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08/03/2016 | FRANCE | N°13/06385

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 08 mars 2016, 13/06385


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRÊT DU 8 MARS 2016



(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/06385



Décision déférée à la cour : jugement rendu le 2 avril 2013 par le conseil de prud'hommes de PARIS -section encadrement- RG n° 11/07767





APPELANTE



Madame [K] [U]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

née le [Date naissance 1] 1972 à [Localité 1]

comparante en p

ersonne, assistée de Me Emmanuel MAUGER, avocat au barreau de PARIS, E0706







INTIMÉE



SAS GILEAD SCIENCES

[Adresse 2]

[Adresse 2]

N° SIRET : 391 360 971 00058

représentée par Me Flo...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRÊT DU 8 MARS 2016

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/06385

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 2 avril 2013 par le conseil de prud'hommes de PARIS -section encadrement- RG n° 11/07767

APPELANTE

Madame [K] [U]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

née le [Date naissance 1] 1972 à [Localité 1]

comparante en personne, assistée de Me Emmanuel MAUGER, avocat au barreau de PARIS, E0706

INTIMÉE

SAS GILEAD SCIENCES

[Adresse 2]

[Adresse 2]

N° SIRET : 391 360 971 00058

représentée par Me Florence ACHACHE, avocat au barreau de PARIS, R088 substitué par Me Delphine CAZENAVE, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 janvier 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne PUIG-COURAGE, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Bruno BLANC, président

Madame Roselyne GAUTIER, conseillère

Madame Anne PUIG-COURAGE, conseillère

Greffier : Madame Marine POLLET, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire,

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile, et prorogé à ce jour.

- signé par Monsieur Bruno BLANC, Président et par Madame Marine POLLET, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le 15 janvier 2007, Madame [K] [U] a été engagée par la SARL GILEAD SCIENCES, par contrat à durée indéterminée en date du 15 décembre 2006, en qualité de Responsable Adjoint Taxes et Systèmes d'Information Financiers, statut cadre, classification 7 A, moyennant une rémunération mensuelle brute de 5 000 euros, aux conditions générales de la convention collective nationale de l'industrie pharmaceutique. Elle a été promue Contrôleur Financier le 1er avril 2008.

Le 18 janvier 2011, Madame [K] [U] a été convoqué à un entretien préalable à un licenciement fixé au 27 janvier 2011 et le l4 février 2011, elle a été licenciée pour insuffisance professionnelle et faute sérieuse. La SARL GILEAD SCIENCES lui reproche :

«'- votre manque d'organisation, de rigueur et d'efficacité dans la gestion des priorités des projets, vos retards dans l'accomplissement des tâches :

Votre manager, Monsieur [H] [Q] a été contraint de constater que beaucoup de retard avait été pris dans le paramétrage du nouvel outil (ERP) qui consiste à mettre en place un nouveau logiciel informatique pour la finance, le service client et la comptabilité.

Or au lieu d'adopter une attitude constructive, d'anticiper et de prendre des initiatives vous avez repoussé régulièrement les échéances, vous contentant de faire valoir que les délais n'avaient pu être respectés à cause de la défaillance du cabinet partenaire sur ce projet.

C'est ainsi que le 7 janvier 2011, alors qu'une revue des tâches était pourtant prévues en préparation pour le testing ERP de décembre depuis septembre 2010 nous n'avons pu que constater que les différents points dont vous aviez la responsabilité n'avaient pas été réalisés et que vous n'aviez pas pris la peine d'informer votre manager des éventuelles difficultés que vous auriez pu rencontrer.

Pourtant vous aviez bénéficié, les 14 et 15 octobre 2010, d'une formation en management de projet pour vous aider à la planification et à la réalisation de l'ensemble de vos tâches.

Refus d'effectuer certaines tâches :

L'une de vos missions consiste notamment à accompagner la transition et les changements de process, suite à la mise en place d'un centre de services partagés.

Or, vous avez clairement indiqué...à votre manager, Monsieur [H] [Q], refuser d'être responsable du lien avec le centre de services partagés '

Absence de communication et relations très difficiles avec les autres membres de l'équipe et ceux de centre de services partagés et du projet ERP:

Tout au long de l'année 2010 votre responsable, Monsieur [H] [Q], n'a eu de cesse de de vous demander d'améliorer vos relations avec les autres membres de l'équipe 'Ces difficultés étaient soulignées lors de la revue de mi-année 2010 et vous avez bénéficié d'un coaching avec Madame [Q] [A] de la société NEXMOVE.

Vous n'avez manifestement pas jugé utile de tenir compte de ces remarques et de cette formation puisque :

- vous n'avez pas assisté, sans même prendre la peine de nous en informer, aux réunions du 8 octobre 2010,

- vous avez écourté celle du 25 octobre 2010, et cela sans proposer de les reprogrammer...

- le 14 janvier 2011, la responsable comptable, alors en CDD, et sous votre responsabilité nous a fait part que vous n'avez pas communiqué sur la clôture de fin d'année. Elle a dû assumer seule avec deux autres collègues cette clôture alors que vous en aviez la charge...vous ne l'avez pas non plus remerciée d'avoir fait le travail en votre absence...

- le 17 janvier 2011, le Directeur Financier du centre de services partagés, Madame [U] [M], nous a adressé un e-mail pour se plaindre des très grandes difficultés...dans leurs relations avec vous..il nous apprenait que le 15 novembre 2010 la personne en charge de la comptabilité du centre de services partagés, Monsieur [C] [E] s'est déplacé pour vous rencontrer et que vous l'aviez fait patienter pour finalement annuler le rendez-vous, en lui expliquant que vous aviez une autre réunion.

Un second rendez-vous a donc été planifié pour le 17 novembre à 9 heures. Or vous avez de nouveau changé ce rendez-vous sans le consulter et en l'informant à la dernière minute, l'empêchant ainsi de se rendre à la réunion pour laquelle il avait fait le déplacement, son avion pour son retour à Cork était déjà réservé...

Une telle attitude, démontre la légèreté avec laquelle vous assumez vos fonctions et dénote un manque de respect à l'égard des autres collaborateurs de la société ce qui est inacceptable de la part d'un cadre de votre niveau...'

La multiplication de vos insuffisances dans la réalisation de votre mission, votre refus de prendre en compte les remarques de votre manager et de vos interlocuteurs et les difficultés avec les autres salariés perturbant gravement le fonctionnement de votre service...'nous contraignent à vous notifier par la présente votre licenciement pour insuffisance professionnelle et faute sérieuse'».

La cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par Madame [K] [U] du jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Paris, le 02 avril 2013, qui'a :

- condamné la SARL GILEAD SCIENCES à verser à Madame [K] [U] les sommes de :

* 50 000 euros à titre d'indemnités de licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

* 700 euros au titre de l'article 700 du code de Procédure Civile ;

- débouté Madame [K] [U] du surplus de ses demandes ;

-débouté la SARL GILEAD SCIENCES de sa demande reconventionnelle en la condamnant aux dépens.

Vu les conclusions du 18 janvier 2016 au soutien de ses observations orales par lesquelles Madame [K] [U] demande à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé son licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- le réformer quant au quantum des condamnations :

- condamner la SARL GILEAD SCIENCES à lui payer les sommes de :

* 246 698,88 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

* 100 000 euros à titre de dommages et intérêts pour perte de chance de lever les stocks options ;

*2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu les conclusions du 18 janvier 2016 au soutien de ses observations orales par lesquelles la SARL GILEAD SCIENCES demande à la cour :

- d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse;

- de débouter l'appelante de l'intégralité de ses demandes à ce titre ;

à titre subsidiaire,

- limiter dans son quantum la demande au titre du licenciement injustifié ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Madame [K] [U] de sa demande pour perte d'une chance de lever ses stock options ;

- condamner Madame [K] [U] au paiement de 1500 euros au titre des frais irrépétibles.

SUR CE

Sur les causes du licenciement

La SARL GILEAD SCIENCES fonde sa décision de licenciement sur une insuffisance professionnelle et une faute sérieuse.

Sur l'insuffisance professionnelle

En droit, l'insuffisance professionnelle peut constituer une cause de licenciement réelle et sérieuse lorsqu'elle repose sur des éléments précis, objectifs et imputables au salarié qui perturbent la bonne marche de l'entreprise. Le juge doit pouvoir apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur en formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties.

En l'espèce, il est reproché en premier lieu à Madame [K] [U] de ne pas avoir mené à bien les tâches qui lui étaient confiées ou de le faire avec retard, en raison d'un manque d'organisation, de rigueur et d'efficacité dans la gestion des priorités, en particulier dans la mise en 'uvre du nouvel outil ERP et pour la clôture des comptes de fin d''année, tout en se défaussant de ses responsabilités sur ses interlocuteurs. En second lieu, il est fait état de la persistance de ses difficultés malgré la formation «'management de projets'» mise en place par l'employeur en sa faveur, de juin à décembre 2010. L''employeur s'appuie essentiellement sur l'évaluation de juin 2010 de la salariée où, aux rubriques «'Management et développement équipe'» et «'Coacher et développer ses employés'», son supérieur hiérarchique a noté «'pas en ligne'avec l'objectif'» et sur un échange de courriels du 16 juin 2010 entre Madame [K] [U] et Mme [O] [X].

Madame [K] [U] conteste ces appréciations au motif qu'elle a toujours eu des commentaires élogieux de sa hiérarchie et que les objectifs fixés ont été atteints et même souvent dépassés. Concernant le retard dans la mise en place du projet ERP, elle fait état des difficultés du cabinet DELOITTE chargé d'en réaliser le paramétrage, défaillances dont elle a régulièrement informé sa hiérarchie. Elle verse aux débats un échange de mails avec son supérieur hiérarchique, les 3 et 10 septembre 2010 par lesquels elle le prévient des retards de ce cabinet : «'j'ai dit à G que je ne comprenais pas qu'on en était qu'à ce niveau alors que l'explication de mon requirement lui avait été donné à plusieurs reprises depuis février...'», le 09 novembre 2010'«' ' je pense qu'il serait bien de rappeler à [C] qu'il est responsable et qu'il doit répondre et suivre les demandes du Groupe ...'», et le 17 décembre 2010 «'Merci d'insister auprès de [C] et [D] pour que cela soit fait ...'» ; ainsi que les remerciements qui lui ont été adressés pour son implication pour ce projet par des courriels réguliers reçus de mai 2009 à novembre 2010.

L'échange de mails du 16 juin 2010 ainsi que les messages de remerciements étant en anglais, sans aucune traduction française, même partielle, seront écartés des débats.

Il ressort des pièces produites et des débats que Madame [K] [U] a bénéficié d'une promotion à l'intérieur de l'entreprise en 2008, qu'elle a fait l'objet d'appréciations élogieuses tout au long de son parcours dans la société. Ainsi lors de son évaluation pour l'année 2009 sur les quinze rubriques du formulaire, il est noté pour toutes «'en ligne avec l'objectif'» et pour dix d'entre elles il est rajouté «' obj très largement dépassé'» ou «'obj dépassés, au delà atte'». Lors de l'évaluation de juin 2010, seules deux rubriques sur les quinze évaluées portent la mention «' pas en ligne avec l'objectif'» mais les commentaires en anglais, sans traduction française, ne permettent pas de comprendre la nature des réserves émises par son supérieur hiérarchique. Par ailleurs à la rubrique'«''prendre la responsabilité personnelle », il est noté «'en ligne avec l'objectif'», alors même que son employeur lui reproche dans la lettre de licenciement de se défausser de ses responsabilités sur ses interlocuteurs.

L'insuffisance professionnelle reprochée est essentiellement focalisée sur les retards dans la mise en 'uvre du projet ERP, alors que Madame [K] [U] a, plusieurs fois, ainsi qu'en attestent ses courriels, attiré l'attention de sa hiérarchie sur les difficultés qu'elle rencontrait avec le cabinet DELOITTE, chargé d'en assurer paramétrage.

Enfin, si elle a été inscrite par son employeur à une «'Formation individuelle au mangement'», celui-ci ne peut lui reprocher d'avoir persisté dans ses manquements alors même que cette formation n'a pris fin que le 14 décembre 2010, et n'avait donc pas pu produire tous ses effets à la date du licenciement.

La SARL GILEAD SCIENCES ne démontre pas l'insuffisance professionnelle de Madame [K] [U].

Sur les autres motifs du licenciement

Selon l'article L.1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles'; si un doute subsiste, il profite au salarié.

Ainsi l'administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n'incombe pas spécialement à l'une ou l'autre des parties, l'employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables.

En l'espèce, la SARL GILEAD SCIENCES reproche à Madame [K] [U] de ne pas tenir compte des recommandations de sa hiérarchie, de refuser d'accomplir certaines tâches, telle «' être responsable du lien avec le centre de services partagés'»,'d'être absente à des réunions (le 8 octobre 2010) ou de les écourter (le 25 octobre 2010); d'entretenir des relations difficiles avec les autres membres de l'équipe et avec ceux du centre de services partagés, de ne pas avoir effectué dans les délais impartis la clôture des comptes 2010 qui a dû être opérée par ses collaborateurs.

A l'appui de ces griefs l'employeur produit l'évaluation professionnelle de Madame [K] [U] pour l'année 2010, un mail du 14 janvier 2011 de Madame [A] [T], responsable comptable travaillant sous la responsabilité de Madame [K] [U], qui explique : «'Sans beaucoup d'élément du closing annuel de Gilead, j'ai accompli cette tâche.... Le 12 janvier, [K] est revenue de son arrêt maladie. Pas de question sur le closing...Que dois-je comprendre de ce comportement ''» et la réponse de Monsieur [H] [Q], supérieur hiérarchique de Madame [K] [U] «'...j'ai été très impressionné par la manière dont... vous nous avez accompagné tout au long du closing annuel...Concernant la manière dont [K] vous a traité à son retour au bureau , je vous prie de comprendre que ce n'est pas la manière dont nous opérons, ni le reflet des valeurs de Gilead...'».

Il est également fait état d'un arrêt de la Cour d'Appel de Paris statuant sur le licenciement d'une salariée qui se trouvait sous la responsabilité de Madame [K] [U], qui relève le départ de plusieurs salariés'«'du service placé sous l'autorité de Mme [U], pour des problèmes de management de type anxiogène». L'employeur s'appuie enfin sur des courriels des 12, 15 et 17 janvier 2011 envoyés par Madame [U] [M] et Monsieur [C] [E], travaillant au centre de services partagés, qui relatent les difficultés de relation qu'ils rencontrent avec Madame [K] [U]. Ainsi Monsieur [C] [E] explique être venu depuis l'étranger à [Localité 2], en novembre 2015, pour participer à une réunion et avoir accepté un rendez-vous avec Madame [K] [U] à son arrivée, rendez-vous qu'elle a reporté de 48 heures, après l'avoir laissé attendre et arrivant à ce deuxième rendez-vous avec 2 heures de retard alors même qu'il ne pouvait l'attendre, son vol de retour étant réservé.

Madame [K] [U] conteste l'ensemble des griefs allégués.

Sur les reprochés liés à son absence aux réunions, elle explique n'avoir pu assister à celles du 8 octobre 2010 en raison d'une autre réunion qui s'est terminée en retard. Pour le 25 octobre elle relate avoir accepté un rendez vous téléphonique alors même qu'elle était en RTT, jour de congé pris avec l'accord de son employeur. Celui-ci ne dément pas ces explications.

Concernant son maque d'implication lors de l'établissement de la clôture annuelle des comptes de l'année 2010, elle verse au débats un courriel du 1er décembre 2010 adressé à son supérieur hiérarchique où elle indique ce qu''elle a programmé pour réaliser cette tâche dans les délais impartis: «'je préfère effectivement qu'[A] travaille sur la clôture annuelle ...et que [C] participera aux 6 jours de testing et a toutes les qualités pour effectuer les tests en mon absence. De plus je serai toujours disponible pour [C] pour répondre à ses éventuelles interrogations, ainsi les deux projets clôture annuelle et ERP seront menés à bien ».

L'évaluation professionnelle de Madame [K] [U] pour l'année 2010 est rédigée en anglais pour ce qui concerne les appréciations et les commentaires, ceux-ci n'étant pas traduits en français, cette pièce sera écartée des débats.

La SARL GILEAD SCIENCES ne produit aucune pièce relative au refus de Madame [K] [U] de se charger des relations avec le centre de services partagés. Au contraire, le courriel du 1er décembre 2010, cité ci-dessus démontre qu'elle a eu à c'ur d'organiser les testings prévus y compris en son absence. De même elle a programmé dès le début du mois de décembre 2010, les tâches de ses collaborateurs afin que la clôture des comptes soit réalisée. Elle a été en arrêt maladie du 30 décembre 2010 au 11 janvier 2011, ce qui ne lui a pas permis de terminer cette mission, finalisée par ses collaborateurs.

Enfin s'il peut lui être reproché un management anxiogène ou une certaine maladresse dans les relations avec son équipe ou avec le centre de services partagés, ces reproches ne lui ont été adressés qu'à partir de juin 2010. Elle a alors accepté de suivre un coaching pour améliorer cet aspect. Il ne peut donc lui être reproché les maladresses telles que d'avoir omis de prévenir Monsieur [C] [E] de son retard aux rendez-vous fixés, en novembre 2010 ; ou de remercier ses collaborateurs qui avaient terminé la clôture des comptes de l'année 2010 en son absence, alors que la formation, qu'elle suivait, ne s'est achevée que le 14 décembre 2010, et qu' elle a été en arrêt maladie du 30 décembre 2010 au 11 janvier 2011.

ll en résulte que les motifs de nature disciplinaire énoncés ne sont pas établis et que le licenciement de Madame [K] [U] est donc sans cause réelle et sérieuse.

Sur l'indemnité de licenciement

Aux termes de l'article L.1235-3 du code du travail, si un licenciement intervient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse et qu'il n'y a pas réintégration du salarié dans l'entreprise, il est octroyé au salarié à la charge de l'employeur une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.

Compte tenu notamment de l'effectif de l'entreprise, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à Madame [K] [U], de son âge, de son ancienneté, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels qu'ils résultent des pièces et des explications fournies, il y a lieu de lui allouer une somme de 60 000'euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur les dommages et intérêts pour perte de chance de lever l'option relative aux stock-options

Madame [K] [U] a reçu plusieurs courriers de son employeur lui attribuant des options de souscription le 5 février 2008, 440 options de souscription, le 13 février 2009, 400 options et le 10 février 2010, 365 options. Elle verse aux débats un état, au 5 novembre 2011, des stocks options qui lui ont été attribuées. La SARL GILEAD SCIENCES ne conteste d'ailleurs ni cette attribution, ni le décompte produit. Si la date et les conditions de rachat ne sont pas fixées de manière certaine au vu des pièces versées aux débats, Madame [K] [U] subit néanmoins une perte de chance de lever ces options. Ce préjudice sera justement indemnisé par l'octroi d'une somme de 80 000 euros.

Sur les frais irrépétibles

L'équité et la situation économique respective des parties justifient qu'il soit fait application de l'article 700 du code de procédure civile dans la mesure énoncée au dispositif.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

DÉCLARE l'appel recevable,

CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a :

- dit le licenciement de Madame [K] [U] sans cause réelle et sérieuse ;

L'INFIRME pour le surplus et statuant à nouveau,

CONDAMNE la SARL GILEAD SCIENCES à payer à Madame [K] [U] les sommes de :

* 60 000 euros à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec intérêt au taux légal à compter du présent arrêt ;

* 80 000 euros à titre de dommages et intérêts pour la perte d'une chance de lever les stock-options attribués ;

* 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes ;

CONDAMNE la SARL GILEAD SCIENCES aux entiers dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 13/06385
Date de la décision : 08/03/2016

Références :

Cour d'appel de Paris K4, arrêt n°13/06385 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-03-08;13.06385 ?
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