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15/01/2016 | FRANCE | N°14/06016

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 6, 15 janvier 2016, 14/06016


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 6



ARRÊT DU 15 JANVIER 2016



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 14/06016



Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 Février 2014 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 201202292





APPELANTES



SA COLAS EST VENANT AUX DROITS DE LA SOCIÉTÉ SCREG EST agissant en la personne de ses représe

ntants légaux

RCS : 314 583 873

Dont le siège social est

[Adresse 3]

'[Adresse 3]

[Adresse 3]



Représentée par : Me Patricia HARDOUIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056

Ass...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 6

ARRÊT DU 15 JANVIER 2016

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/06016

Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 Février 2014 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 201202292

APPELANTES

SA COLAS EST VENANT AUX DROITS DE LA SOCIÉTÉ SCREG EST agissant en la personne de ses représentants légaux

RCS : 314 583 873

Dont le siège social est

[Adresse 3]

'[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par : Me Patricia HARDOUIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056

Assistée par : Me Marie Noëlle LAZARI, avocat au barreau de PARIS, toque : C2308

SA ÉLECTRICITÉ RÉSEAU DISTRIBUTION FRANCE 'ERDF'agissant en la personne de ses représentants légaux

RCS 444 608 442

Dont le siège social est

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Adresse 6]

Représentée par : Me Pascale NABOUDET-VOGEL, avocat au barreau de PARIS, toque : L0046

Assistée par : Me Guillaume COSTE FLORET, avocat au barreau de PARIS, toque : C1072

INTIMÉES

SA ALLIANZ IARD VENANT AUX DROITS DE GAN EUROCOURTAGE prise en la personne de ses représentants légaux

RCS : 542 110 291

Dont le siège social est

[Adresse 5]

[Adresse 5]

Représentée par : Me François TEYTAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : J125

Assistée par : Me Marine DEMONCHAUX, avocat au barreau de PARIS, toque : P496 substituant Me Arnault BUISSON FIZELLIER, avocat au barreau de PARIS

SA GAZ RÉSEAU DISTRIBUTION FRANCE - 'GRDF'prise en la personne de ses représentants légaux

RCS : 444 786 511

Dont le siège social est

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Représentée par : Me Patrick BETTAN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0078

Assistée par : Me Sabiha SERMET, avocat au barreau de PARIS, toque : P23

SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DE L'IMMEUBLE [Adresse 1] représenté par son Syndic le Cabinet [J] [G] prise en la personne de ses représentants légaux

Dont le siège social est

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représenté par : Me François TEYTAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : J125

Assisté par : Me Marine DEMONCHAUX, avocat au barreau de PARIS, toque : P496 substituant Me Arnault BUISSON FIZELLIER, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 28 Mai 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Christine BERTRAND, Présidente de chambre

Madame Valérie GERARD, Conseillère

Madame Madeleine HUBERTY, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Madame Sabrina RAHMOUNI

ARRÊT :

-CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Christine BERTRAND, Présidente et par Madame Coline PUECH , Greffier auquel a été remis la minute par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le litige est consécutif à l'incendie accidentel d'un immeuble situé [Adresse 1] le 17 décembre 2009 à la suite de l'arrachement du branchement d'une conduite de gaz située sous le trottoir, perpendiculairement à l'immeuble, par le godet de la mini-pelle de la société SCREG EST chargée d'effectuer le remplacement d'un coffret électrique à la demande d'ERDF, à la suite de l'échauffement sur les barrettes en interne du coffret.

Par ordonnance du juge des référés du tribunal de commerce de PARIS du 19 février 2010, le syndicat des copropriétaires a obtenu la désignation d'un expert, Monsieur [O] [K], qui a déposé son rapport le 23 septembre 2011.

Dans une instance distincte introduite par la société LA FOURNEE CROQUANTE, exploitante d'une boulangerie au rez de chaussée de l'immeuble, la cour d'appel de REIMS, par arrêt du 20 novembre 2012, infirmant partiellement une ordonnance du juge des référés du tribunal de commerce de REIMS du 21 décembre 2011, a condamné la société SCREG EST à payer une indemnité de 362.821 euros à la victime.

Par jugement du 6 février 2014, le tribunal de commerce de PARIS a statué en ces termes sur la demande d'indemnisation formée par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble :

«'Déboute la SA ALLIANZ IARD et le Syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 1] pris en la personne de son syndic le cabinet [J] [G] de leurs demandes à l'encontre de la SA GAZ RESEAU DISTRIBUTION FRANCE - GRDF.

Condamne , in solidum, la Société COLAS EST venant aux droits de la Société SCREG EST et la SA ELECTRICITE RESEAU DISTRIBUTION FRANCE - ERDF à payer à la SA ALLIANZ IARD la somme de 240 816,11€ et au Syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 1] pris en la personne de son syndic le cabinet [J] [G] la somme de 15 788.27€, déboutant pour le surplus,

Condamne, in solidum, la Société COLAS EST venant aux droits de la Société SCREG EST et la SA ELECTRICITE RESEAU DISTRIBUTION FRANCE - ERDF à payer à la SA ALLIANZ IARD et au Syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 1] pris en la personne de son syndic le cabinet [J] [G] la somme de 40 000€, par application des dispositions de l'article 700 du CPC,

Condamné la Société COLAS EST venant aux droits de la Société SCREG EST à payer à la SA GAZ RESEAU DISTRIBUTION FRANCE - GRDF la somme de 3 000€, au titre de l'article 700 du CPC, déboutant pour le surplus,

Dit les parties mal fondées dans leurs demandes plus amples ou contraires et les en déboute.

Ordonne l'exécution provisoire du présent dispositif.

Condamne, in solidum, la Société COLAS EST venant aux droits de la Société SCREG EST et la SA ELECTRICITE RESEAU DISTRIBUTION FRANCE - ERDF aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquides à la somme de 152,64 € dont 25,22 € de TVA'».

Par jugement du 5 juin 2014, le tribunal de commerce de PARIS a rectifié le jugement du 6 février 2014 comme suit :

«'Vu les articles 462 et 463 du cpc, complète le dispositif du jugement du 06.02.2014 prononcé par la 4ème chambre de ce tribunal en rajoutant, avant le paragraphe indiquant la condamnation prononcée au titre de l'article 700 du cpc, les deux paragraphes suivants :

Dit que la société COLAS EST venant aux droits de la société SCREG EST et la SA ELECTRICITE RESEAU DISTRIBUTION FRANCE - ERDF devront se garantir mutuellement à hauteur de leur pourcentage respectif de responsabilité.

Condamne la SA ELECTRICITE RESEAU DISTRIBUTION France - ERDF à rembourser à la société COLAS EST venant aux droits de la société SCREG EST 40% des indemnités réglées à la société RASSEMONT et mises à sa charge en exécution de l'ordonnance de référé du 14 décembre 2011 et de l'arrêt de la cour d'appel de REIMS du 20 novembre 2012 et condamne la SAELECTRICITE RESEAU DISTRIBUTION FRANCE - ERDF à rembourser à la société COLAS EST venant aux-droits de la société SCREG EST le montant des frais d'investigation exposés à la demande de l'expert, pour un montant de 1 530€, et ce à hauteur de 40%'».

La SA COLAS EST, venant aux droits de la SA SCREG EST, a fait appel du jugement du 6 février 2014 par déclaration du 21 mars 2014 et la SA ELECTRICITE RESEAU DISTRIBUTION FRANCE ' ERDF a fait appel des deux jugements par déclarations des 17 mars et 11 juillet 2014.

Les conclusions auxquelles il convient de se reporter pour l'examen des demandes et des moyens des parties sont les suivantes :

- SA GRDF : 4 mai 2015

- SA ERDF : 16 avril 2015

- ALLIANZ IARD et SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES : 6 mai 2015

- SA COLAS EST : 30 avril 2015

'''

sur la recevabilité de l'action du syndicat des copropriétaires

Le tribunal a estimé qu'une autorisation d'agir a été donnée au syndic par l'assemblée générale des copropriétaires du 16 avril 2012.

La société ERDF soutient que l'assemblée générale des copropriétaires n'a pas adopté une résolution autorisant le syndic de la copropriété à agir après un vote conforme à l'article 24 de la loi du 10 juillet 1965 mais qu'il n'a été donné qu'une simple information non soumise au vote.

Conformément aux dispositions de l'article 55 du décret du 17 mars 1967, le syndic, seul habilité à représenter la copropriété en sa qualité de mandataire chargé d'exécuter les délibérations de l'assemblée générale, ne peut agir en justice au nom du syndicat sans y avoir été autorisé par une décision de l'assemblée générale.

La question du pouvoir à donner au syndic d'engager toute procédure consécutive à l'incendie était expressément mentionnée dans l'ordre du jour de l'assemblée générale du 16 avril 2012.

Cependant, la délibération relative à ce point de l'ordre du jour contient une information donnée par l'avocat de la société d'assurance sur la procédure envisagée par elle pour récupérer l'indemnité payée au syndicat des copropriétaires et conclut par ces termes, sans indication de vote d'une quelconque résolution précise :

«'le syndicat autorise Me [J] à suivre la procédure pour la copropriété, en parallèle à celle que le GAN engagera, en recourant aux services du même Conseil'».

A défaut de vote d'une résolution autorisant le syndic à agir en justice pour récupérer les «'pertes indirectes (') et les pertes supplémentaires de loyers pour les copropriétaires'», l'autorisation donnée à l'avocat de la compagnie d'assurance sans vote n'ayant pas valeur d'une autorisation donnée au syndic, la fin de non recevoir soulevée par la société ERDF est bien fondée.

sur la responsabilité

Pour déterminer les causes du sinistre, l'expert a repris la chronologie des événements ainsi que les données factuelles certaines qui l'ont entouré, comprenant l'audition des salariés de la SA SCREG présents sur les lieux :

-Dans la matinée, un échauffement des barrettes du coffret électrique placé sur rue s'est produit et a donné lieu à un flux thermique qui a provoqué la dégradation de l'isolant des quatre conducteurs en amont des quatre jeux de barres en surchauffe et s'est prolongé dans la tête du câble électrique.

-Cet incident est à l'origine de l'intervention de la SA SCREG EST dans la soirée pour creuser une tranchée en vue de réparer le désordre, en présence de deux agents d'ERDF.

-L'installation électrique est restée sous tension pendant l'opération, un technicien d'ERDF venu sur les lieux en fin de matinée ayant coupé l'alimentation des appartements et maintenu l'alimentation de la boulangerie située au rez de chaussée de l'immeuble.

-Les opérateurs, après avoir découpé le bitume au moyen d'une disqueuse et décapé la zone de fouille avec une mini-pelle avec godet, ont sondé le sous-sol avec des pelles jusqu'à découvrir les fourreaux de téléphonie ainsi qu'une canalisation non identifiée, l'un d'eux s'est remis aux commandes de la pelle pour dégager la terre tandis que l'autre se trouvait hors de la tranchée.

-Le godet a arraché une conduite de gaz en polyéthylène non signalée distribuant du gaz de ville sous une pression de 4 bars jusqu'à un coffret de détente destiné à abaisser la pression à 21 millibars, coffret que GRDF a démonté avant l'expertise.

-Une fuite de gaz s'est dirigée vers la façade et la mini-pelle, mise à l'arrêt avant l'inflammation, n'a subi aucune détérioration.

-Le conducteur de la mini-pelle n'a pas été atteint, a vu le gaz s'élever le long de la façade en s'enflammant, est monté dans la mini-pelle et l'a démarrée pour la reculer, tandis que son collègue, qui s'était approché de la tranchée et se trouvait sur la trajectoire de la fuite de gaz entre la mini-pelle et le mur de l'immeuble, a été blessé lors de son embrasement.

L'expert attribue l'origine de l'incendie au cumul de la surchauffe du coffret de branchement électrique, de la présence de la canalisation de branchement de gaz et de l'arrachement de la canalisation par la pelleteuse et précise que le mélange air/gaz en concentration favorable s'est enflammé au contact du point chaud.

- responsabilité de la SA COLAS EST

La responsabilité de la SA COLAS EST est recherchée principalement sur le fondement de l'article 1384 alinéa 1 du code civil en sa qualité de gardienne de la mini-pelle qui est à l'origine de la fuite de gaz.

A défaut de preuve d'un cas de force majeure qui n'est pas invoqué en l'espèce, la SA COLAS EST, qui ne conteste pas avoir eu la garde de la mini-pelle qui a provoqué l'accident, est responsable des dommages causés à la victime, subrogée par la SA ALLIANZ IARD.

- responsabilité de la société ERDF

La responsabilité de la société ERDF est recherchée sur le fondement de l'article 1382 du code civil.

L'expert tient le coffret électrique en façade de l'immeuble pour un élément déclencheur de l'incendie en raison de la direction de la fuite de gaz et estime qu'en ne mettant pas l'installation hors tension la société ERDF a entretenu l'échauffement, qui a eu un effet «'allumette'» qui aurait été évité par la mise hors tension.

Le tribunal a retenu à la charge de la société ERDF, qui avait dépêché deux techniciens sur le site au moment des faits, une faute de surveillance des opérations et une seconde faute ayant consisté à laisser son boîtier en surchauffe.

Pour contester sa responsabilité dans la réalisation des dommages, la société ERDF soutient :

-que l'alimentation électrique n'a eu aucun rôle causal dans l'inflammation du gaz

-que l'inflammation provenait de la mini-pelle

-que l'existence de l'effet «'allumette'» n'est pas démontrée

-que les sources d'inflammation envisageables dans un rayon d'un mètre cinquante autour de la rupture de la canalisation étaient le moteur de la mini-pelle, les éclairages de nuit, le frottement des chenilles de la pelle sur le sol et du godet sur les pierres, procédant à des calculs de probabilité de chacune de ces sources de chaleur, excepté le boitier électrique, partant du postulat que 0,21 milliJoule d'énergie minimale est nécessaire pour provoquer l'inflammation d'un mélange gazeux.

Elle affirme, contrairement aux éléments de faits recueillis par l'expert, que l'échappement s'est projeté vers la mini-pelle et non vers le mur, et envisage, pour en rejeter la possibilité, le trajet d'une étincelle ayant couvert la distance entre le boîtier et la canalisation percée.

Toutes les sources d'incendie envisagées par la société ERDF ne sont cependant que des hypothèses pouvant être étendues à l'infini et formulées hors de toute constatation, alors qu'il est certain que le boîtier électrique était en surchauffe et que l'alimentation électrique n'avait pas été coupée pendant l'intervention de la SA SCREG EST.

Le raisonnement sur le trajet des étincelles est très éloigné de la réalité des faits, eu égard à la force et à la vitesse d'un jet de gaz sous pression de 4 bars s'échappant d'une canalisation.

Les constatations opérées par l'expert, la position du salarié de la SA SCREG EST blessé par l'inflammation et le point de départ et l'existence même de l'incendie de l'immeuble établissent avec certitude que le gaz s'est dirigé vers l'entrée de l'immeuble où se situait le boîtier électrique et non vers la mini-pelle où les éclairages publics, qui n'ont pas été atteints par les flammes.

Pour retenir l'effet «'allumette'» du boîtier , l'expert a fondé ses conclusions sur un examen de ses éléments internes, particulièrement sur le constat de leur état après l'incendie démontrant que les désordres qui les affectaient étaient la conséquence d'un amorçage et non de la chaleur de la fuite de gaz enflammée, qui ne dépasse pas 600° alors que la fusion du cuivre à l'intérieur du boîtier prouve que la chaleur a dépassé 1.000° (annexe 4 photographies 19, 20, 21- réponses aux dires page 25).

La société ERDF soutient que la mini-pelle n'a jamais été examinée par l'expert, pour avoir été restituée au loueur du matériel avant le début de l'expertise, de telle sorte que l'affirmation de l'expert selon laquelle la mini-pelle n'a pas été détériorée par les flammes, ne reposerait sur aucune constatation personnelle.

Cette affirmation de l'expert repose cependant sur une attestation du loueur de l'engin, dont l'exactitude n'est pas démentie (annexe 15).

Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, c'est à bon droit que le tribunal a retenu le rôle causal, dans la survenance du sinistre, d'une faute commise par la société ERDF en ne coupant pas l'alimentation électrique avant les travaux afin de mettre fin à la surchauffe du boîtier qui est à l'origine de l'incendie, et ce malgré la présence de deux techniciens ERDF sur les lieux pendant toute l'opération.

Le jugement doit être confirmé sur ce point.

- responsabilité de la société GRDF

La responsabilité de la société GRDF est recherchée sur le fondement de l'article 1382 du code civil.

L'expert a relevé que la canalisation était enfouie, de façon décroissante, de 50 cm au droit de la bordure du trottoir à 36,5 cm près des coffrets, la profondeur d'enfouissement au point d'arrachement étant de 42/43 cm, alors que la profondeur d'enfouissement imposée par la réglementation, quelle que soit le texte applicable est de 60 ou 80 cm.

Pour contester sa responsabilité dans la réalisation des dommages, la société GRDF soutient, comme elle l'a fait en cours d'expertise, que la réglementation retenue par l'expert pour définir ses obligations au regard de la localisation des canalisations de gaz n'est pas applicable, affirmant que la conduite arrachée par la SA SCREG n'est pas une «'canalisation'» mais un «'branchement'» au sens de l'arrêté du 2 août 1977.

Les dispositions de l'arrêté du 11 mai 1970 s'appliquent effectivement aux canalisations de gaz sous la double conditions que le matériel constituant les éléments tubulaires des ouvrages concernés soit de l'acier et que la pression effective du gaz dépasse 4 bars, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

L'arrêté du 2 août 1977 définit le «'branchement'» comme une conduite reliant une conduite de réseau de distribution publique aux installations intérieures des abonnés, comportant dans les immeubles collectifs un branchement d'immeuble situé en amont de l'organe de coupure et la conduite d'immeuble (horizontale) et la ou les conduites montantes (verticales)

L'expert a observé que, dans l'immeuble litigieux, l'organe de coupure était situé dans la cour de l'immeuble, ce qui n'a cependant pas pour effet d'exclure de l'application du 2 août 1977 la partie de conduite située en amont de cet organe de coupure, qui correspond exactement à la définition du «'branchement'».

L'arrêté du 13 juillet 2000 est applicable à tous les réseaux d'alimentation en gaz comprenant notamment les conduites de distribution, les postes de détente, les organes de coupure, les branchements ainsi que les accessoires (article 2), sous la restriction que les articles relatifs à la conception et à la construction ne s'appliquent pas aux parties de réseaux en service à sa date de parution (article 3).

Au titre de la conception du réseau, figure l'obligation pour les branchements neufs en polyéthylène exploités à une pression supérieure à 50 millibars d'être équipés d'un organe de protection au niveau de leur raccordement sur la conduite principale, d'être enfouis à une profondeur permettant de les protéger des agressions externes et d'être signalés par un dispositif avertisseur chaque fois qu'une ouverture de tranchée est réalisée.

En l'espèce, il appartient à la SA ALLIANZ, qui recherche la responsabilité de la société GRDF, de démontrer qu'une faute a été commise au regard de la réglementation applicable et par conséquent, seules les obligations prévues par l'arrêté du 13 juillet 2000 étant susceptibles de trouver application en l'espèce, de prouver que la conduite en cause a été réalisée après le 13 juillet 2000.

A défaut, la société GRDF, dont la faute n'est pas établie, n'engage pas sa responsabilité dans la réalisation du dommage, n'ayant en outre jamais été avisée de l'intervention de la SA SCREG EST.

Le jugement doit être confirmé sur ce point.

sur le préjudice

Le montant de la condamnation prononcée par le tribunal au profit de la SA ALLIANZ n'est pas contesté et le jugement qui lui a alloué la somme de 240.816,11 euros doit être confirmé.

Sur les demandes de la SA COLAS EST

- en garantie de sa condamnation

La SA COLAS EST est fondée à rechercher la garantie de la société ERDF sur le fondement de l'article 1147 du code civil en raison de sa faute examinée ci-dessus dans ses rapports avec les victimes de l'incendie, qui constitue un manquement dans l'exécution de ses obligations contractuelles pour ne pas avoir mis la SA SCREG EST en mesure d'exécuter son contrat dans des conditions de sécurité optimales.

Ce manquement ne l'exonère que partiellement de sa propre responsabilité, dès lors qu'elle avait une parfaite connaissance du problème électrique justifiant son intervention et qu'il lui était loisible d'exiger de sa cocontractante la mise hors tension du réseau avant le début du chantier.

Dans ces circonstances, le recours de la SA COLAS EST est justifié à hauteur de 40 %, conformément à la décision du tribunal.

Elle recherche la responsabilité de la société GRDF sur le fondement de l'article 1384 alinéa 1 du code civil en sa qualité de gardienne du gaz à l'origine des dommages.

La société GRDF soulève à juste titre la force majeure pour s'exonérer de la responsabilité qu'elle est susceptible d'encourir en sa qualité de gardienne du gaz, l'accident provoqué par la SA SCREG EST dans les conditions susvisées, sans qu'elle n'ait été avisée du creusement de la tranchée et sans interruption des travaux après la découverte de la canalisation par les salariés de la SA SCREG EST constituant une circonstance imprévisible et irrésistible exonératoire.

en remboursement des sommes versées à la société LA FOURNEE CROQUANTE et engagées en cours d'expertise

La SA COLAS EST a payé à la société ERDF et à la société GRDF chacune une somme de 132.314,88 euros représentant le tiers de l'indemnité mise à sa charge par l'arrêt de la cour d'appel de REIMS du 20 novembre 2012 au profit de la société LA FOURNEE CROQUANTE et avait payé auparavant à cette dernière société la somme de 132.314,88 euros.

Elle demande le remboursement d'une part de la somme de 362.821 euros qu'elle a payée à concurrence du pourcentage de responsabilité mise à la charge de la société ERDF.

Elle a par ailleurs exposé des dépenses en cours d'expertise pour pratiquer une fouille devant l'immeuble pour le compte de qui il appartiendra, dépense consécutive au sinistre qui incombe aux deux responsables à concurrence de leur part de responsabilité dans la réalisation du dommage.

Ses demandes, conformes aux dispositions de l'article 1214 du code civil, sont bien fondée.

PAR CES MOTIFS,

INFIRME le jugement sur la recevabilité de la demande du syndicat des copropriétaires

statuant à nouveau,

DECLARE la demande du syndicat des copropriétaires irrecevable

CONFIRME le jugement pour le surplus,

Y ajoutant,

DIT qu'il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la société ERDF et le syndicat des copropriétaires aux dépens de la procédure d'appel, chacun pour moitié.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 14/06016
Date de la décision : 15/01/2016

Références :

Cour d'appel de Paris G6, arrêt n°14/06016 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-01-15;14.06016 ?
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