La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/01/2016 | FRANCE | N°13/02567

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 5, 07 janvier 2016, 13/02567


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5



ARRÊT DU 07 Janvier 2016

(n° , 13 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/02567



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 14 Février 2013 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage d'EVRY RG n° 11/00970





APPELANT

Monsieur [J] [N]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représenté par Me Jean-Claude GUARIGLIA, avocat au barreau de MARSEILLE





INTIMEE

SCS CAP BOULANGER

[Adresse 3]

[Localité 1]

représentée par Me Pascal GASTEBOIS, avocat au barreau de PARIS, toque : R188



PARTIE INTERVENANTE :



SCS CAP BOU...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5

ARRÊT DU 07 Janvier 2016

(n° , 13 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/02567

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 14 Février 2013 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage d'EVRY RG n° 11/00970

APPELANT

Monsieur [J] [N]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représenté par Me Jean-Claude GUARIGLIA, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

SCS CAP BOULANGER

[Adresse 3]

[Localité 1]

représentée par Me Pascal GASTEBOIS, avocat au barreau de PARIS, toque : R188

PARTIE INTERVENANTE :

SCS CAP BOULANGER

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 2]

représentée par Me Pascal GASTEBOIS, avocat au barreau de PARIS, toque : R188

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 Septembre 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Murielle VOLTE, Conseillère, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Bernard BRETON, Présidente

Madame Anne-Marie GRIVEL, Conseillère

Madame Murielle VOLTE, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : M. Franck TASSET, lors des débats

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- signé par Madame Marie-Bernard BRETON, Présidente, et par M. Franck TASSET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

Suivant contrat à durée indéterminée du 18 juin 2003, M. [J] [N] a été engagé par la société Média-Saturn France en qualité d'auditeur interne, statut cadre, position II de la convention collective des commerces et services de l'audiovisuel, de l'électronique et de l'équipement ménager. À compter du 1er juillet 2009, M. [N] a été promu au poste de Responsable de l'audit interne de Média-Saturn France, position III de la convention collective. À la suite du rachat, le 1er juillet 2011, par la Holding du groupe HTM (High-Tech Multicanal Group), des participations de la Holding MEDIA CONCORDE détenues dans les sociétés Média-Saturn France et Saturn SAS, la société Média-Saturn France est devenue la société CAP BOULANGER.

Le 11 juillet 2011, M. [N] a adressé à l'employeur, par l'intermédiaire de son conseil, une lettre recommandée pour réclamer le paiement d'une somme de 152'462,58 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires et d'une somme de 97'509,69 euros à titre de dommages-intérêts pour repos compensateur non pris. Il invoquait en outre dans ce courrier la violation du principe « à travail égal, salaire égal », s'estimant victime d'une discrimination salariale, sans toutefois chiffrer sa réclamation. Par lettre officielle du 3 août 2011, la société CAP BOULANGER faisait répondre par ses conseils au conseil de M. [N] qu'elle n'entendait pas donner suite à la demande du salarié.

Le 19 septembre 2011, M. [N] a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail et de paiement de diverses sommes tant au titre de l'exécution que de la rupture dudit contrat.

Par lettre du 14 novembre 2011, il a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé au 28 novembre 2011, auquel il ne s'est pas présenté. Il a été licencié pour faute grave, le 9 décembre 2011.

Par jugement du 14 février 2013, notifié le 4 mars 2013, le conseil de prud'hommes d'Évry, statuant en formation de départage, a :

- dit le licenciement de M. [N] dénué de faute grave ;

En conséquence,

- dit le licenciement de M. [N] sans cause réelle et sérieuse ;

- condamné la société CAP BOULANGER à payer à M. [N] les sommes suivantes:

'' 48'000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

'' 14'541 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

'' 1454,10 euros au titre des congés payés afférents,

'' 7755,20 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement,

'' 3908,87 euros au titre de la mise à pied,

'' 390,88 euros au titre des congés payés afférents ;

- débouté M. [N] du surplus de ses demandes ;

- ordonné l'exécution provisoire de la décision ;

- condamné la société CAP BOULANGER au paiement à M. [N] de la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

M. [N] a interjeté appel de cette décision le 11 mars 2013.

À l'audience du 18 septembre 2015, il demande à la Cour de :

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a débouté de sa demande de rappel d'heures supplémentaires, de repos compensateurs, de rappel de salaire sur le principe « à travail égal, salaire égal », de dommages-intérêts pour licenciement vexatoire, de rappels d'indemnité compensatrice de préavis et d'indemnité conventionnelle de licenciement ;

- prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de la société CAP BOULANGER ;

- fixer la date de la rupture du contrat de travail à celle de la notification du licenciement;

- dire et juger que son licenciement est intervenu sans cause réelle et sérieuse et s'analyse en un refus de réintégration d'un salarié déclaré apte à reprendre son poste par le médecin du travail;

En conséquence :

- condamner la société CAP BOULANGER à lui payer les sommes suivantes, en retenant l'une des trois hypothèses suivantes :

Hypothèse n° 1 : salaire réajusté sur celui de M. [Y]

' 199'162 euros, à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

' 33'194 euros, outre 3319,40 euros de congés payés y afférents, à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

' 17'703 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

' 253'089 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires, outre 25'308 euros de congés payés y afférents,

' 139'884 euros à titre de repos compensateurs, outre 13'988 euros de congés payés y afférents,

' 134'160 euros, outre 13'416 euros, à titre de rappel de salaires, en application du principe « à travail égal, salaire égal » ;

' 6125 euros à titre de rappel de salaire afférent à la période de mise à pied conservatoire, outre 612,50 euros de congés payés y afférents ;

Hypothèse n° 2 : salaire réajusté sur celui de M. [V]

' 176'301 euros, à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

' 29'384 euros, outre 2938 euros de congés payés y afférents, à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

' 15'671 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

' 223'282 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires, outre 22'328 euros de congés payés y afférents,

' 123'409 euros à titre de repos compensateurs, outre 12'340 euros de congés payés y afférents,

' 84'180 euros, outre 8418 euros, à titre de rappel de salaires, en application du principe « à travail égal, salaire égal » ;

'5431 euros à titre de rappel de salaire afférent à la période de mise à pied conservatoire, outre 543,10 euros de congés payés y afférents ;

Hypothèse n° 3 : pas de salaire réajusté

' 137'817 euros, à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

' 22'970 euros, outre 2297 euros de congés payés y afférents, à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

'12'250 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

'164'405 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires, outre 16'440 euros de congés payés y afférents,

' 90'519 euros à titre de repos compensateurs, outre 9051 euros de congés payés y afférents,

' 4262 euros à titre de rappel de salaire afférent à la période de mise à pied conservatoire, outre 426,60 euros de congés payés y afférents ;

Dans tous les cas :

- condamner la société CAP BOULANGER à lui payer les sommes de :

' 5000 euros à titre de dommages intérêts pour procédé vexatoire dans la mise en 'uvre de la procédure de licenciement,

' 2000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;

- ordonner la rectification des bulletins de paie et de l'attestation Pôle Emploi, sous astreinte journalière de 100 euros par jour de retard à compter de la quinzaine suivant la notification du « jugement » (sic) à intervenir.

La société CAP BOULANGER demande à la Cour de :

In limine litis, sur la compétence matérielle de la Cour pour juger de la demande de M. [N] de bénéficier de la législation protectrice des salariés victimes d'accidents du travail et de maladies professionnelles :

- constater, dire et juger que la demande de M. [N] de bénéficier de la législation protectrice des salariées victimes d'accidents du travail et de maladies professionnelles n'est pas de la compétence de la Cour d'appel ;

- constater que M. [N] a déjà saisi le Tribunal des Affaires de la Sécurité Sociale,

En conséquence,

- se déclarer incompétente au profit du Tribunal des Affaires de la Sécurité Sociale ;

Sur le rappel de salaire au titre des heures supplémentaires et au titre du repos compensateur:

- constater, dire et juger que M. [N] était contractuellement tenu par une convention de forfait jours sur l'année ;

- constater, dire et juger que M. [N] ne démontre pas l'accomplissement d'heures supplémentaires au-delà de la durée légale de travail ;

En conséquence,

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [N] de ses demandes au titre des heures supplémentaires, des congés payés sur leurs supplémentaires quels que soient les hypothèses de salaire figurant dans son «PCM » ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [N] de sa demande de dommages et intérêts pour non pris du repos compensateur ;

Sur les demandes relatives à l'application du principe « travail égal salaire égal » :

- constater, dire et juger que M. [N] n'apporte pas la preuve que le principe « travail égal salaire égal » n'a pas été respecté ;

- constater, dire et juger que M. [N] ne démontre pas qu'il était placé dans les mêmes conditions de travail que les salariés dont il réclame le même salaire ;

En conséquence,

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [N] de sa demande de bénéficier d'un salaire identique à celui des salariés dont il se prévaut ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [N] de sa demande de rappel de salaire sur la base du salaire de ses collègues (hypothèses n° 1 et 2) ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [N] de sa demande de prise en considération de la rémunération des salariés dont il se prévaut pour établir ses demandes au titre du licenciement ou de rappel d'heures supplémentaires et repos compensateur ;

Sur la demande de résiliation judiciaire :

A titre principal,

- constater, dire et juger que M. [N] ne rapporte nullement la preuve de manquements de la société CAP BOULANGER de nature à justifier la résiliation judiciaire de son contrat de travail ;

En conséquence,

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [N] de l'ensemble de ses demandes ;

A titre subsidiaire, et si, par extraordinaire, la Cour « ouvrait le droit » à la demande de résiliation judiciaire :

- constater, dire et juger que le salaire brut moyen de M. [N] est de 4592,06 euros ;

- réduire l'indemnité compensatrice de préavis à la somme de 13'776,18 euros bruts et l'indemnité compensatrice de congés payés à la somme de 1377,61 euros bruts ;

- réduire l'indemnité légale de licenciement à la somme de 7729,90 euros nets ;

- constater, dire et juger que M. [N] ne justifie pas du préjudice exigé par l'article L. 1235-3 du code du travail ;

En conséquence,

- limiter le montant de la réparation allouée à M. [N] à 6 mois de salaire, soit la somme de 27'552,36 euros ;

- ordonner la compensation des condamnations avec la somme déjà versée au titre de l'exécution provisoire ;

Sur le licenciement pour faute grave :

À titre principal,

- constater, dire et juger que M. [N] a commis des faits constitutifs d'une faute grave rendant impossible son maintien dans l'entreprise même pendant la durée du préavis ;

En conséquence,

- infirmer le jugement en ce qu'il a fait droit aux demandes de M. [N] ;

- débouter M. [N] de ses demandes ;

- ordonner le remboursement de la somme versée au titre de l'exécution provisoire ;

A titre subsidiaire, et si par extraordinaire la Cour ne retenait pas la faute grave,

- constater, dire et juger que le salaire brut moyen de M. [N] est de 4592,06 euros ;

- constater, dire et juger que le licenciement de M. [N] est fondé sur une cause réelle et sérieuse ;

En conséquence,

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à verser à M. [N] la somme de 48'000 euros nets à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- condamner M. [N] au remboursement de la somme de 72'537,03 euros versés en règlement des sommes couvertes de plein droit par l'exécution provisoire ;

- réduire l'indemnité compensatrice de préavis à la somme de 13'776,18 euros bruts et l'indemnité compensatrice de congés payés à la somme de 1377,61 euros bruts ;

- réduire l'indemnité légale de licenciement à la somme de 7729,90 euros nets ;

- réduire le salaire correspondant à la période de mise à pied à titre conservatoire à la somme de 3703,27 euros bruts et indemnité de congés payés y afférents à la somme de 370,32 euros bruts;

A titre infiniment subsidiaire, et si, par extraordinaire, la Cour ne retenait pas la cause réelle et sérieuse :

- constater, dire et juger que M. [N] ne justifie pas du préjudice exigé par l'article L. 1235-3 du code du travail ;

En conséquence,

- limiter le montant de la réparation allouée à M. [N] à 6 mois de salaire, soit la somme de 27'552,36 euros ;

- ordonner la compensation de la condamnation avec la somme déjà versée au titre de l'exécution provisoire ;

- débouter M. [N] de sa demande de rectification des bulletins de paie et de l'attestation Pôle Emploi sous astreinte.

À titre reconventionnel,

- condamner M. [N] au versement de la somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions visées par le greffier et développées oralement lors de l'audience des débats.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande de résiliation judiciaire

Attendu que lorsqu'un salarié demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, tout en continuant à être à son service, et qu'il est licencié ultérieurement, il convient d'abord de rechercher si la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail était justifiée et, si tel est le cas, de fixer la date de la rupture à la date d'envoi de la lettre de licenciement, et dans le cas contraire seulement, de se prononcer sur le licenciement ; qu'en l'espèce, M. [N] invoque à l'appui de sa demande divers manquements de l'employeur à ses obligations, à savoir la violation de l'obligation d'égalité de rémunération pour un travail de valeur égale, le défaut de règlement d'heures supplémentaires et l'absence d'information sur son droit à bénéficier de repos compensateurs, qu'il convient d'examiner successivement :

1-sur la violation de l'obligation d'égalité de traitement :

Attendu qu'il résulte du principe 'à travail égal, salaire égal', dont s'inspirent les articles L.1242-14, L.1242-15, L.2261-22.9, L.2271-1.8° et L.3221-2 du code du travail, que tout employeur est tenu d'assurer, pour un même travail ou pour un travail de valeur égale, l'égalité de rémunération entre tous ses salariés placés dans une situation identique et effectuant un même travail ou un travail de valeur égale ; que sont considérés comme ayant une valeur égale par l'article L.3221-4 du même code les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l'expérience acquise, de responsabilités et de charge physique ou nerveuse ;

qu'en application de l'article 1315 du code civil, s'il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe 'à travail égal, salaire égal' de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, il incombe à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs, pertinents et matériellement vérifiables justifiant cette différence;

qu'à l'appui de sa demande de rappel de salaires pour violation de ce principe, M. [N], pour invoquer une différence de traitement se compare, soit à un ensemble de 12 cadres du secteur « administratif » de la société CAP BOULANGER situés comme lui à la position III de la classification des cadres, échelon 215, en faisant valoir qu'à l'exception du responsable groupe produit (M. [Q]), bénéficiant d'un salaire mensuel brut de base légèrement inférieur au sien (4620 euros/4847 euros), les dix autres cadres percevaient des salaires mensuels bruts de base tous supérieurs au sien, soit à trois autres cadres du niveau II de la classification ; qu'ainsi, il relève que Madame [I], responsable de la gestion et de l'administration du personnel, cadre du niveau II, embauchée en janvier 2009, percevait une rémunération mensuelle brute de 6500 euros, M. [A], cadre de niveau II, chef de projet, embauché en novembre 2009, une rémunération mensuelle brute de 6250 euros, et M. [V], responsable juridique et des relations sociales chargé des relations humaines, embauché en février 2005, également cadre de niveau II, une rémunération mensuelle brute de 6300 euros ; qu'il argue que si la seule appartenance à une même catégorie professionnelle n'implique pas une identité de situation, en revanche, il est difficile d'admettre qu'un cadre de catégorie inférieure (niveau II) puisse percevoir une rémunération plus avantageuse que la catégorie supérieure (III) ; qu'il souligne que la société CAP BOULANGER ne soutient ni que les salariés avec lesquels il se compare étaient titulaires de diplômes supérieurs aux siens, ou exerçaient un travail comportant une charge nerveuse supérieure ou devaient assumer des responsabilités supérieures, ni que la différence de rémunération serait justifiée par une plus grande expérience professionnelle, et qu'elle se contente de soutenir que les domaines d'intervention des postes étant différents, aucune comparaison ne serait possible, sans produire ni organigramme ni diplôme ni document concernant ces cadres ; qu'il en conclut que l'employeur n'allègue ni ne démontre que de telles différences objectives existeraient entre ces cadres ; qu'il ajoute que si la société intimée soutient que les cadres auxquels il se compare encadraient chacun trois collaborateurs, elle n'en reste qu'au stade de l'allégation ; qu'il estime donc, qu'en application des dispositions de l'article L. 3221-7 du code du travail, il doit bénéficier d'un rappel de salaire calqué sur la rémunération la plus élevée dont bénéficie le salarié exerçant un travail de valeur égale, en l'occurrence M. [W] [Y], responsable du développement des ressources humaines, dont le salaire brut mensuel s'établissait à 7083,33 euros, et à tout le moins sur celle de M. [V] ;

mais, attendu d'abord que l'article L. 3221-7 précité édicte, en son premier alinéa, la nullité de plein droit de toute disposition notamment contractuelle, conventionnelle ou d'un accord collectif résultant d'une décision d'un employeur qui 'comporte, pour un ou des salariés de l'un des deux sexes, une rémunération inférieure à celle de salariés de l'autre sexe pour un même travail ou un travail de valeur égale' et sanctionne, en son second alinéa, la disposition entachée de nullité par la substitution de plein droit 'de la rémunération plus élevée dont bénéficient ces derniers salariés' ; que dans la mesure où M. [N] n'invoque pas une violation de la règle de l'égalité de rémunération entre les hommes et les femmes, mais une violation de l'égalité de rémunération entre travailleurs du même sexe, puisqu'il se compare à des salariés masculins, le fondement légal de sa demande est inapproprié ; que par ailleurs, si l'appelant fonde ses prétentions sur une pièce intitulée « relevé de salaires catégorie 3 » mentionnant les noms, les dates d'embauche, les fonctions, les positions et les salaires ' selon une fourchette allant de 2640 euros pour le plus faible à 7083,33 euros pour le plus élevé ' de cadres du secteur administratif de la société CAP BOULANGER et présente donc des éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité salariale, cependant, ainsi qu'il le relève lui-même, l'appartenance à une même catégorie professionnelle n'implique pas une identité de situation et ne saurait à elle seule fonder une égalité de traitement, quand bien même les salariés en cause auraient la même position au regard de la classification des emplois de cadres de la convention collective, preuve en étant que parmi les cadres qui figurent dans la liste de ce document, pourtant intitulé «catégorie 3 », certains d'entre eux, outre Madame [I], M. [A] et M. [V] dont M. [N] fait bien état dans ses écritures, n'ont pas le niveau III, mais le niveau II, et perçoivent pourtant une rémunération supérieure à la sienne (un responsable système informatique : 5000€, un responsable projet relations humaines : 5000 €, un responsable SAP : 5416,67 euros), sans pour autant qu'il se compare à eux, et à l'inverse, deux autres cadres, en sus de M. [Q], seul cité dans ses écritures, sont comme lui au niveau III mais perçoivent un salaire inférieur au sien (un auditeur sécurité embauché en 1997 : 4800 euros et un chargé de projet : 2721euros) ; que la société intimée relève donc à juste titre que les arguments de M. [N] sont particulièrement contradictoires puisqu'il se compare à quatre salariés dont les fonctions sont non seulement différentes des siennes, mais également différentes entre elles, ce qui se traduit par des différences de rémunération dont il ne conteste pas le bien-fondé ; qu'enfin, et surtout, M. [N] ne conteste pas sérieusement l'argumentation de l'intimée selon laquelle chacun des deux salariés auxquels il entend finalement se comparer avait, pour les missions qui lui incombaient, soit la responsabilité directe de l'administration de l'ensemble du personnel de la société (M. [Y]), soit la responsabilité de l'ensemble des questions de droit social sur le plan individuel et collectif (M. [V]), dont la charge de travail en termes de responsabilité et donc de stress n'était pas comparable avec celle qui était la sienne et qui consistait à auditer le fonctionnement courant des établissements de vente en s'assurant du respect des procédures internes, et de surcroît, supervisait une équipe de salariés, ce qui n'était pas le cas de M. [N] qui n'avait pas d'autorité sur un service ; que M. [N] ne peut donc prétendre avoir eu un travail « de valeur égale », au sens de l'article précité, à celui des autres cadres auxquels il se compare, l'employeur n'étant pas tenu d'assurer une égalité de rémunération entre des salariés qui ne sont pas placés dans une situation identique au regard des responsabilités exercées ;

que par conséquent, le jugement sera confirmé qui a débouté M. [N] de sa demande de rappel de salaires et d'indemnités de congés payés subséquentes fondée sur une différence de traitement avec M. [Y] et M. [V] ;

2-sur le non-paiement des heures supplémentaires

Attendu que selon l'ancien article L. 212-15-3 du Code du travail, dans sa rédaction applicable au litige antérieure à la loi n° 2008-43 du 20 août 2008 :

« I. - Les salariés ayant la qualité de cadre (...) et qui ne relèvent pas des dispositions des articles L. 212-15-1 et L. 212-15-2 doivent bénéficier d'une réduction effective de leur durée de travail. Leur durée de travail peut être fixée par des conventions individuelles de forfait qui peuvent être établies sur une base hebdomadaire, mensuelle ou annuelle. La conclusion de ces conventions de forfait doit être prévue par une convention ou un accord collectif étendu ou par une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement qui détermine les catégories de cadres susceptibles de bénéficier de ces conventions individuelles de forfait ainsi que les modalités et les caractéristiques principales des conventions de forfait susceptibles d'être conclues. (...)

III. - La convention ou l'accord collectif prévoyant la conclusion de conventions de forfait en jours ne doit pas avoir fait l'objet d'une opposition en application de l'article L. 132-26. Cette convention ou cet accord doit fixer le nombre de jours travaillés. Ce nombre ne peut dépasser le plafond de deux cent dix-sept jours. La convention ou l'accord définit, au regard de leur autonomie dans l'organisation de leur emploi du temps, les catégories de cadres concernés. La convention ou l'accord précise en outre les modalités de décompte des journées et des demi-journées travaillées et de prise des journées ou demi-journées de repos. Il détermine les conditions de contrôle de son application et prévoit des modalités de suivi de l'organisation du travail des salariés concernés, de l'amplitude de leurs journées d'activité et de la charge de travail qui en résulte. L'accord peut en outre prévoir que des jours de repos peuvent être affectés sur un compte épargne-temps dans les conditions définies par l'article L. 227-1. (...) » ;

Qu'en l'espèce, l'article 7 du contrat de travail signé le 18 juin 2003, relatif à la durée du travail, stipulait que 'l'article IV-2-2 de l'accord d'entreprise du 29 septembre 2000 relatif à l'Aménagement et à la Réduction du Temps de Travail (ARTT) à 35 heures conclu au sein de l'UES Média Saturn France prévoit que la durée du travail des cadres ' hors cadres dirigeants ' s'apprécie en jours. La durée du travail annuelle de référence est fixée, de façon forfaitaire, à 214 jours de travail effectif. La période de décompte de la durée du travail s'effectuera sur une année civile, du 1er janvier au 31 décembre. Ce nombre de jours de travail forfaitaire tient compte de la législation sur les congés payés annuels. Il est établi sur la base annuelle de prise de 25 jours ouvrés de congés payés sur une année civile. (...)' ;

que l'article IV-2-2-2 de l'accord précité prévoit que les cadres autres que les cadres dirigeants bénéficient d'un décompte de leur durée de travail en jours en raison :

- d'une part, de la nature de leurs fonctions ;

- d'autre part, des responsabilités qu'ils exercent ;

- et du degré d'autonomie dont ils disposent dans l'organisation de leur emploi du temps;

qu'il prévoit également que 'le décompte des jours de travail s'effectuera à l'année, au trimestre et au mois. Chaque cadre concerné devra remplir un bordereau mensuel de comptabilisation de nombre de jours travaillés afin de faciliter la gestion annuelle, trimestrielle et mensuelle du nombre de jours de travail' et que ces cadres ne sont donc pas soumis aux dispositions légales et conventionnelles relatives aux durées journalière et hebdomadaire du travail ainsi que la législation sur les heures supplémentaires, mais qu'un repos minimal de 11 heures entre 2 journées de travail devra leur être accordé, qu'ils ne devront pas travailler plus de 6 jours au cours d'une même semaine et devront bénéficier, en principe, de 48 heures de repos hebdomadaire, consécutifs ou non, et de manière exceptionnelle et limitée, d'au moins un repos hebdomadaire de 24 heures, et qu'enfin, la durée de travail quotidienne de ces cadres ne devra pas excéder 12 heures sauf circonstances exceptionnelles et temporaires ;

que M. [N], qui ne conteste pas qu'il avait une large autonomie dans l'organisation de son emploi du temps, compte tenu de la nature de ses fonctions, et qui ne soutient plus en appel que cet accord visé contractuellement n'a jamais été porté à sa connaissance, appartenait bien à la catégorie de cadres concernés par ledit accord, qui lui est donc opposable ; qu'en outre, contrairement à ce qu'il prétend, cet accord dont les stipulations assurent la garantie du respect des durées maximales de travail ainsi que des repos, journaliers et hebdomadaires, est de nature à assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié soumis au régime du forfait en jours et est parfaitement valable ;

que cependant, il incombe à l'employeur de démontrer que les stipulations de l'accord collectif ont bien été observées en ce qui concerne la tenue des documents de contrôle du décompte de la durée du travail ; que, tout comme l'a relevé le conseil de prud'hommes, la cour constate que la société CAP BOULANGER ne peut valablement soutenir que M. [N] 'sait parfaitement que la Direction des Ressources Humaines de la société Média Saturn France tenait régulièrement à jour le décompte de ses jours travaillés et de ses jours de repos sur l'année et que le groupe HTM n'a pas en sa possession ce décompte' ; qu'il sera notamment rappelé que l'ancien article L. 212-15-3 du Code du travail précité énonce en son dernier alinéa que «L'employeur doit tenir à la disposition de l'inspecteur du travail, pendant une durée de trois ans, le ou les documents existant dans l'entreprise ou l'établissement permettant de comptabiliser le nombre de jours de travail effectués par les salariés concernés par ces conventions de forfait.»; que pour sa part M. [N] soutient que l'employeur ne lui a jamais demandé de tenir un décompte du nombre de jours travaillés ; que dès lors, faute par la société intimée de produire aux débats tout élément venant confirmer la mise en place d'un système de contrôle du nombre de jours travaillés dans le respect des dispositions de l'article en IV-2-2-2 de l'accord d'entreprise du 29 septembre 2000, il s'en déduit que la convention de forfait en jours est privée d'effet , si bien que M. [N] peut prétendre au paiement d'heures supplémentaires dont il y a lieu de vérifier l'existence et le nombre ; qu'il importe peu en tout état de cause qu'antérieurement au transfert de son contrat de travail au sein de CAP BOULANGER, le salarié se soit abstenu de toute réclamation, un tel fait ne pouvant valoir de sa part renonciation au paiement des heures supplémentaires ;

Et attendu qu'il appartient au salarié qui sollicite le paiement d'heures supplémentaires de produire préalablement des éléments permettant d'étayer ses allégations, et que l'employeur puisse discuter ;

qu'en l'espèce, M. [N] a établi des tableaux de calcul des heures supplémentaires qu'il prétend avoir effectuées sur la période du 28 août 2006 au 28 août 2011 en reconstituant ses horaires de travail sur la base des horaires figurant sur des courriels envoyés tôt le matin et tard le soir, des justificatifs de déplacement, des journaux de connexion informatique, et de sept attestations de directeurs de magasins dont il a effectué l'audit témoignant de sa présence tôt le matin et tard le soir ;

mais attendu, ainsi que l'a pertinemment relevé le conseil de prud'hommes, que les horaires figurant sur les courriels, les journaux de connexion informatique et les justificatifs de déplacement ne permettent pas d'établir le nombre précis des heures de travail réellement accomplies dans la journée, les heures de commencement ou de fin de journée qui figurent sur les documents produits et dont les variations sont importantes, ne permettant pas de déterminer un nombre d'heures supplémentaires qui auraient été effectuées au-delà de la durée hebdomadaire de travail chaque semaine de l'année travaillée et ce durant les 5 années visées et correspondent seulement à des amplitudes horaires globales démontrant davantage la véritable autonomie dont il jouissait ; que les tableaux établis par ses soins sont très approximatifs et ce, sur l'ensemble de la période considérée, puisqu'ils ne permettent pas dans l'ensemble de vérifier les heures de début ou de fin de journée réelles, qui sont alignées 'par défaut' sur l'horaire d'ouverture ou de fermeture du magasin, ou encore sur une 'amplitude moyenne' de 9,50 heures de temps de travail, si bien que tous les décomptes sont faussés puisqu'ils reposent dans leur grande majorité sur des éléments hypothétiques rendant incertains les horaires de travail effectivement accomplis par le salarié et ne permettant pas à l'employeur d'y répondre en fournissant ses propres éléments; que les pièces produites par M. [N] ne sont donc pas susceptibles d'étayer sa demande de paiement d'heures supplémentaires et le jugement sera confirmé qui l'en a débouté ainsi que de celles relatives aux repos compensateurs et congés payés afférents ;

Attendu qu'il résulte de ce qui précède que M. [N] ne peut qu'être débouté de sa demande tendant au prononcé de la résiliation judiciaire de son contrat de travail ;

Sur le bien-fondé du licenciement

Attendu que les termes de la lettre de licenciement fixant les limites du litige, il convient de rappeler que M. [N] a été licencié pour faute grave, par lettre du 9 décembre 2011, rédigée sur trois pages, qui a été intégralement reproduite dans le jugement entrepris auquel la cour se réfère expressément, et dont les motifs sont résumés ainsi qu'il suit :

- de s'être, dès le départ, dans le cadre du rachat par le Groupe HTM des participations de la société Média Saturn France, placé en opposition vis-à-vis de ses interlocuteurs, MM. [D] [L] et [C] [E] avec lesquels il lui avait été demandé de travailler en concertation, et d'avoir ainsi, en adoptant une telle position, fait obstruction à la mise en place, après rachat, 'du nécessaire rapprochement des différentes entités et du respect des valeurs' ;

- d'avoir persisté, par la suite, dans cette position qui a entraîné des tensions avec ses interlocuteurs et des dysfonctionnements au sein de l'entreprise ;

- d'avoir totalement fait abstraction, dans le cadre du contrôle des procédures effectué les 29 et 30 septembre 2011 au sein des magasins Saturn de [Localité 4] et de [Localité 5], des process Boulanger dont il devait tenir compte dans l'exécution de ses fonctions, et adopté une attitude contraire à à ses obligations contractuelles essentielles, notamment de loyauté à l'égard de son employeur, démontrant ainsi une volonté d'opposition systématique aux process et aux valeurs de l'entreprise et de refus de collaboration avec ses interlocuteurs au sein du groupe ;

Attendu que la faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle justifie la rupture immédiate du contrat de travail ; que la preuve de la faute grave incombe à l'employeur qui l'invoque ;

Attendu qu'à l'appui des griefs énoncés dans la lettre de licenciement, l'employeur invoque en premier lieu le refus du salarié d'utiliser le support d'entretien de découverte type permettant aux nouveaux dirigeants de mieux connaître les anciens salariés de la société Média Saturn France, qui lui avait été transmis le 6 juillet 2011, arguant que cette attitude est contraire à l'article 2 du contrat de travail prévoyant qu'il « s'engage à respecter les instructions qui pourront lui être données par la société et à se conformer aux règles régissant le fonctionnement interne de celle-ci » ; que M. [N] conteste formellement ce refus ; qu'il résulte du courriel qu'il a adressé à MM. [E] et [L], respectivement directeur de l'audit et sécurité et directeur du contrôle de gestion et audit, que le salarié a simplement considéré que le questionnaire était davantage orienté pour un 'simple collaborateur' et ne correspondait pas à ses fonctions de responsable d'audit interne, demandant poliment à ce qu'on lui adresse une autre trame, cette réponse ne pouvant objectivement s'analyser en une position d'obstruction au rapprochement entre le groupe et les nouvelles entités, comme l'énonce la lettre de licenciement, pas plus qu'elle ne permettait d'en conclure que le salarié se plaçait, dès le départ, en opposition vis-à-vis de ses interlocuteurs; que d'ailleurs, la réponse de M. [L] : « Chez Boulanger il n'y a pas des simples et pas simples collaborateurs. Par conséquent il n'y a qu'un support (de référence) qui sert de trame et sert de prétexte à échanger et à comprendre quel est ton projet professionnel dans le cadre du rapprochement de CAP BOULANGER. Aussi je t'invite à t'en inspirer pour que nous puissions dans le temps au mieux envisager l'avenir. » démontre qu'il existait bien une approche différente entre l'ancien employeur et le nouveau puisque dans ce courriel M. [E] prend la peine de l'expliquer au salarié, sans manifester au demeurant un quelconque étonnement ou autre forme de réprobation ; que de plus, il est mentionné dans la lettre de licenciement que lors du premier échange avec ses interlocuteurs, qui a lieu le 7 juillet 2011, M. [N] a proposé la création d'un poste d'audit interne qui n'existait pas chez CAP BOULANGER, cette initiative prouvant au contraire qu'il se montrait soucieux de collaborer avec les nouveaux dirigeants, même si cette solution n'a pas été retenue par ces derniers, et n'ayant pas lieu d'être interprétée comme une forme de persistance de sa part à adopter une position entraînant des tensions avec ses interlocuteurs, comme il le lui est reproché ; que l'employeur prétend en deuxième lieu que lors de l'entretien découverte, M. [N] aurait 'évoqué immédiatement, et ouvertement ne pas être intéressé par le poste' ; que pour établir la réalité de ces propos, contestés par le salarié, l'employeur produit deux attestations émanant de MM. [E] et [L] ; que toutefois, ces témoignages des deux principaux intéressés ' puisqu'ils sont les interlocuteurs visés dans la lettre de licenciement à l'égard desquels le salarié se serait placé en opposition ' ne présentent pas toutes les garanties d'impartialité pour emporter la conviction de la Cour ; qu'en troisième lieu, l'employeur reproche au salarié d'avoir 'préféré s'enfermer dans une attitude d'opposition et de réclamation systématique, notamment au travers les e-mails que (vous) nous avez adressés', alors que le groupe avait tout fait pour faciliter son intégration en lui adressant une lettre de mission claire et précise fin août 2011, ce qui l'aurait ainsi contraint 'd'effectuer de nombreux recadrages', source de perte de temps et de difficultés des opérations d'audit mises en place dans les magasins Saturn ; que dans ses écritures, la société CAP BOULANGER prétend que pour tenter d'amener M. [N] à adopter une attitude conforme à ses missions, elle 'a décidé' de lui adresser une lettre de mission précise le 30 août 2011, cette formulation laissant entendre qu'elle y avait été contrainte par l'attitude d'opposition de ce dernier ; or, ainsi que le relève pertinemment le conseil de prud'hommes, cette lettre de mission ne peut en aucun cas être interprétée comme un recadrage ou un rappel à l'ordre de M. [N], puisqu'elle n'est qu'une étape du processus d'harmonisation tel que détaillé dans le procès-verbal de réunion des délégués du personnel du 24 octobre 2011, selon lequel : « suite à l'entretien découverte, il est produit un descriptif de mission qui est proposé au salarié. Si le salarié donne suite à cette proposition, il est alors produit un projet de contrat auquel s'ajoute les conditions de la mobilité. Si accord alors il est établi une convention de transfert en sus du contrat de travail Boulanger » ; que par conséquent, en envoyant cette lettre de mission, la société CAP BOULANGER ne faisait que se conformer à un processus concernant tous les anciens salariés de Média Saturn France, et l'employeur ne prouve aucunement que le salarié se serait, ainsi qu'elle le lui reproche, enfermé dans une attitude d'opposition systématique aux process de l'entreprise ; que de plus, l'appelant souligne à juste titre que s'agissant d'une proposition, il avait la possibilité de la refuser, ce qui ne pouvait constituer un grief ; qu'en quatrième lieu, l'employeur considère que l'attitude d'opposition et de réclamation systématique de M. [N] s'est illustrée notamment au travers des e-mails qu'il a adressés à la direction, même pour des modifications mineures, alors qu'il avait un accord de principe global et que son contrat de travail prévoyait 'une autonomie relative à la mission à effectuer' notamment sur l'organisation à mettre en place pour y parvenir; que cependant, il ne ressort pas de la teneur des e-mails produits en date des 19 août, 23 août et 5 septembre 2011, une quelconque attitude de réclamation ou d'opposition systématique, mais seulement un comportement on ne peut plus normal d'un salarié dans le cadre de ses premiers échanges avec de nouveaux responsables de prendre la précaution de s'assurer de leur accord sur sa manière de procéder ; qu'en dernier lieu, la lettre de licenciement développe longuement le fait que lors de son déplacement, le 29 septembre 2011, au sein du magasin Saturn de [Localité 4], puis le lendemain, lors de son déplacement dans le magasin Saturn de [Localité 5],M. [N] a adopté une attitude contraire à celle d'un responsable de l'audit ; que ceci étant contesté par M. [N], la preuve doit en être formellement rapportée par l'employeur ; que la société CAP BOULANGER se borne à produire deux courriels émanant, le premier, de la directrice du magasin de [Localité 4] qui précise d'emblée à M. [E] que, 'suite à notre conversation téléphonique, je te confirme que la visite avec [J].... a été difficile' ; qu'elle indique ensuite que M. [N] s'est présenté à l'équipe ' comme un audit Saturn Allemagne', que les thèmes abordés lors du déjeuner l'ont surpris s'agissant de 'négos en cours, présence de délégués syndicaux sur le magasin, paiement de ses frais de déplacement', si bien qu'elle a ensuite demandé à M. [N] quelle était sa mission exacte, concluant que 'cette visite manquait toutefois de beaucoup de formes' ; que le second e-mail émane du Directeur Régional Ouest, qui est donc membre du comité stratégique de l'entreprise, indiquant à M. [L] être étonné par le comportement 'qui semble assez éloigné de nos valeurs' d' 'une personne se présentant de l'audit Saturn sur le magasin de [Localité 5]', et ponctuant sa réflexion en ces termes : 'à 2 jours de la fermeture de [Localité 5] ce Monsieur qui devrait être facilitateur de cette période délicate est semble-t-il plus un frein au bon déroulé des opérations' ; que force est de constater que ces courriels, fort peu circonstanciés sur l'attitude négative qui aurait été adoptée par M. [N] lors de ses déplacements dans les magasins et qui se bornent en fait à exprimer le ressenti nécessairement subjectif de leurs auteurs, sont insuffisants pour établir le manque de professionnalisme reproché dans la lettre de licenciement et qu'ils ne sont confortés par aucune attestation des intéressés reprenant les propos tenus dans leurs courriels ;

Qu'il résulte de ce qui précède, que la matérialité des faits reprochés au salarié quelques mois à peine après le rachat de la société Média Saturn France, et qualifiés de faute grave par l'employeur, est insuffisamment établie, de sorte que le jugement sera confirmé qui a dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Sur les demandes pécuniaires subséquentes

Attendu, préalablement, que M. [N] invoque la violation de la législation protectrice relative aux salariés victimes d'accidents du travail ou de maladie professionnelle, en soutenant que celle-ci s'applique dès lors que l'employeur a connaissance de la démarche du salarié auprès de la CPAM en vue de faire reconnaître l'existence d'une maladie professionnelle et qu'en l'espèce, la société CAP BOULANGER aurait dû, à titre conservatoire, faire application de cette législation protectrice, puisqu'il l'avait informée par lettre recommandée du 18 novembre 2011, d'une part, de ce qu'il était en arrêt de travail jusqu'au 16 décembre 2011, d'autre part, de ce que cet arrêt était la conséquence de la mise à pied « expéditive » du lundi 14 novembre 2011 faite par M. [E] le jour de sa reprise de travail, une demi-heure à peine après qu'il soit revenu de la visite de reprise effectuée auprès du médecin du travail, et de comportements à son égard confinant au harcèlement moral l'ayant conduit à un état réactif dépressionnel constaté par son médecin traitant à compter du 30 septembre 2011, et enfin, de ce qu'il avait entamé une démarche en vue de faire reconnaître le caractère professionnel de sa maladie ; qu'il souligne que contrairement à ce que soutient la société CAP BOULANGER, il ne demande pas que soit reconnu le caractère professionnel de son arrêt de maladie, qui relève effectivement de la compétence exclusive du Tribunal des Affaires de la Sécurité Sociale ; qu'enfin il affirme, qu' 'en droit, équivaut à un refus de réintégration, le licenciement dont la procédure est initiée le lendemain de la reprise du travail, alors que les griefs invoqués par l'employeur ne sont pas établis' et que par conséquent, il est en droit de prétendre à une indemnité ne pouvant être inférieure à 12 mois de salaire en application de l'article 'L.126-15 du code du travail' ; que cependant, M. [N] n'a été victime ni d'un accident du travail ni d'une maladie professionnelle, qu'il a été déclaré apte à la reprise de son poste par le médecin du travail sans aucune réserve, le 14 novembre 2011, cet avis du médecin sur l'aptitude du salarié s'imposant aux parties, et donc à l'intéressé lui-même qui n'est ainsi pas fondé à se prévaloir des dispositions des articles L. 1226-6 et suivants du code du travail, dans la mesure où il ne démontre nullement l'origine professionnelle de sa maladie, qui n'a d'ailleurs pas été reconnue par la CPAM ;

Attendu que M. [N] peut donc prétendre à un rappel de salaire afférent à la période de mise à pied conservatoire, aux indemnités de rupture et au versement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ne pouvant être inférieure au salaire des six derniers mois, en application de l'article L. 1235-3 du code du travail ; que les parties s'opposent sur le montant du salaire de référence, M. [N] revendiquant un salaire mensuel moyen brut de 7656 euros, cependant que la société CAP BOULANGER chiffre ce montant à la somme de 4592,06 euros bruts ; qu'il résulte des bulletins de paie produits aux débats que le salaire de M. [N] s'établissait dans le dernier état de la relation contractuelle à un montant de 5114,55 euros qui tient compte de l'avantage en nature « voiture » de 267,55 euros qui est bien un élément de la rémunération devant être pris en compte pour le calcul du préavis et des indemnités assises sur le salaire ; que par conséquent, la société CAP BOULANGER sera condamnée à verser à M. [N] les sommes suivantes :

1) en ce qui concerne les indemnités de rupture :

- 15'343,65 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis de trois mois, outre la somme de 1534,37 euros au titre des congés payés afférents ;

- 8950,46 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement, compte tenu d'une ancienneté de 8 ans et 9 mois à la date d'expiration du préavis ;

2) en ce qui concerne l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'indemnité allouée par le conseil de prud'hommes en réparation a été justement fixée à la somme de 48'000 euros, le jugement méritant également d'être confirmé sur ce point;

3) en ce qui concerne le rappel de salaire relatif à la mise à pied du 14 novembre au 9 décembre 2011 :

- 4124,64 euros, outre la somme de 412,46 euros au titre des congés payés afférents ;

Attendu que le jugement sera confirmé qui a débouté M. [N] de sa demande de dommages-intérêts pour « procédé vexatoire », ce dernier ne démontrant l'existence ni de circonstances distinctes du caractère non fondé du licenciement ni d'un préjudice distinct de celui déjà réparé ;

Attendu que la société CAP BOULANGER qui perd partiellement en ses prétentions sera condamnée aux dépens d'appel ; que toutefois l'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de M. [N] ;

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Réforme le jugement en ce qui concerne les montants alloués au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, du rappel de salaire de la mise à pied, des congés payés afférents et de l'indemnité légale de licenciement ;

Statuant à nouveau sur ces chefs,

Condamne la société CAP BOULANGER à payer à M. [J] [N] les sommes suivantes:

- 15'343,65 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 1534,37 euros au titre des congés payés afférents ,

- 8950,46 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement,

- 4124,64 euros au titre du rappel de salaire de la mise à pied,

- 412,46 euros au titre des congés payés afférents ;

Confirme le jugement pour le surplus ;

Y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société CAP BOULANGER aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 13/02567
Date de la décision : 07/01/2016

Références :

Cour d'appel de Paris K5, arrêt n°13/02567 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-01-07;13.02567 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award