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27/01/2016 | FRANCE | N°14/01980

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 2, 27 janvier 2016, 14/01980


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 2



ARRET DU 27 JANVIER 2016



(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 14/01980



Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 mai 2011 - Tribunal de grande instance d'Auxerre - RG n°08/01246

Arrêt du 08 Février 2012 -Cour d'Appel de PARIS - RG n° 11/11792

Arrêt du 3 décembre 2013 - Cour de cassation - Pourvoi n° D 12-

17.807





DEMANDEURS A LA SAISINE



Monsieur [Q] [T]

Né le [Date naissance 1] 1953 à [Localité 1]

[Adresse 1]

[Localité 2]



Madame [X] [A] épouse [T]

Née le ...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 2

ARRET DU 27 JANVIER 2016

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/01980

Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 mai 2011 - Tribunal de grande instance d'Auxerre - RG n°08/01246

Arrêt du 08 Février 2012 -Cour d'Appel de PARIS - RG n° 11/11792

Arrêt du 3 décembre 2013 - Cour de cassation - Pourvoi n° D 12-17.807

DEMANDEURS A LA SAISINE

Monsieur [Q] [T]

Né le [Date naissance 1] 1953 à [Localité 1]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Madame [X] [A] épouse [T]

Née le [Date naissance 2] 1955 à [Localité 1]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentés par Me Francine HAVET, avocat au barreau de PARIS, toque : D1250

Assistés par Me Béatrice CARLO-VIGOUROUX de la SCP BAZIN-PERSENOT-LOUIS SIGNORET CARLO-VIGOUROUX, avocat au barreau d'AUXERRE

DÉFENDEURS A LA SAISINE

Monsieur [Y] [R]

Né le [Date naissance 3] 1931 à [Localité 3] (PORTUGAL)

[Adresse 2]

[Localité 4]

Madame [S] [W] épouse [R]

Née le [Date naissance 4] 1937 à [Localité 5] (PORTUGAL)

[Adresse 2]

[Localité 4]

Monsieur [B] [Y]

Né le [Date naissance 5] 1944 à [Localité 6] (PORTUGAL)

[Adresse 1]

[Localité 2]

Madame [N] [E] épouse [Y]

Née le [Date naissance 6] 1946 à [Localité 6] (PORTUGAL)

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentés par Me Nadia BOUZIDI-FABRE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0515

Assistés par Me Marie-Pierre GUIGNY, avocat au barreau d'AUXERRE

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 04 Novembre 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Dominique DOS REIS, Présidente de chambre

Madame Denise JAFFUEL, Conseillère

Madame Claudine ROYER, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Stéphanie JACQUET

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Dominique DOS REIS, président et par Mme Stéphanie JACQUET, greffier présent lors du prononcé.

***

Monsieur et Madame [Q] et [X] [T], Monsieur et Madame [Y] et [S] [R] et Monsieur et Madame [B] et [N] [Y] ont des propriétés contiguës et voisines sises [Adresse 3]).

Plus précisément la maison des époux [R] se situe [Adresse 3], et celle des époux [Y], [Adresse 1].

A l'arrière de ces deux maisons, les époux [T] sont propriétaires de 3 parcelles cadastrées A [Cadastre 1], A [Cadastre 2] et A [Cadastre 3], sur lesquelles se trouvaient jusqu'en 1988 des bâtiments accolés aux immeubles [R] et [Y].

Ces bâtiments étant vétustes, les époux [T] ont obtenu un permis de les démolir le 24 mars 1988, puis le 29 mars 1988 un permis de reconstruire un hangar avec des matériaux de récupération de la démolition (pierres et tuiles de Bourgogne notamment).

Soutenant que le nouveau hangar des époux [T] avait été reconstruit sans permis préalable et sans leur autorisation contre la façade arrière de leur maison, selon eux non mitoyenne, et que cette construction les privait de lumière, les époux [R] ET [Y] ont fait assigner les époux [T] devant le Tribunal de grande instance d'Auxerre afin d'obtenir :

la démolition sous astreinte du hangar litigieux,

l'indemnisation de leur préjudice de jouissance,

et subsidiairement une indemnité de 10.000 euros chacun pour le trouble anormal de voisinage qui leur avait été causé.

Très subsidiairement, ils ont sollicité une expertise pour déterminer si les murs contre lesquels le hangar prenait appui étaient mitoyens.

Par jugement du 30 mai 2011, le Tribunal de grande instance d'Auxerre, après avoir considéré que les murs litigieux étaient privatifs et que les époux [T] ne pouvaient y adosser leur hangar sans autorisation de leurs voisins, a estimé que cette construction entraînait des nuisances en réduisant la luminosité et l'ensoleillement de leur maison. Le Tribunal a donc condamné les époux [T] :

à démolir le hangar litigieux sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement,

à payer aux époux [R] ET [Y] une somme de 2.000 euros chacun à titre de dommages et intérêts, outre 1.500 euros chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur appel des époux [T], la Cour d'appel de Paris (pôle 4 ' chambre 2) a par arrêt du 8 février 2012 :

- infirmé le jugement déféré en toutes ses dispositions,

- débouté les époux [R] ET [Y] de toutes leurs demandes,

- condamné ces derniers à verser aux époux [T] une somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre dépens.

La Cour a notamment considéré que le hangar litigieux n'était pas adossé aux murs des époux [T] et qu'il y avait eu un permis de construire régulier. Elle a rejeté la demande des époux [T] de suppression des ouvertures pratiquées à l'arrière de leurs maisons par les époux [Y] (jours de souffrance et grille d'aération) au motif que le caractère mitoyen des murs n'était pas établi.

Sur pourvoi des époux [R] ET [Y], la 3ème chambre civile de la Cour de Cassation a, par arrêt du 3 décembre 2013:

- Sur le pourvoi principal et au visa de l'article 455 du code de procédure civile, cassé l'arrêt du 8 février 2013 au motif que la Cour n'avait pas répondu aux conclusions des consorts [D], qui invoquaient le trouble anormal de voisinage causé par le hangar litigieux, leur enlevant la lumière et provoquant de l'humidité de leur maison, et dont la toiture comportait de l'amiante constituant un danger pour leur santé,

- Sur le pourvoi incident et au visa de l'article 1353 du code civil, cassé le même arrêt au motif que la Cour avait rejeté la demande des époux [T] visant à reboucher les ouvertures pratiquées dans le mur à l'arrière de leur immeuble, en retenant que les époux [T] n'établissaient pas le caractère mitoyen de ce mur, sans rechercher si la présomption simple fondée sur l'attestation de M. [I] n'établissait pas ce caractère mitoyen.

C'est dans ce contexte que l'affaire est revenue devant la 2ème chambre du Pôle 4, autrement composée.

Monsieur et Madame [Q] et [X] [T] par dernières conclusions signifiées le 12 octobre 2015 demandent à la Cour :

- d'infirmer le jugement du tribunal de grande instance d'Auxerre du 30 mai 2011,

- de débouter tant les époux [Y] que les époux [R] de toutes leurs demandes, plus amples ou contraires,

- condamner les époux [Y] à reboucher les ouvertures par eux pratiquées dans le mur situé à l'arrière de leur immeuble, tant au titre des jours de souffrance que des dispositifs d'aération et ce, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir,

- condamner les époux [Y] et les époux [R] à leur payer chacun la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner les époux [Y] et les époux [R] aux entiers dépens.

Monsieur et Madame [Y] et [S] [R] et Monsieur et Madame [B] et [N] [Y] par dernières conclusions signifiées le 18 septembre 2015 demandent à la Cour, au visa des articles 544 et suivants et 653 et suivants du code civil, de :

- déclarer les époux [T] mal fondés en leur appel et les débouter de toutes leurs demandes fins et conclusions,

- confirmer en son entier le jugement rendu le 30 mai 2011 par le Tribunal de Grande Instance d'AUXERRE,

- subsidiairement, condamner solidairement les époux [T] à leur payer à chacun la somme de 10.000 euros pour trouble anormal de voisinage,

- ajoutant à la décision dont appel: condamner solidairement les époux [T] à leur payer à chacun la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- condamner solidairement les appelants aux entiers dépens d'appel ,

- très subsidiairement, avant dire droit, ordonner une expertise aux frais avancés des époux [T], pour déterminer si les murs contre lesquels était adossé le hangar étaient mitoyens .

Pour un plus ample exposé des faits de la cause, des procédures, des prétentions, moyens et arguments dont elle est saisie, la Cour fait référence expresse à la décision déférée et aux dernières conclusions d'appel des parties.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 28 octobre 2015.

CELA ÉTANT EXPOSÉ, LA COUR,

Sur le trouble anormal de voisinage

L'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 8 février 2012 a été cassé au motif qu'il n'avait pas répondu aux demandes des consorts [Y] ' [R] invoquant un trouble anormal de voisinage du fait du hangar construit par les époux [T].

Les époux [Y] et [R] prétendaient et soutiennent toujours que les murs de leurs maisons contre lesquels le hangar litigieux a été construit ne sont pas mitoyens et que la présomption de mitoyenneté ne s'appliquait pas; que les jours en pavés de verre situés dans leurs maisons respectives ont été obstruées par le hangar qui empêche la lumière de passer; que leurs pièces sont devenues humides, l'aération n'étant plus assurée correctement; que par ailleurs le toit en éverit du hangar comporte de l'amiante et constitue un danger pour leur santé; que le hangar en cause les empêche par ailleurs de ravaler le mur arrière de leur immeuble et d'assurer son entretien.

A supposer que ce mur soit mitoyen, les intimés font valoir que les époux [T] n'ont sollicité aucune autorisation pour adosser leur hangar au mur de leurs maisons. Ils soutiennent toujours que ceux-ci n'ont obtenu aucun permis de construire pour édifier leur hangar, dont les travaux n'ont pas commencé avant 1995; que le permis obtenu en 1988 concernait la construction d'une remise située sur une autre parcelle appartenant aux époux [T].

Les époux [T] maintiennent au vu des documents qu'ils produisent que leur hangar est venu en remplacement de bâtiments vétustes et qu'il a été construit en 1988 avec toutes les autorisations nécessaires; qu'il n'est pas adossé aux murs des maisons [Y] et [R] puisqu'il repose sur des piliers métalliques et qu'un espace a été laissé libre entre sa structure et leurs murs. Ils déclarent ignorer quand ont été pratiquées les ouvertures pour installer des pavés de verre et des aérations, mais que ces travaux ont été probablement réalisés à une époque où une partie de l'ancien hangar était éboulée courant 1987 puisqu'ils ont obtenu un permis de construire en 1987; qu'en ce qui les concerne, ils ne leur ont donné aucune autorisation.

Ils prétendent que le mur de la maison des [Y] était un mur mitoyen et que ces derniers avaient pratiqué des ouvertures sans leur autorisation. Ils reconnaissent en revanche que le mur de la maison [R] n'était pas mitoyen, mais que les troubles de voisinage allégués ne résultent pas de leur construction.

Selon l'article 653 du code civil, «Dans les villes et les campagnes, tout mur servant de séparation entre bâtiments jusqu'à l'héberge, ou entre cours et jardins est présumé mitoyen, s'il n'y a titre ou marque du contraire'».

En l'espèce, il résulte des pièces versées aux débats que les époux [T] ont bien obtenu un permis de démolir des bâtiments anciens (constructions et hangars) situés sur les parcelles A [Cadastre 1], [Cadastre 2] et [Cadastre 3] leur appartenant, et un permis de construire un nouveau hangar en fond de cour sur les parcelles [Cadastre 2] et [Cadastre 3]. Contrairement à ce que soutiennent les intimés il est incontestable au vu des permis obtenus et des attestations produites de part et d'autre que le hangar litigieux a fait l'objet d'un permis de construire en bonne et due forme le 29 mars 1988 puis le 11 août 1988 (permis modificatif) la construction autorisée étant un hangar en charpente métallique avec couverture en fibrociment; que la déclaration d'ouverture de chantier du 10 octobre 1988 et la déclaration d'achèvement des travaux du 19 décembre 1990, font expressément référence au numéro du permis de construire du 11 août 1988. Les intimés n'établissent nullement que la construction du hangar litigieux serait postérieure, les témoignages produits par eux ne permettant pas de l'établir.

Par ailleurs, il résulte du procès-verbal de constat de Maître [Q], huissier à [Localité 1] du 19 juillet 2011 qu'aucun des éléments maçonnés métalliques formant la charpente du hangar litigieux ainsi que les tôles constituant le toit n'étaient adossés ni ne se trouvaient en contact avec le mur des époux [Y] ou le mur et la toiture appartenant aux époux [R]. Le hangar litigieux ne prend donc pas appui sur les murs des maisons de ces derniers.

S'agissant de la question de la mitoyenneté des murs, l'attestation de Monsieur [E] [I] du 20 mai 2009, est à ce sujet éclairante. Ce témoin, dont les parents avaient été locataires de la propriété appartenant aujourd'hui aux époux [T], décrit très précisément l'état des constructions avant démolition des bâtiments anciens et hangars se trouvant sur les parcelles A [Cadastre 1], [Cadastre 2] et [Cadastre 3] appartenant aux époux [T], bâtiments qu'il avait bien connus. Il précise, ce que corrobore le plan des lieux annexé au permis de construire de 1988 pour la démolition:

«'En entrant dans la cour qui était froide et humide l'hiver (située en plein Nord)

Sur la gauche se trouvaient un puits et un hangar de trois travées ouvert sur la cour où mes parents entreposaient le matériel agricole.

En face l'entrée se trouvait un hangar de deux travées ouvert sur la cour où il était entreposé du matériel et du bois.

Sur la droite un bâtiment avec un local d'une pièce et une écurie. La pièce servait à entreposer les betteraves et autres nourritures pour l'hiver. Au dessus de ce local il y avait une pièce qui appartenait à Monsieur [V] [K] avec un escalier le long du chemin pour y accéder.

L'écurie servait à deux vaches, un cheval et quelques chèvres, au-dessus de l'écurie du foin était entreposé.'»

En ce qui concerne la situation de cet ensemble de bâtiments et hangars, le témoin indique clairement:

«'Il y avait un seul mur pour le bâtiment propriété [Z] [aujourd'hui [T]] et le bâtiment qui appartenait à l'époque à M. [K] [V]. La gouttière en pierre toujours existante sur le mur servait à recevoir les eaux de pluie des deux rampants de toit.

Si M. et Mme [T] [Q] n'avaient pas démoli le bâtiment et reconstruit un bâtiment moins haut que l'ancien, M. et Mme [Y] n'auraient pas pu ouvrir deux fenêtres sans vue pour donner de la clarté chez eux ainsi que des bouches d'aération.

En ce qui concerne le bâtiment qui appartient maintenant à M. et Mme [R] à l'époque mes parents en étaient aussi locataires ils y entreposaient du foin et de la paille. Les hangars de la propriété [Z] n'étaient pas accolés à ce bâtiment.

J'ai toujours connu ce bâtiment humide, il est caché du soleil une grande partie de la journée par l'église et en fin de soirée par le bâtiment de M. [Y].

Le bâtiment de M. et Mme [T] réceptionne les eaux de pluie d'une partie de bâtiment de M. et Mme [R]. (...)'»

Cette attestation établit :

- d'une part que le mur séparant les propriétés [Y] et [Z] (aujourd'hui [T]) était bien mitoyen (Il y avait un seul mur),

- d'autre part que le mur arrière de la propriété [R] ne l'était pas (Les hangars de la propriété [Z] n'étaient pas accolés à ce bâtiment. )

Le nouveau hangar construit par les époux [T] ne prenant en aucune manière appui sur le mur de la propriété [Y], il faut en conclure que la présomption de mitoyenneté avait cessé après démolition des bâtiments anciens, la contigüité n'existant plus. Cependant la cessation de la mitoyenneté laisse subsister le droit de copropriété. Il en résulte que les époux [Y] ne pouvaient sans autorisation des époux [T] pratiquer des ouvertures dans le mur arrière de leur maison (qui était un ancien mur mitoyen), pour y installer des pavés de verre et une grille d'aération. Le fait que ces derniers aient pu obtenir un permis de construire pour pratiquer des ouvertures (en fait le permis de 1987 qu'ils produisent est peu clair sur l'emplacement des ouvertures pratiquées en vue de l'installation de pavés de verre) est inopérant à prouver qu'ils avaient obtenu l'autorisation des époux [T] pour procéder à ces ouvertures. Ils ne sont pas recevables de ce fait à se prévaloir d'un trouble anormal de voisinage lié à une perte de lumière et d'ensoleillement, ni fondés à invoquer un danger résultant de la toiture en fibrociment contenant de l'amiante dès lors qu'il n'est pas établi que cette toiture a été percée ou endommagée et que de la poussière d'amiante a pénétré dans leur maison.

S'agissant du mur des époux [R] dont il n'est pas contesté qu'il n'était pas mitoyen, il reste à établir que la construction du nouveau hangar leur a causé une perte de lumière et d'ensoleillement. Or, selon l'attestation très circonstanciée de Monsieur [I] (ci-dessus rappelée), il n'a pu y avoir perte d'ensoleillement par la construction du hangar, le bâtiment [R] ayant toujours été humide, en raison de son exposition au Nord et de l'absence de soleil, celui-ci étant masqué soit par l'église, soit par le bâtiment des époux [Y]. Quant à la perte de lumière du jour, elle existait déjà auparavant, puisque l'ancien hangar plus haut que l'actuel, servait déjà à abriter du bois et du matériel agricole. Il n'y a eu de lumière du jour plus importante que pendant une brève période après démolition de l'ancien hangar, et reconstruction du nouveau. Enfin, en ce qui concerne la toiture en fibrociment contenant de l'amiante, comme cela l'a été dit plus haut, il n'est pas établi que cette toiture ait été percée ou endommagée et que de la poussière d'amiante ait pénétré dans la maison des époux [R]. Dans ces circonstances, il ne peut être considéré que ces derniers aient subi un trouble anormal de voisinage au sens de l'article 544 du code civil.

Le jugement déféré du Tribunal de grande instance d'Auxerre du 30 mai 2011 sera donc infirmé en ce qu'il a ordonné aux époux [T] de démolir leur hangar sous astreinte et les a condamnés à payer aux intimés une somme de 2.000 euros chacun à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi.

Sur la demande des époux [T] de suppression des ouvertures pratiquées par les époux [Y]

Cette demande a été rejetée tant par le premier juge que par la Cour d'appel avant cassation. Les époux [T] demandent que les époux [Y] soient condamnés sous astreinte à reboucher les ouvertures pratiquées dans le mur arrière de leur maison tant en ce qui concerne les jours de souffrance (pavés de verre) que les dispositifs d'aération installés.

Compte tenu des motifs qui précèdent, il est certain que les époux [Y] n'ont pas sollicité l'autorisation de pratiquer ces ouvertures et dispositifs, la cessation de la mitoyenneté ne les ayant pas dispensés de solliciter une telle autorisation, en l'absence de disparition de la copropriété. Il en résulte que sauf meilleur accord des parties, la demande de remise en état du mur en son état initial par les époux [T] est légitime. Elle sera ordonnée dans les termes du dispositif du présent arrêt.

Sur les demandes accessoires et les dépens

En toute équité, chaque partie supportera la charge de ses propres frais irrépétibles tant en première instance qu'en cause d'appel. Les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile seront donc rejetées. Le jugement déféré sera donc infirmé en ce qu'il a condamné les époux [T] à payer aux époux [Y] et [R] une indemnité de 1.500 euros chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Les époux [Y] et [R] qui succombent en définitive seront condamnés aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement et contradictoirement,

Infirmant le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Déboute Monsieur et Madame [Y] et [S] [R] ainsi que Monsieur et Madame [B] et [N] [Y] de toutes leurs demandes,

Condamne Monsieur et Madame [B] et [N] [Y], sauf meilleur accord des parties, à reboucher les jours de souffrance (pavés de verre) pratiqués dans le mur situé à l'arrière de leur maison et à supprimer les dispositifs d'aération installés par eux dans ledit mur, dans le délai de trois mois à compter de la signification du présent arrêt, sous peine passé ce délai d'une astreinte de 50 euros par jour de retard pendant deux mois,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples et contraires,

Condamne M. et Mme [R] ainsi que M. et Mme [Y] aux entiers dépens de première instance et d'appel incluant ceux de l'arrêt cassé,

Dit que ces dépens pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 14/01980
Date de la décision : 27/01/2016

Références :

Cour d'appel de Paris G2, arrêt n°14/01980 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-01-27;14.01980 ?
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