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10/02/2016 | FRANCE | N°14/04827

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 1, 10 février 2016, 14/04827


Notification par LRAR aux parties le :



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS









COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 1



ORDONNANCE DU 10 FEVRIER 2016



(n° 033/2016 , 12 pages)







Numéro d'inscription au répertoire général : 14/04827



Décision déférée : Ordonnance rendue le 11 Février 2014 par le Juge des libertés et de la détention du Tribunal de Grande Instance de CRETEIL



Nature de la décision : Contradictoire



Nous, Philippe FUSARO, conseiller à la cour d'appel de PARIS, délégué par le Premier président de ladite cour pour exercer les attributions résultant de l'article 64 du code des douanes.



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Notification par LRAR aux parties le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 1

ORDONNANCE DU 10 FEVRIER 2016

(n° 033/2016 , 12 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/04827

Décision déférée : Ordonnance rendue le 11 Février 2014 par le Juge des libertés et de la détention du Tribunal de Grande Instance de CRETEIL

Nature de la décision : Contradictoire

Nous, Philippe FUSARO, conseiller à la cour d'appel de PARIS, délégué par le Premier président de ladite cour pour exercer les attributions résultant de l'article 64 du code des douanes.

assistée de Karine ABELKALON, greffier lors des débats et du prononcé de la décision par mise à disposition ;

Avons rendu l'ordonnance ci-après :

ENTRE :

Société TRACE SPORT,

prise en la personne de son représentant légal domiciliée ès qualités audit siège

[Adresse 3]

[Localité 1]

Monsieur [O] [X]

né le [Date naissance 1] 1965 à [Localité 5]

[Adresse 2]

[Localité 2]

Madame [H] [J]

née le [Date naissance 2] 1959 à [Localité 6]

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représentés et ayant pour avocat plaidant Me Xavier JAUZE de la SCP ATTIAS JAUZE, avocat au barreau de PARIS, toque P0085

Appelants

ET

DIRECTION NATIONALE DU RENSEIGNEMENT ET DES ENQUÊTES DOUANIÈRES

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Mme [Q] [Y], inspecteur des douanes, en vertu d'un pouvoir spécial en date du 07 décembre 2015.

Intimée

***

Et après avoir entendu publiquement, à notre audience du 09 décembre 2015, le conseil des appelants et la représentante de la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières, les débats ayant été clôturés avec l'indication que l'affaire était mise en délibéré au 03 Février 2016 pour mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

***

Le Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal de grande instance de Créteil, en application des dispositions de l'article 64 du code des douanes a, par ordonnance du 11 février 2014, autorisé des opérations de visites domiciliaires dans les locaux de la société TRACE SPORT, situés [Adresse 3], au domicile de M. [O] [X], Président de ladite société, situé au [Adresse 2], au box de stockage loué au nom de Mme [H] [J], compagne de M.[X], et situé [Adresse 4], d'un véhicule de M.[O] [X], immatriculé [Immatriculation 1] et d'un véhicule loué au nom de la société TRACE SPORT, immatriculé [Immatriculation 2]

Cette ordonnance s'est fondée sur une requête de la Direction Nationale du Renseignement et des Enquêtes Douanières (ci après DNRED) présentée le 7 février 2014 selon laquelle la société TRACE SPORT et M. [O] [X], son représentant légal, seraient susceptibles de se livrer à des fausses déclarations sur l'origine des bicyclettes importées dans l'Union Européenne à l'aide de faux documents et/ou de documents inapplicables afin d'éluder le paiement de droits de douane et de droits antidumping.

FAITS ET PROCÉDURE -

Il ressort du dossier de la procédure qu'en matière douanière, l'Union européenne a conclu des accords avec des pays afin d'atténuer les droits de douane à acquitter dans le cadre des opérations d'importation de marchandises en provenance de ces pays.

Il ressort notamment des règlementations applicables suivantes :

règlement d'exécution (UE) n°990/2011 du Conseil du 3 octobre 2011 a institué un droit antidumping définitif sur les importations de bicyclettes originanires de la République populaire de Chine à l'issue d'un réexamen au titre de l'expiration des mesures effectuées en vertu de l'article 11, paragraphe 2 du règlement (CE) n°1225/2009 ;

règlement d'exécution (UE) n°501/2013 du Conseil du 29 mai 2013 portant extension du droit antidumping définitif institué par le règlement d'exécution (UE) n°990/2011 sur les importations de bicyclettes originaires de la République populaire de Chine aux importations de bicyclettes expédiées d'Indonésie, de Malaisie, du Sri Lanka et de Tunisie, qu'elles aient ou non été déclarées originaires de ces pays ;

règlement n°2913/92 du Conseil du 12 octobre 1992 a établi le code des douanes communautaire (JO L302 du 19/10/1992) plus spécifiquement les articles 20 à 27 relatifs à l'origine des marchandiese repris sous les articles 33 à 39 du code des douanes communautaire modernisé (règlement n°450/2008 du Parlement et du Conseil du 23 avril 2008) ;

règlement n°2454/93 de la Commission du 2 juillet 1993 fixe certaines dispositions d'application du code des douanes communautaire (JO L253 du 19/10/1992)plus présicément les articles 35 à 123 relatifs à l'origine des marchandises et que le règlement n°1063/2010 (applicable depuis le 01/01/2011) de la Commission du 18 novembre 2010 porte modification du règlement (CEE) n°2454/93 fixant certaines dispositions d'application du règlement (CEE) n°2013/92 du Conseil établissant le code des douanes communautaire ;

règlement d'exécution (UE) n°501/2013 du Conseil du 29/05/2013 met en 'uvre un droit antidumping définitif de 48,5% aux exportations de bicyclettes effectuées vers l'Union Européenne ;

et les articles 97 vicies et 97 unvicies en application des dispostions du code des douanes communautaire visées ci-dessus qui posent les règles applicables en matière de contrôle a posteriori des certificats d'origine FORM A.

***

La requête de la DNRED qui a sollicité l'autorisation de mise en 'uvre du droit de visite et de saisie prévu à l'article 64 du code des douanes, a fait état des éléments suivants :

La socie'te' TRACE SPORT a de'douane', en France, pre's d'un million cinq cent mille euros (l.500.000 euros) de bicyclettes de'clare'es originaires du Sri Lanka, entre 2010 et 2013, selon les statistiques douanie'res. Des importations de bicyclettes de'clare'es originaires du Sri Lanka ont e'te', par ailleurs, effectue'es par la socie'te' TRACE SPORT en Belgique et aux Pays-Bas pour un montant d'environ quarante millions quatre cent mille euros (40.400.000 euros) sur la pe'riode 2008 a' 2013.

Les bicyclettes achete'es par la socie'te' TRACE SPORT aupre's d'agents situe's pour la plupart a' [Localité 4] proviennent de l'usine sri lankaise CREATIVE CYCLES PVT puis a' partir du mois d'octobre 2012 de l'usine sri lankaise KELANI CYCLES PVT. Ces bicyclettes ont e'te' de'douane'es avec une origine pre'fe'rentielle sri lankaise sous couvert de certificats d'origine Form A permettant ainsi d'acquitter un droit de douane re'duit de 0 % avant 2009 puis de 10,5 % au lieu de 15 %.

Une mission communautaire d'enquêteurs de l'Office europe'en de Lutte anti- fraude (ci-après OLAF) a eu lieu au cours des mois de mai et octobre 2011 au Sri Lanka au sein de la socie'te' CREATIVE CYCLES PVT, en accord et avec l'appui des autorite's sri lankaises, afin de ve'rifier l'origine des bicyclettes exporte'es a' destination de l'Union Europe'enne.

Elle a permis d'obtenir des e'le'ments de preuves quant a' l'existence d'une fausse de'claration d'origine pre'fe'rentielle.

Au vu des investigations mene'es au sein de l'usine par l'OLAF et des e'le'ments transmis aux E'tats membres suite a' ces investigations, il apparaîtrait que l'obligation de transformation suffisante, telle que pre'vue par les re'gles de liste reprises a' l'Annexe 15 puis a' l'Annexe 13 bis des dispositions d'app1ication du Code des Douanes Communautaire, a' savoir que la valeur des pie'ces de'tache'es utilise'es pour la fabrication des bicyclettes d'une origine autre que sri lankaise ne doit pas exce'der 40 % du prix de'part usine des bicyclettes, pourcentage passant a' 50 % a' partir du 01/01/2011, n'a pas e'te' respecte'e par la socie'te' CREATIVE CYCLES PVT.

Les enquêteurs ont constate' la pre'sence de pie'ces de bicyclettes, a' forte valeur ajoute'e, majoritairement d'origine chinoises (jantes, cadres peints, fourches et fourches suspendues). Des factures commerciales a' en-tête des socie'te's chinoises CIXI DOUYU IMP & EXP et CHINA NINGBO CIXI attestent l'importations de ces pie'ces par la socie'te' CREATIVE CYCLES PVT, alors même qu'elle de'clare acheter celles-ci uniquement aupre's d'un fournisseur local lie' juridiquement, la socie'te' GREAT CYCLES PVT.

Les socie'te's CREATIVE CYCLES PVT et GREAT CYCLES PVT n'ont pas e'te' en mesure de de'montrer la re'alite' des coûts lors de la mission communautaire au Sri Lanka. L'OLAF constate l'absence de preuves e'videntes et satisfaisantes fournies par les deux socie'te's contrôle'es concernant la fabrication et les ope'rations d'assemblage re'alise'es pour chaque mode'le de bicyclettes exporte' en UE; l'absence de documents approprie's prouvant l'origine des bicyclettes fournies en UE a' l'appui de certificats d'origine Form A et l'absence d'informations suffisantes pour de'terminer l'origine pre'fe'rentielle Sri Lanka des bicyclettes exporte'es en UE. Les deux socie'te's sri lankaises n'ont donc jamais e'te' en mesure de prouver que les bicyclettes exporte'es en Europe, et en particulier en France, respectent les re'gles de l'origine pre'fe'rentielle.

En conse'quence, l'OLAF aurait relevé que la socie'te' CREATIVE CYCLES PVT, en tant qu'exportateur, n'a pas respecte' les obligations qui lui incombent dans le cadre de la re'glementation sur le Syste'me de Pre'fe'rences Ge'ne'ralise'es (SPG).

Enfin, dans le cadre de cette enquête, Monsieur [I], directeur ge'ne'ral de la socie'te' CREATIVE CYCLES PVT, e'voque l'absence de relation directe avec les importateurs europe'ens. Or, la socie'te' TRACE SPORT, en tant qu'importateur français, a bien eu des relations directes avec la socie'te' CREATIVE CYCLES PVT. M. [I] de'clare, en effet, que M. [O] [X] a eu le rôle de conseil aupre's de sa socie'te' en matie're de production des bicyclettes.

Par ailleurs, d'autres investigations mene'es par la Commission Europe'enne ayant pour objet d'e'tablir un e'ventuel contournement des mesures antidumping institue'es sur les importations de bicyclettes originaire de Chine, a' travers notamment le Sri Lanka, a abouti, par le re'glement d'exe'cution (UE) n°501/2013 du Conseil du 29/05/2013 a' mettre en oeuvre un droit antidumping de'finitif de 48,5 % aux exportations de bicyclettes effectue'es vers l'Union Europe'enne par la socie'te' KELANI CYCLES PVT, autre fournisseur de la socie'te' TRACE SPORT.

L'enquête pour l'instauration de ces droits antidumping s'est de'roule'e du mois de septembre 2012 au mois de mai 2013.

A partir d'octobre 2012, la socie'te' TRACE SPORT a effectue' des achats de bicyclettes, par l'interme'diaire d'agents situe's en Chine, aupre's de ce fournisseur. Suite a' la mise en place de ces mesures de droits anti-dumping en juin 2013, la socie'te' TRACE SPORT a interrompu ses importations en provenance de KELANI CYCLES PVT.

Par ailleurs, l'enquête mene'e en France au sein de la socie'te' TRACE SPORT a mis en e'vidence des incohe'rences dans les documents douaniers d'importation quant a' l'origine de'clare'e au sein de l'Union Europe'enne. En effet, quatre importations de bicyclettes originaires du Sri Lanka effectue'es par la socie'te' Alliance Bikes Sp. z o.o (situe'e en Pologne) ont e'te' re'gle'es par la socie'te' TRACE SPORT via le cre'dit documentaire n° D349366 ouvert fin 2009 aupre's de la Banque Populaire Rives de Paris. Trois packing-list ainsi que des attestations d'envoi de certificat d'origine Form A par DHL a' la socie'te' TRACE SPORT, repris dans ce cre'dit documentaire, sont libelle'es au nom de la socie'te' chinoise CIXI DOUYOU IMP. & EXP. Concemant ces incohe'rences entre des documents indiquant une origine sri lankaise (Form A) et d'autres semblant attester d'une origine chinoise (packing-list), M. [O] [X] n'a fourni aucune explication au service.

La DNRED en déduirait que ces documents laissent donc supposer un contournement possible des droits anti-dumping sur les bicyclettes chinoises en leur confe'rant l'origine Sri Lanka.

D'autre part, la grossie'rete' de certaines signatures reprises sur les factures d'achat de bicyclettes originaires du Sri Lanka font douter de l'authenticite' de ces documents commerciaux a' en-tête des agents hongkongais WORLDTEC CYCLES INDUS LTD et CHINA WISE DEVELOPMENT LIMITED. Interroge' sur ce point, M. [O] [X] estimait qu'il ne s'agit pas d'e'le'ments importants, e'ludant les questions pose'es par les enquêteurs. Par ailleurs, les tampons de ces mêmes socie'te's sembleraient avoir e'te' scanne's puis appose's sur certaines de ces factures commerciales.

In fine, la DNRED estimait qu'il existait des présomptions selon lesquelles la socie'te' TRACE SPORT aurait re'alisé de fausses factures ayant servi au de'douanement des bicyclettes de'clare'es originaires du Sri Lanka importe'es au sein de l'Union Europe'enne afin de masquer une fraude douanie're en matie're de valeur et d'origine des marchandises et présentait une requête au juge des libertés et de la détention de Créteil.

Le juge des libertés et de la détention de Créteil a délivré une commission rogatoire au juge des libertés et de la détention de Paris, lequel a pris une ordonnance sur le même fondement le 12 février 2014.

Les opérations de visites domiciliaires et les saisies ont été effectuées dans les locaux sus-mentionnés le 18 février 2014.

Le 28 février 2014, la société TRACE SPORT, Monsieur [X] et Madame [J] ont interjeté appel de cette ordonnance.

La société TRACE SPORT, Monsieur [X] et Madame [J] demandent notamment à la Cour d'annuler l'ordonnance de Monsieur le Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal de grande instance de Créteil du 11 février 2014 au motif que l'ordonnance n'a pas été motivée par le juge qui s'est contenté de signer un document préparé par le service des douanes et que les pièces qui auraient été produites à l'appui de la demande n'ont pu être consultées ni produites le 19 février 2014 au Conseil des demandeurs quand il s'est présenté au greffe du Juge des Libertés et de la détention de Créteil. Enfin, les demandeurs soulèvent la violation de l'Ordonnance de Villers-Côtterets d'août 1539 au motif que le rapport de l'OLAF est produit en langue anglaise et non traduit.

La Direction Nationale du Renseignement et des Enquêtes Douanières (DNRED) demande à la Cour de rejeter l'ensemble des demandes formulées par la société TRACE SPORT, Monsieur [X] et Madame [J].

Dans ses dernières conclusions n° 3 déposées le 3 décembre 2015, la société TRACE SPORT, Monsieur [X] et Madame [J] font valoir :

I. L'absence de pièces à l'appui de l'ordonnance au greffe du Juge des Libertés et de la détention le 19 février 2014

En premier lieu, les appelants font valoir que leur conseil s'est présenté le 19 février 2014 au greffe du juge des Libertés et de la détention pour avoir communication du dossier relatif à l'autorisation des visites domiciliaires telles que précisées dans l'ordonnance du 7 février 2014.

La greffière présente a tout d'abord opposé un refus en se fondant sur l'article 64 du code des douanes.

Les appelants indiquent qu'aucune disposition de l'article 64 du code des douanes ne justifie un tel refus.

De surcroît, le magistrat a rencontré le conseil des appelants et lui a indiqué que le dossier du greffe de la juridiction ne contenait plus de pièces annexes, ces dernières ayant été restituées avec l'ordonnance à l'Administration des douanes après la signature de l'autorisation.

Les appelants en déduisent que l'absence des pièces le 19 février 2014 ne permet pas de s'assurer de leur présence et examen par le Juge des Libertés et de la détention.

En réponse, la DNRED fait observer que le Conseil des appelants ne produit aucun document permettant de vérifier la véracité et le déroulement chronologique des différents entretiens qu'il a eu au greffe de Monsieur le JLD le 19 février 2014.

En outre, il ne saurait être reproché l'absence des pièces le lendemain de la signature de l'ordonnance.

II. La violation de l'article 64 du code des douanes

-Les appelants font valoir que cet article impose au juge de motiver personnellement l'ordonnance après un examen et /ou analyse en fait ou en droit.

En effet, selon les appelants, il appartient au juge de la liberté et de la détention de préciser quels sont les éléments précis et documents qui fondent sa décision. En se contentant pour justifier sa position d'une référence globale au document « CD pièce 9 » concernant le rapport de l'OLAF comprenant près de 2000 pages et de surcroit en anglais, le juge des libertés et de la détention, en l'absence de visa précis des documents et/ou pièces justifiant sa position, ne peut permettre à la défense d'exercer ses droits ni à la Cour de s'assurer du bien fondé des termes de l'ordonnance.

Les appelants concluent qu'il s'agit manifestement d'une ordonnance préparée par les agents des douanes et soumis pour signature au magistrat.

En outre, les appelants font valoir qu'aucun élément relatif au respect des modalités du contrôle a posteriori tel que prévu par les articles 97 vicies et 97 unvicies des dispositions d'application du code des douanes communautaire n'ont été produits au Juge des Libertés et de la détention.

En effet, selon les appelants, les douanes ne justifient dans leur requête d'aucune demande en application des articles 97 vicies et 97 unvicies des dispostions d'applications du code des douanes.

L'Administration des douanes ne justifie pas non plus d'une quelconque invalidation des certificats FORM A, documents produits en même temps que les déclarations d'importation pour attester de l'origine d'une marchandise, et délivrés par las autorités compétentes du Sri Lanka et produits lors des opérations de dédouanement par la société SAS TRACE SPORT, corollaire des demandes effectuées dans le cadre des articles 97 vicies et 97 unvicies des dispostions d'applications du code des douanes communautaires.

Cette absence de procédure obligatoire (contrôle a posteriori) n'a pas non plus été relevée par le juge des libertés et de la détention, alors qu'il est visé expressément les articles dont il est constaté le non respect.

Dans le cadre de ces obligations, les douanes auraient du s'assurer de la validité des documents produits.

A défaut d'invalidation et /ou d'annulation par la autorités Sri lankaises des certificats FORM A, l'origine déclarée ne peut être remise en cause.

Tel est le cas, en l'espèce.

En outre, l'absence de la justification du respect de ces textes prive de tout fondement le « rapport » qui aurait été produit au support de la requête.

En conséquence, selon les appelants, il ressort des termes de l'ordonnance et de ce qui précède que le juge des libertés et de la détention n'a pas satisfait, en violation de l'article 64 du code des douanes, à son obligation de vérification concrète, l'Ordonnance du 7 février 2014 reprenant dans des termes identiques, les éléments de la requête de l'Administration des douanes.

LA DNRED, à tous ces arguments avancés par les appelants, demande à la Cour de les rejeter.

En effet, elle rappelle que :

les appelants omettent d'indiquer que la requête mentionne les pages importantes du rapport de l'OLAF.

les forts doutes quant à la licéité des opérations d'importations effectuées par la société TRACE SPORT ne se basent pas uniquement sur le rapport de l'OLAF. Ils résultent également de l'enquête initiale diligentée contre la société TRACE SPORT, la découverte des incohérences dans les documents douaniers, le caractère plus qu'incertain de l'authenticité de certaines factures, l'absence de réponse de Monsieur [X] à certaines demandes de justification des enquêteurs.

Ces éléments de faits et de droit permettent de laisser présumer l'existence de la fraude

Enfin, l'éventuelle invalidation officielle des certificats d'origine suivant le mécanisme repris aux articles 97 vicies et 97 unvicies est un argument qui touche au fond même de ce contentieux, et qui est donc inopérant dans le cadre de cette procédure.

III. La violation de l'Ordonnance de Villers-Côtterets d'août 1539

De surcroit, les appelants demandent à la Cour de constater la violation de l'Ordonnance de Villers-Côtterets d'août 1539 qui impose une exigence obligatoire de traduction des documents en langue française.

Dans ces conditions, les appelants demandent à la Cour de prononcer l'annulation de l'Ordonnance et des procés-verbaux des visites domiciliaires qui en sont la conséquence directe et des actes subséquents.

LA DNRED rappelle que suivant une jurisprudence, il est précisé que cette ordonnance ne concerne que les actes de procédure et que le juge, à qui il appartient d'apprécier la force probante de l'ensemble des éléments qui lui sont soumis, peut estimer en avoir une connaissance suffisannte.

SUR CE,

I. L'absence de pièces à l'appui de l'ordonnance au greffe du Juge des Libertés et de la détention le 19 février 2014

Le juge des libertés et de la détention signataire de l'ordonnance et qui de ce fait se l'approprie en demandant des rectifications ou des modifications est amené à donner des consignes verbales à l'administration lorsque la requête est déposée à son greffe. En l'espèce, entre le dépôt de la requête (le 7 février 2014) et la signature de l'ordonnance (le 12 février 2014), il peut être amené à donner des instructions à la DNEF afin que celle-ci corrige la requête, au besoin se la faire transmettre par courriel afin que lui-même la modifie et se l'approprie (ou bien, s'il a en sa possession une copie numérisée de l'ordonnance la rectifie à sa guise). Il peut enfin, refuser de signer le projet d'ordonnance, déposé en version papier par simple commodité, par les agents des douanes, son rôle ne se limitant pas à une simple mission de chambre d'enregistrement.

Il est précisé que le juge des libertés et de la détention a eu quatre jours pour examiner ce dossier, qui en l'espèce était relativement mince (y compris avec les annexes), ce qui lui a laissé amplement le temps d'examiner la pertinence de la requête, d'étudier les pièces jointes à celle-ci, de vérifier les habilitations des agents des douanes et le jour de la signature, de demander aux agents de la DNEF toute information pertinente préalablement à la signature de son ordonnance.

Il s'est donc totalement approprié l'autorisation qu'il a délivrée.

Enfin, sur l'absence des annexes lors de la demande le 19 février 2014 au greffe du juge des libertés et de la détention, il ne peut en être déduit que le juge des libertés et de la détention ne les disposait pas lors de l'examen du dossier présenté, à savoir, entre le 7 et le 11 février 2014.

Ce moyen sera écarté.

II. La violation de l'article 64 du code des douanes

Les appelants font valoir que cet article impose au juge de motiver personnellement l'ordonnance après un examen et /ou analyse en fait ou en droit.

L'article 64 du code des douanes dispose :

1- 'Pour la recherche et la constation des délits douaniers visés aux articles 414 à 429 et 459, les agents des douanes habilités à cet effet par le Ministre chargé des douanes, peuvent procéder à des visites en tout lieu, même privés où les marchandises et documents se rapportant à ces délits ainsi que les biens et avoirs en provenant directement ou indirectement sont susceptibles d'être détenus ou d'être accessibles ou disponibles. Ils sont accompagnés d'un officier de police judiciaire (...).

2- 'Hormis le cas de flagrant délit, chaque visite doit être autorisée par une ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance du lieu de la direction des douanes dont dépend le service chargé de la procédure.

L'ordonnance comporte :

l'adresse des lieux à visiter ;

le nom et la qualité du fonctionnaire habilité qui a sollicité et obtenu l'autorisation de procéder aux opérations de visite ;

la mention de la faculté pour l'occupant des lieux ou son représentant, ainsi que l'auteur présumé des infractions mentionnées au 1, de faire appel à un conseil de son choix.

L'exercice de cette faculté n'entraîne pas la suspension des opérations de visite et de saisie.

Le juge motive sa décision par l'indication des éléments de fait et de droit qu'il retient et qui laissent présumer, en l'espèce, l'existence des agissements frauduleux dont la preuve est recherchée. Il se prononce par une mention expresse sur la saisie de biens et avoirs pouvant provenir directement ou indirectement des délits dont la preuve est recherchée (...).

Le juge doit vérifier de manière concrète que la demande d'autorisation qui lui est soumise est bien fondée ; cette demande doit comporter tous les éléments d'information en possession de l'administration de nature à justifier la visite.

Il désigne l'officier de police judiciaire chargé d'assister à ces opérations et de le tenir informé de leur déroulement.

La visite s'effectue sous le contrôle du juge qui l'a autorisée. Lorsqu'elle a lieu en dehors du ressort de son tribunal de grande instance, il délivre une commission rogatoire, pour exercer ce contrôle, au juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance dans le ressort duquel s'effectue la visite.

Le juge peut se rendre dans les locaux pendant l'intervention.

A tout moment, il peut décider la suspension ou l'arrêt de la visite.

L'ordonnance est exécutoire au seul vu de la minute.' (...).

S'il est mentionné ci-dessus que le juge des libertés doit vérifier de manière concrète que la demande d'autorisation qui lui est soumise est bien fondée et ce au regard de la requête présentée et de ses annexes, cet examen in concreto portant sur des présomptions d'agissements prohibés, résulte non seulement des conclusions traduites dans la requête du rapport de l'OLAF mais également, des investigations diligentées en amont par les services des douanes, citées dans la requête, et notamment, les réponses évasives ou l'absence de réponse sur des points précis de M. [X], de l'existence d'incohérence émanant des documents douaniers et sur le doute sur l'authenticité de certaines factures. Le juge des libertés et de la détention a en l'espèce, examiné le dossier selon la méthode dite 'du faisceau d'indices', a estimé in concreto, qu'il existait des présomptions d'agissements prohibés et a délivré une ordonnance, n'ayant nul besoin de justifier quel était l'élément ou les éléments qui ont détérminé sa décision. Il convient de préciser qu'en l'espèce, le compte rendu du rapport de l'OLAF n'était pas le seul élément visé dans la requête et ses annexes.

Le premier juge a donc régulièrement effectué son office.

S'agissant du non respect des modalités du contrôle a posteriori tels que prévues par les articles 97 vicies et 97 unvicies des dispositions d'application du code des douanes communautaire qui n'auraient pas été produites au juge des libertés et de la détention.

Il y a lieu de retenir qu'il s'agit d'un moyen qui relève du fond du dossier et non pas du contentieux des autorisations de visite et de saisies. Les appelants pourront utilement faire valoir le cas échéant ce moyen devant la juridiction de jugement.

Au stade de la phase de l'enquête préparatoire, le rôle du magistrat doit simplement se limiter à vérifier de manière concrète le dossier et à constater l'éventuelle existence de présomptions qui pourraient l'amener à délivrer une autorisation de visite et de saisies.

Ces moyens seront écartés.

III. La violation de l'Ordonnance de Villers-Côtterets d'août 1539

Il est demandé l'annulation de l'autorisation de visite et de saisies en date du 11 février 2014 eu égard à l'absence de traduction d'un rapport de 2 000 pages de l'OLAF produit en annexe sur support informatique.

Comme nous l'avons rappelé précédemment, le rapport de l'OLAF n'a pas été le seul élément et la pièce déterminante ayant conduit le juge des libertés et de la détention de Créteil de prendre sa décision.

Par ailleurs, la requête des services des douanes servant de fondement à l'autorisation délivrée a repris en langue française des éléments importants de ce rapport lequel compte tenu de son importance, ne concernait pas uniquemt la société TRACE SPORT.

Enfin, il appartenait au premier juge d'apprécier s'il disposait de suffisamment d'éléments lui permettant de retenir des présomptions d'agissements prohibés, étant précisé qu'à ce stade, aucune accusation n'est portée à l'encontre de la société TRACE SPORT et de son dirigeant. Le premier juge a estimé que la traduction complète des 2 000 pages du rapport de l'OLAF n'était pas indispensable pour sa prise de décision et d'autant plus qu'une synthèse concernant la société TRACE SPORT était rédigée en français dans la requête.

Ce moyen sera écarté.

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement, contradictoirement et sans frais.

Confirmons en toutes ses dispositions l'ordonnance du juge des libertés de la détention de Créteil en date du 11 février 2014

Rejetons toutes les autres demandes

Disons n'y avait lieu à une condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER

Karine ABELKALON

LE DÉLÉGUÉ DU PREMIER PRESIDENT

Philippe FUSARO


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 14/04827
Date de la décision : 10/02/2016

Références :

Cour d'appel de Paris I1, arrêt n°14/04827 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-02-10;14.04827 ?
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