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18/02/2016 | FRANCE | N°15/05959

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 5, 18 février 2016, 15/05959


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5



ARRÊT DU 18 Février 2016

(n° , 4 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/05959



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 28 Mai 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY - Section encadrement - RG n° 13/00199





APPELANTE

SASU CASTORAMA FRANCE

[Adresse 1]

[Adresse 1]

N° SIRET : 451 678 973 00012

représentée

par M. [I] [M] (Contrôleur gestion magasin)

assisté par Me Etienne DE VILLEPIN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,





INTIME

Monsieur [Z] [B]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

né le...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5

ARRÊT DU 18 Février 2016

(n° , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/05959

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 28 Mai 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY - Section encadrement - RG n° 13/00199

APPELANTE

SASU CASTORAMA FRANCE

[Adresse 1]

[Adresse 1]

N° SIRET : 451 678 973 00012

représentée par M. [I] [M] (Contrôleur gestion magasin)

assisté par Me Etienne DE VILLEPIN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

INTIME

Monsieur [Z] [B]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

né le [Date naissance 1] 1971 à [Localité 1]

comparant en personne,

assisté par Me Stéphanie LAMY, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 372

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 Décembre 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Bernard BRETON, Présidente, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de:

Madame Marie-Bernard BRETON, Présidente

Madame Anne-Marie GRIVEL, Conseillère

Madame Marie-Liesse GUINAMANT, Vice-Présidente placée

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Laura CLERC-BRETON, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- signé par Madame Marie-Bernard BRETON, Présidente et par Madame Laura CLERC-BRETON, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

[Z] [B] a été embauché par la société Castorama en qualité de chef de secteur selon contrat de travail à durée indéterminée du 1er février 2010 ; licencié pour cause réelle et sérieuse par lettre du 21 septembre 2012 il a saisi le conseil de prud'hommes de Bobigny en réclamant le paiement de sommes diverses au titre, tant de l'exécution que de la rupture du contrat de travail.

Vu le jugement rendu le 28 mai 2015 par le conseil de prud'hommes qui a condamné la société Castorama à verser à [Z] [B] les sommes de :

- 27 500, 00 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail

- 1 500, 00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, en ordonnant la remise des documents sociaux et en ordonnant le remboursement des indemnités de chômage versées à [Z] [B] par pôle emploi.

Vu l'appel formé par la société Castorama contre ce jugement.

Vu les conclusions du 4 décembre 2015 auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé complet des prétentions et des moyens, reprises oralement à l'audience, sans ajout ni retrait, par l'appelante qui demande à la cour de débouter [Z] [B] de ses demandes et de le condamner à lui payer 2 000, 00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu les conclusions du 4 décembre 2015 auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé complet des prétentions et des moyens, reprises oralement à l'audience, sans ajout ni retrait, par [Z] [B] qui demande à la cour, en confirmant le jugement sur la rupture du contrat de travail et l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, de condamner la société Castorama à lui payer 54 683, 16 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail, 10 000, 00 euros à titre de dommages et intérêts pour violation du droit individuel à la formation , 3 000, 00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile , d'assortir la remise de documents d'une astreinte et d'ordonner la capitalisation des sommes dues conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil en condamnant la société Castorama aux dépens de première instance et d'appel.

SUR QUOI

LA COUR

Sur la rupture du contrat de travail,

Il résulte de l'article L. 1232-1 du code du travail que le licenciement doit être motivé et qu'il est justifié par une cause réelle et sérieuse, et de l'article L. 1235-1 du même code que le juge forme sa conviction, quant au caractère réel et sérieux des motifs invoqués au vu des éléments fournis par les parties ; s'il subsiste un doute, il profite au salarié.

Aux termes de la lettre de licenciement qui fixent les limites du litige la société Castorama reproche à [Z] [B] d'avoir abusé de sa position au sein de l'équipe d'encadrement du magasin et plus précisément d'avoir :

- exercé des pressions sur les hôtesses de caisse pour les pousser à transgresser les procédures d'encaissement,

- pratiqué de la ségrégation entre elles,

- sollicité des agents de contrôle des avances de paiement pour des clients,

- sollicité des agents d'accueil des avoirs en dehors de la procédure prévue,

- détourné au profit d'une personne qui lui était proche, la pratique des cartes satisfaction

- fait procéder à des livraisons gratuites sans autorisation

- de ne pas avoir préservé suffisamment les hôtesses de caisse des comportements agressifs des clients

Au soutien de ces griefs la société Castorama produit un rapport de dysfonctionnement émanant de monsieur [P], chef de secteur caisse accueil services, en date du 13 août 2012 qui après avoir relevé la présence régulière et constante de [Z] [B] à la caisse principale du bâti, fait état des faits rapportés par les hôtesses ; pressions régulières de celui-ci sur leurs encaissements - écart entre les produits facturés et les produits présents dans le véhicule du client - manque de protection face à l'agressivité de certains clients - ségrégation entre les hôtesses de caisse en fonction de leur âge - paiement pour le compte de certains clients -encaissement de chèques sans pièces d'identité - livraison sans passer par le magasin - livraisons non facturées - tentatives répétées pour faire éditer des avoirs au profit d'un client ; ce rapport se trouve complété par un rapport de cinq entretiens auxquels monsieur [P] a procédé auprès des collaborateurs immédiats de [Z] [B] et qui confirment les mentions du précédent rapport.

[Z] [B], qui ne conteste pas la matérialité des pratiques qui lui sont reprochées, dénonce une volonté de remettre ces pratiques en cause de la part de l'employeur alors qu'il les avait jusque là admises ; il verse à cette fin une attestation de monsieur [J] qui mentionne que [Z] [B] ne pouvait pas faire pression sur les agents de sécurité qui était très surveillés et souligne que les pratiques reprochées à [Z] [B], s'agissant des livraisons gratuites, des chèques de garantie et des bons d'achat, étaient d'usage dans l'entreprise.

Il produit également une attestation de monsieur [T] , prestataire de services qui a travaillé souvent avec la société Castorama et qui atteste du sérieux des contrôles de sortie des marchandises en précisant que les agents de contrôles faisaient des exceptions pour des clients fidèles.

Il produit encore trois attestations qui confirment les pratiques de [Z] [B] quant aux cartes satisfaction, aux retour de livraisons et d'une façon générale quant aux facilités qu'offrait le chef du secteur pour faciliter les ventes en indiquant que ces pratiques sont validées par la direction.

La cour relève qu'il est établi par les attestations des hôtesses de caisse, sans qu'aucune des attestations versées par le salarié n'apporte la preuve contraire, qu'usant du lien hiérarchique qui existait entre eux, [Z] [B] a exercé des pressions sur elles pour contourner les procédures d'encaissement, que s'agissant des procédure de contrôle les attestations ci dessus, versées par [Z] [B] lui-même, démontrent qu'il s'arrangeait avec les agents de sécurité pour modifier le cours des contrôles de sortie des marchandises et pour mettre en place des paiements différés, de façon discrétionnaire, pour avantager certains clients ;

S'agissant d'influencer les salariés qui travaillaient sous sa direction pour les contraindre à alléger les contrôles et modifier les circuits d'encaissement, il apparaît que les pratiques développées par [Z] [B] constituaient un détournement de l'autorité qui lui était confiée au profit de pratiques commerciales dont il ne démontre pas qu'elles étaient autorisées par sa direction.

S'agissant de l'utilisation de la carte satisfaction [Z] [B] reconnaît avoir commandé des livraisons de marchandises auprès d'une entreprise qui travaillait pour sa mère sous son nom et avoir ainsi fait bénéficier un tiers des avantages réservés aux membres du personnel ; que de ce fait le grief consistant à avoir abuser de sa fonction est constitué.

S'agissant de l'utilisation de la carte 'perso', [Z] [B] qui n'est pas en mesure de démontrer que l'achat effectué sur sa carte alors que le nom du bénéficiaire ne figure pas sur la facture l'était pour son compte personnel ; qu'il y a là aussi un usage abusif de l'autorité que lui confèrent ses fonctions au sein de l'entreprise.

D'où il suit que le licenciement fondé sur de tels manquements repose sur une cause réelle et sérieuse ; la demande de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail Présentée par [Z] [B] doit en conséquence être rejetée.

Sur le manquement à l'obligation de formation,

[Z] [B] reproche à la société Castorama ne pas avoir assuré son obligation de formation conformément à l'article L. 6312-1 du code du travail.

Il résulte des articles L. 6321-1 et suivants du code du travail que l'employeur est débiteur envers le salarié d'une obligation de formation qui lui permette de maintenir ses capacités à occuper son poste et de s'adapter aux évolutions technologiques et organisationnelles ; interpellé sur le respect de cette obligation la société Castorama ne rapporte au débat aucun élément justifiant des formations dont a bénéficié le salarié depuis le 1er février 2010 ; ce manquement a occasionné pour [Z] [B] un préjudice caractérisé par les difficultés qu'il a à justifier de son niveau de compétence auprès de ses futurs employeurs et qui sera intégralement réparé par l'allocation de la somme de 2 000, 00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La présente décision ne rend pas nécessaire la remise de documents sociaux rectifiés.

La solution donnée au litige conduit à laisser à chaque partie la charge de ses dépens et à rejeter les demandes en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à la disposition des parties au greffe

INFIRME le jugement en toutes ses dispositions,

statuant de nouveau :

REJETTE la demande de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail,

CONDAMNE la société Castorama à payer à [Z] [B] la somme de 2 000, 00 euros, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de formation,

REJETTE la demande de remise de documents,

ORDONNE la capitalisation des sommes dues conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil.

LAISSE à chaque partie la charge de ses dépens de première instance et d'appel,

REJETTE les demandes en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 15/05959
Date de la décision : 18/02/2016

Références :

Cour d'appel de Paris K5, arrêt n°15/05959 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-02-18;15.05959 ?
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