République française
Au nom du Peuple français
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4- Chambre 9
ARRÊT DU 17 Novembre 2015
(no, 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/ 00199
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 06 Août 2014 par le RG no 1113001522
APPELANT
Monsieur Germaine, Lucie, Eve X...
...
94220 CHARENTON LE PONT
représenté et assistée par Me Laurent KARILA de la SELARL KARILA SOCIETE D'AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0264, substitué sur l'audience par Me Camille MAZEAUD, avocat au barreau de PARIS, toque P0264
INTIMÉS
Monsieur Marco Y...
...
75012 Paris
représenté et assisté sur l'audience par Me Ilanit SAGAND-NAHUM, avocat au barreau de PARIS, toque : D1021
Monsieur Marco Y...
...
75012 PARIS
non comparant
SA SOCRAM
2 rue du 24 février
BP 8426
79092 NIORT CEDEX 9
non comparante
SA BNP PARIBAS LE BATANIA BAR A
20 Bld Eugène Deruelle
9 ème Etg
69432 LYON CEDEX 03
non comparante
CAF DE PARIS
101 rue Nationale
75656 PARIS CEDEX 13
non comparante
CA CONSUMER FINANCE FINAREF
Service Surendettement
BP 40
59202 TOURCOING CEDEX
non comparante
CARREFOUR BANQUE
Service surendettement
TSA 74116
77026 MELUN CEDEX
non comparante
SA COFIDIS
Chez synergie
CS 14110
59899 LILLE CEDEX 9
non comparante
FACET
Chez Neuilly Contentieux CAPE BDF NORD BAC A API 333
BP 20203
13572 MARSEILLE CEDEX 02
non comparante
MACIF ILE DE FRANCE
CHEZ eFFICO-SORECO Recouvrement de Créances
196 Avenue Grammont
37917 TOUR CEDEX 9
non comparante
SA MENAFINANCE
Chez Consumer France, anap miniparc de Bordeaux Bât 6
6 rue du Professeur de la Vignolle
33042 BORDEAUX CEDEX
non comparante
VOLKSWAGEN BANK
Service Surendettement
11 Avenue de Boursonne-BP 61
02601 VILLERS COTTERETS CEDEX
non comparante
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 13 Octobre 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Jean-Pierre GIMONET, Président de chambre
Mme Patricia GRASSO, Conseillère
Madame Françoise JEANJAQUET, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffier : Monsieur Christophe DECAIX, lors des débats
ARRÊT : RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE
-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
-signé par Monsieur Jean-Pierre GIMONET, présidente et par M. Christophe DECAIX greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
* * * * * *
FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES
Monsieur Marco Y... et madame Ruth Z..., épouse Y..., ont saisi la commission de surendettement des particuliers de Paris qui, à l'issue d'un moratoire de 24 mois, a orienté le 23 juillet 2013 la procédure vers un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire et a recommandé l'effacement des dettes ;
Saisie par madame X...et la société Socram banque, créanciers, le tribunal d'instance du 19 ème arrondissement de Paris a, par jugement du 6 août 2014, notamment :
- rejeté les contestations ;
- prononcé une mesure de rétablissement personnel au profit de monsieur Marco Y... et madame Ruth Z...;
Le 20 août 2014, madame Eve X...a relevé appel de cette décision ;
À l'audience du 13 octobre 2015, madame X...était représentée par son conseil qui s'est référé à ses conclusions visées par le greffier à l'audience ;
Elle a demandé à la cour :
- d'infirmer le jugement ;
- de rééchelonner le paiement de la dette des époux Y... qui s'élève à la somme de 25 577, 43 ¿ ;
- de condamner madame Y... à communiquer la dévolution successorale de la succession de son père, monsieur Z..., ou à défaut le nom des héritiers sous astreinte de 100 ¿ par jour de retard à compter de la décision à intervenir, et ce, dans un délai de 2 mois ;
- de se réserver la liquidation de l'astreinte ;
- de condamner solidairement les époux Y... à lui payer la somme de 3 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;
Monsieur et madame Y... étaient représentés par leur conseil qui s'est référé à ses conclusions visées par le greffier à l'audience ;
Ils ont demandé à la cour :
- de confirmer le jugement et de prononcer leur rétablissement personnel sans liquidation judiciaire ;
- de condamner madame X...à payer la somme de 3 000 ¿ titre au titre des frais irrépétitibles que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide, dans les conditions de l'article 37 de la loi no 91-647 du 10 juillet 1991 ainsi qu'aux dépens devant être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;
Les créanciers n'ont pas comparu ;
SUR CE,
Considérant à titre liminaire que l'appel en matière de procédure de surendettement des particuliers, est formé, instruit et jugé selon les règles de la procédure sans représentation obligatoire figurant aux articles 931 à 949 du code de procédure civile ; que la procédure applicable devant la cour d'appel est donc la procédure orale de droit commun dans laquelle la prise en considération des écrits d'une partie par la cour est subordonnée à l'indication orale à l'audience par cette partie ou son représentant qu'elle se réfère à ses écritures ; que dès lors, la cour ne peut prendre en compte les éventuelles demandes ou observations présentées par écrit par les créanciers non comparants ;
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L 330-1 al. 3 et 4 du code de la consommation, le débiteur qui se trouve dans une situation irrémédiablement compromise caractérisée par l'impossibilité manifeste de mettre en oeuvre les mesures de traitement prévues par les articles L 331-7 et L 331-7-1 est éligible à la procédure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire s'il est constaté que le débiteur ne possède que des biens meublants nécessaires à la vie courante et des biens non professionnels indispensables à l'exercice de son activité professionnelle ou que l'actif est constitué de biens dépourvus de valeur marchande ou dont les frais de vente seraient manifestement disproportionnés au regard de leur valeur vénale ; que le juge doit donc se référer aux éléments objectifs qui lui sont soumis, c'est-à-dire le rapport entre le montant des dettes et les revenus disponibles ou ceux prévisibles ;
Considérant que l'article R. 334-1 du code de la consommation dispose que :
" Pour l'application des articles L. 331-6, L. 331-7 et L. 331-7-1, la part des ressources mensuelles du débiteur à affecter à l'apurement de ses dettes est calculée, dans les conditions prévues à l'article L. 331-2, par référence au barème prévu à l'article R. 3252-2 du code du travail. Toutefois, cette somme ne peut excéder la différence entre le montant des ressources mensuelles réelles de l'intéressé et le montant forfaitaire du revenu de solidarité active mentionné au 2o de l'article L. 262-2 du code de l'action sociale et des familles applicable au foyer du débiteur.
La part de ressources réservée par priorité au débiteur est déterminée au regard de l'ensemble des dépenses courantes du ménage, qui intègre les dépenses mentionnées à l'article L. 331-2.
Le montant des dépenses courantes du ménage est apprécié par la commission soit pour leur montant réel sur la base des éléments déclarés par le débiteur, soit en fonction du barème fixé par son règlement intérieur et prenant en compte la composition de la famille. Le règlement intérieur précise à quelles conditions et selon quelles modalités les dépenses sont prises en compte pour leur montant réel ou selon le barème.
Lorsque la commission prend en compte des dépenses courantes du ménage pour leur montant réel, elle peut demander au débiteur d'en fournir des justificatifs. Si le débiteur ne les fournit pas, les dépenses concernées sont appréciées selon le barème susvisé " ;
Considérant que la cour doit apprécier la bonne foi et la situation de surendettement des débiteurs au vu des éléments fournis à la date à laquelle elle statue ;
Considérant que madame X...soutient que les époux Y... n'ont cessé, par leur comportement, d'aggraver le montant de leur dette en ne payant pas l'intégralité des loyers et charges malgré les échéanciers mis en place par le cabinet Loiselet et Daigremont ;
Qu'elle fait valoir qu'ils n'ont réglé aucun loyer postérieur au moratoire de 24 mois dont ils ont bénéficié à compter du 30 août 2011 et n'ont pas cherché de logement plus adapté à leurs ressources pendant ledit moratoire attendant le 12 août 2012 pour déposer une demande de logement social auprès de la seule mairie de Paris ;
Qu'elle soutient que les époux Y... auraient pu être hébergés à titre gratuit par la mère de madame Y... ;
Qu'enfin, elle reproche aux époux Y...de n'avoir pas déclaré à la commission l'ensemble de leurs actifs, alors que madame Y... serait titulaire de parts sociales dans la SCI Z..., propriétaire de biens immobiliers ;
Considérant cependant que les ressources des époux Y... sont très insuffisantes au regard de leurs charges ; que madame X...verse elle-même un jugement du tribunal d'instance du 12 ème arrondissement de Paris du 28 février 2013 mentionnant les efforts des époux Y... pour réduire leur dette locative en ce que l'APL a été remise en place depuis le mois de juin 2012 et en ce qu'ils versent tous les mois le loyer résiduel de 950 ¿ ;
Que n'est pas caractérisé sur ce point un comportement actif et conscient des débiteurs susceptibles d'établir leur mauvaise foi ;
Considérant que l'affirmation selon laquelle les époux Y... auraient pu être hébergés à titre gratuit par la mère de madame Y... apparaît sans portée, alors que l'aptitude de l'appartement de cette dernière à recevoir cinq personnes supplémentaires n'est pas connue non plus que l'accord de la mère de madame Y... ;
Considérant qu'il ressort d'un courrier du ministère de l'Egalité, des territoires et du logement du 5 juillet 2013 que la demande initiale de logement social formée par madame Y... date du 4 mai 2010 et a été renouvelée depuis ; qu'il a été indiqué à cette dernière le 23 janvier 2014 par la commission de médiation du département de Paris qu'une décision favorable avait été rendue qui avait été transmise au préfet du département afin qu'une offre de logement lui soit faite par un organisme bailleur dans un délai de maximum de 6 mois ;
Que, s'il est fait reproche aux époux Y...de n'avoir pas présenté de demande de logement social en banlieue, ceux-ci indiquent qu'ils devaient résider à Paris intra muros en raison du traitement médical de leur fille dans un hôpital parisien et justifient de ce que leur enfant Shauna a suivi un traitement de chimiothérapie au pôle oncologie hématologie de l'hôpital Trousseau ;
Considérant qu'il apparaît, comme le relève madame X..., que madame Y... n'a pas déclaré qu'elle était associée de la SCI Z...; que, cependant, il ressort des statuts de ladite société qu'elle n'est titulaire que d'une seule des 1300 actions de cette société au capital de 198. 183, 72 ¿ qui est propriétaire de deux appartements dans un immeuble du 10ème arrondissement de Paris ; que l'omission de déclaration de cette part qui peut être évaluée aux alentours de 252 ¿ ne peut caractériser la mauvaise foi de madame Y... ;
Considérant que madame X...conclut à l'absence de caractère irrémédiablement compromis de la situation de surendettement en raison de la situation des époux X...qui s'est améliorée dès lors qu'ils ont été relogés probablement dans un logement social et du fait que madame Y... se trouve en position d'héritier ;
Considérant qu'il est constant que monsieur Z...est décédé laissant pour recueillir sa succession, son épouse, madame Fortunée A..., née le 20 juin 1950, et ses trois enfants venant à la succession pour un tiers, sauf les droits du conjoint survivant ;
Considérant que l'actif de la succession est composé de 2 studios dans le 11éme arrondissement ; que madame Y... indique qu'elle ne possède avec ses frères et soeurs que des droits indivis en nue-propriété en présence de sa mère, usufruitière qui refuse de vendre ; qu'il n'existe pas dans la succession d'élément permettant la réalisation à court ou moyen terme d'un actif dont les frais de vente seraient proportionnés à leur valeur vénale ;
Considérant que la situation du couple Y... est toujours compromise, monsieur Y..., chauffeur livreur, salarié en intérim, ne percevant que des allocations du pôle emploi Ile de France entre 487 ¿ et 503 ¿, selon les mois ; que madame Y..., esthéticienne, est au chômage depuis 2006 ; que le couple perçoit en outre des prestation de la caisse d'allocations familiales, dont la principale est une allocation pour l'éducation de l'enfant handicapé, le montant total des prestations s'élevant à la somme de 1992 ¿, y compris l'APL ;
Considérant que le seul forfait charges courantes de 1711 ¿ et le loyer de 831 ¿ montrent la persistance d'une capacité de remboursement négative des époux Y... rendant impossible tout rééchelonnement des créances ;
Considérant que, comme l'a cour la déterminé auparavant, les époux Y... ne disposent d'aucun actif réalisable dès lors qu'il n'existe pas dans la succession d'élément permettant la réalisation à court ou moyen terme d'un actif dont les frais de vente seraient proportionnés à leur valeur vénale, alors d'ailleurs qu'aucun moratoire n'est possible ;
Qu'il convient, dès lors, en l'état d'une situation irrémédiablement compromise rendant impossible la mise en oeuvre dune mesure classique de surendettement, de confirmer le jugement qui a prononcé le rétablissement personnel sans liquidation judiciaire des époux Y....
PAR CES MOTIFS
La cour
Déboute madame X...de ses demandes ;
Confirme le jugement ;
Dit n'y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et de l'article 37 de la loi no 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Dit que l'arrêt sera notifié par lettre simple à la commission de surendettement et par lettre recommandée avec accusé de réception au débiteur et à ses créanciers connus.
LE GREFFIER LE PRESIDENT