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28/01/2016 | FRANCE | N°13/04466

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 7, 28 janvier 2016, 13/04466


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7



ARRÊT DU 28 Janvier 2016

(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/04466



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 08 Février 2013 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 11/06541





APPELANTE

Madame [F] [X]

[Adresse 1]

[Localité 1]

comparante en personne, assistée de Me Stéphane FRIEDMANN, avocat au

barreau de PARIS, toque : P0425







INTIMEE

SAS GROUPE HELICE

[Adresse 2]

[Localité 2]

représentée par Me Arnaud CLERC, avocat au barreau de PARIS, toque : T10









COMPO...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7

ARRÊT DU 28 Janvier 2016

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/04466

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 08 Février 2013 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 11/06541

APPELANTE

Madame [F] [X]

[Adresse 1]

[Localité 1]

comparante en personne, assistée de Me Stéphane FRIEDMANN, avocat au barreau de PARIS, toque : P0425

INTIMEE

SAS GROUPE HELICE

[Adresse 2]

[Localité 2]

représentée par Me Arnaud CLERC, avocat au barreau de PARIS, toque : T10

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 Novembre 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Patrice LABEY, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Patrice LABEY, Président de chambre

Monsieur Rémy LE DONGE L'HENORET, Conseiller

M. Philippe MICHEL, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Chantal HUTEAU, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Patrice LABEY, Président, et par Madame Wafa SAHRAOUI, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Madame [F] [X] a été engagée par la société Groupe HELICE SAS à compter du 2 novembre 1999 par contrat à durée indéterminée en qualité de Directeur Administratif et Financier Adjoint.

Mme [X] a été convoquée à un entretien préalable à licenciement par courrier en date du 22 février 2011 et, après entretien préalable, s'est vue notifier son licenciement pour faute grave, par lettre du 16 mars 2011.

Contestant son licenciement, Mme [X] a saisi le conseil de prud'hommes le 22 avril 2011 pour présenter, dans le dernier état de la procédure, les chefs de demande suivants :

- Indemnité compensatrice de préavis 27 000,00 €

- Indemnité compensatrice de congés payés sur préavis 2 700,00 €

- Indemnité de licenciement conventionnelle 40 687,00 €

- Rappel de primes 2008 18 000,00 €

- Congés payés afférents 1 800,00 €

- Rappel de primes 2010 18 000,00 €

- Congés payés afférents 1 800,00 €

- Dommages et intérêts pour RTT non accordés 23 876,57 €

- Indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse 126 000,00 €

-Article 700 du Code de Procédure Civile 5 000,00 €

- Exécution provisoire

- Dépens.

Mme [X] est appelante du jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 8 février 2013 qui l'a déboutée de toutes ses demandes et l'a condamnée aux dépens.

Vu les écritures développées par Mme [X] à l'audience du 6 novembre 2015, au soutien de ses prétentions par lesquelles, elle demande à la cour de :

Condamner la Société GROUPE HELICEE à lui payer les sommes suivantes :

Indemnité compensatrice de préavis : 27.000,00 €

Congés payés afférents : 2.700,00 €

Indemnité conventionnelle de licenciement : 40.687,00 €

Rappel de primes sur l'année 2008 : 18.000,00 €

Congés payés afférents : 1.800,00 €

Rappel de primes sur l 'année 2010 : 18.000,00 €

Congés payés afférents : 1.800,00 €

Dommages et intérêts pour jours de RTT non accordés : 23.876,57 €

indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse : 126.000,00 €

Article 700 du CPC : 5.000,00 €

La condamner aux entiers dépens.

Vu les écritures développées par la société Groupe Hélice à l'audience du 6 novembre 2015, au soutien de ses prétentions par lesquelles, elle demande à la cour de :

CONFIRMER le jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes en toutes ses dispositions;

A titre subsidiaire, et en tout état de cause :

REDUIRE au maximum les demandes de dommages et intérêts sollicités par Mme [X] , qui a immédiatement retrouvé un emploi ;

DEBOUTER Mme [X] de l'intégralité de ses autres demandes ;

A titre subsidiaire :

CONDAMNER la société à un rappel de RTT pour un montant maximum de 5.692,31 € ; CONDAMNER Mme [X] aux entiers dépens ;

CONDAMNER Mme [X] à un article 700 de 3.000 €, conformément au Code de Procédure Civile.

Pour un exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour renvoie à leurs écritures visées par le greffe le 6 novembre 2015, auxquelles elles se sont référées et qu'elles ont soutenues oralement à l'audience.

MOTIFS DE L'ARRET

La lettre de licenciement, à laquelle il est expressément fait référence, qui fixe les limites du litige, lie les parties et le juge qui ne peut examiner d'autres griefs que ceux qu'elle énonce, est ainsi motivée :

'...Nous vous notifions notre décision de mettre un terme à nos relations de travail pour faute grave, motivée par les faits suivants :

Vous avez été embauchée le 04 octobre 1999 et vous occupez le poste de Directeur Administratif et Financier Adjoint avec le statut cadre. A ce titre, vos missions principales consistent, notamment, à assurer la coordination et la régulation des comptabilités, déceler les anomalies, suggérer et faire mettre en oeuvre des actions correctives, veiller au respect des législations, des règlements et à la protection des sociétés du groupe Hélice sur le plan juridique et de rendre compte à la Direction Générale.

Lors de son arrivée, le 04 janvier 2011, Monsieur [G] a engagé un audit général des comptes et de la situation financière des entreprises du groupe Hélice. Il a demandé au service comptable la balance générale des sociétés Hélice et Groupe Hélice. Il a ainsi pu découvrir l'existence d'une dette de TVA déductible afférent à l'exercice 2008, d'un montant total de 549K€ et dont le solde d'un montant de 377 K€ n'avait toujours pas été réglé,

Interrogée par la suite sur ce point, vous n'avez pu apporter que des explications tronquées aboutissant à dissimuler la situation exacte de ce dossier. Monsieur [G] a dû lui-même faire procéder à une déclaration modificative le 24 janvier 2011 auprès des services fiscaux afin de tenter de préserver vis-à-vis de l'administration notre réputation et les intérêts de la société.

Le même audit, déclenché par la nouvelle présidence, a permis de révéler un retard surprenant dans les déclarations de la TVA collectée sur l'exercice 2010 qui se chiffre à 1 471 K€ pour les sociétés Hélice et Groupe Hélice.

Ce constat a conduit Monsieur [G] à compléter la déclaration modificative d'un montant de 1471 K€ au titre de la TVA collectée.

Bien que la réaction de Monsieur [G] ait permis de réduire les risques de pénalités et de sanctions que votre attitude faisait courir à l'entreprise, votre gestion de la TVA, contraire aux règles les plus élémentaires, s'est traduite par une pénalité de 96 K€.

Cette situation est inadmissible, aux regards des missions pour lesquels vous aviez été embauchée.

Face à ces montants et pratiques vous avez été dans l'incapacité de fournir une explication crédible, et pour cause.

Par ailleurs, l'audit engagé a permis de révéler une surévaluation de la production immobilisée, calculée par vos soins, pour les exercices 2008 et 2009, respectivement d'un montant de 1 076 K€ et de 442 K€. Or, à aucun moment, vous n'avez alerté votre hiérarchie sur cette situation et pratique. Ce montant injustifié fait aujourd'hui l'objet d'un contrôle fiscal.

Il est également apparu, lors de cet audit, que le service comptable, placé directement sous votre responsabilité, fournissait à la Directrice Générale une enveloppe mensuelle d'argent en liquide d'un montant qui s'élevait, en 2010, à 2700 € pour les mois de Janvier à Octobre (à l'exception du mois de juillet dont le montant était de 1000 €). Cette enveloppe revenait ensuite au service comptable, vide d'argent en liquide, et assortie de justificatifs incomplets. Une partie de la somme était donc dépensée sans justificatifs : pour le seul exercice 2010, le montant total d'argent liquide dépensé sans justificatifs par la Directrice Générale s'élève à 15 090 €. Vous avez couvert de votre autorité cette pratique inacceptable, frauduleuse et préjudiciable à la société.

Enfin, lorsque Monsieur [G] a été contraint de faire des économies et de vendre le véhicule de fonction de la Directrice Générale, après que celle-ci ait quitté la société le 22 janvier 2011, il a naturellement demandé au service comptable la valeur nette comptable du véhicule en question. Il a alors découvert que la base d'amortissement du dit véhicule était minorée de 10 K€ par rapport à sa valeur d'acquisition. Une enquête immédiatement diligentée a permis de constater que ce procédé de sous-évaluation de la base d'amortissement était systématique pour tous les véhicules de société de 2005 à 2009. Ce procédé, établi sous votre autorité et votre responsabilité directe, a conduit à fausser les résultats financiers de la société.

L'ensemble de ces éléments factuels nous contraint à constater que, dans l'exercice de vos fonctions de Directeur Administratif et Financier Adjoint, vous avez non seulement abusivement transgressé, à plusieurs reprises et de façon régulière dans certains cas, les règles les plus élémentaires de la comptabilité et de la fiscalité que vous ne pouviez méconnaître compte tenu de votre niveau de formation et de votre expérience, mais vous avez également gravement enfreint vos obligations contractuelles.

Nous vous rappelons que vous deviez, notamment, déceler les anomalies, procéder à des alertes, faire mettre en 'uvre les actions correctives et veiller au respect des législations dans l'intérêt de la société. Or, en violant celles-ci, votre comportement a porté un grave préjudice au groupe Hélice qui, notamment par votre faute, se trouve exposé à des sanctions et à des contrôles dont vous aviez pour missions de le protéger.

Vous n'avez fourni aucune explication lors de notre entretien du 04 mars 2011. En conséquence, nous avons décidé de vous licencier pour faute grave.

Votre licenciement prend donc effet immédiatement dès première présentation de cette lettre...'.

Pour l'infirmation du jugement et un licenciement sans cause réelle et sérieuse, Mme [X] fait plaider que :

- elle exerçait ses fonctions sous la responsabilité de Mme [I] directeur général et directeur administratif et financier, licenciée pour faute grave le 20 janvier 2011.

- le grief tiré de la dette de TVA déductible et du retard dans les déclarations de TVA est prescrit de l'aveu même de l'employeur qui écrit avoir découvert les faits en novembre 2010, corroboré en cela par le rapport du commissaire aux comptes du 6 décembre 2010 et les autres pièces du dossier, étant précisé que la dette de TVA est afférente à l'exercice 2008. Ce grief ne lui est pas imputable, dans la mesure où au quotidien elle rendait compte à sa supérieure de ses missions, que M [M] président de la société était nécessairement informé de tous ces faits et qu'il n'est pas établi qu'elle a commis cette faute personnellement.

- les autres griefs sont prescrits et, en tout état de cause, inexistants ou ne lui sont pas imputables

- son licenciement procède de la volonté de M [G], directeur général de la société Groupe Helice nommé par Mme [M], de se débarrasser, comme d'autres directeurs, comme étant trop payée.

Pour la confirmation du jugement sur le licenciement, la société Groupe Helice fait valoir en substance que :

- toutes les fautes reprochées à Mme [X] sont prouvées et permanentes dans le temps, de sorte qu'elles ne sont pas prescrites et à aucun moment, elle n'a été loyale et n'a exécuté ses obligations contractuelles, qui lui imposent notamment d'alerter la Direction de toutes mesures frauduleuses au sein de sa Direction.

- alors même que Mme [X] avait parfaitement la possibilité d'informer telle ou telle personne des fraudes auxquelles elle participait et dont elle était l'organisatrice technique, elle a préféré poursuivre ces méthodes et se taire, afin de préserver ses avantages personnels.

- une telle attitude est tout simplement fautive et rend impossible la poursuite du contrat de travail au sein de l'entreprise.

En droit, il résulte des articles L.1234-1 et L.1234-9 du code du travail que, lorsque le licenciement est motivé par une faute grave, le salarié n'a droit ni à un préavis ni à une indemnité de licenciement ; que la faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée du préavis ; l'employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve ;

En l'espèce, il suit des pièces produites et des explications des parties que :

Le contrat de travail de Mme [X] lui impartit comme missions, notamment, de :

- Assurer la coordination et la régulation des comptabilités.

- Déceler les anomalies, suggérer et mettre en oeuvre des actions correctives.

- Veiller au respect des législations, des règlements et la protection des sociétés du GROUPE HELICE sur le plan juridique.

- Rendre compte à la Direction Générale,

et lui donne pour attributions, nottement de :

- Proposer toute amélioration des procédures comptables.

- Proposer des améliorations de gestion.

- Dans le cadre du contrôle de gestion : Mettre en place une comptabilité analytique d'exploitation, effectuer toutes les analyses de coût utiles à la DG.

En précisant que ce cadre est pleinement responsable de l'ensemble de ses attributions.

A la suite du décès de M [M] le 31 mai 2010, créateur de l'entreprise, sa fille [W] [M], qui n'était pas dans l'entreprise, a repris la société à partir du 4 juin 2010. Celle-ci s'est entourée d'une équipe de consultants extérieurs qui a procédé à un audit des comptes de la société.

Sur le grief tiré de la dette de TVA déductible et du retard dans les déclarations de TVA

Il est établi par les pièces versées au débat et les enquêtes menées à l'instigation de la nouvelle présidente de la société Groupe Helice, qu'il existait au sein de la Société un système de décalage de paiement de la TVA collectée à l'aide de déclarations de TVA inexactes ne comportant pas le paiement des factures pourtant encaissées, permettant ainsi à l'entreprise de bénéficier d'une trésorerie indue, pour régulariser ou tenter de régulariser la situation en fin d'exercice auprès de l'administration fiscale. Ainsi il existait un décalage de TVA à reverser à l'administration fiscale de 1.852.727 € en 2009. Dans son rapport du 6 décembre 2010, le commissaire aux comptes relève qu'au jour de son intervention le retard de TVA représente environ 2M€, qu'il avait constaté un décalage de 1,2M€ sur l'exercice précédent et que les contrôles font ressortir une insuffisance de versement de 2.010.645,83 € au 30 juin 2010.

Le moyen tiré de la prescription des faits reprochés n'est pas fondé dans la mesure où seul l'audit mené par des tiers à l'entreprise jusqu'à la fin décembre 2011, ainsi qu'il en est attesté par M [O] et M [V], a permis à l'employeur de prendre l'exacte mesure des faits de fraude à la TVA conduisant à une virtuelle cessation des paiements pour janvier 2011, la procédure de licenciement de Mme [X] étant engagée le 22 février 2011. Par ailleurs le défaut de paiement de la TVA qui en est résulté perdurait en janvier 2011, puisque Mme [X] a du alors négocier le 14 janvier une ligne de crédit de 400k€ auprès des banques et la société d'affacturage pour faire face à une TVA exigible de 1 808 908 €.

Mme [X] ne peut prétendre que M [M], président de la SAS Groupe Helice était nécessairement informé de ces pratiques frauduleuses et que même ces pratiques étaient convenues avec la direction, dont elle a suivi les instructions y compris celles de Mme [W] [M], voire décidées par M [M], dans la mesure où elle cite dans ses écritures d'appel un arrêt de la cour d'appel de Paris du 10 janvier 2013 qui, statuant dans le litige opposant Mme [I] directeur général et directeur administratif et financier à la société Groupe Helice, précise :

« Qu 'ainsi, il apparaît que les fonctions de DAF de Madame [I], loin de se distinguer de celles de Directeur Général, se confondaient avec celles-ci dans la mesure où elles étaient exercées par Madame [I] sans la moindre subordination effective à l'égard du Président de la Société Groupe HELICE.... ».

Par ailleurs, Mme [X] ne verse pas la moindre pièce de nature à établir qu'il lui était donné pour instruction de recourir à ces pratiques frauduleuses ou encore qu'elle aurait fait preuve de réticence à mettre en oeuvre de telles pratiques et avait alerté sur de telles pratiques, ce que lui permettait son niveau de qualification, à savoir DECF, DESCF, puis diplôme d'expertise comptable, et lui faisait obligation son contrat et expliquent son niveau de rémunération de base à 9.000 € brut mensuel et une moyenne de salaire mensuel de 10.500€ sur les douze derniers mois.

Enfin, quand bien même la lettre de licenciement de Mme [I] indique que Mme [X] a aidé les auditeurs dans leur travail, il est établi que lorsque le nouveau directeur financier, M [S] qui a pris ses fonctions le 17 janvier 2011, après avoir analysé les soldes de comptes de la balance générale pour en déduire qu'il était impossible que la société puisse présenter un solde créditeur de 74 328,30 € dans le compte TVA déductible et a interrogé Mme [X] sur les raisons de ce constat, celle-ci n'a donné aucune explication et est restée taisante sur ses pratiques.

Le fait pour ce cadre qualifié de participer à des pratiques illégales en matière de TVA, et ne serait-ce que de les couvrir, au lieu de déceler les anomalies, suggérer et mettre en oeuvre des actions correctives et de veiller au respect de la législation, comme lui en faisait obligation son contrat de travail, constitue à lui seul un manquement d'une gravité tel qu'il empêchait la poursuite du contrat, y compris pendant la durée du préavis, en ce qu'un tel comportement qui a faussé les résultats de l'entreprise, lesquels en apparence positifs fin 2010 étaient en réalité négatifs, et qui a entraîné une pénalité au titre de la TVA de l'ordre de 95.000 €, ne relève pas d'un fait isolé.

Le licenciement étant justifié par la faute grave, le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a débouté Mme [X] de ses demandes au titre de la rupture du contrat.

Sur le rappel de primes

A l'appui de ses demandes, Mme [X] expose que depuis son embauche, elle percevait une prime annuelle de deux mois de salaire, comme l'ensemble des autres salariés, que son arrêt de travail d'avril à juillet 2008, ne constitue évidemment pas un motif pouvant permettre à l' employeur de supprimer cette prime de 18.000 €, que pour l'année 2010 la société Groupe Helice connaissant des difficultés financières, M [G] avait adressé à l'ensemble des salariés concernés un mail le 2 mars 2011 indiquant que les primes pour l'année 2010 seraient versées en 2011, en se référant aux montants versés en 2010, à raison d'un acompte de 50% de la prime sur la paye du mois de mai et le solde sur la paye du mois de septembre, que pourtant elle n'a pas perçu le paiement de cette prime de 18.000 € , outre 1.800 € à titre de congés payés, qui constituait un usage dans l'entreprise.

Pour le débouté de la salariée, la société Groupe Helice soutient que les primes n'étaient pas automatiques, mais dues pour le travail fourni au cours d'une année et versée l'année suivante, en fonction des critères suivants, rappelé par la DRH à Mme [X] le 23 novembre 2010 :

« Du développement commercial, de l'investissement de chacun, de la qualité de gestion commerciale des collaborateurs, de l'évolution de l'effectif, de l'implication de l'entreprise, du niveau de responsabilités, de la nature des décisions à prendre, de l'assiduité, des résultats, de l'ancienneté... ».

L'existence dans l'entreprise d'une pratique constante, générale et fixe d'un versement d'un bonus ou d'une prime, constitutive d'un usage oblige l'employeur à respecter cet usage.

En l'espèce, la prime revendiquée par Mme [X] ne ressort pas de son contrat, mais la salariée établit pas les caractères de constance, généralité et fixité de cette prime qui obligent l'employeur à respecter l'usage en vigueur dans l'entreprise.

Pour l'année 2008, l'arrêt maladie ne peut constituer un manque d'assiduité de Mme [X] pour l'application des critères d'attribution de la prime annuelle, rappelés par la DRH. Quand bien même la salariée n'a pas contesté à l'époque l'absence de versement de prime pour l'année 2008, l'employeur qui n'explique, ni ne justifie quoi Mme [X] n'aurait pas rempli les critères d'attribution doit être condamné à lui payer la prime annuelle de 18.000 €, outre les congés payés afférents.

Pour l'exercice 2010, M [G] a annoncé par mail du 2 mars 2011 aux salariés, dont Mme [X] à l'encontre de laquelle était déjà engagée la procédure de licenciement, le paiement des primes selon le même calendrier qu'en 2010, sauf décalage pour difficultés de trésorerie, par référence aux primes versées en 2010. L'entreprise s'est donc engagée à lui verser cette primequi ressort en tout état de cause d'un usage.

Ayant perçu 18.000 € en 2010 au titre de la prime annuelle de l'exercice 2009, Mme [X] est fondée à prétendre au versement de cette même prime pour l'exercice 2010, avec l'indemnité de congés payés afférents.

Sur les dommages et intérêts au titre des RTT

Soumise au forfait jours, Mme [X] soutient que son employeur ne lui a pas permis de prendre entre 2001 et 2009 tous ces jours de RTT, sauf 6, en raison de sa charge de travail, pour prétendre au paiement de la somme de 23.876,57 € à titre de dommages et intérêts pour jours de RTT non accordés, laquelle demande n'est pas prescrite, selon elle, s'agissant de dommages et intérêts.

Pour s'opposer à cette demande, la société Groupe Helice oppose la prescription de la demande analysée comme un rappel de salaire, courant à compter de juin 2006, le fait que la salariée n'avait plus de RTT pour la période non prescrite et, subsidiairement, précise devoir 5.692,31 € à ce titre.

En l'espèce sous couvert d'une demande de dommages et intérêts pour non prise des jours de RTT, Mme [X] demande le paiement d'une créance de rappel de salaire soumise à la prescription de 5 ans de l'article 2277 du Code Civil. Sa demande présentée le 22 avril 2011 est donc prescrite pour la période antérieure au 22 avril 2006.

En ce qui concerne l'année 2009, les demandes de congés signées par la salariée et le directeur d'agence démontrent que pour 9 jours de RTT, Mme [X] en a pris 10, de sorte que sa demande n'est pas fondée.

En ce qui concerne la période 22 avril 2006 fin 2008, la société Groupe Helice qui n'a pas mis Mme [X] en mesure de prendre ses jours de RTT doit lui régler la somme de 5.692,31 €.

Sur les frais et dépens

La société Groupe Helice qui succombe en appel n'est pas fondée à obtenir l'application de l'article 700 du code de procédure civile, mais versera sur ce même fondement à Mme [X] la somme de 3.000 € et supportera les dépens de première instance et d'appel ;

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 8 février 2013 sur le rappel de prime annuelle et l'indemnisation des jours de RTT ;

Statuant à nouveau de ces chefs,

Condamne la société Groupe HELICE SAS à payer à Madame [F] [X] les sommes de:

- 18.000 € au titre de la prime sur l'année 2008,

- 1.800 € de congés payés afférents,

- 18.000 € au titre de la prime sur l'année 2010,

- 1.800 € de congés payés afférents,

- 5.692,31 € de dommages et intérêts pour les jours de RTT ;

Confirme le jugement en ses autres dispositions ;

Y ajoutant,

Condamne la société Groupe HELICE SAS à payer à Madame [F] [X] la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute les parties de leurs autres demandes ;

Condamne la société Groupe HELICE SAS aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

P. LABEY


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 13/04466
Date de la décision : 28/01/2016

Références :

Cour d'appel de Paris K7, arrêt n°13/04466 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-01-28;13.04466 ?
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