RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 11
ARRÊT DU 19 Février 2016
(n° 136 , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/04663
15/04682
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 20 Janvier 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LONGJUMEAU - Section industrie - RG n° 13/01112
APPELANT
Monsieur [I] [C]
[Adresse 2]
[Localité 3]
comparant en personne, assisté de Me Michel HENRY, avocat au barreau de PARIS, toque : P0099
INTIMEES
Me [H] [Z] - Mandataire liquidateur de SA DIAMANT GRAPHIC
[Adresse 1]
[Localité 1]
représenté par Me France TETARD, avocat au barreau de LYON
AGS CGEA DE [Localité 2]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Localité 2]
représentée par Me Pascal GOURDAIN, avocat au barreau de PARIS, toque : D1205 substitué par Me Thierry BLAZICEK, avocat au barreau de PARIS, toque : C.44
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 octobre 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Luce CAVROIS, Présidente de chambre, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Marie-Luce CAVROIS, Présidente
Madame Evelyne GIL, Conseillère
Madame Isabelle DOUILLET, Conseillère
Qui en ont délibéré
Greffier : M. Franck TASSET, lors des débats
ARRET :
- Contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Marie-Luce CAVROIS, Présidente et par Monsieur Franck TASSET, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
M. [I] [C] a été engagé par la société DIAMANT GRAPHIC le 16 octobre 2000 en qualité de conducteur Offset 4 couleurs.
Du 1er septembre 2009 au 1er octobre 2010, il a occupé la fonction de contremaître mais suite aux difficultés économiques de la société, il est redevenu conducteur offset à compter du 1er octobre 2010.
En 2012, la société DIAMANT GRAPHIC est rachetée par le Groupe FERREOL.
Le salaire mensuel moyen des trois derniers mois de M. [C] est de 3.338 € bruts.
Le 27 novembre 2013, M. [C] a saisi le conseil de prud'hommes de Longjumeau d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de la société DIAMANT GRAPHIC ;
Le 6 février 2014, le tribunal de commerce a arrêté un plan de cession de la société DIAMANT GRAPHIC au bénéfice de la société HOLDING PRENANT avec la suppression de 16 postes.
Par lettre du 28 février 2014, M. [C] est licencié pour motif économique.
Le 4 mars 2014, le tribunal de commerce a prononcé la liquidation judiciaire de la société.
La convention collective applicable est celle des imprimeries de labeur et des industries graphiques.
Par jugement du 20 janvier 2015, le conseil de prud'hommes de Longjumeau a débouté M. [I] [C] de toutes ses demandes ; débouté Maître [H] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; dit le jugement opposable à l'AGS dans les limites de ses garanties ; mis les dépens à la charge de M. [C].
Le jugement a été notifié le 7 avril 2015 et M. [C] en a formé appel le 4 mai 2015.
L'affaire est venue sur le fond à l'audience du 8 octobre 2015, date à laquelle les parties ont soutenu leur conclusions, visées par le greffier, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens en application de l'article 455 du code de procédure civile.
M. [C] sollicite l'infirmation du jugement en toutes ses dispositions et a demandé à la cour de :
à titre principal, juger le licenciement pour motif économique de M. [C] sans cause réelle et sérieuse,
à titre infiniment subsidiaire, constater la violation des règles relatives à l'ordre des licenciements,
En conséquence, fixer les sommes suivantes au passif de la SA DIAMANT GRAPHIC :
- à titre principal, 30.000 € d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- à titre subsidiaire, 30.000 € pour violation des règles relatives à l'ordre des licenciements,
Ordonner la remise d'un bulletin de salaire conforme à la condamnation prononcée sous astreinte de 100 € par jour à compter de la notification du jugement pendant 60 jous, délai au terme duquel le conseil liquidera l'astreinte,
- dire l'arrêt opposable à l'AGS CGEA.
Maître [Z] [H], en qualité de mandataire liquidateur de la SAS DIAMANT GRAPHIC demande à la cour de :
A titre principal :
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Longjumeau,
- juger que la procédure de licenciement pour motif économique a été respectée concernant l'obligation de recherche de reclassement et l'application des critères d'ordre économique,
- en conséquence débouter M. [C] de sa demande de dommages et intérêts por licenciement sans cause réelle et sérieuse ou non respect des critères d'ordre de licenciement,
A titre subsidiaire,
Si la cour devait à titre subsidiaire, juger que le licenciement pour motif économique de M. [C] est sans cause réelle et sérieuse ou bien que la société DIAMANT GRAPHIC a mal appliqué les critère d'ordre de licenciement, il sera en tout état de cause jugé que la demande de dommages et intérêts de M. [C] est excessive et la cour réduira son montant par une plus juste appréciation ;
En tout état de cause, condamner M. [C] à verser à Maître [Z] [H], en qualité de mandataire liquidateur de la SAS DIAMANT GRAPHIC, 2.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Et le condamner aux entiers dépens de l'instance.
L'AGS demande à la cour qu'il lui soit donné acte de ce qu'elle s'associe aux explications de Maître [H], mandataire liquidateur de la SAS DIAMANT GRAPHIC, sur le bien-fondé du licenciement de M. [C].
A titre principal, l'AGS sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a débouté M. [C] de ses demandes,
A titre subsidiaire, au visa de l'article L.1235-3 du code du travail, l'AGS demande à la cour de réduire à de plus justes proportions le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
En tout état de cause juger que l'AGS ne garantit pas l'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et que le plafond de garantie applicable est le plafond 6,
Condamner M. [C] aux entiers dépens.
SUR CE LA COUR :
Sur la jonction :
L'appel sur le même jugement ayant été enrôlé sous deux n° de répertoire général distincts, il convient dans l'intérêt de l'administration d'une bonne justice d'en ordonner la jonction.
Sur le licenciement :
M. [C] fait valoir que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse au motif que la société n'a pas respecté l'obligation de reclassement ; il indique que le plan de cession prévoyait la suppression de 16 postes ; il estime que la société n'a pas respecté les dispositions de l'accord collectif du 24 mars 1970 clauses et notamment ses articles 12 et 19 qui imposent à l'employeur d'une part de rechercher aussi un reclassement à l'extérieur de l'entreprise, en particulier dans les industries graphiques et d'autre part lorsque le reclassement en interne n'aura pas été possible, de soumettre le problème aux instances départementales, régionales ou nationale de l'emploi .
M. [C] fait valoir que cette information des instances de l'emploi n'a pas été faite et que la société DIAMANT GRAPHIC ne s'est pas acquittée loyalement de son obligation de reclassement ne n'interrogeant qu'une entreprise extérieure et en se contentant d'adresser des lettres au contenu identique pour demander si un poste était disponible sans préciser les caractéristiques de l'emploi occupé par M.[C] ni sa qualification.
Le mandataire liquidateur justifie de ce que la société a écrit à la commission paritaire nationale de l'emploi, de ce que celle-ci a répondu qu'elle solliciterait les entreprises de la région actuellement à la recherche de collaborateurs et que pour toute proposition ces entreprises la contacteraient directement. (Pièce 12)
Mais même si l'administrateur judiciaire a reçu une réponse de la commission paritaire nationale de l'emploi de l'imprimerie et des industries graphiques, il reste qu'il ne justifie pas avoir informé la commission départementale ni régionale.
Surtout l'administrateur de la société DIAMANT GRAPHIC dans le cadre de la recherche de reclassement s'est contenté d'adresser le 11 février 2014 à cinq entreprises du groupe ou extérieures une lettre type qui communique la liste des postes que l'entreprise est contrainte de supprimer dans les différentes catégories mais à ce courrier n'est joint aucun curriculum vitae et le courrier lui même ne contient aucune indication personnalisée sur les parcours, l'expérience et les compétences des personnes à reclasser, de telle sorte que l'entreprise destinataire n'est pas mise en situation de faire des propositions utiles ; ces cinq courriers identiques sont tout à fait insuffisants et ne sauraient être considérés comme une recherche sérieuse de reclassement au niveau local ni même régional, les cinq entreprises étant situées dans un périmètre géographique restreint à [Localité 6], [Localité 4] et [Localité 5] et les entreprise de ce secteur n'ayant pas été consultées en nombre suffisamment important.
Il en résulte que l'administrateur judiciaire représentant la société n'a pas rempli son obligation de reclassement et que le licenciement doit être qualifié de sans cause réelle et sérieuse.
Au vu de l'ancienneté de M. [C] de 13 ans, des vicissitudes de sa carrière au sein de l'entreprise où il a été rétrogradé pour cause économique, de son âge de 44 ans et du fait qu'il n'a pas retrouvé d'emploi, il convient de faire droit à sa demande principale de 30.000 € ; s'agissant d'une créance correspondant à des dommages et intérêts, il n'y a pas lieu à remise de feuille de paye ni à cotisations, la demande de remise d'un bulletin de salaire est donc rejetée.
La demande principale ayant été satisfaite, il n'ya pas lieu à examen de la demande subsidiaire.
Sur la garantie de l'AGS
Au vu des motifs précédents, il convient de rappeler que la garantie de l'AGS est limitée au plafond 6.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
La société représentée par son mandataire liquidateur succombant en appel, elle est déboutée de sa demande formée au titre des frais irrépétibles et les dépens sont mis à la charge de la liquidation.
Par ces motifs :
Infirme en toutes ses dispositions le jugement du conseil de prud'hommes de Longjumeau du 20 janvier 2015,
Statuant à nouveau :
Prononce la jonction des dossiers enrôlés sous les n° de RG 15/04663 et 13/04682,
Dit que la société SA DIAMANT GRAPHIC représentée par son mandataire liquidateur n'a pas rempli loyalement son obligation de reclassement,
En conséquence fixe au passif de la société DIAMANT GRAPHIC la somme de 30.000 € au profit de M. [I] [C] de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Dit que l'AGS de [Localité 2] doit sa garantie, en application des articles L. 3253-6, L.3253-8, L.3253-17 et L.3253-18 dans la limite du plafond 6.
Rejette toute autre demande.
Dit que les dépens seront pris en frais privilégiés de liquidation.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT