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10/12/2015 | FRANCE | N°12/07115

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 12, 10 décembre 2015, 12/07115


COUR D'APPEL DE PARIS Pôle 6 - Chambre 12
ARRÊT DU 10 Décembre 2015

Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/07115
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 04 Avril 2012 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de PARIS - RG no 11/04672

APPELANTE CPAM 92 - HAUTS DE SEINE Service contentieux 113, rue des Trois Fontanot 92026 NANTERRE CEDEX représentée par Mme Marie-José SIRIEIX en vertu d'un pouvoir spécial

INTIMEE SA HARLEQUIN 83/85 BLD Vincent AURIOL 75646 PARIS CEDEX 13 siret 31867159100069 représentée par Me Rodolphe

OLIVIER, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, toque:1701

Monsieur le Ministre chargé de l...

COUR D'APPEL DE PARIS Pôle 6 - Chambre 12
ARRÊT DU 10 Décembre 2015

Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/07115
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 04 Avril 2012 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de PARIS - RG no 11/04672

APPELANTE CPAM 92 - HAUTS DE SEINE Service contentieux 113, rue des Trois Fontanot 92026 NANTERRE CEDEX représentée par Mme Marie-José SIRIEIX en vertu d'un pouvoir spécial

INTIMEE SA HARLEQUIN 83/85 BLD Vincent AURIOL 75646 PARIS CEDEX 13 siret 31867159100069 représentée par Me Rodolphe OLIVIER, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, toque:1701

Monsieur le Ministre chargé de la sécurité sociale 14, avenue Duquesne 75350 PARIS CEDEX 07 avisé - non comparant
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 1er octobre 2015, en audience publique, devant la Cour composée de : Mme Bernadette VAN RUYMBEKE, Président Monsieur Luc LEBLANC, Conseiller Mme Marie-Odile FABRE DEVILLERS, Conseiller qui en ont délibéré
Greffier : Madame Laïla NOUBEL, lors des débats
ARRÊT : - contradictoire - rendu par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile. - signé par Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Président et par Madame Céline BRUN, Greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts de Seine d'un jugement rendu le 4 avril 2012 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris dans un litige l'opposant à la société Harlequin et sur celui formé par cette société à l'encontre du jugement du 15 juin 2009 ;

LES FAITS LA PROCÉDURE LES PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Les faits de la cause ont été exactement exposés dans la décision déférée à laquelle il est fait expressément référence à cet égard ;
Il suffit de rappeler que Mme X..., employée par la société Harlequin, en qualité de chef de secteur, a établi une déclaration de maladie professionnelle accompagnée d'un certificat médical faisant état de "troubles psychiques déclenchés par un conflit du travail" ; que cette maladie n'étant pas inscrite dans un tableau de maladie professionnelle et le taux d'incapacité reconnu à l'intéressée étant égal ou supérieur à 80 %, la caisse primaire d'assurance maladie professionnelle a demandé l'avis du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de Paris qui a retenu l'origine professionnelle de la maladie ; que la caisse a donc pris en charge la maladie déclarée au titre de la législation sur les risques professionnels ; que la société Harlequin a alors contesté l'opposabilité de cette prise en charge devant la juridiction des affaires de sécurité sociale qui, dans un premier jugement du 15 juin 2009, a rejeté les moyens d'inopposabilité tirés de l'absence de motivation de la décision de la caisse et de l'irrégularité de la procédure d'instruction d'une part et désigné le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles d'Orléans d'autre part.
Statuant sur appel de ce jugement, la présente Cour a, dans son arrêt du 10 février 2011, sursis à statuer dans l'attente du jugement à intervenir à la suite du dépôt du rapport du comité régional d'Orléans.
Par jugement du 4 avril 2012, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris, statuant au vu de ce second avis, a déclaré inopposable à la société Harlequin la décision de la caisse de reconnaître le caractère professionnel de la maladie déclarée par Mme X....
La caisse primaire d'assurance maladie des Hauts de Seine fait déposer et soutenir oralement par sa représentante des conclusions invitant la cour à recueillir l'avis d'un autre comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles et déclarer opposable à la société Harlequin la prise en charge de la maladie du 21 octobre 2005.
A l'appui de son recours, elle prétend d'abord que, contrairement aux énonciations du jugement, l'article R 142-24-2 du code de la sécurité sociale ne limite pas le nombre de comités pouvant être consultés en cas de différend relatif à l'origine professionnelle d'une maladie. Elle fait observer qu'en l'espèce, il existe une contradiction entre les avis rendus par les deux comités successivement consultés qui impose la consultation d'un troisième comité pour les départager. Elle critique également l'avis du comité d'Orléans en ce qu'il s'est essentiellement fondé sur le rapport d'expertise médicale du 25 mars 2005 ordonnée dans le cadre des rapports caisse /assurée au sujet de la stabilisation de la maladie en cause. Elle ajoute aussi qu'aucun antécédent de dépression n'a été évoqué par le comité d'Orléans. Enfin, elle considère que la décision prud'homale écartant le harcèlement moral invoqué par la salariée n'exclut pas l'existence d'un syndrome anxio-dépressif lié au travail.

Sur les autres moyens d'inopposabilité repris par la société Harlequin, elle indique avoir respecté la procédure d'instruction en informant l'employeur de la déclaration de maladie professionnelle déposée par sa salariée et en l'invitant à venir consulter les pièces du dossier avant la décision de prise en charge. De même, elle considère que cette décision du 19 septembre 2006 reconnaissant le caractère professionnel de la maladie au vu de l'avis du comité régional consulté n'avait pas besoin de satisfaire à d'autres exigences de motivation.
La société Harlequin fait déposer et soutenir oralement par son conseil des conclusions de confirmation du jugement attaqué et d'annulation de la décision du 19 septembre 2006. Elle conclut en tout état de cause à la condamnation de la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts de Seine à lui payer la somme de 2 000 ¿ au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Elle se prévaut d'abord de l'inopposabilité de la décision du 19 septembre 2006 qui n'est pas motivée. Elle rappelle en effet que les dispositions de la loi du 11 juillet 1979 sur la motivation des décisions administratives individuelles s'appliquent aux organismes de sécurité sociale et considère que les énonciations contenues dans la décision contestée ne satisfont pas aux exigences de motivation. Elle relève l'absence d'indication sur les éléments ayant conduit à la décision du comité et le défaut de mentions relatives aux pièces prises en considération ainsi qu'à la nature de la maladie déclarée. Elle invoque ensuite l'irrégularité de la procédure suivie par la caisse en ce que cet organisme ne lui a pas adressé le recours de Mme X... contre le refus initial de prise en charge, ni le certificat médical accompagnant la déclaration de maladie, ni l'avis rendu par le comité régional préalablement à sa décision du 19 septembre 2006. Elle en déduit l'inopposabilité de cette décision. Elle estime enfin que l'avis du comité régional d'Orléans, selon lequel les éléments du dossier ne permettent pas d'établir l'existence d'un lien direct et essentiel entre la pathologie déclarée et l'exposition professionnelle, s'impose et qu'il n'y a pas lieu de désigner un autre comité dès lors que la juridiction s'est déjà prononcée au vu de l'avis d'un autre comité régional que celui consulté par la caisse et que le recours à un troisième comité n'est pas envisageable.
Il est fait référence aux écritures ainsi déposées de part et d'autre pour un plus ample exposé des moyens proposés par les parties au soutien de leurs prétentions ;

MOTIFS
- Sur la contestation préalable de la procédure d'instruction du dossier de maladie professionnelle :
Considérant qu'aux termes de l'article R 441-14, alinéa 3, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige, la décision motivée de la caisse est notifiée à la victime ou à ses ayants droit et en cas de refus, le double de cette notification est envoyé pour information à l'employeur ; que ce dernier doit toutefois être informé du recours éventuel de la victime pour que la nouvelle décision de prise en charge lui soit opposable et en cas de saisine du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, il doit recevoir une notification de la décision de reconnaissance ou de rejet ;
Considérant qu'en l'espèce, la société Harlequin a reçu, le 25 septembre 2006, la notification de la nouvelle décision du 19 septembre 2006 prise au vu de l'avis favorable du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles d'Ile de France ; que cet avis a été délivré postérieurement au recours exercé par Mme X... à l'encontre de la décision initiale de refus de prise en charge ;
Considérant que cette lettre précise que le comité a estimé qu'il existe un lien direct et essentiel entre les conditions de travail habituelles de la salariée et la maladie déclarée par certificat médical du 21 octobre 2005 ; qu'elle informe l'employeur qu'au vu de cet avis, la maladie est prise en charge au titre de la législation relative aux risques professionnels et que cette nouvelle décision annule et remplace le refus précédemment notifié ;
Considérant que cette référence à l'avis du comité régional, qui s'impose à la caisse, satisfait aux exigences de motivation prévues à l'article R 441-14 du code de la sécurité sociale ;
Considérant qu'auparavant, la société Harlequin avait été avisée, le 7 novembre 2005, de l'établissement d'une déclaration de maladie professionnelle par sa salariée et un double de cette déclaration lui avait bien été transmis ;
Considérant que, contrairement au moyen soutenu par la société, la caisse n'était pas tenue de lui adresser le certificat médical relatif à la maladie en même temps qu'elle lui envoyait le double de la déclaration ; qu'il lui appartenait seulement de verser ce certificat au dossier prévu à l'article R 441-13 du code de la sécurité sociale et d'en permettre la consultation par cette société préalablement à sa décision ;
Considérant qu'elle devait aussi informer l'employeur de la contestation élevée par son salarié et de la désignation en conséquence d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, sans être tenue pour autant de lui notifier un double du recours ;

Considérant que précisément la caisse justifie avoir averti la société Harlequin, le 16 juin 2006, du recours de la salariée ainsi que de la saisine du comité régional de reconnaissance maladies professionnelles d'Ile de France et l'avoir invitée, le 26 juin 2006, à prendre connaissance des pièces du dossier préalablement à leur transmission au comité ;
Considérant que l'employeur a aussi été prévenu, par lettre du 6 septembre 2006, de la clôture du dossier et il lui a encore été permis de venir consulter les éléments susceptibles de lui faire grief ;
Considérant qu'avant de prendre sa décision, la caisse n'avait pas à notifier l'avis du comité régional qui s'imposait à elle mais devait seulement adresser à la société Harlequin, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, la notification de sa décision de reconnaissance de l'origine professionnelle de la maladie, ce qu'elle justifie avoir fait le 25 septembre 2006 en application de l'article D 461-30 du code de la sécurité sociale ;
Considérant que c'est donc à jute titre que le jugement du 15 juin 2009 retient que la caisse a satisfait à toutes ses obligations et écarte l'ensemble des moyens d'inopposabilité tirés de la procédure ;
- Sur la contestation du lien de causalité entre la pathologie déclarée et le travail habituel :
Considérant qu'en tout état de cause, selon le dernier avis rendu par le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles du Centre qui s'impose à la caisse dans ses rapports avec l'employeur, aucun élément médical ne permet d'établir l'existence d'un lien direct et essentiel entre la pathologie déclarée et l'exposition professionnelle ;
Considérant que cet avis a été émis après une analyse complète des éléments soumis au comité régional qui ne s'est pas exclusivement fondé sur le rapport d'expertise médicale du 25 mars 2005 ;
Considérant que le comité n'avait pas besoin de se référer à un état préexistant pour refuser de reconnaître l'origine professionnelle de la maladie déclarée et rien n'indique que la décision de justice écartant le harcèlement moral ait joué un rôle dans cette appréciation ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu de désigner un nouveau comité régional dès lors que l'avis d'un comité régional autre que celui saisi par la caisse a déjà été recueilli comme le prescrit l'article R 142-24-2 du code de la sécurité sociale ;
Que les premiers juges ont donc décidé à bon droit que la décision de prise en charge de la maladie de Mme X... était inopposable à l'employeur ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu pour autant d'annuler la décision du 19 septembre 2006 qui reste valable dans les rapports entre la caisse et l'assurée ;
Considérant qu'au regard de la situation respective des parties, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;
PAR CES MOTIFS

LA COUR,
Déclare la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts de Seine recevable mais mal fondée en son appel ;
Confirme le jugement du 15 juin 2009 en ce qu'il rejette les moyens d'inopposabilité tirés de l'irrégularité de la procédure d'instruction ;
Confirme le jugement du 4 avril 2012 en ce qu'il déclare inopposable à la société Harlequin la décision de reconnaître la maladie déclarée par Mme X... ;
Rejette la demande d'annulation de cette décision ;
Déboute la société Harlequin de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Dispense la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts de Seine du paiement du droit d'appel prévu à l'article R 144-10, alinéa 2, du code de la sécurité sociale ;


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 12
Numéro d'arrêt : 12/07115
Date de la décision : 10/12/2015
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2015-12-10;12.07115 ?
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