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09/03/2016 | FRANCE | N°13/07306

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 9, 09 mars 2016, 13/07306


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9



ARRÊT DU 09 Mars 2016



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/07306



Décision déférée à la cour : jugement rendu le 29 avril 2013 par le conseil de prud'hommes de PARIS - section commerce - RG n° 12/06096









APPELANT

Monsieur [M] [Y]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

né le [Date naissance 1] 1986 à [Localité

1] ( POLOGNE )

représenté par Me Olivier AUDRAS, avocat au barreau de PARIS, G0009







INTIMEE

SA PARIS MEUBLE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

N° SIRET : 493 138 614

représentée par Me Mélanie RASSENEUR,...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9

ARRÊT DU 09 Mars 2016

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/07306

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 29 avril 2013 par le conseil de prud'hommes de PARIS - section commerce - RG n° 12/06096

APPELANT

Monsieur [M] [Y]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

né le [Date naissance 1] 1986 à [Localité 1] ( POLOGNE )

représenté par Me Olivier AUDRAS, avocat au barreau de PARIS, G0009

INTIMEE

SA PARIS MEUBLE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

N° SIRET : 493 138 614

représentée par Me Mélanie RASSENEUR, avocat au barreau de PARIS, G0398

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 06 janvier 2016, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Catherine SOMMÉ, président de chambre

Monsieur Benoît HOLLEAUX, conseiller

Madame Anne DUPUY, conseiller

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Marion AUGER, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Catherine SOMMÉ, président et par Madame Marion AUGER, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 29 avril 2013 ayant débouté M. [M] [Y] de l'ensemble de ses demandes ;

Vu la déclaration d'appel de M. [M] [Y] reçue au greffe de la cour le 23 juillet 2013 ;

Vu les écritures régulièrement communiquées et oralement soutenues à l'audience du 6 janvier 2016 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens de M. [S] [M] qui demande à la cour :

' d'infirmer le jugement entrepris

' statuant à nouveau, de :

- condamner la SA PARIS MEUBLE à lui régler les sommes de :

' 2 598,64 € de rappel d'heures supplémentaires et 259,86 € de congés payés afférents

' 2 067 € à titre de dommages-intérêts pour dépassement des durées hebdomadaires maximales de travail

- requalifier la rupture conventionnelle en un licenciement sans cause réelle et sérieuse

- condamner en conséquence la SA PARIS MEUBLE à lui payer la somme indemnitaire de ce chef de 6 201 €

- dire que les sommes précitées produiront des intérêts au taux légal avec leur capitalisation

- condamner la SA PARIS MEUBLE à lui verser la somme de 2 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les écritures régulièrement communiquées et oralement soutenues à l'audience du 6 janvier 2016 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens de la SA PARIS MEUBLE qui demande à la cour de confirmer le jugement entrepris ayant rejeté l'ensemble des réclamations de M. [M] [Y] qui sera condamné à lui payer la somme de 4 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur les demandes au titre du temps de travail

La SA PARIS MEUBLE a engagé M. [M] [Y] en contrat de travail à durée indéterminée à temps plein ayant pris effet le 25 juillet 2011 en qualité de chef de rang, catégorie employé, moyennant un salaire de 1 500 € nets pour 169 heures mensuelles.

Au soutien de sa demande en paiement d'un rappel d'heures supplémentaires sur la période d'août à décembre 2011, M. [M] [Y] produit aux débats une attestation - sa pièce 5 - émanant du directeur du restaurant «MASA» exploité par la SA PARIS MEUBLE et qui certifie l'authenticité de ses plannings de travail - pièces 3 et 4 -, ainsi qu'un décompte détaillé à due concurrence de la somme qu'il réclame - pièce 4 bis.

En réponse à ces éléments suffisamment précis venant étayer la demande de l'appelant, la SA PARIS MEUBLE se contente pour l'essentiel d'objecter qu'elle ne l'a jamais autorisé «explicitement ou implicitement» à effectuer des heures supplémentaires, qu'il «ne rapporte pas la preuve des heures supplémentaires prétendument réalisées sur la période contractuelle», que les plannings de travail produits «ont de toute évidence été établis pour les besoins de la cause, avec la complicité de Monsieur [Q] [L]», et que l'absence d'heures supplémentaires en l'espèce ressort de manière incontestable d'une attestation en ce sens de sa secrétaire comptable - sa pièce 15.

En l'absence de pièces versées aux débats par l'employeur, venant contredire celles de M. [M] [Y], démontrant l'accomplissement d'heures supplémentaires au service de la SA PARIS MEUBLE avec l'accord implicite de celle-ci et sur la période concernée, il y a lieu, après infirmation du jugement déféré, de condamner celle-ci à lui verser la somme à ce titre de 2 598,64 € et 259,86 € de congés payés afférents, avec intérêts au taux légal partant du 5 juin 2012, date de réception par l'employeur de la convocation en bureau de conciliation.

Dans la mesure où, à l'examen des mêmes plannings de travail, il ressort que l'appelant s'est vu imposer des horaires de travail dépassant certaines semaines la durée maximale autorisée de 48 heures, telle que prévue à l'article 2.3 de l'avenant n°1 du 15 juin 2001 à la convention collective nationale des Hôtels-Cafés-Restaurants (HCR) dont relève la SA PARIS MEUBLE, la durée de travail effective ayant pu atteindre 53 heures, ce qui constitue une situation préjudiciable, après infirmation de la décision critiquée, elle sera condamnée à lui payer la somme de 1 000 € à titre de dommages-intérêts, avec intérêts au taux légal partant du présent arrêt.

Sur la rupture conventionnelle

La SA PARIS MEUBLE a adressé à l'appelant le 9 décembre 2011 une lettre rédigée en ces termes : «Vous nous avez fait part de votre souhait de rompre à l'amiable le contrat de travail en application de l'article L.1237-14 du code du travail. Nous vous invitons à venir discuter avec nous-même des modalités de cette convention le 14/12/2011 ' Nous vous précisons que vous avez la possibilité de vous faire assister lors de cet entretien soit par une personne appartenant au personnel de la société, soit par un conseiller inscrit sur la liste établie à cet effet par le préfet de [Localité 2]. Vous pouvez vous procurer cette liste aux adresses suivantes : 'Dans le cas où vous choisiriez de vous faire assister, nous vous serions gré de bien vouloir nous en avertir au préalable».

Les parties ont ultérieurement co-signé le document type «Rupture conventionnelle d'un contrat de travail à durée indéterminée et formulaire de demande d'homologation» renvoyant aux dispositions de l'article L.1237-14 du code du travail, avec mention d'une date de fin du délai de rétractation le 30 décembre 2011 et une date envisagée de la rupture du contrat de travail au 18 janvier 2012.

*

Pour demander à la cour de prononcer la nullité de cette même rupture conventionnelle devant ainsi produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, M. [M] [Y] invoque le fait que le formulaire de demande d'homologation a été envoyé à l'autorité administrative avant l'expiration du délai de rétractation le 30 décembre 2011, que ce même formulaire ne précise pas la date à laquelle les parties sont censées l'avoir signé, et qu'alors qu'il réclamait une nouvelle fois le paiement de ses heures supplémentaires, l'intimée, par l'entremise d'une certaine Mme [U], lui a fait signer le 18 octobre 2011 «une lettre antidatée le convoquant à un entretien en vue d'une rupture conventionnelle», entretien qui n'a en définitive jamais eu lieu, ce qui a vicié son consentement.

En réponse, la SA PARIS MEUBLE indique que la procédure de rupture conventionnelle a été régulièrement menée puisque l'appelant a été avisé de son droit d'être assisté lors de l'entretien préalable, qu'il en a accepté le principe aux conditions prévues par le formulaire d'homologation de manière libre et éclairée, que la date de signature dudit document, bien que non expressément mentionnée, est parfaitement connue des parties puisqu'il n'est pas contesté que cette même signature est intervenue à l'issue de l'entretien qui les a réunies le 14 décembre 2011 «et que le délai de rétractation a été calculé sur la base d'une signature à la date du 14 décembre 2011 du formulaire de rupture conventionnelle», et que si effectivement le formulaire d'homologation de la rupture conventionnelle a été envoyé à son initiative avant l'expiration du délai de rétractation, il sera relevé que la DIRECCTE de Paris l'a «implicitement homologuée».

*

Il résulte de l'application combinée des articles L.1237-13 et L.1237-14 du code du travail qu'une partie à une convention de rupture ne peut valablement demander son homologation à l'autorité administrative avant l'expiration du délai de rétractation de 15 jours calendaires prévu par le premier de ces textes.

Force est de constater qu'en l'espèce l'employeur ne conteste pas le fait que le formulaire de demande d'homologation de la rupture conventionnelle ait été envoyé à l'autorité administrative avant l'expiration du délai de rétractation de quinze jours fixé à l'article L.1237-13 du code du travail.

Au surplus, afin de garantir la liberté de consentement du salarié à la convention de rupture, l'article L.1237-12 rappelle à son premier alinéa que : «Les parties au contrat conviennent du principe d'une rupture conventionnelle lors d'un ou plusieurs entretiens au cours desquels le salarié peut se faire assister».

Il en ressort qu'en cas de contestation sur l'existence même de cet entretien préalable, il incombe à l'employeur de démontrer que ledit entretien a eu lieu effectivement, ce dont la SA PARIS MEUBLE s'abstient.

En présence d'une telle convention de rupture, qui ne mentionne par ailleurs aucune date certaine aux côtés de la signature des parties, il convient de considérer que le consentement de M. [M] [Y] a été vicié, ce qui ne peut que conduire au prononcé de sa nullité, peu important en définitive que l'autorité administrative ait pu implicitement l'homologuer en application de l'article L.1237-14.

*

Infirmant la décision querellée, il sera ainsi jugé que cette rupture conventionnelle nulle s'analyse en un licenciement abusif emportant la condamnation de la SA PARIS MEUBLE à payer à l'appelant la somme de ce chef de 4 000 € équivalente à un mois de salaire, avec intérêts au taux légal partant du présent arrêt.

Sur la capitalisation des intérêts

Il sera ordonné la capitalisation des intérêts au taux légal sur les sommes revenant à M. [M] [Y] dans les conditions de l'article 1154 du code civil.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

L'intimée sera condamnée en équité à payer à M. [M] [Y] la somme de 2 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

INFIRME le jugement entrepris ;

Statuant à nouveau,

CONDAMNE la SA PARIS MEUBLE à régler à M. [M] [Y] les sommes de:

' 2 598,64 € de rappel d'heures supplémentaires et 259,86 € de congés payés afférents, avec intérêts au taux légal partant du 5 juin 2012

' 1 000 € à titre de dommages-intérêts pour dépassement de la durée maximale hebdomadaire de travail avec intérêts au taux légal partant du présent arrêt

JUGE nulle et de nul effet la convention de rupture entre les parties, en conséquence, dit qu'elle s'analyse en un licenciement abusif et condamne la SA PARIS MEUBLE à payer à M. [M] [Y] la somme de ce chef de 4 000 € à titre de dommages-intérêts, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

Y ajoutant,

ORDONNE la capitalisation des intérêts au taux légal sur les sommes allouées à M. [M] [Y] dans les conditions de l'article 1154 du code civil ;

CONDAMNE la SA PARIS MEUBLE à régler à M. [M] [Y] la somme de 2 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SA PARIS MEUBLE aux entiers dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 13/07306
Date de la décision : 09/03/2016

Références :

Cour d'appel de Paris K9, arrêt n°13/07306 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-03-09;13.07306 ?
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