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20/01/2016 | FRANCE | N°15/05035

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 20 janvier 2016, 15/05035


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRÊT DU 20 Janvier 2016

(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/05035 BDC



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 29 avril 2015 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de PARIS RG n° F12/09798





APPELANT

Monsieur [F] [Y]

[Adresse 3]

[Localité 3]

comparant en personne, assisté de Me Philippe PACOTTE, avocat a

u barreau de PARIS, toque : P0513



INTIMEES

SAS CGI FRANCE

[Adresse 1]

[Localité 2]

N° SIRET : 702 042 7555

représentée par Me François-pierre LANI, avocat au barreau de PAR...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRÊT DU 20 Janvier 2016

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/05035 BDC

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 29 avril 2015 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de PARIS RG n° F12/09798

APPELANT

Monsieur [F] [Y]

[Adresse 3]

[Localité 3]

comparant en personne, assisté de Me Philippe PACOTTE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0513

INTIMEES

SAS CGI FRANCE

[Adresse 1]

[Localité 2]

N° SIRET : 702 042 7555

représentée par Me François-pierre LANI, avocat au barreau de PARIS, toque : P0426

SAS SOCIETE CONSEILLERS EN GESTION ET INFORMATIQUE CGI

[Adresse 2]

[Localité 1]

N° SIRET : 702 042 75555

représentée par Me François-pierre LANI, avocat au barreau de PARIS, toque : P0426

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 Novembre 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Benoit DE CHARRY, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Benoît DE CHARRY, Président

Madame Catherine BRUNET, Conseillère

Madame Céline HILDENBRANDT, Vice-présidente placée

Greffier : Mme Eva TACNET, greffière stagiaire en pré-affectation, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Monsieur Benoît DE CHARRY, président et par Madame Eva TACNET, greffière stagiaire en pré-affectation à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES

Monsieur [F] [Y] a été engagé par la SAS SOCIETE CONSEILLERS EN GESTION ET INFORMATIQUE CGI (ci-après CGI) par contrat de travail à durée indéterminée en date du 18 avril 2002 avec reprise de son ancienneté à compter du 27 février 1997 en qualité de conseiller.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, cabinets d'ingénieurs-conseils et sociétés de conseil (Syntec).

Monsieur [F] [Y], consultant principal, coefficient 170, position 3-1, percevait en dernier lieu une rémunération mensuelle de 5125 euros.

Il détenait plusieurs mandats de représentant du personnel ; il était membre titulaire du comité d'entreprise depuis l'année 2004, délégué du personnel et membre du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail et délégué syndical.

La SAS SOCIETE CONSEILLERS EN GESTION ET INFORMATIQUE CGI occupait à titre habituel au moins onze salariés.

Par lettre en date du 10 août 2012, Monsieur [F] [Y] a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l'employeur.

Pour voir constater que sa prise d'acte produit les effets d'un licenciement nul et obtenir diverses indemnités et le paiement d'une prime, il a saisi le 5 septembre 2012 le conseil de prud'hommes de Paris qui, par jugement en date du 29 avril 1015 auquel la Cour se réfère pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, l'a débouté de ses principales demandes, a condamné la société CONSEILLERS EN GESTION ET INFORMATIQUE à lui les chèques cadeaux célébrant les 15 ans d'ancienneté qu'il a acquis en son sein à équivalence de la somme de 400 euros, l'a condamné à verser 15'375 euros à la SAS SOCIÉTÉ CONSEILLERS EN GESTION ET INFORMATIQUE CGI au titre de l'indemnité de préavis.

Monsieur [F] [Y] a relevé appel de ce jugement par déclaration parvenue au greffe de la cour le 18 mai 2015.

Monsieur [F] [Y] soutient que sa prise d'acte est justifiée par des manquements graves de CGI qui ont rendu impossible la poursuite de son contrat de travail : non paiement d'heures supplémentaires, non respect des durées maximales de travail, discrimination subie du fait de ses mandats de représentant du personnel.

En conséquence, il sollicite que la cour :

juge que la prise d'acte produit les effets d'un licenciement nul,

condamne la SAS SOCIÉTÉ CONSEILLERS EN GESTION ET INFORMATIQUE CGI à lui payer :

* 26'662 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

* 15'375 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

* 1537 euros au titre des congés payés y afférents,

* 30'750 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul,

* 158'875 euros à titre de dommages-intérêts au titre de la méconnaissance du statut protecteur de représentant du personnel,

* 30'750 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect de la réglementation sur la durée du travail,

* 60'000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du retard de carrière causé par une discrimination syndicale,

* 36'900 euros à titre de dommages-intérêts pour clause de non-concurrence illicite,

* 30'750 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

le tout avec intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes.

Il sollicite la remise de l'attestation pôle emploi, du solde de tout compte et du bulletin de salaire rectifié conformément à la décision ainsi que la condamnation de son adversaire à lui payer 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

En réponse, la SAS SOCIETE CONSEILLERS EN GESTION ET INFORMATIQUE CGI fait valoir que la prise d'acte se réfère à une situation née en 2009, que Monsieur [Y] ne démontre pas de manquements de son employeur susceptibles de justifier la rupture de son contrat de travail, que dans l'hypothèse où la cour viendrait à considérer que la prise d'acte doit produire les effets d'un licenciement, l'indemnité pour violation du statut protecteur devrait être limitée à 6 mois, ou au plus à 2 ans et 6 mois de salaire, que la jurisprudence relative à l'absence de contrepartie financière et de délimitation géographique de la clause de non-concurrence est postérieure à la signature du contrat de travail de sorte que Monsieur [Y] est mal fondé à prétendre imposer à son ex-employeur une règle qui n'existait pas à l'époque de la conclusion de son contrat de travail et que, de surcroît, Monsieur [Y] n'a pas respecté la clause de non-concurrence pour avoir créé une société OSB conseil dès la rupture de son contrat de travail de sorte qu'il ne justifie d'aucun préjudice.

En conséquence, elle sollicite la confirmation du jugement, et subsidiairement la réduction de l'indemnisation de Monsieur [Y] au minimum légal. En tout état de cause, elle demande sa condamnation à lui verser 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

Vu le jugement du conseil de prud'hommes, les pièces régulièrement communiquées et les conclusions des parties visées par le greffier, soutenues oralement à l'audience, auxquels il convient de se référer pour plus ample information sur les faits, les positions et prétentions des parties.

Sur la prise d'acte et ses conséquences

Le salarié qui reproche à l'employeur des manquements suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail peut prendre acte de la rupture de ce contrat.

Il appartient au salarié de rapporter la preuve des manquements de l'employeur qu'il invoque.

Si la prise d'acte est justifiée, elle produit, si le salarié est protégé, les effets d'un licenciement nul.

Dans le cas contraire elle produit les effets d'une démission.

Lorsqu'il subsiste un doute sur la réalité des faits invoqués à l'appui de la prise d'acte, celle-ci doit produire les effets d'une démission.

En l'espèce, Monsieur [Y] impute à son employeur trois manquements justifiant selon lui la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail :

Le non paiement d'heures supplémentaires,

Le non-respect des durées maximales du travail,

une discrimination subie du fait de ses mandats de représentant du personnel.

Sur les heures supplémentaires

Seules les heures supplémentaires accomplies à la demande ou pour le compte de l'employeur ou, à tout le moins, avec son accord implicite doivent donner lieu à rémunération. En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Le salarié doit étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments. La preuve des heures de travail effectué n'incombe spécialement à aucune des parties.

Au cas d'espèce, Monsieur [Y] était soumis à la modalité de gestion du temps de travail appelée dans l'entreprise «'réalisation de mission'» ou encore modalité Type II applicable aux cadres dont les horaires ne sont pas contrôlables.

Afin d'établir la durée de son temps de travail, Monsieur [Y] renseignait un outil informatique de déclaration mis en place par son employeur dans lequel il devait saisir ses heures standard «'ST'», correspondant aux heures travaillées facturables au client, ainsi que d'autres heures d'activité répertoriées sous les appellations heures supplémentaires, astreintes ou autres heures standard.

Au sein de l'entreprise CGI, la réalisation d'heures supplémentaires par un salarié est soumise à une autorisation préalable de sa hiérarchie. Si tel est le cas, ces heures sont rémunérées.

Monsieur [Y] n'a pas sollicité l'autorisation de réaliser des heures supplémentaires. Il n'a pas mentionné dans ses déclarations de temps de travail en avoir réalisé.

En revanche, l'examen de ses déclarations d'heures de travail démontre qu'outre les heures «'ST'», il a régulièrement déclaré la réalisation d'autres heures standard «'AUTRES-ST'». Ces déclarations portent la mention de leur approbation et il n'est pas contesté par l'employeur que l'approbateur est un membre de la hiérarchie de l'entreprise.

Des documents versés aux débats, il résulte que l'activité du salarié répertoriée sous la rubrique «'autres heures standard'», correspond à des heures travaillées au-delà des 7.70h standard par jour :

Un message électronique du Responsable Contrôle de Gestion CGI CGI du 5 mars 2010 précise en effet que les AUTRES-ST «'ont été ajoutées afin de vous permettre de déclarer l'ensemble de votre temps, même s'il n'a pas été préalablement approuvé par votre Directeur de projet. En conséquence, elles ne donneront lieu ni à facturation client ni à paiement d'heures supplémentaires ou acquisition de temps compensatoire'».

Selon une note de CGI relative aux heures supplémentaires du 5 mars 2010, le code activité «'AUTRES-ST'» permet aux salariés d'inscrire les heures travaillées au delà de l'heure standard, sans approbation de leur chef de projet.

Ainsi, les périodes d'activité inscrites sous la rubrique «'AUTRES-ST'» correspondent à du temps de travail effectif qui peut s'ajouter à la durée d'un travail à temps plein dans l'hypothèse où les heures standard travaillées totalisent en elles-même un temps-plein.

À partir du rapprochement des déclarations de ses temps d'activité avec ses bulletins de paie et des tableaux comparatifs entre ces documents, Monsieur [Y] a calculé qu'il avait effectué 12,10 heures de travail supplémentaire non rémunéré en 2010, 113,40 heures supplémentaires non compensées en 2011 et 79,45 heures supplémentaires non rémunérées en 2012.

Par la production de ses déclarations de temps d'activité au cours des années 2010 à 2012, Monsieur [Y] étaye suffisamment sa demande.

Son employeur, destinataire des déclarations d'activité, a eu une parfaite connaissance des temps de travail déclarés au fur et à mesure de leur établissement.

Pour justifier que Monsieur [Y] n'avait pas effectivement accompli la totalité des heures de travail qu'il avait déclarées, l'employeur fait valoir que l'intéressé a inclus dans ces heures des heures de délégation excédant le crédit d'heures qui lui étaient alloué à raison de ses mandats, en dehors de toutes circonstances exceptionnelles.

Monsieur [Y] ne fait valoir aucune observation à cet égard.

Il en résulte que dans son calcul, il inclut 161,30 heures au titre des heures de délégation qui excèdent son crédit d'heures de délégation et doivent donc venir en déduction des heures supplémentaires à défaut de circonstances exceptionnelles justifiant leur prise . Ce nombre d'heures à déduire est inférieur aux nombres d'heures supplémentaires accomplies.

De ce qui précède, la cour retient qu'au cours des années 2010 à 2012, Monsieur [Y] a accompli des heures supplémentaires de travail qui n'ont été ni rémunérées, ni compensées.

Sur le non-respect des durées maximales du travail

Monsieur [Y] soutient qu'il a travaillé plus de 48 heures par semaine à plus de 8 reprises en 2010, à plus de 10 reprises en 2011 à plus de 3 reprises en 2012, que la durée moyenne hebdomadaire de travail de 44 heures sur 12 semaines n'a pas été respectée, qu'en 2011 il a effectué 320,75 heures de travail supplémentaire soit plus que le contingent annuel par salarié prévu par la convention collective et qu'il a travaillé 271 jours en 2010, 245 jours en 2011 et 136 jours entre janvier et juillet 2012, de sorte que la société CGI n'a pas respecté les règles relatives à la durée hebdomadaire maximale de travail, au plafond des jours travaillés et au contingent annuel d'heures supplémentaires

S'agissant du nombre de jours travaillés, la société CGI réplique que le tableau que présente Monsieur [Y] est faussé par le fait, par exemple, qu'il a décompté une journée de travail alors qu'il s'agissait en réalité d'une demi-journée travaillée, ou encore qu'il a imputé dans ses calculs des heures excédentaires de délégation.

La preuve du respect de la durée maximale de travail incombe à l'employeur.

L'examen des tableaux détaillés par Monsieur [Y] révèle qu'à plusieurs reprises, son activité a dépassé par son amplitude ou sa durée les maxima autorisés, et ce même après déduction des excédents d'heures de délégation. De même, durant l'année 2011, ce salarié a déclaré 320,75 heures de travail supplémentaire dont on doit retirer 56,60 heures de temps de délégation excédentaire, de sorte que le nombre d'heures supplémentaires effectuées par Monsieur [Y], pour cette année-là, demeure excédentaire par rapport au chiffre de 90 heures résultant de l'application de la convention collective.

La société CGI ne rapportant pas la preuve qui lui incombe, la cour retient l'existence de non-respect des durées maximales de travail.

Il en est de même du nombre de jours travaillés, CGI ne démontrant pas que Monsieur [Y] n'a pas travaillé tous les jours qui figurent sur les tableaux détaillés qu'il a versés aux débats.

Sur la discrimination syndicale

Aux termes de l'article L 1132-1 du code du travail, aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié, ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire directe ou indirecte telle que définie à l'article premier de la loi 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses m'urs, de son orientation sexuelle, de son âge de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, ses activités syndicales ou mutualistes, ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille en raison de son état de santé ou de son handicap.

Aux termes de l'article L2141-5 du code du travail, il est interdit à l'employeur de prendre en considération l'appartenance à un syndicat ou l'exercice d'une activité syndicale pour arrêter ses décisions en matière notamment de recrutement, de conduite et de répartition du travail, de formation professionnelle, d'avancement, de rémunération et d'octroi d'avantages sociaux, de mesures de discipline et de rupture du contrat de travail.

Aux termes de l'article L1134-1 du code du travail, lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance des dispositions du chapitre II, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Monsieur [Y] fait valoir avoir rencontré des difficultés à assurer ses missions de représentant du personnel au titre de ses différents mandats. Il présente des mails remontant pour la plupart à l'année 2009, relatifs à la prise d'heures de délégation. Dans l'un de ces messages date du 30 juin 2009, son supérieur rappelle que Monsieur [Y] s'est engagé à ne pas dépasser mensuellement 5 jours de délégation alors qu'il avait droit jusqu'à 9 jours par mois. Monsieur [Y] ajoute qu'il était contraint , pour assumer son mandat , d'utiliser ces heures de délégation le week-end ou après sa journée de travail, comme le démontre une capture d'écran de la déclaration des temps au titre du mois de septembre 2009.

CGI ne conteste pas l'existence du courriel du 30 juin 2009, pas plus que le fait que l'organisation du travail du salarié l'a amené à différer ou à réduire ses heures de délégation au cours de l'année 2009.

La cour retient que la gestion du temps de travail en place chez CGI n'a pas permis, en 2009, à Monsieur [Y] d'accomplir pleinement les heures de délégation auxquelles ses mandats lui ouvraient droit, ce qui laisse supposer l'existence d'une discrimination.

CGI ne démontre pas que l'organisation du travail de Monsieur [Y] était justifiée par des éléments étrangers à toute discrimination.

Monsieur [Y] ajoute que son employeur a pris en compte des heures de délégation dans les entretiens annuels.

Il présente les comptes-rendus de l'entretien annuel d'évaluation du 15 décembre 2010 et de l'outil dialogue du 10 avril 2012. Dans le premier, son implication dans les instances représentatives du personnel est relatée. Dans le second, il est mentionné à plusieurs reprises que Monsieur [Y] est titulaire d'un mandat de DP et qu'il assure des heures de délégation ; l'évaluateur ajoute que l'objectif de rentabilité pourra être atteint par une meilleure gestion des heures de délégation.

CGI réplique qu'un employeur peut évoquer l'exercice d'un mandat représentatif lors des entretiens annuels.

L'activité de représentant du personnel ne peut être prise en considération dans l'évaluation professionnelle d'un salarié.

Dans l'entretien annuel d'évaluation de Monsieur [Y] pour l'année 2012, l'évaluateur note que ce salarié a un mandat de DP, mentionne des «'heures de délégation représentant'» et s'agissant du taux de rentabilité que l'objectif pourra être «'dans le cas de [F] par une meilleure gestion des heures de délégation'».

Ces mentions dans l'évaluation, et en particulier l'appréciation portée par l'employeur sur l'incidence de la gestion par Monsieur [Y] de ses heures de délégation sur sa rentabilité, démontrent la prise en compte de l'activité de représentant du personnel de ce salarié dans son évaluation professionnelle et laisse supposer l'existence d'une discrimination.

L'employeur ne démontre pas que ces mentions étaient justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Monsieur [Y] soutient que l'évolution de sa carrière a été ralentie, que de 2004 à 2012, son coefficient est 170 et sa position 3-1, que son salaire est inférieur à ceux pratiqués dans l'entreprise et que, contrairement à ses homologues, il a sous sa responsabilité seulement deux conseillers.

CGI réplique que ce salarié a été augmenté tous les ans de 1998 à 2009, qu'au cours des 12 derniers mois il a perçu une rémunération supérieure à la moyenne annuelle, que plusieurs salariés à ancienneté comparable ou de peu supérieure sont moins rémunérés que lui ou de façon à peine supérieure.

Monsieur [Y] présente plusieurs tableaux dans lesquels sont repris les nom, fonction, rémunération, ancienneté, diplôme, expérience et classification de salariés de CGI.

L'examen de ces tableaux ne permet pas d'en tirer un enseignement quant à l'évolution des carrières respectives des personnes qui y sont mentionnées faute d'indiquer à quelle fonction et à quel coefficient elles ont été recrutées.

Il permet en revanche d'appréhender le montant de la rémunération de ces personnes tant au regard de leur poste, de leur ancienneté ou expérience et de leur classification.

On peut tirer de la liste numériquement la plus importante produite aux débats (p. 31 des conclusions de l'appelant) :

- que 11 salariés, dont lui occupaient un poste de consultant,

-que 9 de ces 11 salariés avaient une ancienneté dans l'entreprise ou une expérience sensiblement égale à la sienne, pour avoir été recrutés ou avoir débuté entre 1996 et 1998,

- que 10 de ces 11 salariés relevaient du coefficient 3.1 170 qui est le sien,

- que presque tous étaient comme lui titulaires d'un Bac+5,

- que monsieur [O], pourtant senior consultant, percevait une moindre rémunération que lui,

- que monsieur [V], tout comme lui consultant, ayant débuté en 1998, percevait une rémunération inférieure à la sienne de près de 10'000 euros par an,

- que si 3 consultants percevaient une rémunération supérieure à la sienne (61.500 euros/an), 7 étaient moins bien rétribués.

Il ressort en outre de ses bulletins de paie qu'il a bénéficié d'augmentations de salaires entre 2009 et 2012, et que, dans le dernier état, le montant de son salaire était proche du salaire moyen au sein de la société pour le poste de consultant principal selon les données de septembre 2011.

Au regard de ce qui précède, on ne peut retenir que les éléments de fait présentés par Monsieur [Y] concernant sa classification ou sa rétribution laissent supposer l'existence d'une discrimination ayant eu pour conséquence un retard de carrière.

Monsieur [Y] souligne qu'il n'a que deux collaborateurs.

L'étude du portail d'entreprise permet de constater que le nombre de membres se rapportant à chaque salarié est variable : ainsi Monsieur [U], pourtant consultant senior expert, n'en a aucun, de même que Madame [T], consultant principal, ce qui fait que le petit nombre de collaborateurs de Monsieur [Y] n'est pas un élément de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination.

Monsieur [Y] indique qu'il n'a pas été compris dans la liste des salariés concernés par le plan de formation 2012.

Ainsi qu'il l'admet, une partie du personnel est dans son cas et il ne fait pas valoir avoir été écarté malgré sa candidature, de sorte que, ici encore, cet élément de fait ne laisse pas supposer l'existence d'une discrimination.

Monsieur [Y] fait enfin valoir qu'il n'a pas été payé d'une prime d'ancienneté de 400 euros et qu'il est le seul dans ce cas.

CGI ne le conteste pas et indique avoir payé la somme comme elle s'y était engagée devant le conseil de prud'hommes.

L'omission de versement de cette prime laisse supposer l'existence d'une discrimination et l'employeur ne prouve pas que cette omission a été justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

En conséquence du défaut de versement de la prime d'ancienneté, le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné CGI à remettre à Monsieur [Y] les chèques cadeaux célébrant les quinze ans d'ancienneté qu'il a acquis en son sein, ce, à équivalence de la somme de quatre cent euros.

En conséquence, la cour retient comme constitutifs de discrimination syndicale les difficultés rencontrées en 2009 par Monsieur [Y] pour assumer pleinement ses heures de délégation, la prise en considération de sa qualité de représentant du personnel dans son évaluation annuelle et le non versement d'une prime.

En définitive, la cour retient comme constitutifs de manquements de l'employeur le défaut de paiement d'heures de travail supplémentaire, le dépassement du temps de travail, et la discrimination syndicale.

La pluralité et la diversité de ces manquements, la commission répétée sur plusieurs années, de certains d'entre eux, l'existence de plusieurs fais constitutifs de discrimination font que, appréciés globalement, ces manquements sont suffisamment graves pour rendre impossible la poursuite du contrat de travail, de sorte que la prise d'acte par Monsieur [Y], salarié protégé, produit les effets d'un licenciement nul.

La décision des premiers juges sur ce point sera infirmée, tout comme sera infirmée la condamnation prononcée à l'encontre de Monsieur [Y] au titre de l'indemnité de préavis.

Sur les conséquences du licenciement nul

Le salarié victime d'un licenciement nul qui ne demande pas sa réintégration a droit aux indemnités de rupture (indemnité conventionnelle de licenciement et de préavis), et à une indemnité au moins égale à 6 mois de salaire au titre du caractère illicite du licenciement.

Indemnité conventionnelle de licenciement

Aux termes de l'article 19 de la convention collective SYNTEC applicable, l'indemnité de licenciement se calcule en mois de rémunération sur les bases suivantes :

Après 2 ans d'ancienneté, 1/3 de mois par année de présence de l'ingénieur ou du cadre sans pouvoir excéder un plafond de 12 mois.

Le mois de rémunération s'entend dans le cas particulier comme 1/12 de la rémunération des 12 derniers mois précédant la notification de la rupture du contrat de travail, cette rémunération incluant les primes prévues par les contrats de travail individuel et excluant les majorations pour heures supplémentaires au-delà de l'horaire normal de l'entreprise et les majorations de salaire ou indemnité liées à un déplacement ou à un détachement. Pour les années incomplètes, l'indemnité de licenciement est calculée proportionnellement au nombre de mois de présence.

Au cas d'espèce, au vu de la moyenne mensuelle brute du salaire de Monsieur [Y] au cours des 12 derniers mois précédant la prise d'acte en excluant les heures supplémentaires supplémentaires, et de l'ancienneté de ce salarié, 15 ans et demi, le montant de l'indemnité conventionnelle de licenciement s'élève à 26'662 euros, somme non utilement contestée par la société CGI.

Indemnité compensatrice de préavis

Aux termes de l'article 15 de la convention collective SYNTEC relatif au préavis, le délai de celui-ci applicable aux ingénieurs et aux cadres est de 3 mois. L'indemnité de préavis calculée sur la base du salaire de Monsieur [Y] et sur une durée de trois mois, éléments non contestés, s'élève à 15'375 euros. Il s'y ajoute une indemnité au titre des congés payés afférents d'un montant de 1537 euros.

Dommages-intérêts pour licenciement nul

Eu égard à l'ancienneté de Monsieur [Y], remontant à 1997, de son âge et des conséquences du licenciement, et sur la base de sa rémunération mensuelle, 5125 euros, il doit lui être alloué en réparation du préjudice consécutif à la nullité du licenciement dont il a été l'objet, la somme de 30'750 euros.

Indemnité au titre de la méconnaissance du statut protecteur de représentant du personnel

Le salarié objet d'un licenciement nul qui ne demande pas sa réintégration a droit à une indemnité au titre de la méconnaissance par l'employeur du statut protecteur qui s'ajoute à l'indemnisation pour nullité du licenciement. Le montant de cette indemnité due à un représentant du personnel élu est égal à la rémunération brute qui aurait dû être perçue entre la date de la rupture et l'expiration de la période de protection dans la limite de 30 mois de salaires. La période de protection s'entend de celle en cours au jour de la prise d'acte, date de la rupture. A la date de cette dernière, Monsieur [Y] était titulaire d'un mandat de membre élu titulaire du comité d'entreprise et son mandat expirait le 29 septembre 2014.

Il est donc dû à Monsieur [Y] une indemnité au titre de la méconnaissance du statut protecteur de 153'750 euros.

Sur les autres demandes de Monsieur [Y]

- Dommages et intérêts pour non-respect de la réglementation sur la durée du travail

Les non-respects de la réglementation relative à la durée du travail par CGI rappelés ci-dessus ont nécessairement causé un préjudice à Monsieur [Y], préjudice que la cour est en mesure de chiffrer à la somme de 10'250 euros.

- Dommages et intérêts liés au retard de carrière

La cour n'ayant pas retenu l'existence d'une discrimination dont aurait été victime Monsieur [Y] ayant eu pour effet de le priver de la carrière qui aurait dû être la sienne, la demande de dommages-intérêts pour retard de carrière ne sera pas accueillie.

- Dommages et intérêts pour préjudice causé par une clause de non-concurrence illicite

Une clause de non-concurrence n'est licite notamment que si elle est limitée dans le temps et dans l'espace et si elle comporte l'obligation pour l'employeur de verser au salarié une contrepartie financière. Cette règle s'applique quelque soit la date à laquelle la clause de non-concurrence a été édictée.

L'article 14 du contrat de Monsieur [Y] lui interdit, en cas de rupture contrat de travail, de créer pour son propre compte une entreprise développant les techniques et activités mises en 'uvre dans les fonctions qu'il occupait au sein de CGI au cours des deux dernières années de présence dans la société et ce pour une durée d'un an dans la région Ile de France ainsi que dans les régions et pays où il serait intervenu pour le compte de la société CGI, ainsi que de travailler soit directement soit pour le compte d'un concurrent de CGI, dans les services des clients pour le lesquels il est intervenu au cours des deux dernières années de présence dans la société et cela pendant une durée d'un an. Il n'est pas prévu contractuellement de contrepartie financière à cette clause de non-concurrence. Il importe peu que le contrat de travail de Monsieur [Y] a été conclu avant que la jurisprudence fasse de la contrepartie financière une condition de validité la clause de non-concurrence. La clause de non-concurrence qui ne prévoit pas de contrepartie financière est nulle. Celle insérée au contrat de travail est donc nulle.

La société CGI fait valoir que Monsieur [Y] a exercé l'activité interdite par la clause après la rupture du contrat en créant une auto-entreprise spécialisée dans le domaine du conseil pour les affaires, qu'il ne justifie d'aucun préjudice et ne peut donc prétendre à des dommages et intérêts. Monsieur [Y] fait valoir que le non-respect de la clause n'est pas démontré.

La stipulation dans le contrat de travail d'une clause de non-concurrence nulle cause nécessairement un préjudice au salarié. L'appréciation du préjudice doit tenir compte, le cas échéant, de l'exercice par l'ancien collaborateur de l'activité interdite après la rupture du contrat de travail.

Si les pièces versées aux débats établissent que Monsieur [Y] a créé une auto-entreprise de «'conseil pour les affaires'», dont le lieu d'exercice est à [Localité 4], et que cette activité a généré des recettes au cours du 4ème trimestre 2012 et du premier trimestre 2013, il n'est pas démontré que cette activité de conseil pour les affaires développe les techniques et activités mises en 'uvre par Monsieur [Y] dans les fonctions de consultant principal qui étaient les siennes au sein de CGI. En conséquence de l'absence d'exercice de l'activité interdite par Monsieur [Y], le préjudice qui résulte pour lui de la clause de non-concurrence illicite peut-être chiffrée à 3000 euros.

- Indemnité forfaitaire pour travail dissimulé

Monsieur [Y] sollicite le versement par son ancien employeur d'une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire sur le fondement des articles L8221-5 et L8223-1 du code du travail en faisant valoir que CGI avait sciemment mentionné sur le bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli.

Compte tenu des circonstances de l'espèce et notamment du caractère restreint des heures de travail dont la mention sur le bulletin de paie a été omise, le caractère intentionnel de l'omission n'est pas caractérisé de sorte que la demande d'indemnité en cas de rupture de la relation de travail prévue en faveur du salarié auquel l'employeur a eu recours en violation de l'interdiction de travail dissimulé, ne sera pas accueillie.

Sur la remise des documents

En conséquence du présent arrêt, la société CONSEILLERS EN GESTION ET INFORMATIQUE, se verra ordonner de remettre à Monsieur [Y] une attestation POLE EMPLOI, un solde de tout compte et un bulletin de salaire rectifiés conformément à la présente décision.

Sur le cours des intérêts

Les intérêts au taux légal sur les sommes allouées sont dus à compter de la date date de réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes, soit le 17 septembre 2012, en ce qui concerne l'indemnité conventionnelle de licenciement, l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents et à compter du présent arrêt en ce qui concerne les sommes allouées en réparation du licenciement nul, de la méconnaissance du statut protecteur de représentant du personnel, du non-respect de la réglementation sur la durée du travail, et de la clause de non-concurrence illicite.

Sur les frais irrépétibles

La société CONSEILLERS EN GESTION ET INFORMATIQUE, partie perdante, sera condamnée à payer à Monsieur [Y] 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur le dépens

La société CONSEILLERS EN GESTION ET INFORMATIQUE, partie perdante, supportera les dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement entrepris, sauf en sa disposition ayant condamné la société CONSEILLERS EN GESTION ET INFORMATIQUE à remettre à Monsieur [F] [Y] les chèques cadeaux à équivalence de la somme de 400 euros,

Et statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

Dit que la prise d'acte produit les effets d'un licenciement nul,

Condamne la société CONSEILLERS EN GESTION ET INFORMATIQUE à payer à Monsieur [F] [Y] :

avec intérêts au taux légal à compter du 17 septembre 2012 :

* 26'662 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

* 15'375 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 1537 euros à titre de congés payés afférents,

avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt :

* 30'750 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

* 153'750 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de la méconnaissance du statut protecteur de représentant du personnel,

* 10'250 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect de la réglementation sur la durée du travail,

* 3000 euros à titre de dommages-intérêts pour clause de non-concurrence illicite,

Ordonne à la société CONSEILLERS EN GESTION ET INFORMATIQUE de remettre à Monsieur [F] [Y] une attestation POLE EMPLOI, un solde de tout compte et un bulletin de salaire rectifié conformément à la présente décision.

Condamne la société CONSEILLERS EN GESTION ET INFORMATIQUE à payer à Monsieur [F] [Y] 2000 euros au titre des frais irrépétibles,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples et contraires,

Condamne la société CONSEILLERS EN GESTION ET INFORMATIQUE aux dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 15/05035
Date de la décision : 20/01/2016

Références :

Cour d'appel de Paris K6, arrêt n°15/05035 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-01-20;15.05035 ?
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