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04/02/2016 | FRANCE | N°13/08670

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 5, 04 février 2016, 13/08670


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5



ARRÊT DU 04 Février 2016

(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/08670



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 25 Mars 2010 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 08/09475





APPELANT

Monsieur [J] [G]

[Adresse 3]

[Adresse 2]

[Localité 1]

né le [Date naissance 1] 1948 à [Localité 4]

compa

rant en personne, assisté de Me Eric ANDRES, avocat au barreau de LYON,

toque : 769







INTIMEE

Société ALLIANZ IARD anciennement dénommée AGF IART

[Adresse 1]

[Localité 2]

N° SIR...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5

ARRÊT DU 04 Février 2016

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/08670

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 25 Mars 2010 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 08/09475

APPELANT

Monsieur [J] [G]

[Adresse 3]

[Adresse 2]

[Localité 1]

né le [Date naissance 1] 1948 à [Localité 4]

comparant en personne, assisté de Me Eric ANDRES, avocat au barreau de LYON,

toque : 769

INTIMEE

Société ALLIANZ IARD anciennement dénommée AGF IART

[Adresse 1]

[Localité 2]

N° SIRET : 542 110 291 00011

représentée par Me Emmanuel DECHANCÉ, avocat au barreau de PARIS, toque : C2597

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 septembre 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées ,devant Madame Anne-Marie GRIVEL, Conseillère, chargée d'instruire l'affaire, ainsi que Madame Marie-Liesse GUINAMANT, Vice-Présidente placée .

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Bernard BRETON, Présidente

Madame Anne-Marie GRIVEL, Conseillère

Madame Marie-Liesse GUINAMANT, Vice-Présidente placée

qui en ont délibéré

Greffier : M. Franck TASSET, lors des débats

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- signé par Madame Marie-Bernard BRETON, Présidente et par M. Franck TASSET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE ET PRÉTENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES

M. [J] [G] a été engagé, par lettre du 5 juin 2000 à effet au 1er juillet suivant, par la société AGF IART, devenue ALLIANZ IARD, en qualité de directeur technique du département indemnisation, expatrié au Venezuela.

Par lettre recommandée en date du 25 février 2004, M. [G] a été licencié.

Le 10 mars 2004, un accord transactionnel a été conclu entre les parties.

Le 25 juillet 2008, M. [G] a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de dommages-intérêts au titre de l'exécution de son contrat de travail.

Par jugement en date du 25 mars 2010, le conseil de prud'hommes de [Localité 3] l'a débouté de l'ensemble de ses demandes.

Par un arrêt du 28 février 2012, la Cour d'appel de Paris a confirmé le jugement.

Par un arrêt en date du 19 juin 2013, la Cour de cassation a cassé et annulé l'arrêt en toutes ses dispositions.

A l'audience du 17 septembre 2015, M. [G] sollicite de la Cour qu'elle infirme le jugement entrepris et qu'elle condamne la société ALLIANZ IARD au paiement, avec intérêts au taux légal à compter du 27 juillet 2008, des sommes suivantes :

- 186 910 euros en réparation du préjudice résultant de l'absence de cotisations sur les avantages en nature et salaires locaux excédant le salaire de référence,

- 53 174 euros en réparation du préjudice résultant de l'insuffisance de cotisations de retraite complémentaire pendant la période de chômage du fait de l'attestation Assedic erronée,

- 53 041 euros en réparation du préjudice résultant de la minoration des prestations de chômage du fait de l'attestation Assedic erronée,

- 7 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

M. [G] soutient que la transaction du 10 mars 2004 ne portait que sur les conséquences du licenciement. S'agissant du préjudice relatif au cantonnement de la base des cotisations de retraite, il prétend que la société ALLIANZ IARD n'a pas exécuté le contrat de bonne foi dès lors, d'une part, qu'elle ne l'a pas informé avant son départ en expatriation de l'assiette des cotisations de retraite et, d'autre part, qu'elle l'a laissé croire par la lettre du 7 août 2000 que la détermination de l'assiette des cotisations était contractuelle, alors que des dispositions conventionnelles s'appliquaient, que contrairement à ce qu'elle prétend, la délibération D 5 de la commission paritaire de l'AGIRC, dans sa rédaction en vigueur à compter du 1er janvier 1996 relative à l'assiette des cotisations sociales, n'est pas applicable aux salariés des sociétés d'assurance dès lors qu'elle est contraire aux conventions spécifiques qui s'appliquent à eux, que le contrat d'expatriation que vise ladite délibération, postérieur à son départ au Venezuela, est contraire aux dispositions conventionnelles plus favorables et à l'ordre public absolu et qu'il a subi une discrimination par rapport aux salariés restés en France dont les cotisations ont été payées sur l'intégralité des rémunérations perçues. Très subsidiairement, il fait valoir que la délibération D5 se réfère à la base du salaire qui aurait été perçu en France pour les mêmes fonctions, et que la rémunération correspondante ne saurait être inférieure à 140 000 euros. S'agissant de l'indemnisation de la période de chômage du 12 septembre 2004 au 27 mars 2006, il soutient que l'attestation Assedic est erronée dès lors qu'en application de l'annexe IX au règlement annexé à la convention Assedic, il incombe à l'employeur de cotiser sur l'ensemble des rémunérations brutes plafonnées converties en euros, sauf accord de la majorité des salariés concernés, dont la société intimée ne justifie pas. Il ajoute enfin que la rédaction erronée de l'attestation Assedic a également entraîné l'insuffisance des cotisations de retraite pendant la période de chômage.

La société ALLIANZ IARD conclut :

- à titre principal, à l'irrecevabilité des demandes de M. [G],

- à titre subsidiaire, à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [G] de l'ensemble de ses demandes,

- à titre infiniment subsidiaire, à la limitation des dommages et intérêts,

- en tout état de cause, à la condamnation de M. [G] au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

La société ALLIANZ IARD oppose l'autorité attachée à la transaction intervenue le 10 mars 2004. Elle soutient par ailleurs que la base de cotisations est constituée par le salaire que M. [G] aurait dû percevoir en France, et non sur le salaire perçu et les avantages dont il a bénéficié au Venezuela. Elle conteste enfin le préjudice allégué par le salarié.

Le délibéré, qui avait été fixé au 5 novembre, a été prorogé au 21 janvier, puis au 4 février 2016, après l'acceptation d'une mesure de médiation par les parties ordonnée le 6 octobre 2015, laquelle n'a finalement pas abouti.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions visées par le greffier et développées lors de l'audience des débats.

SUR QUOI, LA COUR

Sur la recevabilité de la demande

Attendu que, selon les articles 2048 et 2049 du code civil, les transactions ne règlent que les différends qui s'y trouvent compris, si bien que la renonciation qui y est faite à tous droits, actions et prétentions ne s'entend que de ce qui est relatif au différend qui y a donné lieu, et l'autorité de la chose jugée qui y est attachée par application de l'article 2052 du même code ne s'applique qu'à cet objet ;

Attendu en l'espèce que l'exposé de la transaction du 10 mars 2004 démontre que la contestation de M. [G] ne portait que sur son licenciement, si bien que le salarié n'a pu renoncer « irrévocablement pour lui et ses ayant-droits à tout droit ou action qu'il pourrait tenir tant du droit commun que des dispositions de la convention collective ou de son contrat de travail » que pour ce qui concerne la rupture de son contrat de travail ; que la fin de non-recevoir soulevée par la société ALLIANZ IARD doit ainsi être rejetée ; que, par suite, le jugement entrepris, qui a déclaré irrecevables les demandes de M. [G], sera infirmé ;

Sur le bien-fondé de la demande

En ce qui concerne la demande de dommages et intérêts au titre des cotisations de retraite

Attendu, en premier lieu, qu'il résulte de l'article R. 320-5 du code du travail, alors applicable, interprété à la lumière de la directive n° 91/533/CEE du 14 octobre 1991, que l'employeur, tenu d'une obligation de bonne foi dans l'exécution du contrat de travail, doit informer le salarié expatrié, avant son départ, de sa situation au regard de la protection sociale pendant la durée de son expatriation ;

Attendu que contrairement à ce qu'il soutient, M. [G] a été informé avant son départ au Venezuela des conditions dans lesquelles il serait cotisé pour son compte aux divers organismes sociaux au titre des garanties retraite et chômage, par la lettre du 5 juin 2000, qu'il a retournée après l'avoir signée, approuvant même ainsi les conditions qu'elle fixait, à savoir que l'intéressé exercerait son activité au Venezuela, qu'il serait rémunéré sur une base annuelle brute de 430 000 francs et affilié à l'AGIRC par l'intermédiaire de l'UCREPPSA ; que si l'avenant du 7 août 2000 prévoit finalement des conditions plus avantageuses, son salaire net social et fiscal d'expatriation annuel étant porté à 496 279 francs payé localement, outre différents accessoires, il ne fait que confirmer le précédent accord s'agissant des cotisations patronales, dont l'employeur pouvait, sans manquer à une quelconque obligation de bonne foi, soumettre la base à un accord, en rappelant qu'elles seraient acquittées en France sur la base du salaire qu'il aurait perçu en France, soit 430 000 francs ;

Attendu, en deuxième lieu, que la délibération D 5, dans sa rédaction applicable après le 1er janvier 1996, prise en application de la convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947 (AGIRC), à laquelle renvoie la convention collective des sociétés d'assurances, précise que, pour les salariés dont l'activité s'exerce hors de France, les cotisations sont calculées sur la base du salaire qui aurait été perçu en France pour les fonctions correspondantes, éventuellement augmenté de tout ou partie des primes et avantages en nature, ainsi que prévu dans le contrat d'expatriation ; que la société ALLIANZ était tenue de faire bénéficier M. [G] desdites dispositions spécifiques aux cadres, qui ne sont pas défavorables aux salariés concernés dès lors que leur accord est requis ; qu'en signant et retournant à son employeur la lettre du 5 juin 2000 prévoyant des cotisations sociales calculées sur un salaire de 430 000 francs, M. [G] a donné son accord au cantonnement de la base des cotisations sociales au salaire de référence, accord qui ne saurait être contraire à l'ordre public absolu invoqué par le salarié dès lors qu'il est prévu par la convention susmentionnée ;

Attendu, en troisième lieu, que ledit cantonnement ne saurait constituer une discrimination, ni même une inégalité de traitement, dès lors que les salariés travaillant en France et les salariés travaillant à l'étranger ne sont pas dans une situation identique, ce qui a permis au demeurant à M. [G] de bénéficier d'avantages dont n'ont pas bénéficié les salariés restés en France ;

Attendu en quatrième et dernier lieu, que M. [G] n'établit nullement, notamment par des articles de journaux, que la base du salaire qui aurait été perçu en France pour des fonctions correspondantes serait supérieur à 430 000 francs, alors en outre qu'il était d'accord avec ce montant avant son départ au Venezuela ;

Attendu qu'il résulte de ce qui précède qu'il convient de rejeter la demande de M. [G] fondée sur le cantonnement des cotisations sociales au salaire de référence ;

Sur la demande de dommages et intérêts fondée sur le caractère erroné de l'attestation Assedic

Attendu qu'en application de l'article 55 de l'annexe IX au règlement annexé à la convention d'assurance-chômage du 1er janvier 2001, relative à l'aide au retour à l'emploi et à l'indemnisation du chômage, les cotisations des employeurs et des salariés sont assises sur l'ensemble des rémunérations brutes plafonnées converties en euros telles que définies à l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale sauf si, au moment de l'affiliation et à titre définitif, la majorité des salariés concernés ont décidé avec l'employeur de les acquitter sur la base de la rémunération qui serait versée pour des fonctions correspondantes exercées en France ; que ces dispositions reprennent celles prévues par l'article 8 de l'annexe IX au règlement annexé à la convention du 1er janvier 1997 ; qu'enfin, les deux annexes prévoient que les prestations de chômage sont calculées sur les rémunérations soumises à contributions ;

Attendu qu'il est constant qu'aucun accord n'a été conclu entre l'employeur et la majorité des salariés concernés ; que, par suite, la société ALLIANZ IARD aurait dû cotiser au titre de la garantie chômage sur l'ensemble des éléments de la rémunération de M. [G] ; que cette insuffisance de cotisations est à l'origine de la faute alléguée tenant à la rédaction erronée de l'attestation Assedic ; que, toutefois, le préjudice en résultant ne consiste que dans l'indemnisation minorée de sa période de chômage, et non dans l'insuffisance des cotisations de retraite pendant la période de chômage, l'Assedic ne pouvant être tenue à cotiser à ce titre sur la base d'un salaire plus important que celui servant de référence à l'employeur ;

Attendu que M. [G] produit un rapport évaluant son manque à gagner au titre de la minoration des indemnités de chômage à la somme, intégrant la revalorisation liée au retard de paiement, de 53 041 euros, non sérieusement contestée par la société ALLIANZ par la simple observation de ce que le montant aujourd'hui sollicité est plus important que le montant initialement demandé ; que, toutefois, ainsi que le fait remarquer à juste titre la société ALLIANZ, pour évaluer le préjudice de l'appelant, il convient de déduire de ce manque à gagner 10,1% au titre de la cotisation affectée au financement des retraites complémentaires, de la CSG et de la CRDS, outre 40 % au titre du taux marginal de l'impôt sur le revenu non contesté par le salarié qu'il aurait été amené à régler si ses indemnités de chômage avaient été majorées ; qu'ainsi, le préjudice de M. [G] s'élève à la somme de 28 355,72 euros, que la société ALLIANZ IARD sera condamnée à lui payer, avec intérêts au taux légal à compter de ce jour en application de l'article 1153-1 du code civil ;

Sur les dépens et les frais de procédure

Attendu que la société ALLIANZ IARD, partie perdante à l'instance, sera condamnée aux dépens ; que sa demande au titre des frais de procédure ne pourra être que rejetée ; qu'elle sera en outre condamnée à payer à M. [G] la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par arrêt contradictoire, mis à disposition des parties au greffe,

INFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

CONDAMNE la société ALLIANZ IARD à payer à M. [J] [G] la somme de 28 355, 72 euros à titre de dommages et intérêts, avec intérêts au taux légal à compter de ce jour ;

CONDAMNE la société ALLIANZ IARD à payer à M. [J] [G] la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société ALLIANZ IARD aux dépens de première instance et d'appel ;

REJETTE toute autre demande.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 13/08670
Date de la décision : 04/02/2016

Références :

Cour d'appel de Paris K5, arrêt n°13/08670 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-02-04;13.08670 ?
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