La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/12/2015 | FRANCE | N°12/10036

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 3, 08 décembre 2015, 12/10036


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3



ARRÊT DU 08 Décembre 2015



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/10036



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 02 Octobre 2012 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de PARIS section RG n° 10/04410





APPELANTE

SA IMPRIMERIE CHIRAT

[Adresse 2]

[Adresse 2]

N° SIRET : 405 880 535

représentée par Me

Christian COLOMBIER, avocat au barreau de LYON,

En présence de M. Jacques CHIRAT (Président) et M. Auguste CHIRAT (Directeur Général)





INTIMEE

Madame [D] [Q]

[Adresse 1]

[Adresse ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3

ARRÊT DU 08 Décembre 2015

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/10036

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 02 Octobre 2012 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de PARIS section RG n° 10/04410

APPELANTE

SA IMPRIMERIE CHIRAT

[Adresse 2]

[Adresse 2]

N° SIRET : 405 880 535

représentée par Me Christian COLOMBIER, avocat au barreau de LYON,

En présence de M. Jacques CHIRAT (Président) et M. Auguste CHIRAT (Directeur Général)

INTIMEE

Madame [D] [Q]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

née le [Date naissance 1] 1973 à [Localité 1]

comparante en personne,

assistée de Me Slim BEN ACHOUR, avocat au barreau de PARIS, toque : C1077

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 27 Octobre 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Isabelle VENDRYES, Conseillère faisant fonction de Président

Madame Roselyne NEMOZ, Conseillère

Mme Laurence SINQUIN, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Claire CHESNEAU, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par Madame Isabelle VENDRYES, Conseillère faisant fonction de Président et par Madame Claire CHESNEAU, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Madame [D] [Q] a été embauchée par la société IMPRIMERIE CHIRAT le 15 février 2007 en qualité d'agent technico commercial, son salaire étant constitué d'une partie fixe et d'une d'un intéressement de 1,5% sur les montants facturés.

La convention collective applicable à la relation de travail est celle des imprimeries de labeur.

Le 1er mars 2010, madame [Q] et quatre autres salariés du secteur commercial de [Localité 2] ont demandé à leur employeur d'assurer l'égalité de traitement entre l'équipe commerciale de la région parisienne et celle de la région Rhône Alpes.

Suite à cette demande, madame [Q] a été convoquée par la direction pour un entretien qui s'est tenu le 1er avril 2010.

Le 2 avril 2010, madame [Q] a saisi le Conseil de Prud'hommes de Paris pour solliciter la résiliation judiciaire de son contrat de travail et en paiement de diverses sommes. Le 28 août 2011, elle a pris acte de la rupture de son contrat de travail.

Par jugement du 2 octobre 2012, le juge départiteur du Conseil de Prud'hommes a condamné la société IMPRIMERIE CHIRAT à payer à madame [Q] les sommes suivantes, avec exécution provisoire et intérêts au taux légal à compter du 9 avril 2010 pour les créances salariales:

- 8.643 Euros à titre de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires et les congés payés afférents ;

- 6.753,60 Euros au titre du repos compensateur ;

- 34.020,34 Euros à titre de rappel de salaires incluant les congés payés ;

- 14.870,25 Euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents;

- 9.913,05 Euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement ;

- 30.000 Euros à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Le juge a ordonné à la société IMPRIMERIE CHIRAT de remettre à madame [Q] les bulletins de salaires et documents de fin de contrat conformes, condamné la société IMPRIMERIE CHIRAT à lui payer 1.751 Euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure civile, et débouté les parties de leurs autres demandes.

Le 16 octobre 2012, la société IMPRIMERIE CHIRAT a interjeté appel de cette décision.

Par conclusions visées par le greffe le 27 octobre 2015 au soutien de ses observations orales, et auxquelles il est expressément fait référence en ce qui concerne ses moyens, la société IMPRIMERIE CHIRAT demande à la Cour de réformer le jugement en toutes ses dispositions, de dire et juger qu'elle a indûment payé la somme de 108.302,54 Euros incluant les charges salariales, outre les charges patronales, de dire et juger que la rupture du contrat de travail est imputable à madame [Q], de la condamner à lui payer 15.225 Euros au regard de la désorganisation subie par le bureau parisien de l'imprimerie, d'ordonner à madame [Q] de rembourser les sommes indûment perçues à hauteur de 93.565,90 Euros, enfin de la condamner à lui payer 10.000 Euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure civile.

Par conclusions visées par le greffe le 27 octobre 2015 au soutien de ses observations orales, et auxquelles il est expressément fait référence en ce qui concerne ses moyens, madame [Q] demande à la cour de confirmer le jugement sur les sommes allouées au titre de l'égalité salariale, l'indemnité de licenciement et l'indemnité compensatrice de préavis, de l'infirmer sur le surplus et de condamner la société IMPRIMERIE CHIRAT à lui payer :

- 73.072,48 Euros au titre des heures supplémentaires et les congés payés afférents ;

- 88.888 Euros au titre du repos compensateur ;

- 59.481,15 Euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par le licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Subsidiairement elle demande à la Cour de confirmer le jugement sur les condamnations prononcées de ces chefs.

Elle sollicite condamnation de la société IMPRIMERIE CHIRAT à lui payer 5.000 Euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure civile.

MOTIFS

Sur l'égalité de traitement

C'est par de justes motifs, adoptés par la Cour, que le juge départiteur après avoir rappelé le principe d'égalité de traitement a considéré, au vu des différences d'intéressement entre les chargés d'affaires de la région parisienne et ceux de la région Rhône-Alpes, lesquels bénéficiaient d'un taux de 1,5% sur les périodiques mais de 2% sur les autres produits et toutes les commandes directes ou indirectes sur le secteur attribué, que les éléments que faisait valoir l'employeur ne justifiaient pas la différence de traitement ;

La société IMPRIMERIE CHIRAT maintient devant la Cour que la différence s'explique par les conditions géographiques (secteurs à prospecter plus étendu et plus dispersé en région Rhône-Alpes) et la différence de clientèle (grands éditeurs à [Localité 2] avec une clientèle déjà acquise et des tarifs prénégociés, petites ou moyennes entreprises en région Rhône-Alpes nécessitant une prospection, des propositions financières et l'établissement de devis ) ; elle considère, en conséquence, que les chargés d'affaires parisiens et les chargés d'affaires inter régionaux n'exercent pas le même travail, les premiers étant gestionnaires d'une clientèle principalement acquise et les seconds développeurs d'une clientèle hautement concurrentielle;

Toutefois, il ressort des pièces produites, notamment les contrats de travail de salariés travaillant en région parisienne et en région Rhône Alpes, que ces derniers bénéficiaient également d'une clientèle acquise, notamment par leur prédécesseur (contrat de travail de madame [X], de monsieur [Z]) ; que l'employeur se réservait dans l'un ou l'autre cas de modifier ou d'ajouter un secteur et qu'il n'est pas contesté que madame [Q] avait plusieurs clients hors région parisienne; qu'il lui était également demandé dans son contrat de travail, d'investir des prospects, à l'instar de ses collègues lyonnais et elle justifie d'ailleurs d'une progression de nouveaux clients représentant environ le tiers de la progression de son portefeuille ; quant à la différence du nombre de clients, elle n'est pas pertinente, la Cour relevant ainsi qu'il pouvait presque varier du simple au double à l'intérieur de chacun des secteurs selon le chargé d'affaires, sans pour autant que cette différence s'accompagne d'une différence du taux de commissionnement, et il en va de même en ce qui concerne le nombre de devis (écart de 52 à 128 en région parisienne, de 150 à 607 en région Rhône Alpes) ;

La société IMPRIMERIE CHIRAT n'explique pas en quoi l'utilisation d'un véhicule de société pour visiter les clients est plus incommode que des déplacements en bus, métro et RER à [Localité 2] et en banlieue ; en toute hypothèse, comme l'a relevé à juste titre le juge départiteur, ces clients généraient un chiffre d'affaires, sur la base duquel était calculé l'intéressement, similaires dans l'une ou l'autre région voire, si l'on se reporte aux chiffres communiqués par la société, plus important depuis 2008 en région Rhône Alpes ;

Le montant du rappel des commissions, en application de la règle de l'égalité des salaires pour un même emploi occupé, étant contesté dans son principe, mais pas dans son montant, il convient de confirmer le jugement du Conseil de Prud'hommes sur ce point ;

Sur les heures supplémentaires

C'est encore par de justes motifs, adoptés par la Cour que le premier juge, après avoir rappelé les règles de preuve sur la durée du travail, a considéré que les éléments produits par la salariée pour étayer sa demande, notamment titres de transport, factures de restaurant, rapport d'activé, location de véhicules, faisaient apparaître qu'elle avait une amplitude horaire importante, excédant les horaires imposés par la direction, soit 8h45-12 heures et 13h15-17 heures ;

Ces éléments sont suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre, lequel ne produit aucune pièce pour justifier que la durée hebdomadaire de 35 heures était respectée, se bornant à relever l'absence de réclamations, alors que l'accomplissement des heures supplémentaires résultait d'une demande implicite de sa part, telle qu'elle ressort de son courrier du 21 novembre 2001 reproduit dans le jugement ;

Le jugement sera également confirmé en ce qu'il a calculé les heures supplémentaires sur la parte fixe du salaire, hors paiement des commissions dont le montant est indépendant du temps de travail ;

Eu égard au caractère régulier des heures supplémentaires accomplies, celles-ci faisaient nécessairement partie intégrante de la rémunération de madame [Q] si bien qu'il n'y a lieu de déduire ni les jours fériés, ni les absences pour maladie et maternité ni les congés payés ; en revanche, dès lors que ces derniers sont déjà pris en compte dans la base de calcul, il n'y a pas lieu d'ajouter d'indemnité compensatrice de congés payés et le jugement sera réformé de ce chef ;

Compte tenu de ce qui précède, le jugement sera confirmé sur la somme allouée au titre du repos compensateur ;

Sur la rupture du contrat de travail

La prise d'acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquements suffisamment graves de l'employeur à ses obligations, empêchant la poursuite du contrat de travail ; si les manquements sont établis, elle produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'une démission dans le cas contraire ;

La Cour adopte encore la motivation du premier juge qui a considéré que la prise d'acte, postérieure à la demande de résiliation judiciaire devenue ainsi sans objet, avait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, notamment en raison des pressions exercées sur madame [Q] pour qu'elle renonce à faire valoir ses droits concernant le taux de commissionnement ;

Il suffira de rajouter que contrairement à ce que prétend la société IMPRIMERIE CHIRAT, les 5 salariés, dont madame [Q], se sont bornés dans la lettre collective du 1er mars 2010 à revendiquer, un taux de commissionnement identique à ceux de leurs collègues de la région Rhône Alpes, sans aucunement dépasser les limites de la liberté d'expression ; la circonstance que deux de ces 5 salariés se soient déclarés satisfaits des explications qui leur ont été données n'implique pas que les demandes étaient illégitimes ni que les autres salariées soient tenues d'y renoncer ; quant au pressions exercées dont la société maintient qu'elles ont été inexistantes, il suffit de se reporter à l'attestation du directeur général, monsieur [R], versée aux débats par la société IMPRIMERIE CHIRAT pour comprendre qu'il ne s'agissait pas, comme celle-ci l'affirme, d'un banal entretien annuel d'évaluation, l'intéressé expliquant ainsi que suite à la réception de la lettre du 1er mars, 'monsieur [O] [P] a souhaité très justement commencer les entretiens annuels individuels sur ce sujet. Nous avons donc profité de l'occasion pour leur indiquer notre fort mécontentement sur la forme de leur demande', entrée en matière qui n'était pas annonciatrice d'un échange convivial avec l'intéressée sur son travail ;

Le jugement sera également confirmé sur le montant de l'indemnité de licenciement et l'indemnité compensatrice de préavis, contestées dans leur principe par la société IMPRIMERIE CHIRAT mais pas dans leur montant ; il sera également confirmé sur le montant des dommages et intérêts alloués à la salariée, adaptés à son ancienneté dans l'entreprise, aux circonstances de la rupture et à sa situation professionnelle postérieure ;

La société, eu égard à ce qui précède, doit être déboutée de ses demandes reconventionnelles, étant précisé que le présent arrêt qui infime le jugement sur les congés payés alloués par le conseil au titre du rappel de salaires tient lieu de titre exécutoire ;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme le jugement du Conseil de Prud'hommes sauf en ce qu'il a assorti des congés payés afférents le rappel de salaires au titre des heures supplémentaires ;

Statuant à nouveau de ce seul chef ;

Déboute madame [D] [Q] de sa demande de congés payés sur rappel de salaires au titre des heures supplémentaires ;

Rappelle que le présent arrêt, réformant sur ce point la décision du premiers juge, constitue le titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées en exécution jugement et que les sommes devant être restituées portent intérêt au taux légal à compter de la notification valant mise en demeure de la décision.

Ajoutant au jugement ;

Condamne la société IMPRIMERIE CHIRAT à payer à madame [Q] une somme supplémentaire de 1.500 Euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

Déboute les parties de toutes leurs autres demandes, plus amples ou contraires;

Met les dépens à la charge de la société IMPRIMERIE CHIRAT.

LA GREFFIÈRE LA CONSEILLÈRE FAISANT FONCTION DE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 12/10036
Date de la décision : 08/12/2015

Références :

Cour d'appel de Paris K3, arrêt n°12/10036 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-12-08;12.10036 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award