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15/12/2015 | FRANCE | N°14/13456

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 1, 15 décembre 2015, 14/13456


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 1



ARRET DU 15 DECEMBRE 2015



(n° 552 , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 14/13456



Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 Juin 2014 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 12/08001





APPELANTS



Monsieur [U] [V]

[Adresse 2]

[Localité 1]

né le [Date naissance 1] 1946 à [Localité

2]



Représenté par Me Marie-catherine VIGNES de la SCP GALLAND - VIGNES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010

Ayant pour avocat plaidant Me Yves LEONZI de la SELURL CABINET LA PÉROUSE, ...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 1

ARRET DU 15 DECEMBRE 2015

(n° 552 , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/13456

Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 Juin 2014 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 12/08001

APPELANTS

Monsieur [U] [V]

[Adresse 2]

[Localité 1]

né le [Date naissance 1] 1946 à [Localité 2]

Représenté par Me Marie-catherine VIGNES de la SCP GALLAND - VIGNES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010

Ayant pour avocat plaidant Me Yves LEONZI de la SELURL CABINET LA PÉROUSE, avocat au barreau de PARIS, toque : C1291

SARL [U] [V] agissant poursuites et diligences de son Gérant y domicilié en cette qualité.

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Marie-catherine VIGNES de la SCP GALLAND - VIGNES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010

Ayant pour avocat plaidant Me Yves LEONZI de la SELURL CABINET LA PÉROUSE, avocat au barreau de PARIS, toque : C1291

INTIMEE

SARL GALERIE BERES ladite société agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant domicilié en cette qualité audit siège,

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentée par Me Florence GUERRE de la SELARL SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018

Ayant pour avocat plaidant Me Vania COLETTI, avocat au barreau de PARIS, toque : W01

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 Octobre 2015, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant M. Jacques BICHARD, Président de chambre et Madame Marie-Sophie RICHARD, Conseillère, chargée du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Jacques BICHARD, Président de chambre

Madame Marie-Sophie RICHARD, Conseillère

Madame Isabelle CHESNOT, Conseillère, appelée pour compléter la composition de la cour en vertu de l'article R312-3 du Code de l'organisation judiciaire

Greffier, lors des débats : Mme Elodie PEREIRA

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Jacques BICHARD, président et par Mme Elodie PEREIRA, greffier présent lors du prononcé.

Courant novembre 2010 M [V] et la société [U] [V] ont acquis moyennant la somme de 60 000€ auprès de la société Galerie Berès qui l'avait préalablement exposée une huile sur toile signée du peintre [F] [S] figurant dans le catalogue de l'exposition avec une photo de l'oeuvre comme: 'Numéro 119-coupe de fruits- Circa 1926 Huile sur toile- Signée en bas à droite: S.Férat- H57 L43cm', au prix de 80 000€.

M [V] et la société [U] [V], soutenant que l'oeuvre avait fait l'objet d'une restauration ont sollicité la nullité et subsidiairement la résolution de la vente invoquant l'existence d'un dol par réticence consistant à leur cacher l'état de conservation de l'oeuvre qui avait été restaurée, le non-respect par le vendeur de ses obligations d'information et de bonne foi et subsidiairement l'existence d'un vice caché.

Par jugement en date du 2 juin 2014 le tribunal de grande instance de Paris les a déboutés de leurs demandes et condamnés à payer à la galerie Berès la somme de 1€ à titre de dommages-intérêts, celle de 4 000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens.

M [V] et la société [U] [V] ont interjeté appel de cette décision et dans leurs conclusions notifiées par la voie électronique le 4 septembre 2015 ils demandent à la cour d'infirmer le jugement, de constater l'existence d'un dol et subsidiairement d'une erreur et 'alternativement ou surabondamment' d'un vice caché ainsi que celle du non-respect par le vendeur de ses obligations d'information et de bonne foi, de condamner la galerie Berès à payer à M [V] la somme de 16 666€ et à la société [U] [V] celle de 33 334€ en réparation du préjudice subi par la différence entre le montant d'achat de l'oeuvre et sa valeur vénale actuelle , 8 333€ à M [V] et 16 667€ à la société [U] [V] en réparation des préjudices accessoires, de condamner la galerie à publier à ses frais dans les journaux spécialisés ainsi que dans le Figaro ou le Monde la décision à intervenir, subsidiairement de résilier la vente et de condamner la galerie à rembourser le prix de vente en contrepartie de la restitution du tableau outre la somme de 8 333€ à M [V] et 16 667€ à la société [U] [V] en réparation des préjudices accessoires subis du fait de la galerie Berès, dire que la galerie qui a manqué à son obligation de loyauté dans le cadre du débat judiciaire sera condamnée au paiement de la somme de 30 000€ à titre de dommages-intérêts pour abus du droit d'ester en justice outre la somme de 20 000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Dans ses conclusions notifiées par la voie électronique le 28 septembre 2015 et contenant appel incident la galerie Berès demande à la cour de confirmer le jugement déféré sauf en ce qui concerne le montant des dommages-intérêts alloués pour procédure abusive dont elle sollicite la fixation à la somme de 25 000€ outre la condamnation des appelants à lui payer la somme de 15 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens d'appel.

**********

Les appelants qui reprochent à leur vendeur de leur avoir volontairement dissimulé l'opération de marouflage effectuée sur le tableau litigieux, en teintant la toile ayant servi au doublage de brou de noix et en procédant au ré encadrement de la toile pour dissimuler les bordures, ne demandent cependant pas la nullité de la vente pour vice du consentement mais uniquement des dommages-intérêts et, sur le fondement du vice caché, ils ne sollicitent la résiliation de la vente qu'à titre subsidiaire. Ils font valoir sur le fondement des vices du consentement l'existence d'une erreur non invoquée en première instance et celle d'un dol par réticence, ainsi que le non-respect par le vendeur de son obligation pré contractuelle d'information.

La Charte des membres du Comité Professionnel des galeries d'Art rappelle effectivement que si la description des oeuvres vendues doit être la plus complète possible, les restaurations doivent être mentionnées quand elles peuvent, notamment, avoir modifié les qualités de l'oeuvre et le Syndicat national des antiquaires précise que les restaurations effectuées à titre conservatoire qui n'altèrent en rien les caractères d'ancienneté et de style et n'apportent aucune modification au caractère propre de l'oeuvre n'ont pas besoin d'être expressément mentionnées.

Les différents spécialistes interrogés dans le cadre du présent litige Mmes [L] et [P] font remarquer que les opérations de marouflage ou de rentoilage sont effectuées dans un but de conservation de l'état originel du tableau et de stabilisation de ses craquelures et n'apportent normalement pas de modification au caractère propre de l'oeuvre.

Au cas particulier les examens de la toile de [F] [S] par deux restaurateurs de tableaux, [N] [K] et l'atelier Jaafar-Lavergne, versés aux débats par M [V] et sa société ne contredisent pas la finalité de restauration des opérations de marouflage et n'établissent pas qu'en l'espèce elles n'ont pas été réalisées dans les règles de l'art ou qu'elles ont altéré l'oeuvre et en ont diminué la valeur. En effet Mme [K] ne parle pas du marouflage mais des petits accidents constatés sur les bords de l'oeuvre ainsi que du large réseau de craquelures d'âge qu'elle qualifie d'apparent et l'atelier Jaafar-Lavergne qui décrit les opérations de marouflage par doublement de la toile d'origine avec une autre toile teintée et l'utilisation d'un adhésif synthétique stable mais irréversible, conclut à un état de conservation de l'oeuvre stable sans mentionner de manquements aux règles de l'art imputables aux opérations de restauration. Les deux rapports ne se prononcent pas sur la valeur de l'oeuvre .

En conséquence la Galerie Berès n'était pas tenue dans le cadre de son obligation pré contractuelle d'information de porter à la connaissance des acquéreurs les opérations de marouflage non visibles qu'elle avait constatées en procédant au changement d'encadrement du tableau, s'agissant d'une opération de simple conservation de l'oeuvre dont il n'est pas démontré qu'elle n'a pas été réalisée conformément aux règles de l'art.

Les appelants soutiennent que l'absence d'information sur le marouflage est également constitutive d'une manoeuvre et d'un dol par réticence aux fins de tromper l'acheteur sur l'état réel de conservation de l'oeuvre ainsi que sur la valeur du tableau, la galerie Berès ayant dissimulé les opérations de marouflage ainsi que la présence d'enfoncements, de déchirure de la toile et de manque en teintant la toile utilisée et en changeant de place l'étiquette du tableau.

Mais les opérations de restauration par marouflage dont la mauvaise exécution n'est pas établie n'avaient pas pour objet de dissimuler l'état du tableau. Ainsi les craquelures stabilisées par l'opération de restauration demeuraient après le marouflage parfaitement visibles tant sur la photographie figurant dans le catalogue de vente que lors de son exposition préalable à la galerie Berès à laquelle M [V] s'est rendu et ce dernier ne démontre pas l'importance des petits accidents constatés après enlèvement du cadre, ni enfin la volonté de dissimulation du rentoilage par la transposition de l'étiquette faisant état d'une exposition en 1926 sur la nouvelle toile, étant remarqué sur ce dernier point que la galerie Berès conteste avoir fait réaliser le marouflage et qu'il n'est pas établi qu'elle est à l'origine de cette transposition de l'étiquette.

En conséquence l'existence des manoeuvres alléguées n'est pas démontrée.

Enfin, à les supposer établies, les appelants ne démontrent pas le caractère déterminant des manoeuvres alléguées ni que s'ils avaient eu connaissance du marouflage réalisé, ils n'auraient pas acquis le tableau ou l'auraient acheté à un prix bien inférieur. En effet la seule évaluation de l'oeuvre de [F] [S] entre 7 000€ et 10 000€ qu'ils produisent a été réalisée au vu d'une photographie de l'oeuvre.

Pour les mêmes motifs il ne peut être retenu l'existence d'une erreur sur les qualités substantielles de l'oeuvre puisque le procédé de conservation par marouflage n'est pas de nature à en altérer le style ou à en modifier la singularité non plus que celle d'un vice caché quant à l'état réel du tableau invoquée en outre tardivement, étant rappelé:

-le caractère apparent des craquelures que le marouflage avait pour objet de stabiliser,

-l'absence de démonstration par les acquéreurs de l'altération de l'oeuvre résultant des petits accidents constatés sur les bords du tableau, (déchirure ou manque).

En conséquence les appelants seront déboutés de l'intégralité de leurs demandes.

Sur la demande en dommages-intérêts de la galerie Berès:

Le changement de fondement des demandes des appelants en cours de procédure comme le délai écoulé entre la vente litigieuse et la première réclamation des acquéreurs sont insuffisants à caractériser leur mauvaise foi et l'abus d'ester en justice et la décision qui a alloué à la galerie Berès la somme de 1€ à titre de dommages-intérêts sera réformée de ce chef ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu l'article 696 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par décision contradictoire:

-Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a alloué la somme de 1€ à titre de dommages-intérêts à la société Galerie Berès ;

Statuant à nouveau de ce chef,

-Déboute la société Galerie Berès de sa demande de dommages-intérêts ;

Y ajoutant,

-Condamne M [U] [V] et la société [U] [V] à payer à la société Galerie Berès la somme de 5 000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

-Condamne M [U] [V] et la société [U] [V] aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 14/13456
Date de la décision : 15/12/2015

Références :

Cour d'appel de Paris C1, arrêt n°14/13456 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-12-15;14.13456 ?
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