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24/11/2015 | FRANCE | N°15/03908

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 24 novembre 2015, 15/03908


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRÊT DU 24 Novembre 2015

(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/03908



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 24 Février 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - section industrie RG n° 14/11309





APPELANTE



Madame [W] [C]

[Adresse 1]

[Localité 1]

née le [Date naissance 1] 1981 à [Loca

lité 3] (60)

comparante en personne, assistée de Me Jean-Christophe BONINO, avocat au barreau de SENLIS





INTIMEE



SARL AAZ MIROITERIE AGENCEMENT (AZED)

[Adresse 3]

[Localité 2]

...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRÊT DU 24 Novembre 2015

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/03908

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 24 Février 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - section industrie RG n° 14/11309

APPELANTE

Madame [W] [C]

[Adresse 1]

[Localité 1]

née le [Date naissance 1] 1981 à [Localité 3] (60)

comparante en personne, assistée de Me Jean-Christophe BONINO, avocat au barreau de SENLIS

INTIMEE

SARL AAZ MIROITERIE AGENCEMENT (AZED)

[Adresse 3]

[Localité 2]

RCS 390 405 167

représentée par Me Myriam NAHON, avocat au barreau de PARIS, toque : D1662

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 Septembre 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Jean-Louis CLEVA, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Jean-Louis CLEVA, Président

Mme Soleine HUNTER FALCK, conseillère

Mme GAUTIER, conseillère

Greffier : Madame Chantal HUTEAU, lors des débats

ARRET :

- Contradictoire,

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par Monsieur Jean-Louis CLEVA, Président et par Madame Chantal HUTEAU, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Cour est saisie de l'appel interjeté par Mademoiselle [W] [C] du jugement du Conseil des Prud'hommes de PARIS, section Industrie - chambre 4, rendu le 24 Février 2015 qui l'a déboutée de ses demandes.

FAITS ET DEMANDES DES PARTIES

La SARL AAZ MIROITERIE AGENCEMENT (AZED) a pour activité le commerce de miroiterie, vitrerie et les travaux de bâtiment ; Monsieur [G] [A] est son gérant ;

A l'issue d'un contrat à durée déterminée conclu le 4 février 2002, Mademoiselle [W] [C] née le [Date naissance 2] 1981 a été engagée le 3 juin 2002 en contrat à durée indéterminée à temps plein par la SARL AAZ MIROITERIE AGENCEMENT (AZED) en qualité d'assistante de gestion ; sa rémunération mensuelle brute était de 1322 € pour 39 h par semaine plus une prime de panier ; dans le dernier état de ses fonctions, elle occupait le poste de comptable ; son salaire de base pour 151 h 67 était de 2458.28 € plus une prime d'ancienneté de 221.25 € soit une rémunération mensuelle brute de 2679.55 € ;

L'entreprise est soumise à la convention collective de la miroiterie, négoce de verre, elle emploie moins de11 salariés ;

Le 19 juin 2012, Mademoiselle [W] [C], dans le cadre de la visite périodique par la médecine du travail a été déclarée « Apte » sans autre mention ou observation ;

Elle a été en congés du 1er Mai 2013 au dimanche 12 Mai 2013 puis en arrêt de travail à compter du 14 Mai 2013 avec établissement d'un arrêt de travail le 15 Mai 2013 pour «épisode de crise douloureuse rachidienne » constamment renouvelé jusqu'au 9 Mars 2014 ; la salariée a avisé son employeur le 3 Mars 2014 que son arrêt de travail ne sera pas renouvelé et qu'il y avait lieu de prévoir une visite de reprise auprès de la médecine du travail ;

La visite de reprise a eu lieu le 10 Mars 2014 ; le médecin du travail a émis un avis d'inaptitude au poste occupé antérieurement à l'arrêt maladie pour danger immédiat, sans nécessité d'une seconde visite et a ajouté « aucun reclassement dans l'entreprise n'est demandé à titre médical » ;

Le 20 Mars 2014, l'employeur a questionné le médecin du travail afin de savoir si Mademoiselle [W] [C] serait apte à occuper un poste de commerciale ou de chargée d'affaires en entreprise et sur le terrain ( prospects de clients, relations avec les techniciens, suivi de la clientèle...) ; le médecin du travail a confirmé le 21 Mars 2013 qu'il ne demandait pas à titre médical de poste de reconversion dans l'entreprise ;

Le 24 Mars 2013 l'employeur a adressé un courrier recommandé AR à Mademoiselle [W] [C] lui demandant si elle était susceptible d'accepter l'un des postes visés dans la lettre qu'il avait fait parvenir au médecin du travail le 20 Mars 2014 ; la salariée a répondu négativement le 1er avril 2014 ;

Le 1er avril 2014 Mademoiselle [W] [C] a été convoquée à un entretien préalable fixé au 10 avril suivant en vue d' un licenciement, l'entretien a été reporté au 30 avril 2014, la salariée ayant fait savoir qu'elle ne pouvait pas se présenter à l'entretien du 10 avril 2014 ; le 16 avril 2014 l'employeur a fait connaître à la salariée qu'elle avait refusé les postes de reclassement de sorte qu'il était dans l' impossibilité de la reclasser ;

Mademoiselle [W] [C] a été licenciée le 6 Mai 2014 en raison de son inaptitude prononcée par la médecine du travail et de son impossibilité de la reclasser ;

Mademoiselle [W] [C] a saisi le Conseil des Prud'hommes le 3 Septembre 2014 ;

Mademoiselle [W] [C] demande l'infirmation du jugement et de dire que la rupture de son contrat de travail est sans cause réelle et sérieuse comme trouvant sa cause dans le harcèlement physique et moral dont elle a été victime à l'origine de son inaptitude ; elle invoque le défaut de reclassement et demande la condamnation de l'employeur à lui payer avec intérêts légaux à compter de la demande les sommes de :

5359.06 € à titre d'indemnité de préavis plus congés payés afférents

32154.36 € pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

32154.36 € à titre d'indemnité spécifique pour manquement de l'employeur à son obligation de prévenir les actes de harcèlement dans l'entreprise

3500 € en application de l'article 700 du Code de procédure Civile

Elle demande en outre la remise d'un solde de tout compte rectifié et des bulletins de paie rectifiés (niveau 6, catégorie TS3, échelon HM3) ;

LA SARL AAZ MIROITERIE AGENCEMENT ( AZED) demande la confirmation du jugement , le rejet des prétentions de l'appelante et la condamnation de cette dernière à lui payer la somme de 3500 € en application de l'article 700 du Code de procédure Civile.

SUR CE

Il est expressément fait référence aux explications et conclusions des parties visées à l'audience et soutenues oralement à la barre .

Mademoiselle [W] [C] expose que les relations avec son employeur étaient bonnes jusqu'en 2011, Monsieur [G] [A], le gérant la conseillant et la guidant dans la réalisation de son projet d'acquisition d'un bien immobilier et lui proposant la rénovation du bien qu'elle a acquis en 2009, ce qu'elle a accepté, dit-elle « sans se douter que ce cadeau supposait une contrepartie sexuelle » ;

Elle indique que postérieurement, Monsieur [G] [A], a adopté envers elle « une attitude familière, paternaliste, peu respectueuse de sa personne , qu'il est devenu envahissant, exigeant, autoritaire despote et que son comportement a pris les caractéristiques d'un harcèlement moral qui s'est doublé ensuite d'un harcèlement sexuel » ; elle soutient que plus ce dernier constatait qu'elle s'était rapprochée de [E] ( co-gérant et commercial de la société) qui partageait le même bureau qu'elle depuis 2007 suite aux travaux de rénovation et d'agrandissement dans les locaux de la société AZED « et des autres salariés, plus il adoptait un comportement haineux » ; elle soutient encore page 8 de ses conclusions que plus elle résistait « plus la sentence est lourde ; qu'il en arrive à ne plus lui dire bonjour le matin en arrivant au bureau mais dans la journée il vient lui parler correctement avec un comportement convenable la plongeant dans un grand désarroi » ;

Elle expose que le matin du 14 Mai 2013, son employeur est entré dans le bureau et l'a «agressée verbalement la traitant d'incapable, l'accusant injustement d'avoir jeté un chèque d'un client AZ concept à la poubelle » ; aux termes de ses conclusions, elle cite une multitude de faits comme la demande de faire ce qu'elle appelle des fausses factures pour le 19 Mai entre deux sociétés « car il ne voulait pas payer la TVA », le manque de chauffage dans son bureau, la caméra apposée dans un angle de son bureau, le piratage de sa messagerie ; elle indique que dans l'après midi du 14 Mai 2013 elle avait réclamé sa paie et s'était vue répondre « pour que tu puisses toucher ton salaire je vais devoir te mettre sur le trottoir, tu gagneras peut-être suffisamment pour me permettre en plus de payer mes ouvriers » ;

En arrêt de travail à compter du 15 Mai 2013, le 17 Mai 2013 elle réclame par courrier son salaire du mois d'avril 2013 ; le 24 Mai 2013, l'employeur lui répond que toute la comptabilité se trouve sur son poste informatique et que pour pouvoir verser son salaire et continuer l'activité de l'entreprise il lui demande de transmettre rapidement le code d'accès pour la MAC et différents comptes dont le code des comptes bancaires ;

Les parties échangeront encore divers courriers au sujet des salaires d'avril et Mai 2013 et de la transmission des codes d'accès aux logiciels comptabilité ; Mademoiselle [W] [C] a saisi l'inspection du travail qui est intervenue auprès de la SARL AAZ MIROITERIE AGENCEMENT (AZED le 12 juin 2013 au sujet des salaires impayés d' avril et Mai 2013 et de l'attestation de salaire destinée à la sécurité sociale ;

L'employeur a transmis les salaires et les bulletins de salaire à Mademoiselle [W] [C] le 20 juin 2013, tout en lui réclamant le « règlement prochain de la somme de 28890 € correspondant à la main d''uvre et à la fourniture des travaux exécutés dans votre appartement du [Adresse 2] » ;

Le 25 juin 2013, la salariée a demandé certaines rectifications sur ses bulletins de salaire et le versement du reliquat de salaire afférent aux rectifications tout en sollicitant l'annulation de la facture de travaux « qui n'a pas lieu d'être » ;

Le 10 juillet 2013 Mademoiselle [W] [C] a déposé une plainte au commissariat de police à l'encontre de Monsieur [G] [A] pour harcèlement moral et sexuel dans laquelle elle relate que les faits ont commencé au mois de Mai 2011 (caresse de la main, des cheveux, pose de la main sur la cuisse pendant qu'il lui parlait ou qu'elle lui montrait quelque chose sur l'écran de l'ordinateur ou manipulait la souris) dans cette plainte, elle cite certains des propos qu'il lui tenait « tous les patrons couchent avec leur secrétaire, il faut que tu essaies plusieurs hommes .... c'est pas du dos que tu es coincée, tu es coincée des fesses, j'ai un remède, c'est que tu te fasses sauter et je peux t 'aider etc.... » ; elle cite encore de nombreux propos tenus par son employeur tels « ici c'est moi le patron, tu dois obéir à tout ce que je te demande et pour avoir ton salaire, il faut que tu fasses le trottoir » ;

Le 15 juillet 2013 Mademoiselle [W] [C] a confirmé sa plainte pour harcèlement moral et sexuel à l'encontre de Monsieur [G] [A] et indique avoir reçu une facture datée du 5 juin 2013 « qu'il a monté de toute pièce pour un montant de 29000 euros » ; dans le procès-verbal elle cite le nom de trois personnes susceptibles de témoigner ([F] [A], [L] [R], [Y] [V]) ;

Le 16 juillet 2013, le médecin traitant de Mademoiselle [W] [C] a établi un certificat médical indiquant que l' état psychologique de celle-ci n'est pas en relation avec son AT du 30 avril 2010 (sic), qu'il s'agit d'une erreur de sa part et qu'il lui fait « ce jour un certificat initial concernant son burn out afin d'ouvrir un nouveau dossier d' AT » ; il est établi par un courrier de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de l' Oise en date du 1er avril 2014 que la demande de reconnaissance du caractère professionnel de « la maladie » de la salariée déclarée le 16 juillet 2013 a été rejetée par le comité régional (CRRMP) qui a estimé qu'il ne pouvait pas être retenu de lien direct entre l'affection présentée et l'exposition professionnelle ;

Le même médecin traitant a délivré deux autres certificats, l'un le 10 Mars 2014 certifiant que « Mademoiselle [W] [C] a présenté un burn out diagnostiqué le 15 Mai 2013 suite à un harcèlement moral et sexuel dont le déroulement des événements sont mentionnés en partie dans le procès verbal du 10 juillet 2014 » (sic), l'autre le 25 avril 2014 certifiant que « l'état de santé de Mademoiselle [W] [C] s'est dégradé bien avant d'avoir reçu un courrier de son employeur réclamant une facture. Le début de la maladie de [W] est daté le 14 Mai 2013 et la lettre a été reçue par Melle [C] le 6 juin 2013 » ;

Mademoiselle [W] [C] produit un autre certificat d'un psychothérapeute, [T] [O], établi le 11 avril 2014 attestant avoir reçu Mademoiselle [W] [C] en psychothérapie de soutien à la suite d'un « burn out » lié à un harcèlement moral et sexuel ;

LA SARL AAZ MIROITERIE AGENCEMENT (AZED) conteste l'ensemble des accusations et allégations de l'appelante ; elle verse aux débats plusieurs attestations ([F] [A], co-gérant , [Q] [D], ouvrier dans la société qui indique avoir été en affaire avec Mademoiselle [W] [C] pour tout ce qui était administratif, [Q] [K] qui affirme n'avoir jamais assisté à la moindre situation équivoque entre Monsieur [A] et Mademoiselle [W] [C] et que l'attitude de Monsieur [A] a toujours été empreinte de courtoisie à son égard et envers les autres personnes, enfin une attestation de Madame [V] [Y] du cabinet comptable chargé de la comptabilité de la SARL AAZ MIROITERIE AGENCEMENT (AZED) qui venait régulièrement travailler dans la société en relation avec Mademoiselle [W] [C] ;

Il ressort de ces attestations qu' aucun de leur auteur n'a jamais constaté de propos déplacés ou gestes incorrects de Monsieur [A] à l'égard de Mademoiselle [W] [C] en leur présence ; Monsieur [F] [A] indique également que l'attitude de Mademoiselle [W] [C] a selon lui changé dès lors que Monsieur [A] « a essayé de trouver avec elle un arrangement d'échéancier pour recouvrir sa dette, en effet AZED a avancé pour le compte de celle-ci les travaux effectués dans son appartement » ;

Les attestations produites par la salariée dans le cadre de la présente instance n'apportent aucune information quant à l'attitude et les propos de Monsieur [A] à son égard et aucune de ces attestations n'émane des personnes qu'elle avait cité dans ses dépôts de plaintes à la police ; Monsieur [E] [H], commercial et selon l'appelante co-gérant qui partageait son bureau qu'elle cite comme ayant pu assister à des scènes en précisant toutefois « je ne sais pas s'il a pu voir ou entendre des choses» n'a pas délivré d'attestation ;

Au cours de son audition par la police au commissariat de [Localité 3], elle avait déclaré être la seule femme dans l'entreprise , qu'il y avait des périodes d'accalmie après qu'elle lui ait dit qu'il n'avait pas à lui parler comme çà et qu'elle lui avait toujours fait retirer ses mains mais que çà recommençait et qu'elle allait au travail la boule au ventre ;

Le harceleur étant précisément le « patron » de Mademoiselle [W] [C] dans une micro entreprise où les salariés tous masculins étaient en fait la journée sur les chantiers, la cour considère qu'il ne peut être reproché à la salariée de ne pas avoir avisé son employeur des faits de harcèlement sexuel dont elle faisait l'objet ; elle reconnaît que les propos et gestes déplacés se calmaient par intermittence ce qui était de nature à lui faire prendre patience et à hésiter à déposer plainte ;

La situation isolée de la salariée la plaçait nécessairement dans une situation délicate y compris pour rapporter la preuve des faits des agissements de Monsieur [G] [A] qui cumulait la double identité d'employeur et de harceleur; les attestations communiquées par la SARL AAZ MIROITERIE AGENCEMENT (AZED) émanent en réalité de deux personnes extérieures à l'entreprise ( Madame [Q] [K] et Madame [Y] [V] qui n'étaient donc pas en permanence dans le bureau de Mademoiselle [W] [C]), d'un ouvrier qui indique être salarié de la SARL AAZ MIROITERIE AGENCEMENT (AZED) depuis 20 ans qui n'était par conséquent qu'occasionnellement dans le bureau de Mademoiselle [W] [C] pour des problèmes administratifs et enfin de Monsieur [F] [A] dont le lien et la communauté d'intérêts professionnels avec [G] [A] incite à prendre avec la plus grande réserve son témoignage destiné à innocenter ce dernier ;

Eu égard à l'ensemble de ces éléments, la cour considère que Mademoiselle [W] [C] a été victime de harcèlement moral et sexuel au cours des années 2011 à 2013 et qu'il convient d'infirmer le jugement ;

Eu égard aux certificats médicaux dont la sincérité ne peut être remise en cause compte tenu du contexte de l'affaire et le refus de prise en charge par la Caisse primaire d'Assurance maladie de la déclaration d' AT du 16 juillet 2013 au titre des maladies d'origine professionnelle étant indifférent quant à l'appréciation de la réalité des faits de harcèlement par la cour, il convient de juger que l'inaptitude prononcée pour danger immédiat par le médecin du travail est nécessairement en relation directe avec les faits de harcèlement subis par la salariée sur son lieu de travail de sorte que le licenciement prononcé par l'employeur pour inaptitude et impossibilité de reclassement est nul ;

Il y a lieu d'allouer de ce chef la somme de 30000 € à Mademoiselle [W] [C] en réparation de son préjudice ;

L'impossibilité d'exécuter le préavis étant liée au harcèlement à l'origine de l'inaptitude, il convient de condamner la SARL AAZ MIROITERIE AGENCEMENT (AZED au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis soit eu égard au salaire moyen de Mademoiselle [W] [C] (2679.53 €) et à son ancienneté, au paiement de la somme de 5359.06 € plus 535.90 € pour congés payés afférents ;

La salariée a perçu son indemnité de licenciement sur le bulletin de salaire du mois de Mai 2014 ; l' inaptitude n'a pas été reconnue comme étant d'origine professionnelle de sorte que l'employeur qui n'a pas reclassé la salariée n'est pas tenue au paiement de l'indemnité spéciale de licenciement ;

En revanche, l'employeur a été défaillant dans son obligation de prévenir les actes de harcèlement , la somme de 15000 € sera allouée à l'appelante à titre de dommages intérêts ;

Il y a lieu de rejeter la demande de rectification des bulletins de salaire concernant la catégorie TS3, l'échelon HM3 et le niveau 6, en effet l'appelante ne justifie pas que les tâches qu'elle accomplissaient correspondaient aux définitions de la convention collective relatives à la classification qu'elle revendique , en particulier elle ne dirigeait pas et ne coordonnait pas les programmes de plusieurs équipes et il est constant que la société avait en fait recours à un cabinet d'expertise comptable de sorte que Mademoiselle [W] [C] n'avait pas le contrôle du résultat de la comptabilité ;

Il y a lieu d'allouer la somme de 1500 € à Mademoiselle [W] [C] en application de l'article 700 du Code de procédure Civile et de dire que la SARL AAZ MIROITERIE AGENCEMENT (AZED) conservera à sa charge ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement et statuant à nouveau

Dit que Mademoiselle [W] [C] a été victime de harcèlement moral et sexuel et que son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement est nul,

En conséquence :

Condamne la SARL AAZ MIROITERIE AGENCEMENT (AZED) à payer à Mademoiselle [W] [C] les sommes de :

5359.06 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis plus 535.90 € pour congés payés afférents

30000 € à titre de dommages intérêts pour licenciement nul

15000 € à titre de dommages intérêts pour manquement de l'employeur à son obligation de prévenir les actes de harcèlement

Rejette les autres demandes des parties .

Condamne la SARL AAZ MIROITERIE AGENCEMENT (AZED) aux entiers dépens et à payer à Mademoiselle [W] [C] la somme de 1500 € au titre des frais irrépétibles .

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 15/03908
Date de la décision : 24/11/2015

Références :

Cour d'appel de Paris K4, arrêt n°15/03908 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-11-24;15.03908 ?
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