RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 11
ARRÊT DU 20 Novembre 2015
(n° , 9 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/08252
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 14 Mars 2012 par le Conseil de Prud'hommes de PARIS - RG n° 11/12236
APPELANTE
SA GENERALI VIE
[Adresse 1]
représentée par Me Antoine SAPPIN, avocat au barreau de PARIS, toque : K0020
INTIMEE
Madame [W] [O] épouse [W] née le [Date naissance 1] 1956 à [Localité 1]
[Adresse 2]
comparante en personne, assistée de Me Olivia DU JONCHAY, avocat au barreau de PARIS, toque : B0859
PARTIE INTERVENANTE VOLONTAIRE
POLE EMPLOI
[Adresse 3]
[Adresse 3]
représenté par Me Catherine ROIG, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 309 substitué par Me Olivia DU JONCHAY, avocat au barreau de PARIS, toque : B0859
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 17 Septembre 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Marie-Luce CAVROIS, Présidente de chambre
Mme Jacqueline LESBROS, Conseillère
M. Christophe BACONNIER, Conseiller
Qui en ont délibéré
Greffier : Melle Flora CAIA, lors des débats
ARRET :
- Contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Marie-Luce CAVROIS, Présidente et par Mademoiselle Flora CAIA, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
RAPPEL DES FAITS, PROCEDURE ET MOYENS DES PARTIES
La société GENERALI VIE (SA) a employé Madame [O] épouse [W] par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er février 1979 en qualité de employée aux écritures puis d'assistante commerciale.
Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale de des sociétés d'assurances.
Madame [O] percevait en dernier lieu un salaire de 2789 euros.
Par lettre notifiée le 3 mars 2009, Madame [O] a été convoquée à un entretien préalable fixé au 12 mars 2009.
Madame [O] a ensuite été licenciée pour cause réelle et sérieuse par lettre notifiée le 19 mars 2009 ; la lettre de licenciement indique':
« Vous êtes assistante commerciale niveau 2 au sein du Bureau de Paris de la Direction de la Distribution.
A la fin du premier trimestre 2005, votre hiérarchie vous a chargée de vous occuper quasi exclusivement de la gestion administrative des opérations réalisées pour le compte de « La Financière de l'Europe », cette dernière étant une société de courtage et de conseil qui réalise des affaires avec Generali depuis sa création en 2005.
Vous saisissez donc, depuis cette date, la quasi-totalité des opérations (affaires nouvelles, versement exceptionnels, rachats, demandes d'arbitrage manuels, ') venant de ce courtier dans les outils de gestion de l'entreprise.
A la fin de l'année 2008, nous avons constaté un certain nombre d'irrégularités provoquant un préjudice particulièrement important pour l'entreprise et impliquant des opérations réalisées pour le compte de la société de courtage et de conseil « La Financière de l'Europe ».
Au regard de ce qui précède, la Direction de l'entreprise a demandé des diligences d'audit.
Les conclusions de ces diligences ont mis en évidence, au travers des sondages pratiqués, des actes de gestion administrative atypiques et parfaitement anormaux au titre des opérations réalisées pour le compte de « La Financière de l'Europe » à compter du mois de février 2008 et, plus particulièrement, dans le domaine des arbitrages manuels traités par vos soins. Ces derniers étant tout à fait contraires aux processus de gestion applicables par l'ensemble des gestionnaires.
Compte tenu des éléments évoqués ci-dessus et plus particulièrement de la gestion atypique et anormale des opérations de « La Financière de l'Europe » dont vous êtes en charge, il ne nous est plus possible de maintenir la confiance nécessaire à toutes relations de travail.
Les explications apportées lors de l'entretien préalable n'ont pas été de nature à modifier notre appréciation de la situation.
Aussi, nous avons décidé de vous notifier par la présente lettre recommandée avec avis de réception votre licenciement pour cause réelle et sérieuse ».
A la date de présentation de la lettre recommandée notifiant le licenciement, Madame [O] avait une ancienneté de 30 ans.
La société GENERALI VIE occupait à titre habituel au moins onze salariés lors de la rupture des relations contractuelles.
Contestant la légitimité de son licenciement et réclamant diverses indemnités consécutivement à la rupture de son contrat de travail, Madame [O] a saisi le conseil de prud'hommes de PARIS qui, par jugement du 14 mars 2012 auquel la cour se réfère pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, a':
- condamné la société GENERALI VIE à payer à Madame [O], la somme de 80.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et celle de 1000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile
- condamné la société GENERALI VIE à payer au Pôle Emploi concerné, les indemnités de chômage versées à Madame [O] à hauteur de 3 mois d'indemnités
- débouté Madame [O] du surplus de ses demandes.
La société GENERALI VIE a relevé appel de ce jugement par déclaration parvenue au greffe de la cour le 8 août 2012.
L'affaire a été appelée à l'audience du 17 septembre 2015.
Lors de l'audience et par conclusions régulièrement déposées, la société GENERALI VIE demande à la cour de :
«'A titre principal
- CONSTATER que le licenciement de Madame [O] repose sur une cause réelle et sérieuse ;
En conséquence :
- INFIRMER le jugement de première instance
- DIRE ET JUGER Madame [O] mal fondée dans l'intégralité de ses demandes ;
- L'EN DEBOUTER ;
et à titre reconventionnel, de :
- CONDAMNER Madame [O] à verser à GENERALI la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- CONDAMNER Madame [O] aux entiers dépens.
A titre subsidiaire
- APPRECIER dans de bien plus justes proportions les demandes de dommages et intérêts formulées par Madame [O].
En tout état de cause
- LA DEBOUTER de sa demande au titre d'une exécution déloyale du contrat et de harcèlement moral.'»
A l'appui de ces moyens, la société GENERALI VIE fait valoir en substance que':
- en 2007, Madame [O] a été affectée à la réception et à l'enregistrement des ordres d'arbitrage adressés par la société de courtage dénommée la'Financière de l'Europe'; d'un côté, la réception commandait qu'elle date les ordres, étant précisé que cette «'date de la demande'» déterminait la «'date de valeur'», 3 jours ouvrés plus tard'; de l'autre côté, l'enregistrement consistait à saisir dans le logiciel de gestion les données relatives aux opérations'et il devait être fait dés la réception, la «'date de la saisie'» déterminant elle-même la «'date d'opération sur les marchés'», 3 jours ouvrés plus tard, en sorte que la «'date d'opération sur les marchés'» devait correspondre en principe à la «'date de valeur'»
- fin 2008, les performances de la'Financière de l'Europe étant hors norme, la société GENERALI VIE a fait procéder à un audit interne qui a conclu à l'existence d'une fraude depuis février 2008 consistant à réaliser des opérations d'arbitrage à cours connu et à en faire supporter la charge à la compagnie, et que cette fraude avait nécessité la participation active de Madame [O] puisque c'est elle qui effectuait l'enregistrement des ordres d'arbitrage de la'Financière de l'Europe à une date de saisie systématiquement postérieure à la date de valeur, en sorte que les cours étaient connus à la'date de la saisie
- cette fraude a généré un préjudice de plus de 21 millions d'euros à la société GENERALI VIE en 2008 à titre des opérations passés par la'Financière de l'Europe
- ces faits frauduleux ont amené la société GENERALI VIE a porté plainte pour faux et usage de faux, pour escroquerie, pour fraude informatique, recel et complicité à l'encontre de la'Financière de l'Europe et de Madame [O],
- les agissements déloyaux de Madame [O] constituent une cause réelle et sérieuse et justifient la perte de confiance
- ils sont établis par le rapport d'audit interne et la plainte
- le défaut d'organisation de la société GENERALI VIE et la surcharge de travail allégués en défense par Madame [O] ne sont pas établis, un seul courriel étant produit à cet égard pour un pic d'activité en août 2007, alors que les faits litigieux se sont déroulés à partir de février 2008
- en outre, alors qu'elle avait elle-même détecté des anomalies relatifs à des ordres d'arbitrage antidatés, elle ne les a pas signalés
- la garantie conventionnelle invoquée par Madame [O] est inapplicable car cette garantie ne trouve à s'appliquer qu'en cas de licenciement pour faute ou pour insuffisance professionnelle
- le harcèlement moral et l'exécution déloyale du contrat de travail allégués par Madame [O] ne sont pas établis';
- à titre subsidiaire, les demandes indemnitaires sont excessives.
Lors de l'audience et par conclusions régulièrement déposées, Madame [O] s'oppose à toutes les demandes de la société GENERALI VIE et demande à la cour de':
«'- Confirmer le jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes de Paris le 14 mars 2012 en ce qu'il a jugé que :
- la société GENERALI IARD a violé la garantie de fond prévue par la convention collective des assurances,
- le licenciement de Madame [W] [O] pour perte de confiance est dénué de cause réelle et sérieuse,
- De surcroît y ajouter que la société GENERALI IARD s'est rendue coupable de harcèlement moral et a été déloyale dans l'exécution du contrat de travail,
En conséquence,
A titre principal,
- Condamner la société GENERALI IARD à verser à Madame [O] la somme de 150.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- La condamner à verser à Madame [O] la somme de 60.000 euros en réparation du préjudice subi du fait de l'exécution déloyale du contrat de travail et du harcèlement moral,
En tout état de cause :
- Condamner la société GENERALI IARD à verser à Madame [O] des intérêts, avec capitalisation, sur le montant des condamnations prononcées, depuis la date d'introduction de la demande devant le Conseil de Prud'hommes de Paris,
- La condamner à verser à Madame [O] la somme de 7000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
- La condamner aux entiers dépens.'»
A l'appui de ces moyens, Madame [O] fait valoir en substance que':
- en refusant la réunion d'un conseil comme elle l'a régulièrement demandée, la société GENERALI VIE a violé la garantie conventionnelle prévue par la convention collective des assurances (art. 90 a)'; en effet les faits reprochés à Madame [O] s'analysent en faute'; par suite de cette violation, son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse comme l'a jugé le conseil de prud'hommes
- la perte de confiance ne constitue pas un motif de licenciement
- les accusations portées contre elle sont fantaisistes'; aucun élément de preuve n'a été produit sur le pacte frauduleux imaginé entre la'Financière de l'Europe et Madame [O]
- l'information judiciaire ouverte sur la plainte de la société GENERALI VIE n'a pas permis de caractériser une infraction pénale et aucune faute n'a été retenue à l'encontre de Madame [O]
- la performance de la'Financière de l'Europe ne résulte pas d'une fraude mais de ses talents et les résultats de la'Financière de l'Europe sont restés très performants malgré le départ de Madame [O] comme cela ressort du jugement du tribunal de commerce de Paris du 26 janvier 2010
- le fait que les enregistrements des ordres d'arbitrage étaient effectués parfois avec retard ne lui est pas imputable car cela résulte d'un défaut d'organisation de la société GENERALI VIE et à la surcharge de travail qu'elle subissait
- elle a alerté, à plusieurs reprises mais sans succès, sa hiérarchie de sa surcharge de travail
- elle a été victime de harcèlement moral et l'exécution du contrat de travail a été déloyale de la part de la société GENERALI VIE'; en effet, la surcharge de travail qu'elle a vainement signalée à sa hiérarchie, l'entretien effectué le 15 décembre 2008 dans le cadre de l'audit était un interrogatoire au cours duquel des méthodes d'intimidation et de menace ont été employées (elle a aussitôt été placée en arrêt maladie compte tenu de son état de choc), le traitement qui lui a été réservé lors de la procédure de licenciement (intimidation) et le 7 avril 2009, quand elle venue reprendre ses affaires personnelles à son bureau et plainte dont elle a fait l'objet à l'origine de l'enquête de police judiciaire, de la perquisition et de l'interrogatoire qu'elle a subis, constituent des faits de harcèlement moral'; elle est d'ailleurs toujours en dépression.
- cela justifie les demandes indemnitaires qu'elle formule.
Pôle Emploi est intervenue volontairement lors de l'audience et par conclusions régulièrement déposées, Pôle Emploi demande à la cour de':
- condamner la société GENERALI VIE à lui payer la somme de 9509,50 euros à titre de des indemnités de chômage versées à Madame [O] du 2 novembre 2009 au 2 mai 2010 à hauteur de 9509,50 euros.
- condamner la société GENERALI VIE à lui payer la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Lors de l'audience, les conseils des parties ont plaidé par observations et s'en sont rapportés pour le surplus à leurs écritures ; l'affaire a alors été mise en délibéré à la date du 20 novembre 2015 par mise à disposition de la décision au greffe (Art. 450 CPC)
MOTIFS
Vu le jugement du conseil de prud'hommes, les pièces régulièrement communiquées et les conclusions des parties, soutenues oralement à l'audience, auxquels il convient de se référer pour plus ample information sur les faits, les positions et prétentions des parties.
Sur le licenciement
Il ressort de l'article L. 1235-1 du Code du travail qu'en cas de litige, le juge à qui il appartient d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties'; si un doute subsiste il profite au salarié.
Madame [O] soutient que son licenciement est abusif au motif qu'elle a n'a pas pu bénéficier de la réunion du conseil (de discipline) prévue par la convention collective des assurances (art. 90 a) et que le motif énoncé dans la lettre de licenciement ne caractérise pas la cause réelle et sérieuse exigée par la loi.
La société GENERALI VIE soutient que le licenciement de Madame [O] est justifié au motif que la garantie conventionnelle invoquée n'est pas applicable au licenciement et au motif que les faits invoqués dans la lettre de licenciement caractérisent une cause réelle et sérieuse.
Il ressort de la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige que Madame [O] a été licenciée pour perte de confiance, laquelle résulte des tâches de réception et d'enregistrement des ordres d'arbitrage de la'Financière de l'Europe que Madame [O] a effectuées à partir de février 2008 dans des conditions irrégulières selon l'employeur.
La perte de confiance de l'employeur ne peut jamais constituer en tant que telle une cause de licenciement, même quand elle repose sur des éléments objectifs. Seuls ces éléments objectifs peuvent, le cas échéant, constituer une cause de licenciement, mais non la perte de confiance qui a pu en résulter pour l'employeur
Il incombe donc à la cour d'examiner les faits invoqués par la société GENERALI VIE et de dire s'ils caractérisent ou ne caractérisent pas la cause réelle et sérieuse exigée par la loi.
Il résulte de l'examen des pièces versées aux débats et des moyens débattus que la société GENERALI VIE n'apporte pas suffisamment d'éléments de preuve pour établir les irrégularités invoquées à l'encontre de Madame [O]'; en effet c'est en vain que la société GENERALI VIE soutient que le rapport d'audit interne et la plainte qu'elle a déposée établissent l'existence d'une fraude de la part de la'Financière de l'Europe depuis février 2008 consistant à réaliser des opérations d'arbitrage à cours connu et à en faire supporter la charge à la compagnie, et que cette fraude a nécessité la participation active de Madame [O] puisque c'est elle qui effectuait l'enregistrement des ordres d'arbitrage de la'Financière de l'Europe à une date de saisie systématiquement postérieure à la date de valeur au motif que Madame [O] produit des éléments de preuve contraires.
C'est ainsi qu'il ressort notamment du réquisitoire définitif aux fins de non lieu rendu le 5 août 2015 dans l'information judiciaire ouverte sur la plainte de la société GENERALI VIE qu'aucune infraction pénale n'a pu être caractérisée et qu'aucune faute ou irrégularité ne peut être retenue à l'encontre de Madame [O] contrairement à ce que soutient la société GENERALI VIE qui manque donc en preuve dans l'invocation des moyens relatifs à «'la gestion atypique et anormale des opérations de « La Financière de l'Europe » dont (Madame [O] est) en charge'»
Sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres moyens, il ressort de ce qui précède que l'employeur n'a pas suffisamment caractérisé dans la lettre de licenciement de Madame [O] et à l'occasion de la présente instance la cause réelle et sérieuse justifiant un licenciement au sens de l'article L. 1235-1 du Code du travail.
Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a jugé que le licenciement de Madame [O] est dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
Madame [O] demande la somme de 150.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; la société GENERALI VIE s'y oppose et soutient que la demande indemnitaire est excessive.
Il est constant qu'à la date de présentation de la lettre recommandée notifiant le licenciement, Madame [O] avait au moins deux ans d'ancienneté dans une entreprise de 11 salariés et plus ; il y a donc lieu à l'application de l'article L. 1235-3 du Code du travail dont il ressort que le juge octroie une indemnité au salarié qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.
Il résulte de l'examen des pièces versées aux débats, compte tenu de l'âge de Madame [O], de son ancienneté, de la durée de son chômage, de la perte des avantages offerts par la convention collective des assurances, des difficultés financières générées par son licenciement abusif, du dommage moral qui a été nécessairement subi par Madame [O] à la suite de la perte de son emploi dans des conditions injustes, que l'indemnité à même de réparer intégralement son préjudice doit être évaluée à la somme de 150.000 euros.
Le jugement déféré sera donc infirmé en ce qu'il a octroyé des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à hauteur de 80.000 euros, et statuant à nouveau de ce chef, la cour condamnera la société GENERALI VIE à payer à Madame [O] la somme de 150.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Sur l'application de l'article L.1235-4 du code du travail
L'article L.1235-4 du code du travail dispose «'Dans les cas prévus aux articles L. 1235-3 et L. 1235-11, le juge ordonne le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage par salarié intéressé.
Ce remboursement est ordonné d'office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l'instance ou n'ont pas fait connaître le montant des indemnités versées.'».
Le licenciement de Madame [O] ayant été jugé sans cause réelle et sérieuse, il y a lieu à l'application de l'article L.1235-4 du Code du travail ; il y a lieu d'ordonner le remboursement par la société GENERALI VIE à Pôle Emploi des indemnités de chômage versées à Madame [O] du 2 novembre 2009 au 2 mai 2010 à hauteur de 9509,50 euros.
Le jugement déféré sera donc infirmé en ce qu'il a condamné la société GENERALI VIE à payer au Pôle Emploi concerné, les indemnités de chômage versées à Madame [O] à hauteur de 3 mois d'indemnités, et statuant à nouveau de ce chef, la cour condamnera la société GENERALI VIE à payer à Pôle Emploi la somme de 9509,50 euros en remboursement des indemnités de chômage versées à Madame [O] du 2 novembre 2009 au 2 mai 2010.
Sur les dommages et intérêts pour exécution fautive du contrat de travail
Madame [O] demande la somme de 60.000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution fautive du contrat de travail ; la société GENERALI VIE s'y oppose.
Il résulte de l'examen des pièces versées aux débats et des moyens débattus que Madame [O] n'apporte pas suffisamment d'éléments de preuve pour établir l'exécution fautive de son contrat de travail et le harcèlement moral, allégués à l'encontre de la société GENERALI VIE ; en effet c'est en vain que Madame [O] soutient avoir été victime de harcèlement moral et que l'exécution du contrat de travail a été déloyale de la part de la société GENERALI VIE, que la surcharge de travail qu'elle a vainement signalée à sa hiérarchie, que l'entretien effectué le 15 décembre 2008 dans le cadre de l'audit était un interrogatoire au cours duquel des méthodes d'intimidation et de menace ont été employées, que le traitement qui lui a été réservé lors de la procédure de licenciement et le 7 avril 2009, quand elle venue reprendre ses affaires personnelles à son bureau et plainte dont elle a fait l'objet, constituent des faits de harcèlement moral'à l'origine de sa dépression,
- au motif d'une part qu'une seule pièce établit qu'elle a signalé une surcharge en août 2007 en sorte que Madame [O] manque en preuve dans son moyen de ce chef,
- au motif d'autre part qu'il n'est pas prouvé par aucun élément de preuve probant que l'entretien effectué le 15 décembre 2008 dans le cadre de l'audit était un interrogatoire au cours duquel des méthodes d'intimidation et de menace ont été employées et qu'elle a été victime d'actes d'intimidation lors de la procédure de licenciement'; en effet si Madame [O] prouve qu'elle a été placée en position d'arrêt maladie par son médecin en raison de sont état d'anxiété le 15 décembre 2008, cette pièce établit seulement qu'elle était anxieuse mais n'établit pas la cause exacte de cette anxiété, sachant que, pour une personne de 50 ans, l'entretien avec un auditeur même courtois, ne pouvait qu'être particulièrement anxiogène compte tenu des faits suspectés'; en outre la déclaration de main courante que Madame [O] a faite le jour même de cette entretien et qu'elle produit n'a pas de valeur probante, s'agissant d'une preuve constituée pour soi-même,
- au motif que le fait de déposer une plainte constitue l'exercice d'un droit et n'est pas susceptible de constituer un fait de harcèlement moral sauf abus, lequel n'est pas établi en l'espèce,
- et au motif qu'en ce qui concerne les faits du 7 avril 2009 survenus quand elle venue reprendre ses affaires personnelles, le seul élément de preuve que Madame [O] produit, savoir l'attestation de l'amie qui l'a accompagnée jusqu'à la porte de l'entreprise, établit seulement qu'elle est revenue choquée mais ce témoin n'a pas pu témoigner des conditions de cette visite.
Le moyen tiré du harcèlement moral et de l'exécution déloyale du contrat de travail sera donc rejeté au motif que Madame [O] manque en preuve.
Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a débouté Madame [O] de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral et exécution fautive du contrat de travail.
Sur les demandes accessoires
Conformément aux dispositions des articles 1153 et 1153-1 du code civil, les dommages et intérêts alloués seront assortis d'intérêts au taux légal à compter de la présente décision.
La capitalisation des intérêts est de droit, dès lors qu'elle est demandée et s'opérera par année entière en vertu de l'article 1154 du code civil.
La cour condamnera la société GENERALI VIE aux dépens en application de l'article 696 du Code de procédure civile.
Le jugement déféré sera confirmé en ce qui concerne l'application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Il apparaît équitable, compte tenu des éléments soumis aux débats, de condamner la société GENERALI VIE à payer à Madame [O] la somme de 2000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile pour la procédure d'appel.
Le demande formée par Pôle Emploi à titre de l'article 700 du Code de procédure civile sera rejetée.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Infirme le jugement'mais seulement en ce qu'il a
- condamne la société GENERALI VIE à payer à [W] [O] épouse [W] la somme de 80.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- condamné la société GENERALI VIE à payer au Pôle Emploi concerné, les indemnités de chômage versées à Madame [O] à hauteur de 3 mois d'indemnités
Et statuant à nouveau sur les chefs infirmés,
Condamne la société GENERALI VIE à payer à [W] [O] épouse [W] la somme de 150.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
Condamne la société GENERALI VIE à payer à Pôle Emploi la somme de 9509,50 euros en remboursement des indemnités de chômage versées à [W] [O] épouse [W] du 2 novembre 2009 au 2 mai 2010,
Dit que les dommages et intérêts alloués seront assortis d'intérêts au taux légal à compter de la présente décision.
Ordonne la capitalisation des intérêts et dit qu'elle s'opérera par année entière en application de l'article 1154 du code civil.
Confirme le jugement déféré pour le surplus';
Déboute les parties de leurs demandes plus amples et contraires,
Condamne la société GENERALI VIE aux dépens de la procédure d'appel.
Condamne la société GENERALI VIE à verser à [W] [O] épouse [W] une somme de 2000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Le Greffier,La Présidente,