Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 11
ARRET DU 13 NOVEMBRE 2015
(n° , pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/12122
Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Juin 2013 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2012046668
APPELANTS
Monsieur [V] [L], élisant domicile au Cabinet de Maître [C] [M] (VIGO)
[Adresse 2]
[Localité 2]
Né le [Date naissance 1] 1966 à [Localité 5] (92)
Représenté par Me Julien CHEVAL de l'AARPI VIGO, avocat au barreau de PARIS, toque : G0190
Madame [O] [L], élisant domicile au Cabinet de Maître [C] [M] (VIGO)
[Adresse 2]
[Localité 2]
Née le [Date naissance 2] 1977 à [Localité 4] (92)
Représentée par Me Julien CHEVAL de l'AARPI VIGO, avocat au barreau de PARIS, toque : G0190
Monsieur [Q] [L] Elisant domicile au Cabinet de Maître [C] [M] (VIGO)
[Adresse 2]
PARIS 75008
Né le [Date naissance 3] 1982 à [Localité 4] (92)
Représenté par Me Julien CHEVAL de l'AARPI VIGO, avocat au barreau de PARIS, toque : G0190
INTIMEES
SAS L'AUTRE RIVE, immatriculée RCS de Paris n°434 262 549, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Pascale FAUCON de l'AARPI SATIS AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : D1052
SARL HUBERT ENTREPRISE, immatriculée RCS de Blois n°388 101 404, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 4]
[Localité 1]
Représentée par Me Sylvie OSTRE, avocat au barreau de PARIS, toque : D0541
Représentée par Me George LAINE, avocat au barreau de TOURS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 30 Septembre 2015, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Monsieur Paul André RICHARD, Conseiller hors classe, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Patrick BIROLLEAU, Président de chambre
Paul André RICHARD, Conseiller hors classe,
Marie-Annick PRIGENT, Conseillère
Greffier, lors des débats : Mme Patricia DARDAS
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Patrick BIROLLEAU, président et par Mme Patricia DARDAS, greffière à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.
Les consorts [L] sont appelants du jugement prononcé le 5 juin 2013 par le tribunal de commerce de PARIS qui les a déboutés de leurs demandes dirigées à l'encontre de la société L'AUTRE RIVE et condamnés à verser diverses sommes.
Vu les dernières conclusions des consorts [L] en date du 5 décembre 2014 ;
Vu les dernières conclusions de la société L'AUTRE RIVE en date du 21janvier 2015 ;
Vu les dernières conclusions de la société HUBERT en date du 22 janvier 2015 ;
MOTIFS
Considérant que Monsieur [H] [L] a commandé, en mars 2008, à la société de pompes funèbres L'AUTRE RIVE, un monument funéraire pour lui-même et sa famille ; qu'il devait décéder le [Date décès 1] 2009 avant-même que ledit monument ne soit terminé et mis en place, seul le socle du monument ayant été réalisé au cimetière du [Adresse 3] à [Localité 6] le 5 septembre 2008 ;
Considérant que les consorts [L] soutiennent que le monument livré ne correspond pas à celui commandé par leur père et qu'en raison des dégradations constatées l'affectant, ils demandent la résolution du contrat ;
Considérant que la société L'AUTRE RIVE, à laquelle Monsieur [L] a commandé le monument funéraire, soutient que celui qui a été livré correspond à ce qui a été commandé et conclut à sa mise hors de cause, et, subsidiairement, dans l'hypothèse où la Cour retiendrait une non-conformité, sollicite la garantie de la société HUBERT qui a fourni la pierre ; que la société L'AUTRE RIVE ne conclut pas sur la responsabilité des dégradations affectant le monument ;
Considérant que la société HUBERT, entreprise de tailleur de pierre, soutient que c'est la pierre commandée par Monsieur [L], qui a servie à la réalisation du monument, et qu'en ce qui concerne les dégradations constatées, il ne saurait lui en être fait grief, le transport ayant été assuré aux frais et risques de la société L'AUTRE RIVE ;
Considérant que les consorts [L] soutiennent que la pierre dans laquelle le monument a été réalisé n'existe pas dans la dénomination donnée par la société HUBERT ;
Mais considérant que, quel que soit le nom de la pierre utilisée, celle-ci correspond, selon l'expert [W] désigné par le tribunal de commerce de TOURS, à une pierre qui est adaptée à la construction d'un monument funéraire ;
Considérant que le monument a été transporté jusque chez le mandataire de la société L'AUTRE RIVE, la société CAMPAGNE ;
Considérant que des dégradations ont été constatées sur le monument ; que leur origine n'a pu être déterminée avec certitude, l'expert ayant envisagé diverses hypothèses qui ne débouchent sur aucune certitude quant au responsable ; que l'expert relève que 'l'éclat subi par un socle de muret peut être supprimé en raccourcissant la longueur de ce socle et que, selon le devis établi par la société HUBERT, ce raccourcissement peut être réalisé pour un montant de 800,12 € TTC, valeur octobre 2011.' ;
Considérant que la société HUBERT a admis que cet éclat pourrait provenir d'un défaut de conditionnement lors du transport ;
Considérant que 'les importantes cassures des deux éléments de façade pourraient être réparées par collage, sous réserve d'un abattement de prix substantiel et sous réserve que les consorts [L] en acceptent le principe ; selon le devis de la société HUBERT, le remplacement des deux éléments cassés et leur enlèvement peuvent être réalisés pour un montant de 5.600,87 € valeur octobre 2011' ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société L'AUTRE RIVE, tenue d'une obligation de résultat consistant en la livraison d'un monument funéraire en bon état, n'a pas rempli ses obligations ; qu'il ne saurait être admis au regard de ces obligations que les consorts [L] soient contraints de régler un supplément de prix non négligeable pour obtenir une prestation exempte de tout reproche ;
Considérant que la société L'AUTRE RIVE, co-contractante des consorts [L], ne saurait davantage obtenir la garantie de la société HUBERT dont il n'est pas démontré qu'elle ait commis une quelconque faute ;
Considérant que la société L'AUTRE RIVE, qui n'a pas cru bon de mettre en cause le transporteur ou la société CAMPAGNE, sera retenue à l'égard des consorts [L] comme responsable des dégats constatés ;
Considérant que l'importance des dégradations justifie la résolution du contrat ; que la circonstance que celles-ci soient réparables n'est pas opposable aux consorts [L] dès lors que, la commande portant sur un monument neuf, il doit être exempt de défaut sauf à être refusé par l'acheteur ; que, l'anéantissement du contrat entraînant la remise des choses dans leur état antérieur, la société L'AUTRE RIVE sera condamnée à restituer aux consorts [L] la somme de 42.315,26 €, avec intérêts au taux légal à compter de la date de l'assignation ;
Considérant que les consorts [L] sollicitent la somme de 10.000 € à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice moral, et celles de 2.990 € et 7.500 € en réparation du préjudice financier ;
Considérant que, si dès la constatation des dégradations, la société L'AUTRE RIVE avait assumé sa responsabilité, le litige aurait pu être résolu dans un bref délai à charge pour L'AUTRE RIVE de se retourner ultérieurement contre les sociétés HUBERT et LEA TOURAINE qu'elle estime responsables (cf. courriels de Monsieur [B], responsable de la société L'AUTRE RIVE, en date du 25 octobre 2010) ; qu'il lui était également loisible de les appeler en garantie dès que la procédure a été initiée par les consorts [L] à son encontre, ce qu'elle n'a pas fait pour le transporteur ;
Qu'elle poursuit dans son attitude puisqu'elle n'a pas conclu en cause d'appel sur l'origine des dégradations ;
Qu'elle n'hésitera pas à conclure que 'l'obligation de livrer un monument fabriqué avec une pierre conforme aux souhaits de Monsieur [L] ne lui incombait pas et qu'elle n'a agi qu'en qualité d'intermédiaire entre Monsieur [H] [L] et la société HUBERT' ;
Que cette attitude, révèlatrice d'une parfaite mauvaise foi, a causé un préjudice moral aux consorts [L] qui, depuis plus de cinq ans, tentent sans succès d'obtenir la solution d'un litige au demeurant fort simple ;
Que la Cour condamnera la société L'AUTRE RIVE à payer la somme de 5.000 € à titre de dommages intérêts ;
Considérant que les consorts [L] seront en revanche déboutés de leur demande de dommages intérêts fondée sur le préjudice financier, celui ci étant réparé par les intérêts moratoires et la demande de remise en état du caveau n'étant accompagnée d'aucun justificatif ;
Considérant qu'il sera fait application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que précisé au dispositif ;
PAR CES MOTIFS
Statuant contradictoirement,
INFIRME le jugement entrepris,
STATUANT A NOUVEAU,
MET hors de cause la société HUBERT,
PRONONCE la résolution du contrat liant la société L'AUTRE RIVE aux consorts [L] venant aux droits de Monsieur [H] [L],
DIT que la société L'AUTRE RIVE devra restituer aux consorts [L] la somme de 42.315,26 €, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date de l'assignation,
CONDAMNE la société L'AUTRE RIVE à payer la somme de 5.000 € à titre de dommages intérêts,
CONDAMNE la société L'AUTRE RIVE à payer, en application de l'article 700 du code de procédure civile, aux consorts [L] la somme de 8.000 € et à la société HUBERT celle de 4.000 €,
DEBOUTE les consorts [L] du surplus de leurs demandes,
CONDAMNE la société L'AUTRE RIVE aux entiers dépens dont distraction au bénéfice de Maître [M] .
Le Greffier Le Président