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03/03/2016 | FRANCE | N°15/09855

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 5, 03 mars 2016, 15/09855


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5



ARRÊT DU 03 Mars 2016

(n° 210 , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/09855



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 12 Décembre 2012 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 12/00945





APPELANTS

Monsieur [P] [Z]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

né le [Date naissance 1] 1956 à [Localité 1]

c

omparant en personne,

assisté de M. [G] [S] (Délégué syndical) en vertu d'un pouvoir du salarié en date du 01Septembre 2015 et de son organisation syndicale en date du 01 Janvier 2016


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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5

ARRÊT DU 03 Mars 2016

(n° 210 , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/09855

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 12 Décembre 2012 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 12/00945

APPELANTS

Monsieur [P] [Z]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

né le [Date naissance 1] 1956 à [Localité 1]

comparant en personne,

assisté de M. [G] [S] (Délégué syndical) en vertu d'un pouvoir du salarié en date du 01Septembre 2015 et de son organisation syndicale en date du 01 Janvier 2016

Syndicat CGT DES CADRES ET TECHNICIENS DES SERVICES PUBLICS PARISIENS

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par M. [G] [S] (Délégué syndical) en vertu d'un pouvoir de son organisation syndicale en date du 01 Janvier 2016

INTIMÉE

MAIRIE DE PARIS DÉPARTEMENT DE PARIS

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représentée par Me Sabrina GABYZON, avocat au barreau de PARIS, toque : P0505 substitué par Me Laurent VOVARD, avocat au barreau de PARIS, toque : P0505

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 Janvier 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne-Marie GRIVEL, Conseillère, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Bernard BRETON, Présidente

Madame Anne-Marie GRIVEL, Conseillère

Madame Marie-Liesse GUINAMANT, Vice-Présidente placée

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Laura CLERC-BRETON, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- signé par Madame Marie-Bernard BRETON, Présidente et par Madame Laura CLERC-BRETON, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * *

Monsieur [P] [Z] a été engagé par le Département de Paris en qualité d'agent d'entretien par un contrat unique d'insertion-contrat d'accompagnement dans l'emploi à durée déterminée du 13 octobre 2010 au 12 avril 2011 qui a fait l'objet d'un renouvellement du 5 avril au 12 octobre 2011. Il a été en arrêt de travail du 13 juillet au 12 septembre 2011 puis de nouveau à compter du 4 octobre.

Il a saisi la juridiction prud'homale le 27 janvier 2012 d'une demande de requalification de la relation contractuelle en contrat à durée indéterminée et de réintégration.

Par jugement du 12 décembre 2012 notifié le 30 janvier 2013, le Conseil de prud'hommes de Paris a condamné la Mairie de Paris-Département de Paris à payer à Monsieur [Z] les sommes de 1250 € à titre de dommages-intérêts pour défaut de formation et 950 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et a débouté Monsieur [Z] du surplus de sa demande tout comme le syndicat CGT des cadres et techniciens parisiens des services publics et a condamné le Département de Paris aux dépens.

Monsieur [Z] et le syndicat CGT ont interjeté appel de cette décision le 19 février 2013.

Après avoir été radiée à l'audience du 23 juin 2015 faute de diligence de l'appelant, l'affaire a été rétablie à l'audience du 26 janvier 2016.

A cette date, Monsieur [Z] demande à la Cour d'infirmer le jugement, de dire que les contrats à durée déterminée doivent être requalifiés en contrat à durée indéterminée à partir du 12 octobre 2010 et de condamner le Département de Paris à lui payer les sommes de :

- 1365,03 € à titre d'indemnité de requalification

- 3000 € à titre d'indemnité pour défaut d'obligation de formation

- et 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

à titre principal, si le licenciement est considéré comme nul du fait de son accident du travail,

- 42 420,82 € de dommages-intérêts pour licenciement nul

- et ordonner sa réintégration à la date du 13 octobre 2011 ;

à titre subsidiaire, si le licenciement est considéré comme sans cause réelle et sérieuse

- 20 000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 273,01 € au titre de l'indemnité de licenciement

- 1365,03 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis

- 136,50 € au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis.

Il fait valoir qu'il n'a bénéficié d'aucune action de formation pourtant inhérente au contrat unique d'insertion, si bien que le contrat doit être requalifié en contrat à durée indéterminée, et que se trouvant en accident du travail au moment de la rupture, celle-ci doit être requalifiée en licenciement nul par application de l'article L.1226-13 du code du travail, et en tout cas sans cause réelle et sérieuse, lui ouvrant droit soit à une indemnité correspondant aux salaires courus jusqu'à sa réintégration, soit à des indemnités de rupture.

Le syndicat CGT des cadres et techniciens parisiens des services publics demande pour sa part la condamnation du département de Paris à lui payer les sommes de :

- 1500 € à titre de dommages-intérêts sur le fondement de l'article L.2132-3 du code du travail,

- et 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il soutient qu'il est recevable à agir s'agissant d'une pratique de la Mairie de Paris qui a multiplié ce type de contrats aidés.

Le Département de Paris demande pour sa part la confirmation du jugement en ce qu'il a rejeté la demande de requalification, son infirmation sur le surplus, le rejet de l'intégralité des demandes et la condamnation de Monsieur [Z] et du Syndicat CGT à lui payer la somme de 1000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il expose que le salarié n'a pas souhaité bénéficier d'une formation ni présenté de projet professionnel, si bien qu'il estime qu'il n'y a pas eu de sa part manquement à son obligation de formation qui ne saurait en tout état de cause entraîner la requalification du contrat. Il rappelle par ailleurs que la période de suspension du contrat de travail du fait de l'accident du travail dont a été victime le salarié n'a pas fait obstacle à l'échéance du contrat en application de l'article L.1226-9 du code du travail et considère donc qu'il ne saurait y avoir nullité de la rupture, pas plus que licenciement sans cause réelle et sérieuse. Il conteste enfin toute atteinte aux intérêts collectifs de la profession.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions visées par le greffier et développées lors de l'audience des débats.

MOTIFS

Attendu que selon l'article L. 5134-19-1 du code du travail, issu de la loi n°2008-1249 du 1er décembre 2008 entrée en vigueur le 1er janvier 2010, dans sa rédaction applicable aux faits, le contrat unique d'insertion est constitué par une convention individuelle conclue entre, d'une part, l'employeur, le bénéficiaire et, pour le compte de l'État, l'institution Pôle Emploi, et, d'autre part, par un contrat de travail conclu entre l'employeur et le bénéficiaire de la convention individuelle, sous la forme d'un contrat d'accompagnement dans l'emploi (CAE) ou d'un contrat initiative-emploi (CIE) ; que l'article L. 5134-24 prévoit que le contrat unique d'insertion est un contrat de travail de droit privé, soit à durée déterminée, conclu en application de l'article L. 1242-3, soit à durée indéterminée ;

Et attendu qu'il résulte des articles L. 1242-3 et L. 1245-1 du code du travail que le contrat unique d'insertion à durée déterminée conclu au titre des dispositions légales destinées à favoriser le recrutement de certaines catégories de personnes sans emploi doit remplir les conditions prévues à l'article L. 5134-22 du même code du travail, à défaut de quoi il doit être requalifié en contrat à durée indéterminée ; que destiné à favoriser l'insertion professionnelle de personnes rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières d'accès à l'emploi, le contrat doit, selon ce dernier texte, prévoir des actions de formation et d'accompagnement au profit du salarié qui peuvent être menées pendant le temps de travail et en dehors de celui-ci ; que l'obligation pour l'employeur d'assurer des actions de formation destinées à réinsérer durablement le salarié, contrepartie essentielle de l'effort financier que consent l'Etat, constitue une des conditions d'existence du contrat d'accompagnement dans l'emploi dont le non-respect entraîne donc la requalification du contrat en contrat à durée indéterminée ; qu'en l'espèce, le contrat unique d'insertion conclu entre le Département de Paris et Monsieur [Z] le 12 octobre 2010 et renouvelé le 5 avril 2011 prévoyait une adaptation au poste de travail qui devait s'effectuer en interne ; que si le Département de Paris justifie que lors de l'entretien individuel d'orientation mené dans le cadre du premier contrat, Monsieur [Z] a indiqué qu'il allait réfléchir à une formation éventuelle, peut-être dans le domaine de l'électricité, et ne pas souhaiter suivre de formation dans l'immédiat, en revanche il n'a mis en place aucune formation avant l'échéance du contrat et n'a fait effectuer aucun autre entretien après la signature du second contrat, étant observé que son arrêt de travail n'étant survenu qu'en juillet 2011, il n'a pu entraver l'obligation de formation de l'employeur ; qu'il s'ensuit que les contrats uniques d'insertion conclus entre les parties doivent être requalifiés en un contrat de droit commun à durée indéterminée ; que le jugement déféré qui a débouté M. [Z] de sa demande de requalification sera par conséquent infirmé ;

qu'il en résulte que M. [Z] est en droit de prétendre au paiement d'une indemnité de requalification par application de l'article L.1245-2 du code du travail égale à un mois de salaire, soit la somme de 1365,03 € ;

que par ailleurs, en vertu de l'article L.1226-19 du code du travail, la période de suspension du contrat de travail consécutive à un accident du travail ne fait pas obstacle à l'échéance du contrat à durée déterminée, si bien que la rupture par la seule survenance du terme d'un contrat qui est requalifié postérieurement en contrat à durée indéterminée constitue non un licenciement nul, mais un licenciement sans cause réelle et sérieuse, qui ouvre droit au paiement pour Monsieur [Z] :

- d'une indemnité compensatrice de préavis égale à un mois de salaire soit 1365,03 €

- de l'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis d'un dixième de 136,50 €

- d'une indemnité de licenciement égale, en vertu de l'article R.1234-2 du code du travail, à un cinquième de mois de salaire, soit la somme de 273 €,

ces sommes portant intérêts au taux légal à compter de la réception de la convocation de la défenderesse devant le bureau de conciliation valant mise en demeure de payer,

- de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse correspondant au préjudice subi, par application de l'article L.1235-5 du code du travail, le salarié comptant moins de deux ans d'ancienneté, et qui seront justement fixés, compte tenu des circonstances de la cause, à la somme de 4000 € ;

Qu'enfin, ainsi qu'il a été vu, la mise en oeuvre de l'accompagnement, de la formation et du tutorat est une contrepartie essentielle de l'effort financier consenti par l'Etat pour la prise en charge de ces contrats 'aidés' et constitue pour l'employeur un engagement, si bien que l'obligation de formation ne peut se limiter à l'adaptation du salarié à son poste de travail ; qu'en l'absence de mesure concrète prise pour assurer la formation du salarié, il y a lieu de confirmer le jugement qui a fait droit à la demande indemnitaire de Monsieur [Z] à hauteur de 1250 € ;

Attendu par ailleurs que le syndicat CGT n'est ni recevable ni fondé à agir sur le fondement de l'article L.2132-3 du code du travail, s'agissant d'un manquement de l'employeur à une obligation découlant d'un contrat de travail individuel qui ne porte pas un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession qu'il représente ;

Attendu que le Département de Paris sera condamné aux dépens ; que l'équité commande d'allouer à Monsieur [Z] la somme de 100 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, en sus de celle allouée en première instance ;

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme le jugement en ce qui concerne les sommes allouées à Monsieur [Z] et en ce qu'il a débouté le syndicat de sa demande ;

L'infirme pour le surplus et, statuant de nouveau,

Requalifie les CAE de Monsieur [Z] en contrat à durée indéterminée ;

Condamne en conséquence le Département de Paris à payer à Monsieur [P] [Z] les sommes de :

- 1365,03 € à titre d'indemnité de requalification,

- et 4000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

avec intérêts au taux légal à compter de ce jour,

- 1365,03 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis

- 136,50 € au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis

- et 273 € au titre de l'indemnité de licenciement,

avec intérêts au taux légal à compter du 1er février 2012,

- et 100 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne le Département de Paris aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 15/09855
Date de la décision : 03/03/2016

Références :

Cour d'appel de Paris K5, arrêt n°15/09855 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-03-03;15.09855 ?
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