Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 5
ARRET DU 07 JANVIER 2016
(n° , 8 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 14/04524
Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Décembre 2013 - Tribunal de Commerce de PARIS - 10ème chambre - RG n° J2010000166
APPELANTE
SARL MYRINA
ayant son siège social [Adresse 1]
[Localité 1]
N° SIRET : 389 250 614
prise en la personne de son Gérant domicilié en cette qualité audit siège
Représentée par Me Bruno REGNIER de la SCP REGNIER - BEQUET - MOISAN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050
Assistée de Me Muriel HUMBERT, avocat au barreau de PARIS, toque : E1041
INTIMES
Maître [J] [C], ès-qualités de mandataire liquidateur de la société ELBA
demeurant [Adresse 2]
[Localité 2]
Représentée par Me Stéphane FRIEDMANN de la SCP SIKSOUS FRIEDMANN, avocat au barreau de PARIS, toque : P0425
GROUPAMA PARIS VAL DE LOIRE - Caisse Régionale d'Assurance Mutuel Agricole PARIS VAL DE LOIRE
ayant son établissement départemental [Adresse 3]
[Localité 3]
ayant son siège social [Adresse 4]
[Localité 4]
N° SIRET : 382 285 2600
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Me Philippe BUISSON de l'Association BUISSON & ASSOCIES, avocat à la Cour, toque : R293
Assistée de Me Marjolaine ROUXEL, avocat au barreau du VAL D'OISE, substituant Me Philippe BUISSON de l'Association BUISSON & ASSOCIES, avocat à la Cour, toque : R293
SARL MANDALOUN
ayant son siège social [Adresse 5]
[Localité 5]
N° SIRET : 449 794 973
prise en la personne de son Gérant domicilié en cette qualité audit siège
Représentée par Me Dominique OLIVIER de l'AARPI Dominique OLIVIER - Sylvie KONG THONG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0069
Assistée de Me Sandrine BELLIGAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : E1971
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 Octobre 2015, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Colette PERRIN, Présidente de chambre, et Mme Isabelle ROHART-MESSAGER, Conseillère, chargée du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Colette PERRIN, Présidente de chambre
Monsieur Louis DABOSVILLE, Président de Chambre
Mme Isabelle ROHART-MESSAGER, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Monsieur Bruno REITZER
ARRÊT :
- répute contradictoire.
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Colette PERRIN, Présidente et par Monsieur Bruno REITZER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
****
Rappel des faits et procédure
Par jugement du 20 décembre 2013 le tribunal de commerce de Paris a :
- Débouté la SARL MYRINA de I'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- Débouté la SARL ELBA de ses demandes reconventionnelles,
- Condamné la SARL MYRINA à payer à chaque partie défenderesse la somme de 700 € par application de l'article 700 du code de procédure civile, et les déboute pour le surplus de leur demande,
- Condamné la SARL MYRINA aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 198,78 € dont 32,36 € de TVA.
La société MYRINA a interjeté appel le 28 février 2014.
Dans ses dernières conclusions du 09 mars 2015 la société MYRINA demande à la cour de :
- Déclarer la Sarl MYRINA recevable et bien fondée en ses demandes.
- Dire et juger que la Sarl MYRINA prouve l'existence de désordres à la suite des contrats d'entreprise conclus avec la Sarl ELBA et la Sarl MANDALOUN.
- Dire et juger que la Sarl ELBA et la Sarl MANDALOUN ont commis des fautes contractuelles.
- Dire et juger que les fautes contractuelles de la Sarl ELBA et la Sarl MANDALOUN sont à l'origine directe du préjudice subi moral et financier par la Sarl MYRINA.
A titre subsidiaire,
- Dire et juger que la Sarl MANDALOUN a manqué à ses obligations en s'abstenant d'établir un procès-verbal en bonne et due forme.
- Dire et juger que cette faute est à l'origine directe du préjudice subi par la Sarl MYRINA consistant en la perte de chance de pouvoir établir les désordres affectant l'ouvrage réalisé par la Sarl ELBA et d'obtenir la réparation de son préjudice.
En conséquence,
- Condamner in solidum la Sarl MANDALOUN et GROUPAMA à payer à la Sarl MYRINA la somme de 80.000 € à titre de dommages et intérêts ; pour la société ELBA, fixer au passif de cette dernière la créance de la société MYRINA à la somme de 80 000 €.
En tout état de cause,
- Déclarer la société ELBA représentée par Maître [C] irrecevable et subsidiairement mal fondée en son appel incident et l'en débouter.
- Rejeter des débats les pièces invoquées par la société ELBA en annexe de ses conclusions du 12 février 2015.
- Débouter les intimées de toutes leurs demandes, fins et conclusions.
- Condamner in solidum la Sarl MANDALOUN et GROUPAMA à payer à la Sarl MYRINA une somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du CPC ; pour la société ELBA, fixer au passif de cette dernière la créance de la société MYRINA à la somme de 5 000 €.
- Condamner la Sarl ELBA et la Sarl MANDALOUN et GROUPAMA aux entiers dépens de la présente instance qui seront recouvrés par la SCP REGNIER BEQUET MOISAN, Avocat à la Cour, conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC.
Dans ses dernières conclusions du 12 février 2015 la société ELBA, représentée par son liquidateur judiciaire Maître [C], demande à la cour de :
- Confirmer le jugement prononcé le 20 décembre 2013 par le Tribunal de Commerce de PARIS en toutes ses dispositions,
Dès lors,
- Rejeter les demandes de la SOCIÉTÉ MYRINA. Condamner la SOCIÉTÉ MYRINA au paiement de la somme de 5128,73 euros TTC en règlement de la facture 080603,
- Condamner la SOCIÉTÉ MYRINA au paiement de 10000 euros à titre de dommages et intérêt pour procédure abusive.
- Condamner la SOCIÉTÉ MYRINA au paiement de 3000 euros au titre de l'article 700 du
CPC.
- Subsidiairement Condamner la société LINDOLAQ 77 à garantir la société ELBA de toute condamnation mise à sa charge.
- Condamner la compagnie GENERALI IARD à garantir la société ELBA de toute condamnation mise à sa charge.
- Condamner la SOCIÉTÉ MYRINA aux entiers dépens.
Dans ses dernières conclusions du 05 novembre 2014 la société MANDALOUN demande à la cour de :
A titre principal :
- Confirmer purement et simplement le jugement rendu le 20 décembre 2013 par le Tribunal de Commerce de PARIS.
A titre subsidiaire, si par impossible le Tribunal devait retenir la responsabilité de la société MANDALOUN et infirmer le jugement entrepris :
- Condamner GROUPAMA à garantir la société MANDALOUN de l'ensemble des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre.
- Condamner la société MYRINA à payer à la société MANDALOUN la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
- Condamner la société MYRINA aux entiers dépens d'appel que maître OLIVIER Avocat, pourra recouvrer directement en application de l'article 699 du CPC.
Dans ses dernières conclusions du 19 septembre 2014 la société GROUPAMA PARIS VAL DE LOIRE demande à la cour de :
A titre principal :
Voir confirmer en tous ces termes ledit Jugement.
En conséquence,
Sur l'appel principal de la Société MYRINA
- Déclarer la Société MYRINA irrecevable et mal fondée en son appel principal.
- L'en débouter.
A titre subsidiaire :
Sur l'appel provoqué de la Société MANDALOUN contre la Société GROUPAMA PARIS VAL DE LOIRE.
- Constater la prescription biennale de l'action de la société MANDALOUN.
En conséquence,
- Déclarer irrecevable l'appel provoqué de la Société MANDALOUN envers la Société GROUPAMA PARIS VAL DE LOIRE.
- Débouter la Société MANDALOUN de toutes ses demandes, fins et conclusions telles que dirigées à l'encontre du GROUPAMA PARIS VAL DE LOIRE.
- Retenir par contre ses arguments invoqués contre la Société MYRINA, en ce non contraires à ceux invoqués par la Société GROUPAMA PARIS VAL DE LOIRE.
Sur l'absence de garantie du préjudice par la Société GROUPAMA :
- Constater que la garantie de la société GROUPAMA PARIS VAL DE LOIRE n'a pas vocation à s'appliquer.
- Débouter la société MANDALOUN de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions à l'égard de la société GROUPAMA PARIS VAL DE LOIRE.
En toutes hypothèses :
- Condamner les succombants à payer à la Société GROUPAMA PARIS VAL DE LOIRE la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
- Condamner les succombants aux entiers dépens d'appel qui seront recouvrés par Me Philippe BUISSON dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 24 septembre 2015.
Il résulte de l'instruction du dossier les faits suivants :
Par contrat du 7 mars 2008, la société Myrina, qui exploite une boutique de bijoux fantaisie dans la galerie marchande du [Adresse 6], avait confié à la société Mandaloun une mission d'architecture intérieure et de décoration de sa boutique pour des honoraires fixés forfaitairement à 13 500 € hors taxes et il était précisé que l'enveloppe financière de l'ensemble de l'opération d'architecture d'intérieur était de l'ordre de 50 000 € hors taxes.
La société Mandaloun fait valoir que la société maître d'ouvrage n'a pas retenu le devis qu'elle avait fait et faire par une société LB CONCEPT, mais que le 12 mai 2008, la société Myrina confiait à la société Elba une mission d'entreprise générale pour un montant de 35 818 € hors taxes, prix ferme et non révisable. Cette dernière émettait des factures pour un montant de 31 529,76 euros hors taxes soient 37 709,58 euros TTC qui étaient réglés.
La société Myrina faisant état de malfaçons, faisait établir un constat du huissier le 28 novembre 2008 constatant la présence de rayures sur les présentoirs laqués, une peinture granuleuse sur le mur, des fissures verticales au niveau du point de jonction entre les modules de présentation entre leur montant vertical leur montant horizontal, l'affaissement des étagères ainsi que des fissures verticales.
Après plusieurs courriers de réclamation elle adressait un courrier recommandé au début l'année 2009 à la société Elba listant les travaux non terminés, et mal réalisés, et la mettait en demeure de les terminer.
De son côté la société maître d''uvre la relançait également, de multiples reprises, aux fins de voir les travaux terminés. De ce fait les travaux n'étaient pas réceptionnés.
C'est dans ces circonstances que la société Myrina assignait les sociétés Elba et Mandaloun devant tribunal de commerce de Paris par acte du 2 décembre 2009, en paiement d'une somme de 80 000 € à titre principal.
Puis par acte du 28 août 2012, la société Mandaloun assignait en garantie son assureur de la société Groupama.
C'est dans ces conditions de fait et de droit qu'est intervenu le jugement susvisé présentement entrepris.
Par jugement du 17 décembre 2014, le tribunal de commerce de Créteil a prononcé la liquidation judiciaire de la société Elba.
Motifs de la décision
Sur la demande d'irrecevabilité des conclusions de Me [C]
La société Myrina demande à la cour de prononcer l'irrecevabilité des conclusions de Me [C], es qualités de liquidateur judiciaire de la société Elba. Or, il résulte de l'article 914 du code de procédure civile que le conseiller de la mise en état est seul compétent pour déclarer les conclusions irrecevables et que les parties ne sont plus recevables à le faire après son dessaisissement, à moins que leur cause ne survienne ou ne soit révélée postérieurement. En l'espèce, la société appelante reproche à Maître [C], ès qualités, de n'avoir conclu que le 12 février 2015, c'est-à-dire à une époque où le conseiller de la mise en état n'était pas dessaisi.
En conséquence, en application de l'article 914 du code de procédure civile la société appelante est irrecevable à solliciter irrecevabilité des conclusions de Maître [C], ès qualités.
Sur la responsabilité de la société maître d''uvre
A l'appui de ses demandes, la société Myrina verse aux débats un rapport d'expertise du cabinet d'expertise SARETEC, mandaté par sa propre compagnie d'assurances, dont la société Mandaloun fait valoir qu'il lui est inopposable au motif qu'il s'agit d'une expertise privée, étant précisé qu'elle n'a pas été convoquée et qu'elle n'était pas présente aux opérations d'expertise.
La société Myrina soutient que la société Mandaloun aurait manqué à son devoir de conseil en ce que les meubles réalisés n'auraient pas été adaptés à sa boutique, car les matériaux de laquage étaient trop fragiles pour un usage intensif. Elle fait valoir que l'expertise de la société SARETEC mettrait en évidence le fait que la définition du projet était trop imprécise car aucun document n'indiquait le type même de la laque à utiliser ni son épaisseur, alors que pourtant, selon elle, il entrait dans la mission de la société Mandaloun d'apporter ces précisions.
Elle reproche enfin la mauvaise fixation des étagères.
La société Mandaloun fait valoir que les défauts allégués relèvent de la réalisation et non de la conception. En effet les défauts affectant la peinture laquée granuleuse au toucher et visuellement étaient apparents lors de la réception et c'est dans ces conditions qu'en sa qualité de maître d''uvre, elle a refusé de réceptionner les meubles laqués litigieux et qu'elle a relancé à plusieurs reprises la société Elba qui avait procédé à leur fabrication.
Il résulte du contrat d'architecture que « l'étude technique du projet tous corps d'état sera à la charge et sous la responsabilité exclusive' des entreprises choisies par le client » et que la société Mandaloun n'avait à sa charge que la conception de la décoration et l'assistance dans la réception. En l'espèce la société Mandaloun a effectué de nombreuses diligences, en vain, pour relancer la société Elba afin qu'elle remédie aux désordres esthétiques constatés. Il s'ensuit que la société Mandaloun n'a commis aucune faute dans sa mission de conception et de suivi du chantier et que les désordres constatés relèvent exclusivement de l'exécution effectuée par la société Elba.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté la société Myrina de ses demandes à l'égard de la société Mandaloun et de son assureur, la société Groupama Paris Val de Loire.
Sur les demandes dirigées à l'encontre de la société Elba
La société appelante reproche à la société Elba la réalisation défectueuse des travaux de décoration de sa boutique qui n'ont pas été réceptionnés du fait des désordres les affectant et demande la fixation au passif de la société Elba de sa créance qu'elle évalue à 80 000 € à titre de dommages-intérêts. Elle produit, certes un rapport non contradictoire de la société SARETEC, mais celui-ci est corroboré par d'autres éléments et notamment par des constats d'huissier précis démontrant l'existence de désordres affectant le mobilier et les étagères montées par la société Elba.
Cependant elle ne fournit aucune préconisation pour remédier aux dégradations ni aucun chiffrage de remise en état. Elle se contente de demander de façon forfaitaire que son préjudice se chiffre à une somme de 80 000 € correspondant au préjudice qu'elle aurait subi en invoquant le fait que l'importance des désordres aurait eu un effet très négatif sur l'image de marque de sa société, ce qui aurait eu pour conséquence la perte de clientèle et donc la perte de chiffre d'affaires. Elle indique que si son chiffre d'affaires a été de 234 093 € en 2008, celui-ci a été de 171 540 € pour 2009 et de 87. 751 € en 2010.
Toutefois elle ne rapporte pas la preuve d'un lien de causalité entre les désordres affectant les meubles réalisés par la société Elba et la baisse de chiffre d'affaires. En conséquence le jugement sera confirme en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes.
Sur la demande en paiement de la société Elba
La société Elba, représentée par son liquidateur judiciaire Maître [C], sollicite la condamnation de la société Myrina au paiement d'une somme de 5128,73 en règlement d'une facture de travaux. Or ainsi qu'il est précédemment démontré les travaux n'ont pas été réceptionnés du fait de leurs défauts de conformité et des vices les affectant.
Les travaux commandés à la société Elba étaient des travaux de décoration et les caractéristiques d'ordre esthétique étaient déterminantes pour la société appelante, s'agissant d'un commerce de vente de bijoux fantaisie. En livrant des travaux comportant de nombreux défauts d'ordre esthétique, tels que décrits dans les constats du huissier, corroborés par le rapport d'expertise privée, et par les réclamations du maître d''uvre, la
société Elba n'a pas délivré un bien conforme à ce qui avait été commandé. En conséquence elle sera déboutée, sur le fondement de l'article 1604 du Code civil de sa demande portant sur le paiement des factures y afférent et le jugement sera également infirmé sur ce point.
Sur les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et sur les dépens
La société appelante sera condamnée aux dépens. Toutefois l'équité commande, en application de l'article 700 du code de procédure civile, de rejeter les demandes d'indemnités pour frais hors dépens.
PAR CES MOTIFS
Rejette la demande d'irrecevabilité des conclusions de la société Elba représentée par Maître [C], ès qualités, de liquidateur judiciaire.
Confirme le jugement.
Condamne la société Miryna aux dépens d'appel avec recouvrement de dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
Rejette les demandes d'indemnités pour frais hors dépens.
Le GreffierLa Présidente
B.REITZER C.PERRIN