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25/11/2015 | FRANCE | N°14/13187

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 4, 25 novembre 2015, 14/13187


Grosses délivrées

aux parties le :RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 4



ARRÊT DU 25 NOVEMBRE 2015



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 14/13187



Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 Avril 2014 -Tribunal de Commerce de RENNES - RG n° 2013F00289





APPELANTE



Société KABUSHIKI KAISHA HIYOKI société de droit japonais

ayant son siège so

cial [Adresse 2]

[Adresse 2] JAPON

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège



Représentée par Me Mickael LE ROL, avocat au barreau de RENNES

Assistée...

Grosses délivrées

aux parties le :RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 4

ARRÊT DU 25 NOVEMBRE 2015

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/13187

Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 Avril 2014 -Tribunal de Commerce de RENNES - RG n° 2013F00289

APPELANTE

Société KABUSHIKI KAISHA HIYOKI société de droit japonais

ayant son siège social [Adresse 2]

[Adresse 2] JAPON

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Mickael LE ROL, avocat au barreau de RENNES

Assistée de Me Francine HAVET, avocat au barreau de PARIS, toque : D1250

INTIMÉE

SAS COURTAGE ET DE DIFFUSION - CODIF INTERNATIONAL

ayant son siège social [Adresse 1]

[Adresse 1]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Alain FISSELIER de la SCP SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044

Assistée de Me Marie-Sophie BATAILLE GEDOUIN, avocat au barreau de SAINT-MALO

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 07 Octobre 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Françoise COCCHIELLO, Présidente de chambre

Madame Claudette NICOLETIS, Conseillère

Madame Dominique MOUTHON VIDILLES, Conseillère, rédacteur

qui en ont délibéré

Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Dominique MOUTHON VIDILLES dans les conditions prévues par l'article 785 du Code de procédure civile,

Greffier, lors des débats : Madame Denise FINSAC

ARRÊT :

- Contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Françoise COCCHIELLO, Présidente et par Monsieur Vincent BREANT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

De 1986 à 2006, la société de droit japonais KABUSHIKI KAISHA HIYOKI créée par M. [O] [P], avait pour activité l'importation et la distribution exclusive au Japon de produits cosmétiques de la marque Phytomer fabriqués et commercialisés par la société de COURTAGE ET DE DIFFUSION dite CODIF INTERNATIONAL.

Invoquant une rupture brutale et abusive de leurs relations commerciales, la société KABUSHIKI KAISHA HIYOKI a assigné la société CODIF INTERNATIONAL, par exploit du 25 mai 2011, devant le tribunal de commerce de Saint-Malo puis par exploit du 11 juin 2013, devant le tribunal de commerce de Rennes.

Par jugement du 1er avril 2014, le tribunal de commerce de Rennes a débouté la société KABUSHIKI KAISHA HIYOKI de l'ensemble de ses demandes, a débouté la société CODIF INTERNATIONAL de sa demande d'indemnité pour procédure abusive, condamné la société KABUSHIKI KAISHA HIYOKI à payer à la société CODIF INTERNATIONAL la somme de 15.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ordonné l'exécution provisoire et condamné la société KABUSHIKI KAISHA HIYOKI aux dépens qui comprendront le coût des traductions.

Le 23 juin 2014, la société KABUSHIKI KAISHA HIYOKI a interjeté appel de cette décision .

Vu les dernières écritures notifiées le 28 septembre 2015 aux termes desquelles la société KABUSHIKI KAISHA HIYOKI demande à la cour de :

Dire partiellement bien jugé, bien appelé et réformant pro parte

In limine litis

Confirmer le jugement en ce qu'il a dit irrecevable et mal fondée la société CODIF en son exception de prescription et d'autorité de chose jugée et débouter cette dernière de sa demande de dommages et intérêts pour prétendue procédure abusive,

Dire la société CODIF tant irrecevable que mal fondée en sa nouvelle exception prétendue de défaut de qualité pour agir soulevée pour la première fois en cause d'appel,

Écarter des débats toutes les pièces communiquées par CODIF en langue étrangère non traduites en français par un traducteur assermenté et notamment les pièces n°94, 94 bis et 94 ter,

Le réformer pour le surplus et en conséquence,

à titre principal

Vu l'article L. 442-6-I 5° du code de commerce

Dire brutale, abusive et sans préavis suffisant la rupture de la relation commerciale ayant existé entre la société HIYOKI et la société CODIF à l'initiative de cette dernière,

Dire et juger irrecevable et mal fondée la société CODIF en l'intégralité de ses chefs de contestations et autres demandes reconventionnelles plus amples ou contraires,

L'en débouter intégralement,

Condamner la société CODIF à verser à la société HIYOKI, à titre de dommages et intérêts les sommes de :

' JPY 985,310,867 en réparation du manque à gagner

' JPY 179 592 345 en réparation des pertes éprouvées

' 3 millions d'euros en réparation de l'atteinte à l'image et à la réputation

Dire que les deux premières de ces sommes seront converties en euros en fonction du taux de change applicable au jour de l'arrêt à intervenir et assorties de l'intérêt légal à compter du 28 mai 2011,

Le cas échéant désigner un Expert-Comptable avec la mission d'usage,

Condamner CODIF dans l'attente du rapport à une provision de 6 millions d'euros,

Surseoir à statuer pour la liquidation du préjudice,

à titre subsidiaire

Vu les articles 1134 et 1147 du Code Civil,

Dire comme ayant été valablement renouvelé pour au moins deux ans le contrat de concession exclusive du 5 décembre 2002,

Dire en conséquence comme abusif le refus de la société CODIF d'approvisionner la société HIYOKI en produits Phytomer à compter du 1 er janvier 2007 pendant la durée contractuellement convenue de deux ans, soit jusqu'au 31 décembre 2008, à tout le moins,

Dire abusive la rupture sans préavis et sans justes motifs par la société CODIF de la relation contractuelle ayant existé entre les parties,

Dire irrecevable et mal fondée la société CODIF en l'intégralité de ses chefs de contestations et autres demandes reconventionnelles plus amples ou contraires,

L'en débouter intégralement,

Condamner la société CODIF à verser à la société HIYOKI, à titre de dommages et intérêts les sommes de :

'JPY 985,310,867 en réparation du manque à gagner,

'JPY 179 592 345 en réparation des pertes éprouvées,

'3 millions d'euros en réparation de l'atteinte à l'image et à la réputation,

Dire que les deux premières de ces sommes seront converties en euros en fonction du taux de change applicable au jour de l'arrêt à intervenir et assorties de l'intérêt légal à compter du 28 mai 2011,

Le cas échéant désigner un Expert-Comptable avec la mission d'usage,

Condamner CODIF dans l'attente du rapport à une provision de 6 millions d'euros,

Surseoir à statuer pour la liquidation du préjudice,

en tout état de cause,

Condamner la société CODIF à verser à la société HIYOKI une indemnité de 30 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner la société CODIF aux entiers dépens des instances lesquels comprendront les coûts de traduction.

Vu les dernières écritures notifiées le 16 septembre 2015 aux termes desquelles la société CODIF INTERNATIONAL demande à la cour de :

Dire partiellement bien jugé, et réformant pour partie,

in limine litis,

Réformer le jugement et dires recevables et bien fondées l'exception de prescription, l'exception d'autorité de chose jugée, l'exception de défaut de qualité pour agir,

Condamner HIYOKI au paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive à hauteur de 50 000 €,

Confirmer le jugement pour le surplus,

Débouter la société KABUSHIKI KAISHA HIYOKI de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

à titre subsidiaire,

Ordonner la compensation entre les sommes dues par HIYOKI à CODIF et les sommes auxquelles CODIF serait éventuellement condamnée,

Y additant,

Condamner la société KABUSHIKI KAISHA HIYOKI à payer à la société CODIF INTERNATIONAL la somme de 25 000,00 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

Condamner la société KABUSHIKI KAISHA HIYOKI aux dépens, lesquels comprendront les frais de toutes les traductions dont distraction au profit de la SCP AFG, Avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 29 septembre 2015. L'affaire a été plaidée le 7 octobre 2015 et les parties ont été avisées qu'elle était mise en délibéré au 25 novembre 2015, date à laquelle la présente décision a été rendue par mise à dispositions au greffe.

SUR CE

Sur la communication de pièces non traduites en langue française

Considérant qu'il y a lieu d'écarter des débats la pièce n°94 de la société CODIF INTERNATIONAL, communiquée en langue étrangère et non traduite en langue française ; qu'en revanche, les pièces 94 bis et 94 ter ayant été traduites, la société HIYOKI sera déboutée de sa demande tendant à leur rejet ;

Sur les exceptions d'irrecevabilité

' l'exception tirée du défaut de qualité à agir

Considérant que le défaut de qualité à agir qui constitue une fin de non-recevoir en application des dispositions de l'article 122 du code de procédure civile, peut être proposé en tout état de cause conformément à l'article 123 du même code ; que l'exception soulevée pour la première fois en appel par la société CODIF INTERNATIONAL est donc recevable ;

Considérant que la société CODIF INTERNATIONAL fait valoir que la société HIYOKI n'aurait pas qualité à agir dès lors qu'elle n'aurait en réalité pas d'existence légale ; qu'elle affirme qu'elle fait état dans ses conclusions d'appelante d'un siège social fictif, qu'elle n'a plus d'activité ni de bureau, qu'elle est dans l'incapacité de régler les sommes auxquelles elle a été condamnée, que son site internet a disparu et qu'elle a purement et simplement organisé son insolvabilité ;

Considérant que le défaut d'existence légale tel qu'invoqué ne peut s'entendre que d'un défaut de personnalité morale et relève donc de la fin de non recevoir pour défaut de capacité et non de celle pour défaut de qualité à agir ;

Considérant qu'il ne peut être déduit des seuls éléments allégués, à les supposer avérés, que la société HIYOKI n'a plus d'existence légale ; qu'il n'est pas justifié, à tout le moins, de sa radiation du registre du commerce et des sociétés ; que bien au contraire, il ressort du 'certificat de toutes les affaires courantes' en date du 28 décembre 2014 communiquée par la société HIYOKI (pièce n°123) que celle-ci a transféré son siège social, ce dont il se déduit qu'elle continue d'exister ;

Considérant enfin que la société HIYOKI qui a été partie en première instance, a nécessairement qualité pour déclarer appel ; que dès lors, l'exception soulevée à ce titre sera rejetée ;

' tirée de la prescription de l'action

Considérant que la société CODIF INTERNATIONAL fait valoir que le contrat de concession du 5 décembre 2002 à effet au 1er janvier 2003 n'ayant pas été renouvelé au 31 décembre 2006, la société HIYOKI devait engager son action avant le 31 décembre 2011, ce qu'elle a fait le 28 mai 2011 devant le tribunal de commerce de Saint-Malo ; qu'elle ajoute que le 11 juin 2013, la société HIYOKI s'est désistée de sa demande et a fait délivrer assignation devant le tribunal de commerce de Rennes le même jour ; qu'excipant des dispositions de l'article 2243 du code civil, elle considère qu'en se désistant, la société HIYOKI a renoncé à l'instance et a perdu de façon irrémédiable le bénéfice de l'interruption de la prescription ; qu'elle en conclut que d'évidence, la prescription quinquennale est acquise, l'assignation datant du 11 juin 2013 ;

Considérant que les parties s'accordent à reconnaître que le point de départ de la prescription de l'action se situe au 31 décembre 2006 et que l'action relève du régime de la prescription quinquennale- anciennement décennale- de l'article L 110-4 du code de commerce instaurée par la loi du 17 juin 2008 ;

Considérant que conformément aux dispositions transitoires prévue à l'article 26-II de la loi précitée, celle-ci est applicable à compter du 19 juin 2008, date de son entrée en vigueur dès lors que le délai de prescription décennale n'était pas expiré à cette date ; qu'il en ressort que l'action expirait le 19 juin 2013 de sorte que lors de la délivrance de l'assignation du 11 juin 2013 devant le tribunal de commerce de Rennes, celle-ci n'était pas prescrite ; que le jugement entrepris sera confirmé sur ce point ;

' tirée de l'autorité de la chose jugée

Considérant que la société CODIF INTERNATIONAL soutient que le tribunal de commerce de Saint-Malo aurait définitivement tranché le litige par jugement du le 11 septembre 2007 en ce qu'il a reconnu comme fondée la rupture du contrat de concession ;

Considérant que le présent litige porte exclusivement sur l'indemnisation du préjudice résultant de la rupture brutale des relations commerciales établies sur le fondement de l'article L.442-6 1 5° du code de commerce ;

Considérant qu'en application de l'article 1351 du code civil, l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de la demande fondée sur la même cause ; qu'il ressort du jugement précité que le tribunal était saisi par la société CODIF d'une demande en paiement des stocks de produits PHYTOMER au Japon en suite de la rupture du contrat de concession et que la société HIYOKI n'a pas comparu de sorte qu'aucune demande reconventionnelle en indemnisation pour rupture brutale des relations commerciales n'a été formée ; que si le tribunal a dit que la société CODIF INTERNATIONAL justifiait du non-renouvellement du contrat de concession au 31 décembre 2006 et fait droit à la demande en paiement, il n'a pas statué sur le caractère abusif ou non de la rupture et il importe peu à cet égard que les correspondances sur les conditions de la rupture aient été produites aux débats ; que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté l'exception d'irrecevabilité tirée de ce chef ;

Considérant que la société HIYOKI se prévaut également, en appel, de décisions japonaises et plus particulièrement du jugement du tribunal de Tokyo en date du 29 janvier 2010, confirmé par arrêt du 27 octobre 2010 devenu définitif dont elle cite de larges extraits, en ce qu'il a jugé de la rupture du contrat de concession qui lie les parties ;

Considérant qu'il ressort des décisions japonaises produites que :

Le 25 avril 2007, la société HIYOKI a assigné devant le tribunal de Tokyo les sociétés CODIF, ABCO et PHYTOMER JAPAN d'une demande d'indemnisation en réparation du dommage subi du fait d'une part de la cessation de ses rapports commerciaux avec la société CODIF INTERNATIONAL et d'autre part, de la reprise de son réseau d'affaires par la société PHYTOMER JAPAN,

Par jugement du 11 avril 2008, le tribunal de Tokyo a décliné sa compétence à statuer sur l'action initiée à l'encontre de la société CODIF INTERNATIONAL au bénéfice du tribunal de commerce de Saint-Malo avec application du seul droit français,

Par arrêt du 29 octobre 2008, la cour d'appel de Tokyo a confirmé le jugement d'incompétence et le 28 août 2009, la cour suprême de Tokyo a confirmé l'arrêt,

Par jugement du 29 janvier 2010, confirmé par arrêt du 27 octobre 2010, le tribunal de Tokyo a débouté la société HIYOKI de ses demandes formées à l'encontre des sociétés ABCO et PHYTOMER JAPAN ;

Considérant qu'il en résulte que d'une part, le tribunal de Tokyo s'est déclaré incompétent pour connaître du présent litige de sorte qu'aucune autorité de la chose jugée sur le fond du droit ne peut être opposée à la société CODIF INTERNATIONAL et que d'autre part, il ne saurait non plus être excipé de l'autorité de la chose jugée par le tribunal japonais dans l'instance opposant la société HIYOKI aux seules sociétés ABCO et PHYTOMER JAPAN dès lors que la société CODIF INTERNATIONAL n'y était plus partie ;

Considérant dès lors que l'exception d'irrecevabilité tirée de l'autorité de la chose jugée par les juridictions japonaises sera également rejetée ;

Sur le fond

Considérant qu'il ressort des dispositions de l'article L 442-6-I 5° du code de commerce qu'engage sa responsabilité et s'oblige à réparer le préjudice causé, celui qui rompt brutalement une relation commerciale établie, sans préavis tenant compte de la durée de la relation commerciale antérieure ou des usages reconnus par des accords interprofessionnels ; que ce même article spécifie que ces dispositions ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure ;

Considérant que les parties ne discutent pas avoir été liées entre 1986 et 2006 par de nombreux accords capitalistiques et contrats de concession exclusive des produits de la marque Phytomer à durée déterminée ; que si la société CODIF INTERNATIONAL qualifie ces relations de 'chaotiques' et rappelle que certains contrats ont été résiliés puis renouvelés dans un contexte conflictuel généré par les activités complémentaires exercées par la famille [P], elle fait valoir 'les efforts constants' qu'elle a déployés 'pour trouver des solutions et maintenir les relations avec HIYOKI' ; que l'existence pendant 20 ans de relations commerciales établies au sens de l'article L 442-6-1 5° du code de commerce n'est pas sérieusement contestée ;

Considérant que le dernier contrat signé entre les parties est un contrat de concession exclusive en date du 5 décembre 2002 à effet au 1er janvier 2003 pour une durée de quatre ans, soit devant expirer au 31 décembre 2006 ; que les relations commerciales entre les parties ont cessé au 1er janvier 2007 ;

Considérant qu'aux termes du jugement entrepris, le tribunal de commerce de Rennes a débouté la société HIYOKI de ses demandes d'indemnisation pour rupture brutale et abusive sans préavis des relations commerciales en considérant que les conditions tant du non-renouvellement que de la résiliation du contrat avaient été formellement respectées, ce qui excluait que la rupture ait été brutale et qu'elle ne pouvait être jugée abusive compte-tenu des insuffisances décrites dans des courriers qui n'ont pas fait l'objet d'une réponse circonstanciée ;

Considérant que pour solliciter l'infirmation du jugement entrepris, la société HIYOKI fait valoir en substance que si la rupture a effectivement pris deux formes, le non-renouvellement et la résiliation, c'est à tort que le tribunal a considéré que la société CODIF ne l'aurait pas laissée dans l'illusion que le contrat allait être renouvelé et a estimé pouvoir juger que la résiliation serait intervenue pour de justes motifs ; qu'elle considère qu'elle aurait dû bénéficier d'un préavis de deux ans doublés et que la résiliation ne repose sur aucun motif ;

Considérant qu'à l'article II du contrat du 5 décembre 2002, il était convenu que 'Le contrat est conclu pour une durée de 4 ans à compter du 1er janvier 2003 ; le renouvellement du contrat doit être négocié 6 mois à l'avance avant son échéance, chacune des parties s'engage à prévenir l'autre 6 mois à l'avance par LR-AR de son intention de ne pas renégocier le contrat à son échéance.' ; qu'il s'en suit que la société HIYOKI connaissait nécessairement dès son origine la date de la fin de ce contrat ; qu'elle ne conteste pas que la société CODIF INTERNATIONAL était alors libre, soit de renégocier les conditions d'un nouveau contrat, soit de ne pas le reconduire ; que d'ailleurs, elle reconnaît dans ses écritures qu''Au 30 juin 2006, le contrat en cours n'offrait aux parties que deux options : ' terminer la relation contractuelle et le contrat en cours au 31 décembre 2006 ou ' renouveler le contrat après cette date, selon les modalités à renégocier' ;

Considérant que par lettre recommandée avec accusé réception du 26 juin 2006, soit plus de 6 mois avant le terme du contrat venant à expiration le 31 décembre 2006, la société CODIF INTERNATIONAL a informé la société HIYOKI que 'Nous vous confirmons qu'il convient à cette occasion d'en renégocier les termes [du contrat ] sur lesquels les deux parties devront se mettre d'accord pour le renouvellement...Dans l'hypothèse où les deux parties n'aboutiraient pas à un accord sur les différents point ci-dessus mentionnés, le contrat de concession signé le 5 décembre 2002 se terminera le 31 décembre 2006.' ; que les points mentionnés comme devant être négociés étaient les suivants : 'La durée du contrat, Les quotas, La confidentialité, Le caractère intuitu personae, L'organisation des relations entre HIYOKI et PHYTOMER.' ;

qu'ils portaient donc sur les conditions substantielles du contrat ;

Considérant que la société CODIF a clairement exprimé sa volonté de ne renouveler le contrat qu'à la condition qu'un accord soit trouvé sur des points essentiels qu'elle a listés ; que la société HIYOKI ne saurait faire abstraction de ce courrier et sérieusement soutenir que le principe du renouvellement aurait été acquis et définitif antérieurement en se prévalant d'un courrier du 15 mai 2016 ; qu'en effet, dans ce courrier, si la société CODIF INTERNATIONAL proposait le renouvellement du contrat, elle le soumettait déjà à un accord sur la durée, les quotas '4.180.000€ d'achat + 10% de plus tous les ans' et la persistance d'une clause de confidentialité 'car nous refusons qu'il y ait une autre tentative de copie de nos produits tant chez HIYOKI que chez DAS', en précisant 'Nous souhaitons adjoindre un mémorandum au contrat qui devra définir le cadre de notre collaboration de façon beaucoup plus précise.' ;

Considérant que la société HIYOKI ne saurait pas plus prétendre que la société CODIF lui aurait longtemps fait croire que le contrat serait renouvelé ; qu'en effet, il ne ressort d'aucun des courriers échangés les 30 juin et 24 juillet 2006 qu'un accord aurait été sur le point d'intervenir; qu'un fax du 17 août 2006 de la société CODIF précise 'Afin de pouvoir commencer nos discussions sur le renouvellement du contrat...' et celui du 29 août 2006 ' Dans l'état actuel des choses, je réserve ma position quand au renouvellement du contrat de concession sur les bases qui ont été discutées jusqu'à présent...' ; qu'enfin, par mail du 22 septembre 2006, la société CODIF a indiqué à la société HIYOKI 'Le quota pour l'année 2005 n'a pas été atteint...., le quota pour l'année 2006 : 4 065 600 € ne sera pas atteint. [G] [P] et [F] [P] se sont servies de l'image de PHYTOMER et ont travaillé pour PHYTOMER en contravention avec notre contrat. En conséquence, ce contrat sera dénoncé et ne sera pas renouvelé.' ;

Considérant en définitive que la société HIYOKI était informée dès la signature du contrat en 2002 que ce contrat arrivait à échéance le 31 décembre 2006 et qu'excluant toute reconduction tacite dès lors qu'il prévoyait sa date de fin et la signature d'un nouveau contrat, son renouvellement ne lui était pas acquis de plein droit ; que conformément aux dispositions contractuelles, la société CODIF l'a informée 6 mois avant l'échéance par lettre recommandée avec accusé réception qu'à défaut d'accord, le contrat ne serait pas renouvelé ; que les courriers postérieurs adressés par la société CODIF ne lui permettaient pas de croire au nécessaire renouvellement du contrat ; qu'en conséquence, le délai de préavis de 6 mois dont elle a disposé, était suffisant et la rupture des relations commerciales le 31 décembre 2006 n'est pas brutale ; que le jugement entrepris sera donc confirmé de ce chef ;

Considérant que par mail du 25 septembre 2006, la société CODIF a informé la société HIYOKI 'qu'il sera mis un terme définitif le 31 décembre 2006 au contrat de concession entre les laboratoires PHYTOMER, département de la société CODIF INTERNATIONAL, et la société HIYOKI...signé le 05 décembre 2002 et entré en vigueur le 1er janvier 2003, pour non-respect de l'article VIII- QUOTAS et de l'article XVI- CARACTÈRE INTUITU PERSONAE' ;

Considérant qu'aux termes de l'article XVII-RÉSILIATION du contrat de concession, il était convenu que le contrat pourrait être résilié d'office et de plein droit, 30 jours après l'envoi d'une mise en demeure par lettre recommandée avec accusé réception, '...généralement en cas d'inobservation d'une ou plusieurs obligations mises à la charge du concessionnaire et particulièrement en cas de non-réalisation des quotas fixés et acceptés par les deux parties.' ; que comme l'ont pertinemment relevé les premiers juges, le respect des quotas était une condition essentielle du contrat puisque cité 'particulièrement' ;

Considérant que cette clause librement convenue entre les parties autorisait donc la rupture du contrat de plein droit un mois après l'envoi d'une mise en demeure en cas de non-respect des quotas ;

Considérant qu'il ressort des mails sus visés dont le contenu n'est pas contesté par la société HIYOKI que celle-ci n'a pas respecté les quotas prévus contractuellement de sorte que les manquements invoqués par la société CODIF à cet égard sont avérés et justifiaient la rupture du contrat de plein droit ; qu'en conséquence, celle-ci ne peut être qualifiée d'abusive ; que le jugement entrepris sera également confirmé de ce chef ;

Considérant que la société CODIF INTERNATIONAL qui ne démontre pas que la société HIYOKI est abusé de son droit d'agir en justice et d'exercer une voie de recours qui lui était légalement ouverte, sera déboutée de la demande formée à ce titre ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant par arrêt contradictoire, publiquement par mise à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Et y ajoutant,

CONDAMNE la société la société HIYOKI aux dépens de l'appel,

AUTORISE la SCP AFG, avocat, à recouvrer les dépens dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile,

CONDAMNE la société HIYOKI à verser à la société la somme de 20.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLA PRÉSIDENTE

Vincent BREANT Françoise COCCHIELLO


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 14/13187
Date de la décision : 25/11/2015

Références :

Cour d'appel de Paris I4, arrêt n°14/13187 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-11-25;14.13187 ?
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