REPUBLIQUE FRANCAISE
Au nom du Peuple français
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 7
ARRÊT DU 07 Janvier 2016
(n° , 7 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/10731
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 22 Avril 2013 par le tribunal de grande instance de CRETEIL RG n° 12/00051
APPELANTES
SCI LES BLES D'OR
RCS de Paris n°498 776 66
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représentée par Me Natacha LE QUINTREC, avocat au barreau de PARIS, toque : A0768
SCI HABELIARD représentée par sa gérante, Mme [E]
RCS Paris 341 569 986
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représentée par Me Natacha LE QUINTREC, avocat au barreau de PARIS, toque : A0768
INTIMÉS
SYNDICAT MIXTE D'ACTION FONCIERE DU VAL DE MARNE
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Adresse 5]
Représenté par Me Bruno CHAUSSADE, avocat au barreau de PARIS, toque : C2132
DIRECTION DEPARTEMENTALE DES FINANCES PUBLIQUES DU VAL DE MARNE - COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par M. [N] [U] (COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT) en vertu d'un pouvoir général
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 19 Novembre 2015, en audience publique, devant la cour composée de :
Monsieur Christian HOURS, Président de chambre, spécialement désigné pour présider cette chambre par ordonnance de Madame le Premier Président de la Cour d'Appel de PARIS,
Monsieur Paul André RICHARD, Conseiller hors classe, désigné par Madame le Premier Président de la Cour d'Appel de PARIS
Madame Sylvie SUPLY, Juge de l'Expropriation au Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY, désignée conformément aux dispositions de l'article L. 13-1 du Code de l'expropriation pour cause d'utilité publique
Greffière : Isabelle THOMAS, lors des débats
ARRÊT :- contradictoire
- prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
- signé par Monsieur Christian HOURS, président et par Isabelle THOMAS, greffière présente lors du délibéré.
La cour statue sur les appels croisés formés par les SCI les Blés d'or et Habeliard, d'une part, le 29 mai 2013 et par le Syndicat mixte d'action foncière du Val de Marne (en abrégé le SAF 94), d'autre part, le 8 juillet 2013, d'un jugement du 22 avril 2013 de la juridiction de l'expropriation du Val de Marne, ayant, sur la saisine du SAF 94 :
- fixé à 6 396 400 euros le prix de dépossession des biens et droits immobiliers des appelantes situés à [Adresse 2], sur les parcelles cadastrées section K n° [Cadastre 1], [Cadastre 2] à [Cadastre 4], [Cadastre 5] et [Cadastre 6], d'une superficie de 8 444 m²;
- dit que les intérêts au taux légal courent sur ces sommes à compter du jugement ;
- condamné le SAF 94 à payer la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens de l'instance.
Par arrêt du 17 septembre 2015, la cour d'appel a ordonné la jonction des affaires inscrites sous les numéros de rôle 13/10731, 13/10733 et 13/13883, désormais suivies sous le numéro 13/10731 et renvoyé l'examen de l'affaire à une audience ultérieure.
Pour l'exposé complet des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, il est expressément renvoyé à la décision déférée et aux écritures :
- adressées au greffe par les SCI les Blés d'or et Habeliard, les 16 juillet 2013, 15 octobre 2013 et 17 janvier 2014, aux termes desquelles elles demandent à la cour d'infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau, de fixer le prix des biens leur appartenant à la somme de 18,5 M€, de condamner le SAF 94 à leur verser la somme de 7 000 euros à titre de frais irrépétibles et à supporter les dépens ;
- adressées au greffe par le commissaire du gouvernement le 8 octobre 2013, aux termes desquelles il propose de fixer à 4 811 000 euros le prix du bien en cause en valeur libre ;
- adressées au greffe les 1er août 2013 et 18 décembre 2013 par le SAF 94, aux termes desquelles il forme appel incident et demande l'infirmation du jugement et la fixation du prix de l'immeuble à la somme de 3 909 000 euros, tous chefs de préjudices confondus.
Motifs de l'arrêt :
Considérant qu'outre les écritures précitées, les SCI Habeliard et les Blés d'or ont déposé le 17 novembre 2015 de nouvelles écritures aux mêmes fins contenant de très nombreuses pièces supplémentaires de la pièce 30 à la pièce 61 ; que le SAF 94 a répliqué, par écritures reçues le 18 novembre 2015, dans lesquelles il observe dans ses motifs que les dernières conclusions des appelantes sont irrecevables au regard des dispositions de l'article R 311-26 du code de l'expropriation ; que les appelantes ont encore déposé ensuite au greffe de nouvelles écritures ;
Considérant, s'agissant de la recevabilité des mémoires, que l'article R13-49 du code de l'expropriation, applicable au litige, étant d'ordre public, le juge doit relever la déchéance prévue à l'alinéa 1er ou l'irrecevabilité prévue aux alinéas 2 et 3 en cas de dépôt de mémoires ou de pièces au-delà des délais ouverts pour conclure à l'appelant, à l'intimé et au commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aucun mémoire, aucune pièce n'est admis après l'expiration des délais prévus aux alinéas 1,2 et 3 de l'article R 13-49, si ce n'est pour apporter des précisions en réponse à celui d'une autre partie ;
Considérant qu'en l'espèce, le mémoire complémentaire des appelantes a été envoyé près de 23 mois après le mémoire du SAF 94 auquel il est censé répondre et plus de deux ans après celui du commissaire du gouvernement ; qu'il est accompagné de plus de trente pièces supplémentaires; qu'il est observé que le délai de dépôt de ces jeux d'écritures est tellement tardif et proche de l'audience de plaidoiries qu'il n'est pas possible au greffe de respecter les dispositions de l'article R13-49 du code de l'expropriation lui imposant de notifier à chaque intéressé et au commissaire du gouvernement une copie des pièces qui lui ont été transmises ;
Considérant que, dans ces conditions, il convient de prononcer la déchéance des conclusions du 17 novembre 2015 des appelantes et de toutes conclusions postérieures, ainsi que l'irrecevabilité de celles du SAF 94 du 18 novembre, hormis en ce qu'il soulève l'irrecevabilité des dernières écritures des appelantes ;
Considérant que les SCI Habeliard et Les Blés d'Or soutiennent que :
- le premier juge a manifestement sous-évalué leur bien, lequel forme un vaste îlot à l'angle de deux rues et doit être considéré comme classé, au jour de la déclaration d'intention d'aliéner, en zone UA, (le cas échéant UF), zone d'habitation dense, avec un coefficient d'occupation des sols de 2, idéalement situé en face de la [Localité 7], à moins de 10 minutes de la [Localité 5], à proximité de la station de métro [Localité 3], à moins de 20 minutes de la station [Localité 1] au coeur de [Localité 4], à 1,5 km de l'autoroute A 6 et à 1km de la RD 7, les transports en commun étant proches, étant observé qu'elles avaient la charge de la dépollution, au demeurant marginale, du terrain, de sorte qu'il n'y a pas lieu à abattement de ce chef ; que la présence de squatteurs n'est pas une cause de diminution de prix ; que le prix réclamé de 18,5 M€ correspondrait à une incidence foncière de 38 % par rapport au chiffre d'affaires potentiel, ce qui est le bas de la fourchette observée à Paris, laquelle monte jusqu'à 50 %, alors que le prix offert par le SAF aboutit à une incidence foncière réduite à 4 % dans l'hypothèse d'un COS de 2 et de 8 % dans celle d'un COS de 1 et que l'évaluation du premier juge induit une charge foncière de 6,5 % dans l'hypothèse d'un COS de 2 et de 13% dans l'hypothèse d'un COS de 1 ; que la valeur d'un terrain d'environ un hectare ne peut être obtenue par comparaison avec celle de parcelles de 40 m², ce qui justifie de prendre en compte la valeur de terrains dans d'autres communes ; que les références du SAF 94 ne sont pas des prix de marché et ne sont pas pertinentes, les terrains qu'elles visent, non contigus, étant dépourvus d'accès sur la rue et classés seulement en zone C ; qu'au vu de leurs propres références et des conclusions du rapport d'expertise [L], le prix du m² est généralement situé entre 2 000 et 2 700 euros le m², ce qui valorise leur bien entre 17,7 et 23,9 M€ ;
Considérant que le SAF 94 réplique que la DIA des SCI mentionne en réalité une demande d'acquisition faite auprès de la ville de [Localité 6] et non une véritable déclaration d'aliéner avec un acquéreur réel ; que l'ensemble immobilier se trouve non pas en zone UA comme indiqué par erreur dans le mémoire de saisine du juge de l'expropriation mais en zone UF, réservée à l'implantation d'activités économiques, les constructions à usage d'habitation n'étant pas autorisées à l'exception de celles indispensables à la surveillance ou la direction des activités économiques ; qu'aucune projection pour la construction de logements ne peut par conséquent être faite ; que les constructions sur les parcelles étaient destinées à être démolies et sont squattées par une douzaine de personnes ; que des déchets dangereux sont présents sur le site, les sols étant par ailleurs pollués ; que l'évaluation doit se faire selon la méthode de la récupération foncière et non par celle dite du promoteur ; qu'il convient de retenir le seul terme de comparaison pertinent versé aux débats, la vente du 17 novembre 2011 faisant ressortir un prix au m² de 570 euros ; qu'un abattement de 35 % doit être effectué sur la valeur moyenne de 680 euros, fourchette haute des terrains nus à [Localité 6],en raison de la pollution des terres, d'où un prix au m² réduit à 442 euros ; qu'enfin les intérêts ne peuvent courir au taux légal sur les sommes dues à compter du jour du jugement, l'article L213-14 du code de l'expropriation précisant les règles applicables en ce domaine;
Considérant que le commissaire du gouvernement fait valoir qu'au vu des références prises à [Localité 6] mais sur des terrains situés dans d'autres zones que la zone UF, le prix moyen du m² s'établit à 680 euros, somme sur laquelle il convient de pratiquer un abattement de 20 % pour grande surface, pollution et spécificité de la zone qui ne prévoit pas de zone d'habitation, ce qui aboutit à une valorisation de 4 811 000 euros ;
Considérant qu'aux termes de l''article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, la propriété est un droit inviolable et sacré, dont nul ne peut être privé si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité ;
Considérant que l'article 13-13 du code de l'expropriation dispose que les indemnités allouées doivent couvrir l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation ;
Considérant que, conformément aux dispositions de l'article L 13-15 du code de l'expropriation, les biens sont estimés à la date de la décision de première instance, selon leur consistance matérielle et juridique au jour de l'ordonnance portant transfert de propriété, aux termes de l'article L13-14 dudit code et en fonction de leur usage effectif à la date de référence, l'appréciation de cette date se faisant à la date du jugement du première instance ;
Considérant qu'en application des dispositions des articles L213-6 et L213-4 du code de l'urbanisme, la date de référence prévue à l'article L13-15 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique est la date à laquelle est devenu opposable aux tiers le plus récent des actes rendant public, approuvant, modifiant ou révisant le plan local d'urbanisme, et délimitant la zone dans laquelle est situé le bien ;
Considérant en l'espèce que le bien doit être par suite évalué, comme l'a retenu le premier juge, à la date du 22 avril 2013, selon son usage effectif à la date de référence du 12 février 2009, date d'approbation du plan local d'urbanisme de la ville de [Localité 6] ;
Considérant qu'à la date de référence, la parcelle considérée était située en zone UF, destinée, comme le rappelle le commissaire du gouvernement, uniquement à l'implantation d'activités économiques ; que le COS est de 1 ;
Considérant que le bien consiste en un terrain d'environ 8 844 m², composé de plusieurs parcelles adjacentes, à l'angle des [Adresse 6] et [Adresse 2], sur lesquelles sont édifiées :
- sur la parcelle K [Cadastre 6], un maison d'habitation datant de 1989, de plain pied, de type phénix, d'une surface habitable de 99,15 m², comprenant entrée, cuisine, séjour, quatre chambres, salle de bains wc avec garage attenant ;
- sur la parcelle K [Cadastre 3], une maison d'habitation construite en 1930, de 42 m², avec salle à manger, chambre et cuisine, en partie détruite et squattée lors du transport sur les lieux ;
- sur la parcelle K[Cadastre 1], un bâtiment d'habitation datant de 1890, de 150 m², muré en extérieur, sans toiture, en état délabré et squatté ;
- un bâtiment à usage industriel désaffecté d'une surface utile d'environ 3 600 m² au sol et de 1 832 m² à l'étage, contenant des bacs de décantation et d'acides avec un risque de pollution chimique ;
Considérant qu'il n'est pas contesté que la valeur du bien réside dans celle du terrain, les constructions en mauvais état étant destinées à être détruites, ainsi que précisé par ses propriétaires sur la proposition d'acquérir faite à la ville de [Localité 6], le 23 mars 2012, énonçant que l'ensemble immobilier était destiné à être démoli par le vendeur suivant permis de démolir déjà obtenus ;
Considérant qu'en matière d'expropriation, seul le préjudice matériel direct et certain peut être indemnisé ; que la méthode d'évaluation du compte à rebours aménageur consistant à partir des prix de vente des m² pouvant être construits sur un terrain, déduction faite des coûts de tous ordres et de la marge financière du professionnel à en déduire le coût du foncier, ne peut être admise, les éléments entrant dans ce compte ne présentant aucun certitude et prenant en considération des éléments d'appréciation futurs, ce qui est prohibé; qu'en outre, en l'espèce, le zonage à la date de référence, interdit la construction d'immeuble d'habitation sauf celles indispensables à la surveillance ou à la direction des activités autorisées, soit des activités commerciales, tertiaires, y compris pour l'exercice d'une profession libérale, artisanale, des petites industries classées ou non et les installations ou équipements collectifs d'intérêt général ;
Considérant qu'en l'état d'un terrain encombré de constructions destinées à être démolies, la méthode de l'évaluation par récupération foncière apparaît être la plus adaptée ;
Considérant que l'appréciation de la valeur du terrain nu doit se faire par comparaison avec celle d'autres biens présentant des caractéristiques semblables dans la même aire géographique et ayant fait l'objet de transactions à des époques aussi proches que possible;
Considérant qu'il n'est pas contestable que le bien est très bien situé à moins de 10 minutes en voiture de la [Localité 5] et à proximité de la station de métro [Localité 3] sur la ligne 7, soit à moins de 20 minutes de la station [Localité 1] au coeur de Paris ; que deux arrêts de bus ligne V7, lignes 131 et V1 sont également tout proches ; que ce terrain bénéficie d'une bonne desserte routière par l'autoroute A 6 à 1,5 km et par la RD 7 à mois d'1 km, les autoroutes A 86 et A 10 étant proches ; que le premier juge a pu à bon droit souligner que la situation de la parcelle était privilégiée même s'il n'est pas possible de tenir compte de tous les projets mis en avant par les appelantes ;
Considérant qu'il est indifférent de savoir s'il existait ou non un acquéreur au prix de 15 M€, dès lors que le terrain doit être évalué au vu des règles qui régissent la matière de l'expropriation interdisant de prendre en considération des projets ;
Considérant que ne peuvent être retenues les références contenues dans le rapport [L] en matière de terrains à usage professionnel qui se situent dans des communes voisines mieux valorisées que [Localité 6], pour lesquelles il retient une moyenne entre 2 000 euros et 2 700 euros le m² et propose un prix de 1750 euros le m² pour le terrain considéré ; que ce rapport ne comprend que deux références sur [Localité 6], la première qui doit être écartée car elle se réfère à un terrain d'une superficie de 157 m² et l'autre d'une superficie de plus de 3 000 m², dans la même rue [Adresse 2] que le terrain en cause, ayant abouti à une vente à 148 euros le m² que l'expert mandaté par les appelantes ne retient pas au motif que celle-ci a été vendue au profit du secteur public, ce qui ne saurait correspondre à un prix de marché ; que les termes de comparaison en matière de terrains à usage d'habitation ne peuvent être envisagés, le zonage ne permettant pas ce type de construction ;
Considérant que ne peuvent être davantage prises en considération les propositions d'achat ou les estimations mises en avant par les appelantes, figurant sur différents sites concernant des prix des programmes neufs, qui ne correspondent pas à des ventes réellement intervenues de biens semblables à celui en cause;
Considérant que les appelantes excipent de l'évaluation résultant du jugement de la juridiction de l'expropriation du Val de Marne en date du 21 janvier 2010 pour un terrain dont la SCI Habeliard était propriétaire au [Adresse 4] ; qu'il ressort du jugement que les parties étaient d'accord sur l'offre du SAF 94, autorité préemptrice, qui proposait 800 euros du m² pour le terrain et 1 200 euros le m² pour les bâtiments ; que les parties étaient en désaccord sur le montant de l'abattement qui a été arbitré par le juge à 30 % contre les 40 % réclamés par le SAF 94 ; qu'il apparaît également que ce bien était situé en zone Udb décrivant un périmètre dense à caractère central d'habitat avec commerce et services, dont les constructions sont édifiées en ordre continu ; qu'il s'en déduit qu'il ne s'agissait pas d'un terrain nu comme le bien dont s'agit; que la valeur retenue pour le seul terrain était de 800 euros le m² pour un classement dans un zone beaucoup plus intéressante, puisque permettant la construction d'habitations mieux valorisées ; qu'en outre, le terrain était en valeur libre et n'était pas pollué à la différence du bien en cause ;
Considérant que le SAF 94 se prévaut d'un acte de vente des 19 octobre et 17 novembre 2011 par lequel il a acheté des parcelles en nature de terrain nu, sises 102 et [Adresse 2], d'une contenance de 6 126 euros, au prix de 570 euros le m² ; que ce terme de comparaison apparaît pertinent puisque d'une contenance suffisamment grande pour pouvoir être comparée avec le terrain en cause, d'un zonage semblable puisque permettant des constructions et de la même nature de terrain dépourvu de constructions destinées à subsister ; que le prix n'a pas été imposé par la SAF 94 mais apparaît, comme la preuve en est rapportée par les pièces versées aux débats, en particulier l'avis de [Localité 2], conforme à la proposition faite par le service des domaines ; qu'il ne s'agit par conséquent pas d'un prix de marché ;
Considérant que les termes de comparaison fournis par le commissaire du gouvernement, s'ils sont bien situés à [Localité 6], ne concernent pas des terrains situés dans le même zonage ni d'une superficie comparable puisque le plus grand est de 734 m², soit plus de dix fois moins que le terrain en cause ; qu'ils aboutissent à une valeur moyenne de 680 euros ; que le commissaire du gouvernement considère que la grande taille du terrain est un facteur de moins-value devant conduire à pratiquer un abattement ;
Considérant en définitive que les éléments qui précèdent permettent à la cour de retenir une valeur de 800 euros le m² sur lequel il convient d'effectuer un abattement limité à 25 % pour tenir compte, positivement, de la très bonne situation du terrain et, négativement, du fait qu'il est très partiellement squatté, ce qui constitue une modalité d'occupation très légère puisqu'une expulsion est toujours possible et surtout de son zonage moins valorisant et de son état pollué, d'où une valeur au m² de 600 euros, ce qui valorise l'ensemble immobilier à :
8 844 m² x 600 euros = 5 306 400 euros ;
Considérant enfin qu'en matière d'expropriation, le jeu des intérêts moratoires est régi par les dispositions de l'article R 13-78 du code de l'expropriation dérogeant au principe général posé par l'article 1153 du code civil ; qu'en conséquence, le jugement querellé doit être infirmé sur ce point ;
Considérant que l'indemnité allouée au titre de l'article 700 du code de procédure civile doit être confirmée et la décision sur la charge des dépens en première instance doivent être confirmées mais qu'il apparaît équitable de laisser à la charge de chaque partie les frais irrépétibles exposés en cause d'appel ;
Considérant que les SCI Les Blés d'or et Habeliard, échouant dans leur recours, doivent supporter les dépens d'appel ;
PAR CES MOTIFS, la cour statuant publiquement par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort,
- prononce la déchéance des écritures des SCI les Blés d'Or et Habeliard du 17 novembre 2015 et de ses conclusions postérieures, ainsi que l'irrecevabilité du mémoire du SAF 94 du 18 novembre, sauf en ce qu'il soulève l'irrecevabilité des écritures des appelantes du mois de novembre 2015 ;
- infirme le jugement du 22 avril 2013 du juge de l'expropriation du Val de Marne sauf sur les frais irrépétibles et la charge des dépens et l'infirme pour le surplus ;
- statuant à nouveau :
- fixe à 5 306 400 euros le prix des biens et droits immobiliers appartenant à la SCI Habeliard et à la SCI Les Blés d'or ;
- dit que cette somme portera intérêts au taux légal dans les conditions prévues par l'article R 13-78 du code de l'expropriation ;
- y ajoutant :
- dit que chaque partie conservera à sa charge les frais irrépétibles exposés en cause d'appel ;
- condamne solidairement les SCI Habeliard et les Blés d'or à supporter les dépens d'appel.
LA GREFFIÈRELE PRÉSIDENT