La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/02/2016 | FRANCE | N°14/17029

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 3, 29 février 2016, 14/17029


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 3



ARRÊT DU 29 FÉVRIER 2016



(n°16/ , 16 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 14/17029



Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Juin 2014 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 12/10768





APPELANTE



FONDS DE GARANTIE DES ASSURANCES OBLIGATOIRES DE DOMMAGES, pris en la personne de ses représ

entants légaux

[Adresse 5]



Représenté par Me Hélène FABRE de l'ASSOCIATION Hélène FABRE, Carole SAVARY, Patricia FABBRO, avocat au barreau de PARIS, toque : P0124

Assisté de Me No...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 3

ARRÊT DU 29 FÉVRIER 2016

(n°16/ , 16 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/17029

Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Juin 2014 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 12/10768

APPELANTE

FONDS DE GARANTIE DES ASSURANCES OBLIGATOIRES DE DOMMAGES, pris en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 5]

Représenté par Me Hélène FABRE de l'ASSOCIATION Hélène FABRE, Carole SAVARY, Patricia FABBRO, avocat au barreau de PARIS, toque : P0124

Assisté de Me Noémie TORDJMAN, avocat plaidant pour l'ASSOCIATION Hélène FABRE, Carole SAVARY, Patricia FABBRO, avocat au barreau de PARIS, toque : P0124

INTIMES

Monsieur [J] [M] [C] représenté par Madame [A] [E], son épouse désignée comme mandataire spécial, selon Ordonnance du Juge des Tutelles du RAINCY (93) du 15 février 2013

[Adresse 6]

[Adresse 8]

né le [Date naissance 4] 1943 à [Localité 4] (Portugal)

Madame [A] [E] épouse [C]

[Adresse 6]

née le [Date naissance 2] 1948 à [Localité 4] (Portugal)

Madame [S] [C] épouse [H]

[Adresse 2]

née le [Date naissance 1] 1971 à [Localité 5] (93)

Mademoiselle [Y] [C]

[Adresse 3]

née le [Date naissance 5] 1985 à [Localité 1] (93)

Monsieur [L] [T]

[Adresse 4]

né le [Date naissance 4] 1965 à [Localité 3]

Tous représentés par Me Marie-Louise MEGRELIS, avocat au barreau de PARIS, toque : C2244

Compagnie d'assurances ALLIANZ IARD, prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 7]

[Adresse 7]

Représentée par Me Ghislain DECHEZLEPRETRE de la SELARL CABINET DECHEZLEPRETRE, avocat au barreau de PARIS, toque : E1155

RSI ILE DE FRANCE OUEST, pris en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Défaillant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 Janvier 2016, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Thierry RALINCOURT, Président de chambre , entendu en son rapport et Madame Marie-Brigitte FREMONT, Conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Thierry RALINCOURT, Président de chambre

Madame Catherine COSSON, Conseillère

Madame Marie-Brigitte FREMONT, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Nadia DAHMANI

ARRÊT :RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Thierry RALINCOURT, Président de chambre et par Mme Nadia DAHMANI, greffier présent lors du prononcé.

****

Le 16/01/2010, [J] [C], piéton, a été heurté sur la voie publique par le véhicule conduit par [L] [T] qui a pris la fuite et abandonné ledit véhicule, sur lequel était apposé une vignette d'assurance de la société ALLIANZ IARD.

Une ordonnance de référé du 16/12/2011 a confié une expertise médicale de la victime au Docteur [F] qui a clos son rapport le 28/06/2012.

Par arrêt du 3/07/2012, la présente Cour d'appel, statuant en référé, a condamné la société ALLIANZ à payer à [J] [C] une provision de 20.000 €, pour le compte de qui il appartiendra.

En vertu d'une seconde ordonnance de référé du 10/09/2012, la société ALLIANZ a été condamnée à payer, pour le compte de qui il appartiendra et à titre provisionnel, les sommes de :

-120.000 € à [J] [C],

- 8.000 € à son épouse,

- 5.000 € à chacune de ses deux filles.

Le RSI Ile-de-France a communiqué sa créance définitive le 7 septembre 2012 pour un montant total de 141.115,12 €.

Par jugement dont appel du 10/06/2014 (instance n° 12/10768), le Tribunal de grande instance de Paris a, notamment :

- déclaré irrecevables les demandes du RSI Ile-de-France-Ouest,

- dit que la police d'assurance souscrite par [L] [T] auprès de la société ALLIANZ a été résiliée antérieurement à l'accident dont a été victime [J] [C],

- condamné [L] [T] à payer les sommes suivantes, en deniers ou quittances, provisions non déduites, à :

1° - à [J] [C] :

* 448.491,83 € en capital avec intérêts au taux légal à compter de ce jour au titre de son préjudice,

* une rente trimestrielle et viagère au titre de la tierce personne d'un montant de 42.691,59 €, payable à compter du 29 mars 2012, et qui sera suspendue en cas d'hospitalisation ou de prise en charge en milieu médical spécialisé supérieure à 45 jours, rente payable à terme échu avec intérêts au taux légal à compter de chaque échéance échue et révisable chaque année conformément aux dispositions de l'article 43 de la loi du 5 juillet 1985, étant précisé que l'indexation n'interviendra et les intérêts ne seront dus qu'à compter du jugement,

* dit que les dépenses de santé restées à charge, afférentes au troubles du comportement ou à une épilepsie post-traumatique, seront remboursées annuellement, sur présentation de justificatifs,

2° - à [A] [E] :

* 1.200 € au titre des frais de transport,

* 15.000 € en réparation de son préjudice moral,

* 4.634,82 €.en réparation de son préjudice professionnel,

ces sommes avec intérêts au taux légal à compter du jour du jugement,

3° - à [S] [C] :

* 1.500 € au titre des frais de transport,

* 8.000 € en réparation de son préjudice moral,

ces sommes avec intérêts au taux légal à compter du jour du jugement,

4° - à [Y] [C] :

* 2.000 € au titre des frais de transport,

* 8.000 € en réparation de son préjudice moral,

ces sommes avec intérêts au taux légal à compter du jour du jugement,

- condamné [L] [T] et la société ALLIANZ in solidum à payer aux consorts [C] les intérêts au double du taux de l'intérêt légal sur le montant de l'indemnité allouée, avant imputation de la créance des tiers payeurs et déduction des provisions versées, à compter du 16 septembre 2010 et jusqu'au jugement devenu définitif,

- dit que les intérêts échus des capitaux produiront intérêts dans les conditions fixées par l'article 1154 du code civil,

- rejeté la demande de la société ALLIANZ en remboursement formée à l'encontre du FGAO,

- rejeté le surplus des demandes,

- déclaré le jugement commun au RSI Ile-de-France et opposable au FGAO,

- condamné [L] [T] aux dépens y compris les frais d'expertise,

- condamné [L] [T] à payer aux consorts [C], ensemble, une somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, cette somme avec intérêts au taux légal à compter du jour du jugement.

Appel a été interjeté par le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages selon déclaration du 6/08/2014.

Selon dernières conclusions notifiées le 27/11/2015, le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (FGAO) demande à la Cour de :

- dire et juger que la société ALLIANZ n'a pas respecté les dispositions de l'article R.421-5 du Code des assurances,

- en conséquence, dire et juger que la société ALLIANZ ne peut opposer aux consorts [C] la non-garantie qu'elle invoque pour défaut de paiement des primes d'assurance par [L] [T] et que l'indemnisation des préjudices de la victime directe, de son épouse et de ses filles lui incombera de manière définitive,

- compte tenu du caractère subsidiaire de son intervention, mettre le Fonds appelant hors de cause,

- condamner la société ALLIANZ à lui payer une indemnité de 4.000 € au titre des frais irrépétibles,

- à défaut, dire satisfactoires les offres mentionnées dans le tableau ci-dessous,

Selon dernières conclusions notifiées le 16/10/2015, [J] [C] représentée par son épouse [A] [C] désignée en qualité de mandataire spécial, [A] [C] personnellement, [Y] [C] et [S] [I] personnellement et en qualité de représentant légale de ses filles mineures [Z] et [B] [C], demandent à la Cour de :

- condamner [L] [T] à leur verser les sommes mentionnées dans le tableau ci-dessous,

- condamner [L] [T] à payer à [Z] [H] et à [B] [H] représentées par leur mère [S] [C] épouse [H] une somme de 10.000 € chacune en indemnisation de leur préjudice moral,

- dire que la totalité des sommes réclamées, créance du RSI Ile de France Ouest incluse et provisions non déduites, portera intérêt au double du taux de l'intérêt légal à partir du 16 septembre 2010, soit 8 mois après l'accident, et jusqu'à décision définitive,

- ordonner la capitalisation de ces intérêts dans les conditions de l'article 1154 du Code Civil,

- se prononcer sur la validité de la résiliation du contrat d'assurance n° 44367024 souscrit par [L] [T] auprès de la société ALLIANZ le 8 avril 2009,

- dire que le paiement de l'ensemble des sommes allouées sera placé à la charge du FGAO,

- subsidiairement, condamner la société ALLIANZ solidairement avec [L] [T] au paiement de l'ensemble des sommes allouées,

- dans tous les cas, déclarer la décision à intervenir commune au RSI Ile de France Ouest,

- condamner [L] [T] au paiement des indemnités suivantes par application de l'article 700 du Code de Procédure Civile :

$gt; 8.600 € à [J] [C], incluant les frais de médecin-conseil pour 3.600 €,

$gt; 3.000 € à [A] [C],

$gt; 2.000 € chacune à [S] [C] épouse [H] et à [Y] [C],

Préjudices de [J] [C]

DEMANDES

OFFRES du FGAO

Préjudices patrimoniaux :

$gt; temporaires :

- dépenses de santé actuelles :

mémoire

* dépenses de santé exp. par les organismes sociaux (RSI) :

141.115,12 €

- frais d'expertise

800,00 €

- frais de médecin-conseil

3.600,00 €

- tierce personne jusqu'au 29/03/2012

(ADPA  : 1.331,61 €)

308.880,00

154.538,39 €

- frais de déménagement

1.500,00 €

- adaptation du logement :

2.968,44 €

$gt; permanents :

- dépenses de santé futures :

sur justificatifs annuels

- tierce personne du 30/03/2012 au 29/03/2015

(ADPA  : 6.100,92 €)

551.880,00 €

rente trimestrielle de 23.491,59 €

- tierce personne à compter du 30/03/2015

(ADPA  : 24.348,77 €)

2.202.553,08 €

même rente

Préjudices extra-patrimoniaux :

$gt; temporaires :

- déficit fonctionnel temporaire :

23.760 €

13.020 €

- souffrances endurées :

35.000 €

25.000 €

$gt; permanents :

- déficit fonctionnel permanent :

196.000 €

161.000 €

- préjudice d'agrément :

8.000 €

- préjudice esthétique :

2.000 €

1.500 €

- préjudice sexuel :

25.000 €

5.000 €

Préjudices des victimes indirectes

DEMANDES

OFFRES du FGAO

[A] [C] (épouse)

- frais de transport :

1.256,86 €

- perte de revenus :

54.204,53 €

- préjudice d'affection :

30.000 €

15.000 €

[S] [C] (fille)

- frais de transport :

1.532,34 €

- préjudice d'affection :

20.000 €

8.000 €

[Y] [C] (fille)

- frais de transport :

2.472,30 €

- préjudice d'affection :

15.000 €

8.000 €

Selon dernières conclusions notifiées le 3/12/2015, la société ALLIANZ IARD demande à la Cour de :

confirmant le jugement entrepris,

- dire et juger que la police d'assurance souscrite par [L] [R] a été résiliée avant la survenue de l'accident dont a été victime Monsieur [J] [C],

- dire et juger que la Société ALLIANZ IARD a respecté le formalisme prévu à l'article R.421-5 du Code des Assurances,

- dire et juger qu'il n'appartient pas à la Société ALLIANZ IARD de prendre en charge l'indemnisation des Consorts [C],

- rejeter toutes les demandes des consorts [C] dirigées à l'encontre de la Société ALLIANZ IARD,

- dire et juger l'arrêt à intervenir commun et opposable au FONDS DE GARANTIE,

y ajoutant,

- Condamner le FONDS DE GARANTIE à payer à la Société ALLIANZ IARD une indemnité de 10.000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

[L] [R] et le RSI Ile-de-France Ouest n'ont pas constitué avocat.

CELA ETANT EXPOSE, LA COUR :

1 - sur les obligations de la société ALLIANZ.

Le FGAO fait valoir que la société ALLIANZ n'aurait pas respecté les dispositions de l'article R.421-5 du Code des Assurances et qu'elle serait donc tenue d'indemniser les consorts [C], aux motifs :

- que la société ALLIANZ aurait eu l'obligation de faire sa déclaration de non-assurance dès qu'elle avait été informée le 19 janvier 2010 par les services de police de l'apposition de la vignette d'assurance sur le véhicule de [L] [T] impliqué dans l'accident, et que, dans l'esprit de la loi, l'assureur devrait faire sa déclaration dès le moment où il conteste sa garantie,

- que, postérieurement à cette date, la société ALLIANZ aurait été interrogée à plusieurs reprises par l'avocat de [J] [C] et par le FGAO, sans qu'elle réponde, ou sans qu'elle fasse une déclaration de non assurance conforme aux prescriptions du texte précité,

- que la société ALLIANZ n'aurait procédé à sa déclaration que le 7/10/2011, mais aurait ainsi tenté vainement de régulariser une procédure déjà irrégulière.

L'article R.421-5 du Code des Assurances invoqué par le FGAO dispose :

Lorsque l'assureur entend invoquer la nullité du contrat d'assurance, sa suspension ou la suspension de la garantie, une non-assurance ou une assurance partielle opposables à la victime ou à ses ayants droit, il doit, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, le déclarer au Fonds de Garantie et joindre à sa déclaration les pi ces justificatives de son exception ; il doit en aviser en même temps et dans les mêmes formes la victime ou ses ayants droit en précisant le numéro du contrat.

Si l'assureur entend contester l'existence du contrat d'assurance, nonobstant la présentation par le responsable de l'accident du document justificatif mentionné à l'article R.211-15, il doit, d'une part, le déclarer sans délai au fonds de garantie par lettre recommandée avec demande d'avis de réception et, d'autre part, en aviser en même temps et dans les mêmes formes la victime ou ses ayants droit.

En l'occurrence, la société ALLIANZ a adressé le 7/10/2011 au FGAO la lettre recommandée avec demande d'avis de réception suivante :

"Nous revenons sur ce dossier consécutif à un accident de la circulation dont a été victime Monsieur [J] [C] le 16 janvier 2010 qui a été heurté par un véhicule immatriculé [Immatriculation 1].

"Un contrat n° 44367024 avait été souscrit auprès de notre compagnie à effet du 9/04/2009 pour couvrir ce véhicule.

"Nous ne pourrons toutefois pas intervenir dans la prise en charge des conséquences de l'accident puisque les effets du contrat 44367024 ont été suspendus pour non paiement de prime à effet du 2/09/2009 et que ce contrat a été résilié à effet du 14/09/2009 à la suite de l'envoi d'une lettre recommandée en date du 3/08/2009 dont ci-joint copie à M. [R].

"Nous joignons également copie du bordereau de la poste justifiant de l'envoi de la lettre recommandée (...) et le tampon de la poste en date du 3/08/2009 figurant sur la dernière page du bordereau. (...)" (pièce n° 7 du FGAO).

La société ALLIANZ a, le même jour (7/10/2011), adressé à [J] [C] la lettre recommandée avec demande d'avis de réception suivante (pièce n° 2 de la société ALLIANZ) :

"Nous prenons contact avec vous à la suite de l'accident de la circulation dont vous avez été victime le 16 janvier 2010.

"En qualité de piéton, vous avez été heurté par un véhicule Peugeot 306 immatriculé [Immatriculation 1].

"Nous vous précisons que le contrat n° 44367024 souscrit auprès de notre compagnie à effet du 9/04/2009 pour couvrir ce véhicule ne pourra trouver application et que nous ne pourrons procéder à votre indemnisation.

"En effet, les effets de ce contrat ont été suspendus pour non paiement de prime à effet du 2/09/2009 et le contrat a été résilié à effet du 14/09/2009.

"Nous avisons par même courrier le Fonds de garantie automobile qui devra procéder à votre indemnisation (du fait ') de notre position".

Il résulte explicitement et de manière non équivoque de ces correspondances que la société ALLIANZ n'a aucunement contesté l'existence du contrat d'assurance couvrant le véhicule impliqué dans l'accident, au sens de l'alinéa 2 du texte précité, mais a invoqué la suspension de garantie puis la résiliation de ce contrat (avant la survenance de l'accident), de sorte qu'elle a entendu procéder à la double déclaration précitée en application de l'alinéa 1er de l'article R.421-5 du Code des Assurances.

Le FGAO ne conteste pas que, par les lettres recommandées avec demande d'avis de réception du 7/10/2011, la société ALLIANZ a formellement satisfait aux prescriptions par l'article R.421-5 alinéa 1er du Code des Assurances, mais lui fait le grief chronologique de l'avoir fait tardivement, et donc de manière prétendument inopérante.

Le grief soulevé par le FGAO est vain aux motifs :

- que, si l'alinéa 2 de l'article R.421-5 du Code des Assurances (inapplicable en l'occurrence) impose à l'assureur de procéder à sa déclaration "sans délai", en revanche, l'alinéa 1er du même article (applicable en l'occurrence) n'assortit l'obligation de double déclaration incombant à l'assureur excipant d'une non-assurance d'aucune condition chronologique de délai,

- qu'il en résulte que le FGAO, en soutenant que la société ALLIANZ aurait dû procéder à sa double déclaration dès qu'elle avait été informée le 19 janvier 2010 par les services de police de l'apposition de la vignette d'assurance sur le véhicule de [L] [T] impliqué dans l'accident, prétend ajouter à la loi une condition que cette dernière ne pose pas,

- qu'en droit, la renonciation à un droit ne peut résulter que d'actes manifestant sans équivoque la volonté expresse ou tacite de renoncer,

- qu'en fait, les circonstances selon lesquelles, d'une part, la société ALLIANZ, en réponse à une correspondance de l'avocat de [J] [C] en date du 6/04/2011, a indiqué le 16/04/2011, de manière informelle, que le contrat d'assurance couvrant le véhicule impliqué avait été résilié avant l'accident, et, d'autre part, la société ALLIANZ, en réponse à deux correspondances interrogatives du FGAO, a, par lettre simple du 5/08/2011, informé de manière informelle ledit Fonds de la résiliation du contrat d'assurance antérieure à l'accident, ne l'ont pas privée du droit de procéder postérieurement, mais valablement, à la double déclaration dans les formes prescrites par l'article R.421-5 alinéa 1er du Code des Assurances,

- qu'en tant que de besoin, il sera observé que la société ALLIANZ a procédé à cette double déclaration le 7/10/2011, avant toute décision de justice, la première décision ayant été constituée par l'ordonnance de référé précitée du 16/12/2011.

Les demandes du FGAO tendant à sa mise hors de cause, et à voir juger que l'indemnisation des consorts [C] incombe de manière définitive à la société ALLIANZ doivent être rejetées, et le présent arrêt doit être déclaré opposable audit Fonds.

2 - sur l'indemnisation des préjudices de [J] [C].

Il n'est pas contesté que [J] [C], piéton heurté par le véhicule conduit par [L] [T], a droit à l'entière indemnisation de ses préjudices en application des articles 1, 3 et 5 de la loi n° 85-677 du 5/07/1985.

Le Docteur [F], expert judiciaire, a émis l'avis suivant :

- Déficit Fonctionnel Temporaire :

total du 16/01/2010 au 13/04/2010

à 80 % du 14/04/2010 jusqu'à la consolidation

- Consolidation le 29 mars 2012

- Déficit Fonctionnel Permanent : 70%

- Souffrances Endurées 5/7

- Préjudice esthétique 1/7

- Préjudice d'agrément : inapte à s'adonner aux quelques activités personnelles qu'il avait auparavant

- Préjudice sexuel : abolition de toute activité sexuelle depuis l'accident

- Aménagement du domicile : les époux [C] ont déménagé pour se rapprocher de leur fille, d'un pavillon dans un appartement ; des demandes sont en cours pour aménager notamment une douche

- traitements futurs : nécessité éventuelle de traitements psychocomportementaux de type médicamenteux pour réguler d'éventuels débordements de comportement qui pourraient découler des lésions cérébrales

- réserves concernant une éventuelle épilepsie post-traumatique et les traitements afférents éventuels

- Besoins en aide humaine : Tierce personne active non médicalisée pour la toilette, l'habillage, l'entretien de la maison et du linge : 4 à 5 heures par jour.

La victime pourrait éventuellement être laissée seule 30 minutes à 1 heure le matin et l'après-midi.

Une présence de proximité est nécessaire le reste de la journée et pendant la nuit.

Sur un dire de la société ALLIANZ, l'Expert a émis l'avis complémentaire suivant :

Les besoins en tierce personne pou l'aide aux activités usuelles de la vie quotidienne peut se limiter à 2 ou 3 heures par jour, mais [J] [C] n'est pas voué par ailleurs à être livré à lui-même et une aide incitative pour occupations lui apportant un maintien de ses acquis par des activités occupationnelles et de socialisation (avec aide et accompagnement dans des sorties) justifie que l'ensemble des besoins en tierce personne active non médicalisée soit maintenu à 5 heures par jour. Le reste des 24 heures, une présence sous le toit est nécessaire sauf pour 30 minutes à 1 heure le matin et après-midi pendant lesquelles [J] [C] apparaît pouvoir être laissé seul.

2.1 - sur les préjudices patrimoniaux temporaires.

2.1.1 - Ainsi que l'a exactement retenu la juridiction du premier degré, la consignation versée par [J] [C] sur frais d'expertise ordonnée en référé relève des dépens en application de l'article 695 § 4 du Code de Procédure Civile, et les honoraires du médecin-conseil mandaté par [J] [C] relèvent des frais irrépétibles et ont été expressément inclus dans l'indemnité allouée en application de l'article 700 du même code (cf. jugement page 14).

2.1.2 - Concernant l'indemnisation de l'aide par tierce personne, la juridiction du premier degré a alloué une somme de 223.080 € sur la base d'une aide de 24 heures par jour durant 715 jours (de la fin d'hospitalisation du 13/04/2010 jusqu'à la consolidation) au coût horaire de 13 €.

[J] [C], sur appel incident, demande une indemnisation sur la même base journalière et pour la même durée, mais au coût horaire de 18 €, au motif que le recours à un service prestataire serait obligatoire.

Le FGAO fait valoir que l'Expert a opéré une distinction entre l'aide humaine active (5 heures par jour) et l'aide humaine passive ou de surveillance (17 heures par jour), et offre une indemnisation aux coûts horaires différenciés de 13 € et 9 €.

La durée quotidienne d'assistance par tierce personne (22 heures) préconisée par l'Expert sera entérinée, en l'absence de réfutation argumentée de [J] [C] et d'avis médical contraire.

Le coût horaire de 13 € retenu par la Juridiction du premier degré, sans qu'il y ait lieu de distinguer entre l'assistance active et passive, sera confirmé.

Déduction faite de l'Allocation Personnalisée d'Autonomie perçue par [J] [C], dont le montant n'est pas contesté, ce chef de préjudice doit être indemnisé comme suit :

(13 € * 22 heures * 715 jours) - 1.331,61 € = 203.158,39 €

2.1.3 - Il résulte d'attestations notariées que les époux [C] ont, en juillet 2011, soit avant la consolidation de [J] [C], vendu leur pavillon des Pavillons-sous-bois et acquis un appartement à [Localité 2],

Les frais de déménagement invoqués par ce dernier relèvent donc de la catégorie des préjudices patrimoniaux temporaires.

[J] [C] soutient que ce déménagement aurait été exclusivement imputable à l'accident du 16/01/2010 aux motifs :

- que l'emménagement en appartement aurait été destiné à lui éviter l'utilisation d'escalier compte tenu des risques de chute,

- que son nouvel appartement se situerait à 150 mètres de la résidence de sa fille [S], afin de faciliter son aide quotidienne.

Le Docteur [F], expert, décrit comme suit les séquelles dont [J] [C] demeure atteint (rapport page 16) :

- un syndrome cognitivo-comportemental frontal apragmatique avec lésions temporales bilatérales ; ce syndrome est responsable de troubles cognitifs marqués ;

- troubles de langage importants qui gênent la communication et un apragmatisme avec perte d'initiative et désadaptation aux situations inattendues ;

- troubles comportementaux et notamment troubles du caractère et troubles du contrôle émotionnel ;

- troubles de l'équilibre avec sensations vertigineuses.

Concernant l'aménagement du logement l'Expert a relevé (rapport page 17) : "Monsieur et Madame [C] ont déménagé pour se rapprocher de leur fille. (...) L'aménagement de la douche est souhaitable compte tenu de la nécessité d'assister Monsieur [C] dans son installation dans la douche et de ses troubles de l'équilibre avec risque de chute".

L'Expert, qui a examiné [J] [C] le 29/03/2012 postérieurement à son emménagement en appartement, n'indique pas que l'ancien pavillon aurait été inadapté au séjour de [J] [C], en raison des séquelles provoquées par l'accident.

Il en résulte que [J] [C] ne rapporte pas la preuve d'un lien de causalité directe entre son préjudice corporel causé par l'accident du 16/01/2010 et son déménagement de juillet 2011.

La demande d'indemnisation des frais de déménagement doit donc être écartée, en confirmation du jugement entrepris.

2.1.4 - [J] [C] demande l'indemnisation des préjudices suivants au titre de l'aménagement de l'appartement qu'il occupe depuis 2011 :

- aménagement de la douche (devis) :2.858,44 €

- installation d'une poignée murale : 110,00 €

- total :2.968,44 €

Le FGAO s'oppose à ce chef de demande au motif que la preuve du lien de causalité directe de ces frais avec les séquelles de l'accident litigieux ne serait par rapportée, dès lors que [J] [C] était en invalidité depuis 2005, étant porteur d'une double prothèse de hanches.

Il résulte de l'avis précité de l'expert (cf. supra § 2.1.3) que l'aménagement de la douche est en en lien de causalité directe avec l'accident du 16/01/2010, étant observé que l'expert ne rattache aucunement cet aménagement à l'état antérieur (doublement prothétique) de [J] [C].

Ce chef de demande indemnitaire doit être accueilli dans son principe et son montant, en confirmation du jugement entrepris.

2.2 - sur les préjudices patrimoniaux permanents.

2.2.1 - [J] [C] conclut à la confirmation de la disposition du jugement entrepris relative aux dépenses de santé futures.

Le FGAO s'oppose à cette demande indemnitaire en faisant valoir que ce préjudice serait incertain, et qu'à tout le moins il ne pourrait donner lieu qu'à des réserves.

Comme relevé supra, l'Expert a retenu la perspective de traitements psycho-comportementaux de type médicamenteux et de traitement pour une éventuelle épilepsie post-traumatique, le tout en lien de causalité directe avec l'accident du 16/01/2010.

Ce chef de préjudice, s'il n'est pas présentement quantifiable, est néanmoins prévisible.

Il présentera un caractère certain au vu des justificatifs que, le cas échéant, la victime devra présenter pour en obtenir annuellement le remboursement.

Le jugement entrepris doit être confirmé à ce titre.

2.2.2 - Concernant l'indemnisation de l'aide par tierce personne, la juridiction du premier degré a alloué une rente calculée sur la base d'une aide de 24 heures par jour pour 400 jours par an au coût horaire de 18 €.

[J] [C], sur appel incident, demande une indemnisation calculée sur une base annuelle de 21 € * 24 heures * 365 jours, décomposée en une période triennale (échue) du 30/03/2012 (consolidation) au 29/03/2015, et sur la période à échoir à compter du 30/03/2015 avec capitalisation.

Le FGAO, appliquant la distinction opérée par l'Expert entre l'aide humaine active (5 heures par jour) et l'aide humaine passive ou de surveillance, offre une rente trimestrielle, sans capitalisation, calculée sur une base annuelle de :

(14 € x 5 heures) + (10 € x 17 heures) x 400 jours = 96.000 €

Concernant le coût horaire de l'aide, [J] [C] demande l'application d'une somme de 21 € correspondant à l'emploi d'un personnel professionnel rémunéré induisant des charges sociales, mais ne produit aucun justificatif d'un tel emploi actuel. La juridiction du premier degré a toutefois retenu, avec pertinence, d'une part, que, compte tenu des séquelles de [J] [C] et de l'importance du besoin d'assistance, ce dernier devra faire appel à un service prestataire, son épouse (actuellement âgée de 67 ans) ne pouvant continuer à assumer seule cette assistance, et, d'autre part, qu'il n'est pas établi que l'assistance doive être assurée à plein temps par un prestataire professionnel.

En considération de ces éléments d'appréciation, et au vu du coût horaire de 21 € invoqué par [J] [C] sur la base de devis de prestataire professionnel, il y a lieu de retenir, en confirmation du jugement entrepris, un coût horaire uniforme de 18 € pour l'ensemble du temps d'assistance, sans distinguer le caractère actif ou passif de l'assistance, ni distinguer l'apport de l'assistance bénévole pour par un professionnel.

Il doit être retenu une durée quotidienne d'assistance de 22 heures, conformément à l'avis expertal (cf . supra § 2.1.2) et à l'offre du FGAO.

Déduction faite de l'Allocation Personnalisée d'Autonomie perçue par [J] [C], dont le montant n'est pas contesté, ce chef de préjudice doit être indemnisé comme suit pour la période triennale du 30/03/2012 au 29/03/2015 :

(18 € * 22 heures * 365 jours * 3 ans) - 6.100,92 € = 427.519,08 €

Concernant la période à échoir à compter du 30/03/2015, la juridiction du premier degré a retenu, avec pertinence, une indemnisation sous forme de rente trimestrielle, compte tenu de l'âge et de l'état de santé de la victime, cette modalité d'indemnisation offrant une meilleure protection et satisfaisant au principe de la réparation intégrale du préjudice, sans perte ni profit.

Il y a lieu de retenir la demande subsidiaire de [J] [C] tendant à la prise en compte d'une période annale de 412 jours compte tenu des jours de congés payés et des jours fériés.

La rente trimestrielle doit être liquidée comme suit, déduction faite de l'Allocation Personnalisée d'Autonomie dont le montant n'est pas contesté :

(18 € * 22 heures * 412 jours / 12 mois * 3 mois) - (169,47 € * 3 mois) = 40.279,59 €

Les modalités de paiement de cette rente fixées par le jugement entrepris doivent être confirmées.

2.3 - sur les préjudices extra-patrimoniaux temporaires.

2.3.1 - L'avis expertal relatif au déficit fonctionnel temporaire n'est pas contesté, les parties divergeant sur la valeur unitaire d'indemnisation (30 € par jour selon [J] [C] et 20 € par jour selon le FGAO).

Ce préjudice sera indemnisé à hauteur de 14.515 €.

2.3.2 - L'Expert a quantifié les souffrances endurées au niveau de 5/7 en tenant compte de : la pose de capteur de pression intracrânienne, un séjour en réanimation, la pose de DVE et sa reprise, l'hospitalisation en rééducation fonctionnelle, la pneumopathie subie, la trachéotomie subie, les épisodes de surinfection et la rééducation, notamment orthophonique.

L'indemnisation pertinente de 30.000 € allouée en première instance doit être confirmée.

2.4 - sur les préjudices extra-patrimoniaux permanents.

2.4.1 - L'Expert a retenu un taux de déficit fonctionnel permanent de 70 % compte tenu des séquelles décrites supra (cf. § 2.1.3).

[J] [C] étant âgé de 68 ans au jour de sa consolidation, l'offre indemnitaire de 161.000 € présentée par le FGAO est satisfactoire.

2.4.2 - L'Expert a quantifié le préjudice esthétique permanent au niveau de 1/7 en tenant compte de l'aspect adynamique général et de la cicatrice de pose de pression intracrânienne.

L'indemnisation pertinente de 1.500 € allouée en première instance doit être confirmée.

2.4.3 - La demande d'indemnisation d'un préjudice d'agrément doit être écartée pour les motifs pertinents retenus par la juridiction du premier degré, en ce que, d'une part, [J] [C] ne justifie pas de la pratique de sport ou d'activité de loisir particulier avant l'accident, et que, d'autre part, l'impossibilité de la conduite automobile et la perte d'autonomie qui en résulte sont indemnisées au titre du déficit fonctionnel permanent.

2.4.4 - L'indemnisation pertinente du préjudice sexuel à hauteur de 8.000 € allouée en première instance doit être confirmée.

3 - sur l'indemnisation des victimes indirectes.

3.1 -Concernant les demandes d'indemnisation des frais de transport exposés par l'épouse et les filles de [J] [C] pour le visiter à l'hôpital, les parties, en cause d'appel, ne font que reprendre leurs prétentions et leurs moyens de première instance.

En l'absence d'élément nouveau soumis à son appréciation, la Cour estime que la juridiction du premier degré a, par des motifs pertinents qu'elle approuve, fait une exacte appréciation des faits de la cause et du droit des parties ; en conséquence, la décision entreprise doit être confirmée en ce qu'il a été alloué les indemnisations suivantes :

- à [A] [E] : 1.200 €

- à [S] [C] : 1.500 €

- à [Y] [C] : 2.000 €.

3.2 -Concernant sa demande d'indemnisation de perte de revenus professionnels, [A] [C] fait valoir qu'elle a dû cesser son activité de commerçante ambulante quelques mois après l'accident de son mari, et qu'elle n'a pris sa retraite qu'à l'âge de 65 ans pour bénéficier du taux plein, de sorte qu'elle aurait subi une perte de revenus de 2010 à 2013.

Le FGAO conteste ce poste de préjudice dans son principe, au motif qu'il ferait double emploi avec l'indemnisation de l'assistance par tierce personne réclamée par [J] [C].

Le principe de la demande indemnitaire de [A] [C] doit être accueilli pour les motifs pertinents retenus par la juridiction du premier degré auxquels les parties n'ont opposé aucune réfutation argumentée, en ce que :

l'Expert a indiqué que la perte d'autonomie de [J] [C] a amené son épouse à cesser son activité professionnelle ;

cette dernière justifie de la cessation de son activité professionnelle de commerçante ambulante à effet du 15/06/2010 par la production du récépissé de dépôt de sa déclaration au centre de formalités des entreprises, l'intéressée étant alors âgée de 61 ans ;

cette cessation d'activité intervenue 6 mois après l'accident de son époux, alors que l'intéressée n'avait pas encore atteint l'âge de la retraite, est de nature à corroborer le lien entre l'accident et la cessation d'activité ;

enfin, l'indemnisation ainsi sollicitée de la perte de revenus personnels de l'épouse ne se confond pas avec l'indemnisation de la victime directe [J] [C] au titre l'assistance par tierce personne, dès lors que la somme allouée au titre de la tierce personne indemnise un préjudice personnel de [J] [C] compte tenu de son besoin d'assistance, alors que la somme sollicitée par [A] [E] indemnise le préjudice personnel subi par elle compte tenu de sa cessation d'activité.

[A] [C], née le [Date naissance 3], justifie (pièce n° 77) de ce qu'elle a perçu sa pension de retraite à compter du 1/11/2013, à l'âge de 65 ans révolus.

Sa perte de revenus professionnels (justifiée par la production de ses avis d'imposition) en lien de causalité avec l'accident subi par son époux doit être indemnisée pour la période de 40 mois et demi, ayant couru du 16/06/2010 au 30/10/2013.

L'indemnisation doit être liquidée sur la base du revenu annuel perçu par [A] [C] en 2009 (dernière année précédant sa cessation d'activité) pour un montant de 14.509 € au vu de son avis d'imposition.

Ainsi que le fait observer avec pertinence le FGAO à titre subsidiaire, [A] [C] n'est pas fondée à invoquer une revalorisation annuelle de sa perte de revenus pour les années 2011 à 2013, dès lors que l'évolution des revenus commerciaux qu'elle aurait perçus si elle avait poursuivi son activité ne peut être présumée en exacte corrélation avec l'évolution du coût de la vie.

L'indemnisation de la perte de revenus professionnels de [A] [C] doit être liquidée comme suit : 14.509 € / 12 mois * 40,5 mois = 48.968 €

3.3 -Concernant les demandes de l'épouse et des filles de [J] [C] en indemnisation des préjudices d'affection et de troubles dans les conditions d'existence, les parties, en cause d'appel, ne font que reprendre leurs prétentions et leurs moyens de première instance.

En l'absence d'élément nouveau soumis à son appréciation, la Cour estime que la juridiction du premier degré a, par des motifs pertinents qu'elle approuve, fait une exacte appréciation des faits de la cause et du droit des parties ; en conséquence, la décision entreprise doit être confirmée en ce qu'il a été alloué les indemnisations suivantes :

- à [A] [E] : 15.000 €

- à [S] [C] : 8.000 €

- à [Y] [C] : 8.000 €.

3.4 -Ainsi que le fait exactement valoir le FGAO, l'intervention volontaire, en cause d'appel, de [Z] et [B] [H], petites-filles (mineures) de [J] [C], légalement représentées par leur mère [S] [C] épouse [H], aux fins d'indemnisation de leur préjudice d'affection personnel, est irrecevable dès lors que ces demandes des intervenantes tendent à des condamnations non soumises à l'appréciation des premiers juges et soumettent ainsi à la Cour un litige nouveau en méconnaissance du double degré de juridiction.

4 - sur le taux de l'intérêt légal .

4.1 -sur le doublement du taux.

4.1.1 - à l'égard de la société ALLIANZ.

La disposition du jugement entrepris ayant condamné la société ALLIANZ à payer aux consorts [C] les intérêts au double du taux de l'intérêt légal sur le montant de l'indemnité allouée, avant imputation de la créance des tiers payeurs et déduction des provisions versées, à compter du 16 septembre 2010 et jusqu'au jugement devenu définitif, n'est frappée d'appel incident ni par la société ALLIANZ ni par les consorts [C] et doit dès lors être confirmée.

En revanche, la disposition du jugement ayant prononcé cette condamnation à l'encontre de [L] [T], in solidum avec la société ALLIANZ, doit être infirmée, dès lors que la sanction édictée par l'article L.211-13 du Code des Assurances est uniquement applicable à l'assureur, et non à l'assuré, ce dernier n'étant pas tenu de l'obligation légale de présenter une offre d'indemnisation à la victime.

4.1.2 - à l'égard du FGAO.

Il résulte de l'exposé du litige figurant en page 6 du jugement entrepris que les consorts [C] ont demandé au Tribunal d' "ordonner que la totalité des sommes porteront intérêt au double du taux légal + 3 points à partir du 16 septembre 2010, soit 8 mois après l'accident, et jusqu'à la date de leur règlement effectif", sans restreindre cette demande à l'encontre de la seule société ALLIANZ.

Il s'en déduit que le Tribunal était également saisi de cette demande à l'encontre du FGAO, étant observé que l'article L.211-13 alinéa 1er du même code, applicable au FGAO en vertu de l'article L.211-22, dispose que, lorsque les conditions en sont réunies, le montant de l'indemnité offerte (...) ou allouée par le juge à la victime produit intérêt "de plein droit" au double du taux de l'intérêt légal.

Le Tribunal a omis de statuer sur ce point.

Les consorts [C] font valoir :

- que le FGAO n'aurait jamais adressé aucune offre d'indemnisation à [J] [C] ni à sa famille,

- que les offres contenues dans les conclusions de première instance du Fonds en date du 6/01/2014 ne constitueraient pas des offres prévues par l'article L.211-9 du Code des Assurances, lesquelles devraient être adressées à la victime,

- que l'assiette du doublement du taux légal devrait inclure la créance de la CPAM (sic) et que les provisions versées ne devraient pas être déduites.

Le FGAO fait valoir en réplique :

- à titre principal, que, dès lors qu'un assureur est susceptible d'intervenir et que le Fonds de Garantie a précisé ne pas être en mesure de prendre position sur le bien-fondé du refus de garantie opposé au responsable, il appartiendrait à l'assureur mis en cause de régler pour le compte de qui il appartiendra, et que lui seul encourrait la sanction du doublement du taux légal,

- subsidiairement, que l'assiette de l'intérêt doublé serait exclusive de la créance de la CPAM (sic), des provisions versées, et des indemnités allouées aux victimes par ricochet qui seraient exclues du dispositif légal d'offre indemnitaire.

En droit, l'article L.211-22 alinéa 1er du Code des Assurances dispose : Les dispositions des articles L. 211-9, L. 211-10 et L. 211-13 à L. 211-19 sont applicables au fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages institué par l'article L. 421-1, dans ses rapports avec les victimes ou leurs ayants droit ; toutefois, les délais prévus à l'article L. 211-9 courent contre le fonds à compter du jour où celui-ci a reçu les éléments justifiant son intervention.

L'article L.211-13 du même code dispose : Lorsque l'offre n'a pas été faite dans les délais impartis à l'article L. 211-9, le montant de l'indemnité offerte par l'assureur ou allouée par le juge à la victime produit intérêt de plein droit au double du taux de l'intérêt légal à compter de l'expiration du délai et jusqu'au jour de l'offre ou du jugement devenu définitif. Cette pénalité peut être réduite par le juge en raison de circonstances non imputables à l'assureur.

En fait, la société ALLIANZ a procédé le 7/10/2011 à sa double déclaration de non-assurance, en application de l'article R.421-5 alinéa 1er du Code des Assurances (cf. supra § 1).

Par lettre du 21/10/2011, le FGAO a indiqué à la société ALLIANZ qu'il n'était "pas actuellement en mesure de prendre une décision définitive sur le bien-fondé de l'exception" invoqué par cette dernière, et lui a demandé la communication d'éléments complémentaires.

En réponse, la société ALLIANZ a communiqué au FGAO les éléments sollicités par lettre du 27/10/2011, reçue par le Fonds le 4/11/2011 a vu de son tampon dateur.

En réponse, le FGAO a adressé à la société ALLIANZ le 22/12/2011 la correspondance suivante : "vous m'avez fait part de votre intention de ne pas prendre en charge le sinistre en référence au motif suivant : le contrat n° (...) serait résilié au jour de l'accident pour non paiement des primes. Dans ces conditions, conformément aux prescriptions de l'article R.421-6 du Code des Assurances, j'ai l'honneur de vous informer que le Fonds de garantie conteste votre refus de garantie. (...) Il vous appartient d'engager la procédure d'offre d'indemnité à l'égard de ces victimes (...)".

Dans la mesure où la contestation, opposée par le FGAO, du refus de garantie invoqué par la société ALLIANZ n'était aucunement argumentée dans le courrier précité, et que, notamment, ledit Fonds n'a aucunement contesté la régularité de la résiliation du contrat d'assurance du véhicule impliqué, antérieure à l'accident concerné, il s'en déduit qu'à réception (le 4/11/2011) de la correspondance de la société ALLIANZ datée du 27/10/2011, le FGAO avait reçu les éléments justifiant son intervention, au sens de l'article L.211-22 alinéa 1er in fine précité du même code.

En conséquence, le délai légal de présentation d'une offre d'indemnisation de 8 mois, imparti par l'article L.211-9 alinéa 2 du même code, a couru envers le FGAO à compter du 4/11/2011 et a expiré le 4/07/2012, date à compter de laquelle le doublement du taux de l'intérêt légal lui incombe.

Il résulte du jugement entrepris (pages 4 à 6) qu'en première instance, le FGAO a présenté des offres d'indemnisation conformes aux exigences de l'article L.311-9 alinéa 2 du même code par conclusions du 6/02/2014, lesquelles ont emporté interruption du cours des intérêts à taux doublé.

Ces offres n'incluent aucune créance de tiers payeur (seule étant visée, au titre du préjudice d'assistance de tierce personne temporaire, une Allocation Personnalisée d'Autonomie, dont le montant est expressément déduit de l'offre).

Par ailleurs, le FGAO invoque vainement la provision versée par lui le 14/03/2012 en exécution de l'ordonnance de référé du 16/12/2011, alors qu'en droit la majoration des intérêts doit porter sur la totalité du montant des indemnités offertes, et non pas sur le solde restant dû après déduction des provisions versées le cas échéant.

Enfin, le FGAO fait exactement valoir que le dispositif légal d'offre indemnitaire n'est institué qu'en faveur de la victime directe ou de ses ayants droit, de sorte que les victimes par ricochet [A], [S] et [Y] [C] ne sont pas fondées à prétendre en bénéficier.

4.2 - sur la capitalisation des intérêts.

Cette demande des consorts [C] doit être accueillie, en confirmation du jugement entrepris.

5 - sur les dépens et les frais non compris dans les dépens.

[L] [T], partie principalement perdante, sera condamné aux dépens d'appel.

Les demandes indemnitaires des consorts [C] fondées sur l'article 700 du Code de Procédure Civile seront accueillies à hauteur d'une somme globale de 10.000 €.

Ledit article 700 alinéa 1er dispose : le juge condamne la partie condamnée aux dépens ou qui perd son procès à payer (...).

Si le FGAO n'est pas condamné aux dépens, en revanche, il est perdant envers la société ALLIANZ en ce qu'il a soutenu à tort que cette dernière serait déchue de son exception de non-assurance.

Si les dispositions du Code des Assurances font obstacle à ce que le FGAO soit condamné à payer à la (aux) victime(s) les indemnités réparant leurs préjudices, en revanche, aucune disposition n'interdit sa condamnation au paiement d'une indemnité pour frais irrépétibles en application de l'article 700 précité.

La demande indemnitaire de la société ALLIANZ formée à l'encontre du FGAO sera accueillie à hauteur d'une somme de 3.000 €.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement du Tribunal de grande instance de Paris en date du 10/06/2014 en ce qu'il a :

- dit que la police d'assurance souscrite par [L] [T] auprès de la société ALLIANZ a été résiliée antérieurement à l'accident dont a été victime [J] [C],

- dit que les dépenses de santé restées à charge de [J] [C], afférentes au troubles du comportement ou à une épilepsie post-traumatique, seront remboursées annuellement, sur présentation de justificatifs,

- condamné [L] [T] à payer les sommes suivantes, en deniers ou quittances, provisions non déduites, à :

$gt; à [A] [E] :

* 1.200 € au titre des frais de transport,

* 15.000 € en réparation de son préjudice moral,

ces sommes avec intérêts au taux légal à compter du jour du jugement,

$gt; à [S] [C] :

* 1.500 € au titre des frais de transport,

* 8.000 € en réparation de son préjudice moral,

ces sommes avec intérêts au taux légal à compter du jour du jugement,

$gt; à [Y] [C] :

* 2.000 € au titre des frais de transport,

* 8.000 € en réparation de son préjudice moral,

ces sommes avec intérêts au taux légal à compter du jour du jugement,

- condamné la société ALLIANZ à payer aux consorts [C] les intérêts au double du taux de l'intérêt légal sur le montant de l'indemnité allouée, avant imputation de la créance des tiers payeurs et déduction des provisions versées, à compter du 16 septembre 2010 et jusqu'au jugement devenu définitif,

- dit que les intérêts échus des capitaux produiront intérêts dans les conditions fixées par l'article 1154 du code civil,

- déclaré le jugement commun au RSI Ile-de-France et opposable au Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages,

- condamné [L] [T] aux dépens y compris les frais d'expertise,

- condamné [L] [T] à payer aux consorts [C], ensemble, une somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, cette somme avec intérêts au taux légal à compter du jour du jugement.

Infirme ledit jugement en ses autres dispositions et, statuant à nouveau,

Condamne [L] [T] à payer les sommes suivantes, en deniers ou quittances, provisions non déduites, et avec intérêts au taux légal à compter du jour du présent arrêt, capitalisables annuellement, à :

1° - à [J] [C] :

* 203.158,39 € (deux cent trois mille cent cinquante-huit euros trente-neuf centimes) au titre de l'assistance par tierce personne temporaire,

* 2.968,44 € (deux mille neuf cent soixante-huit euros quarante-quatre centimes) au titre des frais d'aménagement du logement,

* 427.519,08 € (quatre cent vingt-sept mille cinq cent dix-neuf euros huit centimes) au titre de l'assistance par tierce personne pour la période du 30/03/2012 au 29/03/2015,

* une rente trimestrielle et viagère au titre de la tierce personne d'un montant de 40.279,59 € (quarante mille deux cent soixante-dix-neuf euros cinquante-neuf centimes), payable à compter du 30 mars 2015, et qui sera suspendue en cas d'hospitalisation ou de prise en charge en milieu médical spécialisé supérieure à 45 jours, rente payable à terme échu avec intérêts au taux légal à compter de chaque échéance échue et révisable chaque année conformément aux dispositions de l'article 43 de la loi n° 85-677 du 5/07/1985, étant précisé que l'indexation n'interviendra et que les intérêts ne seront dus qu'à compter du présent arrêt,

* 14.515 € (quatorze mille cinq cent quinze euros) au titre du déficit fonctionnel temporaire,

* 30.000 € (trente mille euros) au titre des souffrances endurées,

* 161.000 € (cent soixante et un mille euros) au titre du déficit fonctionnel permanent,

* 1.500 € (mille cinq cents euros) au titre du préjudice esthétique,

* 8.000 € (huit mille euros) au titre du préjudice sexuel.

2° - à [A] [C] : 48.968 € (quarante-huit mille neuf cent soixante-huit euros) au titre de sa perte de revenus professionnels.

Infirme ledit jugement en ce qu'il a condamné [L] [T] à payer aux consorts [C] des intérêts au double du taux de l'intérêt légal sur le montant des indemnités allouées.

Y ajoutant,

Dit et juge que la Société ALLIANZ IARD a respecté le formalisme prévu à l'article R.421-5 du Code des Assurances, et qu'il ne lui appartient pas de prendre en charge l'indemnisation des Consorts [C],

Déclare irrecevable l'intervention volontaire, en cause d'appel, de [Z] et [B] [H], légalement représentées par leur mère [S] [C] épouse [H].

Dit et juge que le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages est tenu, envers [J] [C], du double du taux de l'intérêt légal sur le montant des offres d'indemnité qu'il lui a présentées, figurant en pages 4 et 5 du jugement entrepris, pour la période ayant couru du 4/07/2012 au 6/02/2014.

Déclare le présent arrêt commun au RSI Ile-de-France et opposable au Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages.

Condamne [L] [T] aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du Code de Procédure Civile.

Condamne [L] [T] à payer à [J], [A], [S] et [Y] [C], créanciers solidaires, une indemnité de 10.000 € (dix mille euros) par application, en cause d'appel, de l'article 700 du même code.

Condamne le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages à payer à la société ALLIANZ IARD une indemnité de 3.000 € (trois mille euros) par application du même texte.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 14/17029
Date de la décision : 29/02/2016

Références :

Cour d'appel de Paris C3, arrêt n°14/17029 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-02-29;14.17029 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award