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16/03/2016 | FRANCE | N°13/23445

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 4, 16 mars 2016, 13/23445


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 4



ARRÊT DU 16 MARS 2016



(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 13/23445



Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 Novembre 2013 -Tribunal de Commerce de CRETEIL - RG n° 2012F00365





APPELANTE



SA ESP - EXPRESSO SERVICE PROXIMITE

ayant son siège social [Adresse 1]

[Adresse 1]

prise en

la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège



Représentée par Maître Florence GUERRE de la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARI...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 4

ARRÊT DU 16 MARS 2016

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/23445

Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 Novembre 2013 -Tribunal de Commerce de CRETEIL - RG n° 2012F00365

APPELANTE

SA ESP - EXPRESSO SERVICE PROXIMITE

ayant son siège social [Adresse 1]

[Adresse 1]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Maître Florence GUERRE de la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018

Ayant pour avocat plaidant Maître Raphaël MELLERIO, avocat au barreau de PARIS, toque K0186

INTIMÉE

SAS DEVEUROP

ayant son siège social [Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Ayant pour avocat plaidant Maître Stéphanie BAUDRY-DESOMBRE, avocat au barreau de PARIS, Toque P238

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 Janvier 2016, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Françoise COCCHIELLO, Présidente de chambre, chargée du rapport et Monsieur François THOMAS, Conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Françoise COCCHIELLO, Présidente de chambre, rédacteur

Madame Dominique MOUTHON VIDILLES, Conseillère

Monsieur François THOMAS, Conseiller

qui en ont délibéré,

Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Françoise COCCHIELLO dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile,

Greffier, lors des débats : M. Vincent BRÉANT

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Françoise COCCHIELLO, Présidente et par Monsieur Bruno REITZER, greffier auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

La société anonyme Expresso Service Proximité (ci-après «la société ESP»), filiale de la société italienne Lavazza importe et distribue sur le territoire français différents produits Lavazza, soit du café d'une part et des machines à café d'autre part. La revente des produits est assurée par les sociétés D8 et IVS.

La société par actions simplifiée Deveurop met en place des forces de vente supplétives pour le compte de partenaires, notamment dans le secteur des boissons.

Entre le 29 décembre 2011 et le 9 janvier 2012, la société ESP a conclu pour une durée d'un an reconductible. trois contrats de prestation de services avec la société Deveurop afin de permettre la commercialisation entre ESP et les clients démarchés et intéressés d' un modèle de distributeur de boissons chaudes Lavazza «Brio Blue» sur les secteurs de [Localité 1] / Ile de France, [Localité 2] et [Localité 3].

Considérant que la société Deveurop n'avait pas rempli ses obligations contractuelles, la société ESP a dénoncé les contrats le 14 mars 2012.

Estimant faire l'objet d'une rupture anticipée et abusive de la part de la société ESP, la société Deveurop a assigné la société ESP devant le Tribunal de commerce de Créteil par acte d'huissier en date du 06 avril 2012.

Par jugement du 04 novembre 2013, le Tribunal de commerce de Créteil a :

' Prononcé la résiliation des contrats au 15 janvier 2013, pour [Localité 1] / Ile de France, et au 7 janvier 2013, pour [Localité 2] et [Localité 3].

' Condamné la société ESP à payer à la société Deveurop la somme de 514 884,54 euros et débouté la société Deveurop du surplus de ses demandes à ce titre.

' Condamné au titre de dommages et intérêts la société ESP à payer à la société Deveurop la somme de 1 413 945,02 euros et débouté la société Deveurop du surplus de ses demandes formées de ce chef.

' Débouté la société ESP de sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts.

' Ordonné l'exécution provisoire de ce jugement sous réserve qu'en cas d'appel, il soit fourni par le bénéficiaire une caution bancaire égale au montant de la condamnation prononcée à son profit.

' Condamné la société ESP à payer à la société Deveurop la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, débouté la société Deveurop du surplus de sa demande et débouté la société ESP de sa demande formée de ce chef.

' Condamné la société ESP aux dépens.

' Liquidé les frais à recouvrer par le greffe à la somme de 82,17 euros.

La Cour est saisie de l'appel interjeté par la société ESP d'un jugement du Tribunal de Commerce de Créteil en date du 04 novembre 2013.

Vu les conclusions du 07 juillet 2015 par la société ESP, par lesquelles l'appelant est demandé à la Cour de :

' Réformer en toutes ses dispositions le jugement du Tribunal de commerce de Créteil du 04 novembre 2013 ;

En conséquence :

' Dire et juger que la société Deveurop est mal fondée dans toutes ses demandes en paiement de factures non réglées et en indemnisation ;

' Débouter la société Deveurop de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

' Ordonner le remboursement par la société Deveurop à la société ESP du trop-perçu de 17 940 euros au titre des factures d'acomptes 1 à 3 ;

En tout état de cause :

' Condamner la société Deveurop à payer à la société ESP la somme de 20 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

' Condamner la société Deveurop aux entiers dépens.

Vu les conclusions du 28 décembre 2015 parlesquelles la société Deveurop demande à la Cour de :

' Déclarer la société Deveurop recevable et bien fondée en toutes ses demandes, fins et conclusions,

' Déclarer la société ESP mal fondée en son appel et l'en débouter intégralement,

' Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la résiliation des trois contrats de prestation de service litigieux aux torts exclusifs de la société ESP,

' Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé les contrats résiliés à l'issue de leur durée initiale,

' Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société ESP à verser à la société Deveurop la somme de 430 505,51 euros au titre de l'exécution effective des Contrats,

' Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a exclu du préjudice de la société Deveurop :

la somme de 660 400 euros au titre de primes au bénéfice de la société Deveurop,

les coûts liés à la rupture des contrats de location des véhicules loués pour un montant de 65 608,33 euros

et la somme de 10 000 euros au titre de son préjudice commercial,

' Confirmer le jugement en toutes ses autres dispositions,

Statuant à nouveau,

' Condamner la société ESP à payer à la société Deveurop la somme de 2 149 953 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice financier, toutes causes confondues,

A titre subsidiaire, si la Cour retenait la date de fin des Contrats au 15 mars 2012,

' Condamner la société ESP à payer à la société Deveurop la somme de 2 580 458 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son entier préjudice financier,

A titre encore plus subsidiaire, si la Cour ne retenait pas la réparation intégrale jusqu'à la fin de la durée initiale des Contrats,

' Condamner la société ESP à payer à la société Deveurop la somme de 430 505 euros en réparation de son préjudice subi au titre des pertes subies et la somme de 660 400 euros au titre du gain manqué par la société Deveurop en raison de la rupture anticipée des Contrats.

En tout état de cause,

' Condamner la société ESP à verser à la société Deveurop la somme de 10 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

' Condamner la société ESP au paiement des dépens de l'instance d'appel,

MOTIFS

Sur la résiliation anticipée des contrats par la société ESP :

Considérant que la société ESP soutient que les manquements commis par l'intimé dans l'exécution de ses obligations contractuelles et les pertes irrémédiables subies par la société ESP justifiaient la résiliation anticipée des contrats sans préavis,

Que la société Deveurop n' était pas liée par une obligation de moyens comme le soutient le juge de première instance mais par une obligation de résultat, qui, si elle n'est pas exprimée comme telle dans les contrats, ressort clairement de leur article 2 qui impose à la société Deveurop d'atteindre un seuil de 25 consommations/jour pour valider définitivement une convention avec un utilisateur ; que ce seuil de rentabilité économique était parfaitement connu de Deveurop, se trouvait dans le champ contractuel en vertu de la commune intention des parties et que Deveurop devait cibler la clientèle en conséquence,

Que la société Deveurop a privilégié une approche purement quantitative en multipliant les visites chez des prospects vouées à l'échec qui ont causé à l'appelant des pertes significatives estimées à 395 000 euros en raison de l'acquisition de machines, de leur installation et de leur désinstallation ; que l'avenant signé en février n'était pas une marque de confiance envers Deveurop mais un 'rappel à l'ordre' nécessaire à la poursuite des contrats,

Qu'elle était contrainte de procéder à la résiliation des contrats sans préavis,

Considérant que l'intimée fait valoir que le mauvais rendement de l'opération de commercialisation des machines à café «'Brio Blue'» que dénonce l'appelant pour tenter de justifier la rupture anticipée et unilatérale des contrats ne saurait lui être imputé,

Que la société ESP n'a pas respecté les délais de préavis conventionnels pour dénoncer les contrats, qui étaient d'une durée déterminée d'un an et dont la résiliation anticipée était permise à la condition expresse de respecter un préavis de 30 jours conformément à l'article 7 des contrats,

Qu'elle-même était tenue d'une obligation de moyens selon les termes de l'article 2 du contrat et n'a pas commis de faute grave dans l'exécution de ses obligations contractuelles, qu'elle a prospecté les cibles définies dans les contrats et s'est conformée aux exigences de la société ESP à cet égard, mais a également mis en 'uvre tous les moyens humains et matériels pour tenter d'atteindre les objectifs visés par la société ESP ; que la société ESP a eu connaissance de ses travaux dès le début de la mise en place de l'opération et de manière régulière, la société Deveurop lui reportant, via l'outil Intranet, une synthèse des points de vente visités et travaillant en collaboration avec elle ; que l'avenant du 17 février 2012 avait pour objet d'aménager le modèle économique de l'opération,

Que selon les termes non équivoques de l'article 2 des contrats, elle avait pour obligation d'essayer d'atteindre les objectifs définis avec la société ESP en respectant les règles et méthodes de travail élaborées par la société ESP et la mise en place de tous les moyens dont elle disposait ; qu'elle n'avait pas une obligation de résultat,

Que la société ESP ne justifie pas les pertes de 395 000 euros qui résulteraient de l'acquisition de machines, de leur installation et de leur désinstallation,

Que le jugement doit être confirmé en ce qu'il a dit fautive la résiliation des contrats décidée par la société ESP,

Mais considérant que le modèle économique de ESP précisé par elle-même et reconnu par Deveurop reposait sur la mise à disposition gratuite de la machine par ESP auprès de l'entreprise cliente pour une durée de trois ans, la fourniture à la cliente de capsules et services de maintenance via IVS et D8, que compte tenu du coût de l'opération et la durée des conventions de mise à disposition de 36 mois, la rentabilité de l'opération était assurée pour ESP avec un niveau minimum de 25 consommations quotidiennes,

Considérant que les trois conventions des prestations signées par les parties avaient pour objet de permettre la réalisation de ce modèle économique,

Considérant que les trois contrats de prestations de services sont rédigés en termes identiques,

Que l'article 2 des définissait 'les prestations...dans le but d'atteindre les objectifs' :

' visite de points de vente ciblés devant conduire à la signature d'un contrat de mise en dépôt d'une durée de trois ans de 6 machines ' de boissons chaudes par mois par commercial' ' avec des règles de travail',

transformation de 'l'acte de vente en point de vente en contractualisant cette action', que l'article 2 précise à cet effet que ' concernant les 'nouveaux clients' : chaque convention équivaudra à un 'nouveau client' ; celui-ci sera définitivement validé 21 jours après l'installation de la machine, en fonction des rotations que l'approvisionneur notera lors de ses interventions ; Pour rappel de validation : Lavazza Brio Blue : 25 consommations jours',

augmentation du 'taux de pénétration de la marque Lavazza...'

Que l'article 3 du contrat définissait les modalités d'exécution des prestations, relatives au personnel devant être employé par Deveurop, aux informations quotidiennes à adresser à ESP, avec des communications hebdomadaires sur l'état de réalisation des prestations, sur la réalisation des prestations faites, et indiquait en paragraphe 3.2.1 alinéa 4 que Deveurop s'engageait à 'mettre en oeuvre pour l'exécution de l'ensemble de ces prestations.... toute la diligence requise',

Que selon l'avenant du 17 février 2012, il était notamment convenu à partir du premier mars 2012 un système de malus pour Deveurop ' afin de minimiser l'impact financier des éventuels coûts logistiques de reprise de machines Brio 3 installées suite au déclenchement de conventions par les équipes Deveurop',

Que de nombreux mails ont été échangés entre les parties pendant l'exécution des contrats,

Que selon le tableau en pièce 23 non contredit par ESP, Deveurop a accompli entre le premier janvier et le 12 mars 2012 9485 visites ; que selon ses écritures, elle a fait signé 409 conventions de mise à disposition et permis l' installation de 345 machines sur les mois de janvier et février 2012 ; que ESP fait état d'un nombre de 14 ventes ayant réalisé les objectifs de 25 consommations quotidiennes ; que la société ESP a refusé la livraison de certains clients dont elle a estimé le potentiel non crédible (client [G] [R], Sarl Nil, Franprix), que des clients se sont plaints des informations qui leur ont été fournies, que les informations sur les délais de livraison n'ont pas été données correctement, que certains clients ont renoncé (Le Point des Razes) ; que les parties signaient un avenant le 17 février 2012  ; que EPS rappelait le 7 mars que l'équipe de [Localité 3] ne suivait pas suffisamment les petites et moyennes entreprises ; que EPS indiquait le 9 mars qu'ils allaient 'droit dans le mur' ; que Deveurop qui reconnaissait le 9 mars 2012 que les relevés étaient décevants, proposait de se concentrer sur les entreprises de plus de vingt salariés ;

Que le 14 mars 2012, ESP adressait un courrier par lettre recommandée avec accusé de réception dans lequel elle informait la société Deveurop de la résiliation des trois contrats avec effet immédiat, faisant état de l'installation de 14 machines produisant 25 consommations par jour en six semaines, nombre ' globalement plus de cinq fois inférieur à celui qui constitue le nombre strictement minimum en deça duquel nous sommes en droit de cesser le contrat', exposant que ' ces chiffres sont tellement dérisoires qu'ils rendent la poursuite de ces contrats aux conditions antérieures sans aucun intérêt pour aucune des parties',

Considérant que selon l'article 2 des contrats, la société Deveurop s'engageait à mettre tous les moyens possibles pour parvenir à la réalisation de l'objectif défini dans cet article mais elle n'avait pas une obligation de résultat c'est à dire une obligation de parvenir à la réalisation de cet objectif ; qu'elle savait que la validation d'une vente supposait la réalisation d' un seuil de 25 consommations par jour, ce qui rendait nécessaire un bon ciblage des clients potentiels ; que selon l'article 3 du contrat, elle devait rendre compte très souvent très régulièrement de sa mission ;

Considérant que la mise en jeu de la responsabilité de la partie débitrice d'une obligation de moyen suppose que soit rapportée la preuve de la faute commise dans l'exécution de cette obligation ;

Qu' il est apparu que la mise en place de la prospection pouvait rendre nécessaires quelques ajustements en février 2012, relatifs aux réalisation des visites de propects, à l'emplacement des machines, à leur installation, aux conditions de livraison ; que par l'avenant du 17 février 2012, ESP a cru bon de faire participer Deveurop aux frais de désinstallation des machines lors que la vente n'était pas validée, et il s'agissait ainsi de la rendre plus sensible au respect des conditions de prospection mais aussi pour ESP de revoir partiellement son modèle économique ; que l'existence de ces ajustements ne traduit pas une méconnaissance grave de la part de la société Deveurop de son obligation de moyens,

Que la société ESP, à qui les fiches de visite étaient transmises quotidiennement (art 3.2.1), pouvait constater à la lecture des information qu'elles contenaient, si les clients visités étaient ciblés en conformité avec les objectifs fixés ; que la cour observe que la société ESP n'a pas formé de remarques particulières sur les informations ainsi transmises, sinon en rappelant en mars 2012 que les équipes de [Localité 3] devaient suivre encore plus les petites et moyennes entreprises ; que les deux refus d'installation de machines chez des clients dont elle estimait le potentiel insuffisant n'est pas de nature à justifier un manquement systématique, par conséquent grave, de la société Deveurop à son obligation de bien cibler les clients potentiels mais traduit la faculté de contrôle de la société ESP sur le travail de Deveurop  ; que le nombre de ventes qui respectaient l'objectif, à le supposer justifié, ne peut non plus révéler la violation par Deveurop de son obligation de moyens ; qu'il est possible qu'en définitive, le modèle économique envisagé par ESP n'ait pas été adapté, mais la société Deveurop ne peut en être tenue responsable,

Que les manquements graves à ses obligations par Deveurop ne sont pas rapportés,

Que la résiliation anticipée de la convention n'est pas justifiée,

Sur les sommes dues :

Considérant que des paiements de factures sont demandés par Deveurop, ainsi que la réparation de son préjudice lié à la rupture anticipée du contrat :

Sur les factures

Considérant que la société Deveurop explique avoir continué à travailler pour ESP après le courrier de résiliation et à mobiliser des moyens humains jusqu'à la mi-avril 2012 et des moyens logistiques jusqu'au12 juillet, date de cessation du dernier contrat de location de véhicules ; qu'elle explique avoir respecté les dispositions de l'article 4-2 des contrats, adressant un état récapitulatif budgétaire des mois de janvier, février et mars 2012, qu'il lui est ainsi du la somme de 430 505, 51 euros HT correspondant aux dépenses effectivement engagées

Considérant que pour sa part, la société ESP fait valoir que les sommes dues au titre des prestations effectuées en février et mars 2012 ont déjà été payées, qu'elle rappelle que les acomptes versés couvraient les prestations du mois suivant, et que l'ajustement doit être fait par rapport à ce qui a déjà été payé pour les prestations du mois donné, qu'elle indique que les acomptes de janvier et février étaient plus élevés, couvrant des frais exceptionnels liés au démarrage de la mission, que la société Deveurop a reçu en trop la somme de 17 940 euros TTC,

Mais considérant que la rémunération annuelle de Deveurop était précisée dans l' article 4-2 des contrats ; que cette rémunération était fixe forfaitaire pour la somme de 1169412 Euros HT pour la Région Ile-de-France, de 584706 Euros pour la région de [Localité 2] et de 584706 Euros pour la région de [Localité 3], 'en considération de la mobilisation estimée en moyens humains et matériels' ; que l'alinéa 2 de l'article 4-2 article précisait que si les moyens s'avèraient moins importants, la rémunération serait ajustée et que Deveurop s'engageait à cet effet à remettre au plus tard le 15 de chaque mois un état complet, chiffré et détaillé des moyens mobilisés au cours du mois précédent ; que des acomptes pour la partie fixe hors formation ( article 5) étaient précisés, que le premier acompte était versé dès la signature (50000 Euros X 3), le second acompte le 6 janvier 2012 (62500 X 3), puis tous les 6 de chaque mois 47220,60 euros HT) ; que la société ESP devait verser au titre du budget formation la somme de 18900 euros HT5 (pour chacune des régions de [Localité 2] et [Localité 3]) en deux acomptes de 9450 euros HT le 30 décembre 2011 et le 28 février 2012, et de 37800 Euros HT pour l'Ile-de-France payable en deux acomptes de 18900 euros le 30 décembre 2011 et 28 février 2012 ; que les parties ont prévu (article 5) que les frais des commerciaux devaient faire l'objet d'un récapitulatif des dépenses réeelles engagées par Deveurop et communication à ESP,

Considérant qu'il apparaît que les parties ont entendu fixer forfaitairement le maximum de la 'rémunération', mais qu'en toute hypothèse, elles entendaient réajuster sur le coût des moyens mobilisés chaque mois s'ils étaient moins importants, que la société Deveurop devait verser un état mensuel le 15 de chaque mois pour les moyens engagés le mois précédents,

Considérant par ailleurs que rien ne justifie qu' après le 16 mars 2012, la société Deveurop a continué à travailler pour la société ESP,

Considérant que selon les écritures de la société Deveurop, la société ESP lui a versé la somme de 585 873 euros HT et non celle de 501 273 euros au titre des trois contrats ; que les documents fournis par la société Deveurop en pièce 30, 31 et 32 permettent de constater que les budgets dépenses étaient de 152623, 78 Euros en janvier, de 175 123, 90 en février et de 154031, 30 euros en mars, soit en tout 327 747,68 uros ; que la demande de paiement du trop perçu formée par la société ESP à hauteur de 17 940 euros sera accueillie,

Sur la réparation du préjudice subi en raison de la rupture anticipée :

Considérant que la société ESP rappelle le principe de la réparation intégrale prévu par l'article 1149 du Code civil, en vertu duquel l'indemnisation ne doit couvrir que le préjudice et rien que le préjudice, sans perte ni profit pour la victime de la rupture ; que la rémunération est susceptible d'être ajustée de sorte qu'elle ne peut avoir un caractère forfaitaire, qu'il convient d'apprécier et tirer la conséquence du fait que la société Deveurop n'a plus à supporter les frais de fonctionnement de personnel et de location de véhicules, qu'il convient de rechercher la perte de marge bénéficiaire qui n'est constituée que par les primes que Deveurop aurait perçues sur les ventes de machines dont le chiffre est incertain, qu'il n' y a en définitive aucun préjudice,

Considérant que la société Deveurop estime qu'elle doit être indemnisée pour la perte faite et pour le gain manqué, qu'elle a subi un préjudice en raison des frais engagés (430 505 HT euros), qu'elle a perdu des primes sur les ventes ( 660 400  eurosHT)  ; qu'en application de l'article 7 des contrats, la société ESP doit lui rembourser les coûts liés à la rupture du contrat (en l'espèce, coûts liés à la rupture des contrats de travail des commerciaux estimés à 6 900 euros et à la rupture du contrat de location de leurs voitures estimés à 65 608 euros ) ; qu'elle se dit victime d'une atteinte à son image et à sa réputation vis-à-vis de ses autres clients et prospects du fait de la cessation anticipée et brutale de l'opération par la société ESP et demande 10 000 euros de dommages-intérêts en réparation de ce préjudice,

Mais considérant que la rémunération de Deveurop était précisée dans l' article 4-2 des contrats ; que cette rémunération était fixe forfaitaire pour la somme de 1 169 412 euros HT 'en considération de la mobilisation estimée en moyens humains et matériels' ; que alinéa 2 de cet article précisait que si les moyens s'avèraient moins importants, la rémunération serait ajustée et que Deveurop s'engageait à cet effet à remettre au plus tard le 15 de chaque mois un état complet, chiffré et détaillé des moyens mobilisés au cours du mois précédent ; que selon les articles 4-1 in fin des contrats, la société Deveurop devait percevoir des primes de 200 euros HT par machine entre 1 et 1000 machines par an, et 300 euros HT par machine au delà de 1000 machines par an, que selon l'article 7, en cas de résiliation anticipée de l'opération pour un motif autre que la faute commise par Deveurop dans l'exécution du contrat, que le client s'engageait à dédommager Deveurop de tous frais déjà engagés et tous ceux liés à l'arrêt (rupture des contrats de locations, frais de rupture des contrats d'embauche, éventuelles poursuites, licenciements...) de l'opération,

Considérant que le contrat a été résilié le 15 mars et que rien ne permet de dire qu'il a été exécuté au delà du 16 mars ; que la 'rémunération fixe forfaitaire' qui n'est pas une rémunération mais le montant maximal de la somme allouée par ESP pour permettre à Deveurop de faire face à ses frais et est réajustée tous les mois en fonction des frais engagés, ne peut être demandée par la société Deveurop,

Considérant pour ce qui concerne les pertes subies, que selon les pièces versées, les pertes résultant des frais liés au contrat et à son arrêt doivent être fixées à 56 465,79 euros pour les salaires poursuivis jusqu'à la mi-avril afin de respecter la législation du travail et 6 900 euros pour les indemnités ; que la cour, n'étant pas en mesure de constater que la cessation des trois contrats est à l'origine des frais invoqués liés à des locations de véhicules, qui ne saurait être établie par la seule indication portée sur la facture du loueur ' Deveurop Lavazza' déboutera Deveurop de sa demande sur ce point précis,

Considérant pour le gain manqué qu' au regard du nombre de machines installées sur les deux premiers mois de l'année 2012 et compte tenu de l'aléa commercial existant toujours si le contrat s'était poursuivi jusqu' à son terme, il y a lieu de fixer le gain manqué à 500 000 euros

Considérant enfin, que Deveurop ne démontre pas que l'attitude de la société ESP a eu les atteintes dont elle fait état sur son image et sur l'organisation de l'entreprise, qu'elle sera déboutée de sa demande,

PAR CES MOTIFS :

La COUR,

INFIRMANT le jugement sur les sommes dues exception faite de l'indemnité pour frais irrépétibles de première instance :

CONDAMNE la société Deveurop à payer à la société ESP la somme de 17 940 euros,

CONDAMNE la société ESP à payer à la société Deveurop à titre de dommages-intérêts les sommes de 56 465, 79 euros et 500 000 euros,

DÉBOUTE la société Deveurop du surplus de ses demandes,

CONFIRME le jugement pour le surplus,

CONDAMNE la société ESP à payer à la société Deveurop la somme de 8 000 euros au titre de l'indemnité pour frais irrépétibles,

CONDAMNE la société ESP aux entiers dépens.

Le GreffierLa Présidente

Bruno REITZERFrançoise COCCHIELLO


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 13/23445
Date de la décision : 16/03/2016

Références :

Cour d'appel de Paris I4, arrêt n°13/23445 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-03-16;13.23445 ?
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