Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 6
ARRÊT DU 10 MARS 2016
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 14/24598
Décision déférée à la Cour : Jugement du 21 Octobre 2014 -Tribunal de Commerce de CRÉTEIL 2ème Chambre - RG n° 2013F00581
APPELANTE
SA BPIFRANCE FINANCEMENT
ANCIENNEMENT DÉNOMMÉÉ OSÉO
ANCIENNEMENT DÉNOMMÉÉ OSÉO GARANTIE
ANCIENNEMENT DÉNOMMÉÉ OSÉO SOFARIS
ANCIENNEMENT DÉNOMMÉÉ SOFARIS
immatriculée au RCS de CRÉTEIL sous le numéro 960 414 130
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.
[Adresse 1]
[Localité 1]
Représentée et plaidé par Me Michel BACHELOT, avocat au barreau de PARIS, toque':'E0955
INTIMÉE
Société CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL SUD MÉDITERRANÉE
immatriculée au RCS PERPIGNAN sous le n°776 179 335,
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 2]
Représentée par Me Jean-françoisJOSSERAND, avocat au barreau de PARIS, toque':'A0944
Ayant pour avocat plaidant : Me Marina FOURTINE, avocate au barreau de PARIS, toque':'A944
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Janvier 2016, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Marie-Paule MORACCHINI, Présidente de chambre, et Madame Muriel GONAND, Conseillère, chargées du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Marie-Paule MORACCHINI, Présidente de chambre
Madame Caroline FÈVRE, Conseillère
Madame Muriel GONAND, Conseillère
Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions de l'article 785 du code de Procédure Civile.
Greffier, lors des débats : Madame Josélita COQUIN
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Marie-Paule MORACCHINI, président et par Madame Josélita COQUIN, greffier présent lors du prononcé.
Vu le jugement rendu le 21/10/2014 par le tribunal de commerce de CRÉTEIL qui a condamné la société BPI FRANCE, anciennement dénommée la société OSEO, à payer en deniers ou quittances valable à la CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL SUD MÉDITERRANÉE la somme représentant 50% de sa perte finale dûment constatée au titre du contrat plafond de trésorerie, outre les intérêts au taux légal à compter du 14 juin 2013, ordonné la capitalisation des intérêts à compter du 14 juin 2013, en application de l'article 1154 du code civil, condamné la société BPI FRANCE, anciennement dénommée OSÉO, à payer à la CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL SUD MÉDITERRANÉE la somme de 2500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile , dit qu'il n'y a pas lieu à exécution provisoire de ce jugement, a condamné la société BPI FRANCE, anciennement dénommée OSÉO, aux dépens ;
Vu l'appel interjeté le 04/12/2014 par la société BPIFRANCE FINANCEMENT, anciennement dénommée OSÉO, anciennement dénommée OSÉO GARANTIE, anciennement dénommée OSÉO SOFARIS, anciennement dénommée SOFARIS, à l'encontre de ce jugement ;
Vu les conclusions signifiées le 29/4/2015 par l'appelante qui demande à la cour de réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, statuant à nouveau, de débouter la CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL SUD MÉDITERRANÉE de toutes ses demandes et de la condamner à lui payer la somme de 5000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de la condamner aux dépens de première instance et d'appel ;
Vu les conclusions signifiées le 3/4/2015 par la CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL SUD MÉDITERRANÉE (le CRÉDIT AGRICOLE) qui demande à la cour de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et de condamner la société BPIFRANCE FINANCEMENT à lui payer la somme de 3500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de la condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel ;
SUR CE
Considérant que acte sous seing privé en date du 3 août 2009, le CRÉDIT AGRICOLE a consenti à la société [V] TRAVAUX PUBLICS un plafond de trésorerie d'un montant de 500.000,00 € sur une durée de 14 mois, mis à disposition de l'entreprise à effet du 7 juillet 2009 ; que pour le remboursement de ce concours, le CRÉDIT AGRICOLE a obtenu, d'une part, le cautionnement solidaire de Monsieur [X] [V], dans la limite de la somme de 250.000,00 €, et, d'autre part, la garantie d'OSÉO GARANTIE à hauteur de 50% ;
Considérant que par jugement en date du 20 octobre 2010, le tribunal de commerce de PERPIGNAN a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la SARL [V] TRAVAUX PUBLICS ; que le CRÉDIT AGRICOLE a déclaré sa créance entre les mains de Maître [E], ès qualités, par courrier recommandé avec AR du 22'novembre 2010, à titre nanti sur matériel pour la somme de 117.848,78 € et à titre chirographaire pour la somme de 660.358,73 € ;
Considérant que le CRÉDIT AGRICOLE a informé la société OSÉO GARANTIE de l'ouverture du redressement judiciaire de la SARL [V] TRAVAUX PUBLICS, par courrier recommandé avec AR du 22 novembre 2010, puis de sa liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de PERPIGNAN en date du 24 novembre 2011, par courrier recommandé avec AR du 9 février 2012 ;
Considérant qu'après échange de courriers et de pièces, la société OSÉO GARANTIE a informé le CRÉDIT AGRICOLE, par courrier du 25 mai 2011, qu'elle ne pouvait donner suite à l'appel en garantie compte tenu du fait que les conditions générales et particulières de l'accord de garantie du 20 mai 2009 précisaient que 'la durée de la garantie était égale à la durée du concours confirmé', soit 14 mois en l'espèce, alors que le redressement judiciaire était intervenu après la période de couverture de la garantie ;
Considérant que le CRÉDIT AGRICOLE a contesté cette position par courrier du 6 juin 2011, en rappelant que l'impayé était antérieur au redressement judiciaire, puisqu'il n'avait pas été honoré à son échéance (soit le 7 septembre 2010) et que ce n'est pas la procédure de redressement judiciaire qui avait rendu la créance exigible ;
Considérant qu'après avoir vainement relancé la société OSÉO GARANTIE, le CRÉDIT AGRICOLE l'a assignée devant le tribunal de commerce de CRÉTEIL par acte d' huissier de justice en date du 14 juin 2013, afin d'obtenir sa condamnation à lui verser la somme en principal de 500.000€:2 soit 250.000 € ;
Considérant que c'est dans ces circonstances et conditions qu'est intervenue la décision déférée qui a fait droit à sa demande en retenant que la garantie avait été valablement mise en jeu par une lettre en date du 20 septembre 2010 alors que le crédit de trésorerie expirait le 3 octobre 2010 ;
Considérant que la société BPIFINANCEMENT expose qu'elle a géré pour le compte de l'État, le Fonds National de Garantie Lignes de Crédit Confirmées PME et TPE, qui a été mis en place en 2009 dans le cadre des mesures temporaires prises par l'État pour relancer l'économie et qui a pris fin en 2011; que la garantie qu'elle donnait dans le cadre de ce fonds était spécifique, qu'elle n'est valable que pendant la durée du crédit ; qu'ainsi à l'échéance du crédit, sa garantie cesse même en cas de non remboursement du crédit par le client et la banque ne peut plus la mettre en jeu ; que les seuls événements qui peuvent entraîner la mise en jeu de la garantie sont le redressement ou la liquidation judiciaire du client pendant la durée du crédit puisque la banque s'interdit de dénoncer le concours même en cas de dégradation de la situation financière du client ; qu'en l'espèce la garantie a pris fin le 3 octobre 2010 ; qu'elle précise qu'elle est une société d'économie mixte dont le capital est détenu par l'État, les collectivités locales et l'ensemble des banques installées en FRANCE, dont le CRÉDIT AGRICOLE qui a été régulièrement informé des produits mis sur le marché à destination des PME et TPE et notamment de la spécificité de la garantie adossé à ce fonds qui n'est pas un cautionnement ;
Considérant que le CRÉDIT AGRICOLE soutient que certes l'obligationde couverture de la société BPIFRANCE, correspondant à la durée pendant laquelle les dettes de la société [V] TRAVAUX PUBLICS peuvent naître et être soumises à sa garantie, est d'une durée de 14 mois, mais qu'il faut la distinguer de son obligation de règlement, qui vise la durée pendant laquelle le paiement des dettes nées pendant la période de couverture peut lui être réclamé ; que l'article 8 des conditions générales précise bien la date à laquelle s'achève l'obligation de règlement de la société BPIFRANCE puisqu'il prévoit : 'Après un délai d'un an à compter de la défaillance du bénéficiaire, l'établissement intervenant qui n'a pas mis en jeu la garantie est réputé de plein droit y avoir renoncé et OSÉO garantie est définitivement déchargée de ses obligations à son égard'; qu'il précise qu'il a informé aussitôt la société OSÉO GARANTIE par courrier du 20 septembre 2010 de ce que le plafond de garantie octroyé n'étant pas remboursé à son échéance (soit le 7 septembre 2010) par la société [V] TRAVAUX PUBLICS'; que la dette est née pendant la période de couverture ;que c'est le non remboursement du plafond de garantie qui a mis en oeuvre la garantie OSÉO/BPIFRANCE ; qu'il ajoute que l'article 7 des conditions générales dont se prévaut l'appelante visent les prêts à long et moyen terme et les opérations de crédit-bail et non pas les concours par plafond de trésorerie de courte durée, qui sont remboursables in fine ; qu'il ajoute qu'il faut interpréter le contrat de la société BPIFRANCE pour comprendre l'intention des parties ; qu'OSÉO, devenu BPIFRANCE, est un établissement public dont la mission est de soutenir l'innovation et la croissance des PME, en se mobilisant pour que celles-ci obtiennent les financements dont elles ont besoin; que son rôle n'est pas d'assurer l'entrepreneur contre le risque de défaillance de son entreprise mais de garantir les banques pour une partie de leur perte finale éventuelle sur des opérations de crédit; que par son argumentaire l'appelante reconnaît implicitement que sa garantie est inapplicable pour les concours par plafond de trésorerie de courte durée, lorsque l'entreprise bénéficiaire est in bonis , ce qui n'est pas conforme à sa mission ; qu'il termine en disant qu'il a d'ores et déjà engagé une procédure contre la caution ;
Considérant que la notification de garantie consentie par OSÉO GARANTIE au CRÉDIT AGRICOLE versée aux débats est intitulée ' Fonds national de Garantie Lignes de Crédit Confirmée PME et TPE' ; qu'elle est ainsi libellée : ' durée 1 an 2 mois , taux de garantie 50% . Garanties et conditions particulières : Ce concours bénéficie de la garantie d'OSÉO GARANTIE dans les conditions ci-après et au verso de la présente notification . La présente garantie porte sur une ligne de crédit à court terme faisant l'objet d'une confirmation écrite au bénéficiaire par l'établissement intervenant pour le montant et la durée du concours indiqué ci-dessus . Durant cette période, l'établissement intervenant s'interdit de dénoncer totalement ou partiellement cette ligne unilatéralement notamment au motif de la dégradation de la situation financière de son bénéficiaire. La durée de la garantie est égale à la durée du concours confirmé';
Considérant que l'article 2 des conditions générales prévoit que 'la garantie est soumise aux modalités et conditions particulières définies au recto et aux conditions générales stipulées ci-dessous dans la mesure où il n'est pas dérogé par les conditions particulières' ;
Considérant qu'il se déduit de ces stipulations que la durée de la garantie est de 14'mois et que la banque ne peut dénoncer le concours ; que dès lors, la garantie d'OSÉO ne peut être mise en jeu, aux termes de l'article 7-1 des conditions générales que 'si le bénéficiaire fait l'objet d'une procédure collective' , et dans ce cas elle l'est 'dès le prononcé du jugement de redressement ou de liquidation judiciaire' ; que la première condition visée dans cet article qui stipule que la garantie est mise en jeu 'si le bénéficiaire est in bonis dès la notification au bénéficiaire de la résiliation du crédit décidée d'un commun accord entre l'établissement intervenant et OSÉO GARANTIE' ne peut trouver application en l'espèce, puisqu'aux termes des conditions particulières la banque s'interdit de dénoncer le concours au motif de la dégradation de la situation financière du bénéficiaire'; qu'en conséquence, la garantie de BPIFRANCE FINANCEMENT ne pouvait plus être mise en jeu après la fin du crédit et que seuls le redressement ou la liquidation judiciaire pendant la durée du crédit pouvaient entraîner la mise en jeu de la garantie;
Considérant que la garantie consentie par OSÉO GARANTIE n'est pas un cautionnement mais une garantie, consentie à des conditions spécifiques et déterminée par l'accord des parties, matérialisé par les conditions particulières et générales, les premières primant sur les secondes, qui ont été notifiées au CRÉDIT AGRICOLE et acceptées par lui, ainsi que le stipule l'article 11 des conditions générales intitulé ' adhésion des parties' qui prévoit que 'l'utilisation du crédit implique l'acceptation par les parties des conditions générales et particulières de la présente décision' ;
Considérant qu'en l'espèce le crédit de trésorerie a démarré le 3 août 2009, date de la signature du contrat de prêt et a pris fin 14 mois plus tard, soit le 3 octobre 2010 ; que la garantie donnée par BPIFRANCE FINANCEMENT au CRÉDIT AGRICOLE a donc couru du 3 août 2009 au 3 octobre 2010 ;
Considérant qu'à la date du 20/9/2010, la société [V] TRAVAUX PUBLICS était in bonis et que la garantie ne pouvait être mise en jeu selon l'article 7-1 des conditions générales ;
Considérant que le tribunal de commerce de Perpignan a ouvert le redressement judiciaire de la société le 20 octobre 2010, c'est à dire postérieurement au 3 octobre 2010, date à laquelle la ligne de crédit est arrivée à échéance, et la garantie a pris fin ;
Considérant en conséquence que la garantie de la BPIFINANCEMENT ne peut être mise en jeu et que le CRÉDIT AGRICOLE doit être débouté de ses demandes ;
Considérant que le jugement déféré sera infirmé en toutes ses dispositions,
Considérant que le CRÉDIT AGRICOLE, qui succombe et sera condamné aux dépens de première instance et d'appel , ne peut prétendre à l'octroi de sommes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; que l'équité ne commande pas pour autant sa condamnation à ce titre ;
PAR CES MOTIFS
Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Statuant des chefs infirmés et y ajoutant,
Déboute la CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL SUD MÉDITERRANÉE de toutes ses demandes formées à l'encontre de la société BPIFRANCE FINANCEMENT, anciennement dénommée OSÉO, anciennement dénommée OSÉO GARANTIE, anciennement dénommée OSÉO SOFARIS, anciennement dénommée SOFARIS,
Rejette toutes autres demandes des parties,
Condamne la CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL SUD MÉDITERRANÉE aux dépens de première instance et d'appel qui seront, pour ces derniers, recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT