Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 2
ARRET DU 07 JANVIER 2016
(n°3, 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 14/06929
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 19 Mars 2014 -Tribunal de Commerce de MELUN - RG n° 2013R177
APPELANTS
Monsieur [I] [I]
[Adresse 1]
[Localité 1]
né le [Date naissance 1] 1959 à [Localité 2]
SARL COTE D'AZUR ROUTAGE
représentée par son gérant y domicilié
[Adresse 1]
[Localité 1]
Représentée par Me Charles-hubert OLIVIER de la SCP LAGOURGUE & OLIVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0029
Assistée de Me Michel LOPRESTI, avocat au barreau de GRASSE
INTIMES
Monsieur [E] [H]
[Adresse 2]
[Localité 3]
né le [Date naissance 2] 1964 à [Localité 4]
Monsieur [Q] [H]
[Adresse 2]
[Localité 3]
né le [Date naissance 3] 1934 à [Localité 5]
Monsieur [C] [H]
[Adresse 2]
[Localité 3]
né le [Date naissance 4] 1961 à [Localité 4]
Monsieur [V] [H]
[Adresse 3]
[Localité 6]
né le [Date naissance 5] 1953 à [Localité 4]
SARL PARISO
agissant poursuites et diligences de son Gérant et tous représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 3]
SAS TRANSPOST MIDI PYRENEES
Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 7]
Représentés par Me Michel BLIN de la SCP SCP BLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0058
Assistés de Me Thierry JOVE DEJAIFFE de la SELARL JOVE-LANGAGNE-BOISSAVY-AVOCATS, avocat au barreau de MELUN
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Novembre 2015, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Monsieur Frédéric CHARLON, Président de chambre, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Frédéric CHARLON, président
Madame Evelyne LOUYS, conseillère
Madame Mireille DE GROMARD, conseillère
Qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Mme Sonia DAIRAIN
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Frédéric CHARLON, président et par Mme Sonia DAIRAIN, greffier.
La Sarl Cote d'Azur Routage a deux associés égalitaires M. [E] [H] et M. [I] [T] [I].
Elle occupe des locaux situés à [Localité 8]) qui lui ont été donnés à bail par la Sarl Pariso moyennant un loyer annuel de l'ordre de 400 000 euros HT.
Le capital social de la Sarl Pariso d'un montant de 9 147 euros est divisé en 60 parts sociales attribuées aux associés à proportion de leurs droits respectifs à savoir':
M. [Q] [H]': 15 parts en usufruit
Mrs [C], [E] et [V] [H]': 11 parts en pleine propriété et 5 parts en nue-propriété
M. [I] [T] [I]': 6 parts en pleine propriété
La société Transport Midi-Pyrénées': 3 parts en pleine propriété
La société Cote d'Azur Routage': 3 parts en pleine propriété.
M. [E] [H] est le gérant de la société Pariso.
Au cours de l'année 2008, les relations se sont notablement dégradées entre la famille [H] et la société Cote d'Azur Routage et M. [I] ce qui a donné lieu à différents conflits judiciaires.
Se plaignant d'être tenus dans l'ignorance de la situation comptable, juridique, fiscale et financière et de manière générale sur les affaires sociales de la société Pariso , les deux associés minoritaires ont saisi le juge des référés du tribunal de commerce de Melun aux fins de voir désigner un expert judiciaire avec la mission figurant dans l'acte introductif d'instance au visa des articles L 223-26, L 223-37 et R 223-30 du code de commerce.
Par ordonnance de référé du 19 mars 2014, le président du tribunal de commerce de Melun a déclaré les demandes de la Sarl Cote d'Azur Routage et M. [I] [I] recevables, les a déboutés de leurs prétentions, dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile et les a condamnés aux dépens.
La Sarl Cote d'Azur Routage et M. [I] [I] ont interjeté appel de cette décision.
Par conclusions signifiées le 25 juin 2014 auxquelles il convient de se reporter, ils demandent à la cour de':
- confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle les a déclarés recevables en leurs demandes,
- l'infirmer pour le surplus et statuant à nouveau,
- ordonner la désignation d'un expert judiciaire avec la mission figurant dans leurs écritures,
-condamner M. [E] [H] à leur payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Par conclusions signifiées le 20 août 2014, la Sarl Pariso, M. [Q] [H],'Mrs [C], [E] et [V] [H]'et la société Transport Midi-Pyrénées'demandent à la cour de':
- confirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions,
- débouter la Sarl Cote d'Azur Routage et M. [I] [T] [I] de leurs demandes,
' les condamnés chacun à leur payer la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que solidairement aux entiers dépens.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 28 octobre 2015.
SUR CE, LA COUR,
Considérant que les appelants font valoir que les derniers documents comptables portés à leur connaissance par lettre recommandée avec AR du 1er mars 2013 au titre de la convocation à l'assemblée générale annuelle appelée à statuer sur les comptes de la société Pariso de l'exercice clos le 31 décembre 2011, tenue hors délai, révèlent de nombreuses et graves anomalies'; qu'il en est ainsi des postes «'salaires et traitements'», «'charges exceptionnelles sur opérations de gestion'», «'clients'» et «'autres créances'»'; que la nature des actifs établissent que la société Pariso joue un rôle de financier au profit de plusieurs entités juridiques dont le point commun réside dans leur appartenance directe ou indirecte à la «'nébuleuse'» des sociétés de la famille [H]'; que l'examen du poste passif fait apparaître une explosion exponentielle du montant des emprunts souscrits par la société Pariso et des opérations totalement incohérentes'; que leur demande d'expertise de gestion est parfaitement légitime';
Considérant que la Sarl Pariso, M. [Q] [H],'Mrs [C], [E] et [V] [H]'et la société Transport Midi-Pyrénées'répliquent que chaque associé peut prendre connaissance au siège social de la société des documents concernant les trois derniers exercices conformément aux dispositions légales'; que la Sarl Cote d'Azur Routage et M. [I] ne justifient pas avoir sollicité l'accès à ces pièces'; qu'ils sont convoqués aux assemblées générales comme l'ensemble des actionnaires auxquelles ils n'assistent pas alors qu'ils auraient pu profiter des ces assemblées pour interroger le gérant et les associés de la société Pariso sur les questions qu'elle évoque devant la cour';
Considérant que la recevabilité de l'action initiée par la Sarl Cote d'Azur Routage et M. [I] n'est pas discutée devant la cour';
Considérant que l'article L 223-26 du code de commerce prévoit que «'tout associé à la faculté de poser par écrit des questions auxquelles le gérant est tenu de répondre au cours de l'assemblée. L'associé peut, en outre, obtenir et à toute époque, communication dans les conditions fixées par décret en conseil d'Etat, des documents sociaux déterminés par le dit décret et concernant les trois derniers exercices'»';
Considérant qu'il appartient au juge saisi d'une demande d'expertise de gestion d'apprécier le caractère sérieux de la demande, ce qui est avéré si l'opération critiquée est susceptible de nuire à l'intérêt social'; qu'ainsi justifient la désignation d'un expert des présomptions sérieuses d'irrégularités et des décisions ayant une incidence sur le devenir de la société';
Considérant qu'en l'espèce et si même s'agissant d'une Sarl, l'associé peut s'adresser directement au juge sans phase préalable d'interrogation des dirigeants comme la connaît les sociétés anonymes, il résulte des pièces du dossier que les appelants qui se prévalent de plusieurs opérations comptables enregistrées au cours de l'exercice clos le 31 décembre 2011 «'particulièrement alarmantes et de nature à porter une atteinte irréversible à l'intérêt social'», ne justifient pas avoir usé de leurs prérogatives leur permettant de consulter les documents sociaux au siège de la société Pariso ou que l'accès à ces pièces leur aurait été refusé'; que la lettre recommandée du 1er mars 2013 qui a été adressée à M. [I] par le conseil de la société Pariso, en réponse à celui qu'ils avaient eux-mêmes envoyé le 25 février 2013, rappelait cette possibilité de consultation des documents sociaux ainsi que celle de poser toute question écrite ou orale auxquelles le gérant de la société répondra au cours de l'assemblée';
Considérant encore que si la société Cote d'Azur Routage et M. [I] relèvent qu'ils ont été convoqués par lettre recommandée avec AR du 1er mars 2013 pour participer à l'assemblée générale annuelle appelée à statuer sur les comptes de la société Pariso au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2011, qui légalement doit se tenir dans les six mois de la clôture de l'exercice, force est de constater que M. [I] et la société Cote d'Azur Routage, étaient absents lors de cette assemblée qui s'est tenue le 22 mars 2013 alors même qu'il est établi par les courriers du 1er mars 2013 qu'ils ont été destinataires par lettre recommandée AR de l'ordre du jour de cette assemblée et ainsi que des pièces à savoir': le rapport de la gérance, les comptes annuels arrêtés au 31 décembre 2011, le rapport spécial de la gérance et un formulaire de procuration'et que s'ils affirment «'avoir interpellé de manière explicite la société Pariso et son gérant pour qu'ils fournissent des explications sur plusieurs opérations de gestion'», ces allégations ne sont étayées par aucun élément probant';
Considérant que la fonction essentielle de l'expertise de gestion est d'assurer l'information des associés minoritaires'; qu'elle correspond à un besoin d'information et de contrôle de certaines opérations de gestion accomplies par les dirigeants sociaux';
Considérant qu'il est avéré que les appelants n'ont pas usé des moyens légaux à leur disposition pour s'informer sur les opérations qualifiées «'d'alarmantes'»'; qu'en outre, en l'état du dossier, les prétendues irrégularités dont ils font état au cours de la période allant du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2011 portant sur l'augmentation de la masse salariale et la dégradation du ratio masse salariale/chiffre d'affaires, sur les créances détenues par la société Pariso sur certaines sociétés dénommées ainsi que sur la souscription d'emprunts ne sont pas suffisamment établies et ressortent principalement de leurs seules affirmations de sorte qu'elles ne permettent pas de retenir qu'il existe une éventualité d'atteinte à l'intérêt social comme il est soutenu';
Considérant qu'il suit de ce qui précède que le caractère sérieux de la demande d'expertise de gestion n'est manifestement pas démontré'; que la demande de la société Cote d'Azur Routage et de M. [I] doit être rejetée' et l'ordonnance entreprise confirmée';
PAR CES MOTIFS
CONFIRME l'ordonnance entreprise.
Y ajoutant,
CONDAMNE la Sarl Cote d'Azur Routage et M. [I] [T] [I] à payer chacun une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
CONDAMNE IN SOLIDUM la Sarl Cote d'Azur Routage et M. [I] [T] [I] aux dépens qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER,
LE PRÉSIDENT,