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05/11/2015 | FRANCE | N°14/14006

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 5, 05 novembre 2015, 14/14006


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5



ARRÊT DU 05 Novembre 2015

(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/14006



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 22 Septembre 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - Section commerce - RG n° 13/01032





APPELANTE

Madame [U] [R] épouse [Z]

[Adresse 1]

[Localité 1]

née le [Date naissance 1] 1964 à ALGÉRI

E (99352)

comparante en personne,

assistée de Me Simone DUJONCQUOY TOTH, avocat au barreau de PARIS, toque : C 54





INTIMÉE

SARL RIQUET HOTEL

[Adresse 2]

[Localité 1]

...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5

ARRÊT DU 05 Novembre 2015

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/14006

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 22 Septembre 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - Section commerce - RG n° 13/01032

APPELANTE

Madame [U] [R] épouse [Z]

[Adresse 1]

[Localité 1]

née le [Date naissance 1] 1964 à ALGÉRIE (99352)

comparante en personne,

assistée de Me Simone DUJONCQUOY TOTH, avocat au barreau de PARIS, toque : C 54

INTIMÉE

SARL RIQUET HOTEL

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par M. [G] [N] (Gérant)

assisté par Me Pascale LEFEVRE, avocat au barreau de PARIS, toque : A0646

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 01 Octobre 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Bernard BRETON, Présidente, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de:

Madame Marie-Bernard BRETON, Présidente

Madame Anne-Marie GRIVEL, Conseillère

Madame Marie-Liesse GUINAMANT, Vice-Présidente placée

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Laura CLERC-BRETON, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- signé par Madame Marie-Bernard BRETON, Présidente et par Madame Laura CLERC-BRETON, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

[U] [R] a été engagée en qualité de femme de ménage par la société Hôtel Riquet selon contrat de travail à durée indéterminée du 1er août 2002 ; licenciée pour faute grave par lettre du 3 août 2012 elle a saisi le conseil de prud'hommes de Paris le 28 janvier 2013 pour contester le bien fondé de ce licenciement et obtenir le paiement de dommages et intérêts, indemnités diverse et remise de documents.

Vu le jugement rendu le 22 septembre 2014 par le conseil de prud'hommes qui a débouté [U] [R] de ses demandes et l'a condamnée aux dépens.

Vu l'appel formé par [U] [R] contre ce jugement.

Vu les conclusions du 1er octobre 2015, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé complet des prétentions et des moyens, reprises oralement à l'audience, sans ajout ni retrait, par l'appelante qui demande à la cour de juger que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse et qu'il est intervenu dans des conditions brutales et vexatoires et de condamner la société Hôtel Riquet à lui payer les sommes suivantes :

- 29 906, 28 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 4 984, 38 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement brutal et vexatoire

- 4 984, 38 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral,

- 964; 72 euros à titre de rappel de salaire sur mise à pied

- 3 322, 92 euros avec congés payés y afférents à titre d' indemnité compensatrice de préavis

- 1 937, 75 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés

- 3 327, 10 euros à titre d' indemnité conventionnelle de licenciement

- 3 000, 00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

et d'ordonner la remise des documents de fin de contrat de travail .

Vu les conclusions du 1er octobre 2015, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé complet des prétentions et des moyens, reprises oralement à l'audience, sans ajout ni retrait, par l' intimée qui demande à la cour de confirmer le jugement et de condamner [U] [R] à lui payer 1 500, 00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

SUR QUOI

LA COUR

Sur la rupture du contrat de travail,

en application de l'article L. 1234-1 du code du travail la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié, qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail, d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée limitée du préavis sans risque de compromettre les intérêts légitimes de l'employeur ; la preuve de la faute grave incombe à l'employeur qui l'invoque,

Aux termes de la lettre de licenciement qui fixent les limites du litige, il est reproché à [U] [R] d'avoir adopté une attitude négative, de s'être présentée à l'hôtel à des heures non autorisées par son arrêt de travail, d'avoir semé la zizanie entre les femmes de ménage, d'avoir refusé de faire le ménage de la chambre n° 7 et abandonné son poste de travail et d'avoir provoqué un incident grave le 20 juillet 2012.

[U] [R] s'est trouvée en arrêt pour maladie du 14 juin au 26 juillet 2012, date à laquelle elle a repris son poste de travail.

Le 27 juin 2012 son employeur lui a adressé un courrier dans lequel il fait état du comportement insupportable de [U] [R], du fait qu'elle est passée sur son lieu de travail pour semer la zizanie tous les jours pendant son congé et a abandonné son poste de travail le 26 juin en refusant de nettoyer la chambre n° 7 et en l'insultant, incidents qu'ils qualifie de fautes graves ; le 28 juin l'employeur lui a notifié un avertissement pour les faits d'abandon de poste et de refus d'obéissance.

Il en ressort que le 28 juin 2012 la société Hôtel Riquet a considéré que les griefs qu'elle pouvait faire à la salarié devaient être sanctionnés par la délivrance d'un avertissement ; à moins de réitération, ce qui n'est pas invoqué par la société Hôtel Riquet dans la lettre de licenciement, ces faits ne pouvant constituer un motif de licenciement puisqu'ils ont été sanctionnés le 28 juin, le licenciement ne repose plus que sur l'incident du 20 juillet au cours duquel il est reproché à [U] [R] d'avoir fait venir son mari dans l'établissement et provoqué ainsi un affrontement entre monsieur [Z], son mari d'une part et le réceptionniste et l'employeur d'autre part, ce dernier ayant reçu un coup violent dans un oeil.

Alors que les parties sont contraires en fait sur le déroulement de l'incident ; il ressort des déclarations de monsieur [G] [N], gérant de l'établissement, qu'il n'est pas en mesure d'indiquer précisément qui lui a porté un coup et qu'en tout hypothèse ce n'est pas [U] [R] ; monsieur [H], voisin de l'hôtel, témoin de l'incident atteste avoir vu une personne très énervée sortir de l'hôtel, se jeter sur monsieur [Z] et le frapper, avant que tous deux s'accrochent et tombent au sol, ce qui est confirmé par les déclarations faites auprès des services de police par monsieur [Z] lorsqu'il a été entendu le 25 juillet 2012 lors de son dépôt de plainte.

Il est par ailleurs établi que monsieur [Z] se rendait fréquemment à l'hôtel où travaillait sa femme pour venir la chercher en compagnie de leur enfant et qu'il s'entretenait de manière cordiale avec monsieur [N] ; dans ces conditions il ne peut être fait grief à [U] [R] d'avoir fait venir son mari dans l'établissement pour agresser le réceptionniste.

D'où il suit que le grief n'est pas établi et que le licenciement ne repose ni sur une faute grave ni sur une cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences de la rupture du contrat de travail,

en considération de ce qui précède [U] [R] est en droit de prétendre au paiement, sur la base d'un salaire égal à 1 661, 46 euros, des sommes suivantes :

- 964, 72 euros avec congés payés y afférents au titre des salaires dus lors de la mise à pied

- 3 322, 92 euros avec congés payés y afférents représentant 2 mois de salaire à titre d' indemnité compensatrice de préavis

- 3 327, 10 euros à titre d' indemnité conventionnelle de licenciement

- 16 614, 60 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse calculée en application de l'article 1235-3 du code du travail et en considération de l'ancienneté de 10 ans dont bénéficiait la salariée dans l'entreprise, de son âge de 44 ans au moment du licenciement et des éléments de préjudice dont elle justifie, notamment suite à l'absence de travail,

- 1 937, 75 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur la base d'un revenu de 19 937, 59 euros au jour du licenciement.

Sur la demande relative aux faits de harcèlement moral,

l'article 1152-1 du code du travail interdit de faire subir à un salarié des agissements répétés de harcèlement moral ayant pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité ou d'altérer sa santé.

[U] [R] a fait l'objet le 14 juin 2012 d'un arrêt de travail pour dépression nerveuse réactionnelle ; lors de sa visite dans l'établissement le 6 juillet 2012 l'inspecteur du travail indique que [U] [R] l'a alerté sur ses conditions de travail en se plaignant de l'agressivité qu'elle rencontrait, du mépris et des insultes ; interpellé sur ce point monsieur [N] s'est borné à contester les faits sans démontrer qu'il en a par la suite cherché l'origine et tenté d'y remédier, notamment en provoquant des explications avec monsieur [L], dénoncé par [U] [R] comme harceleur.

En l'état de ces considérations et en relevant que l'employeur, auprès duquel la salariée s'est plainte de manière précise quant aux faits et aux personnes dénoncées,n'apporte aucun élément sérieux de démenti, il apparaît que les agissements dénoncés caractérisent un harcèlement moral en ce qu'ils ont été répétés et ont eu pour effet de porter atteinte à la dignité de [U] [R], notamment par l'appellation grossière qui était d'usage à son égard dans les relations entre le gérant et le réceptionniste, et de dégrader sa santé ainsi qu'en témoignent les certificats médicaux versés au débat.

Il en résulte pour [U] [R] un préjudice qui sera intégralement réparé par l'allocation de la somme de 3 000, 00 euros à titre de dommages et intérêts.

Sur les circonstances du licenciement,

[U] [R] ne rapporte pas la preuve que les circonstances qui ont entouré son licenciement sont particulièrement brutales et vexatoires ; sa demande de dommages et intérêts présentée sur le fondement de la faute civile sanctionnée par l'article 1382 du code civil doit être rejetée.

Il sera fait droit à la demande de remise de documents de fin de contrat de travail.

La société Hôtel Riquet qui succombe supportera les dépens de première instance et d'appel

Il serait contraire à l'équité de laisser à la charge entière de [U] [R] les frais de procédure qu'elle a engagés en première instance et en appel.

PAR CES MOTIFS

statuant, publiquement, contradictoirement et par mise à dispositions au greffe,

INFIRME le jugement en toutes ses dispositions et statuant de nouveau :

JUGE que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE la société Hôtel Riquet à payer à [U] [R] les sommes de :

- 964, 72 euros avec congés payés y afférents au titre des salaires dus lors de la mise à pied

- 3 322, 92 euros avec congés payés y afférents représentant 2 mois de salaire à titre d' indemnité compensatrice de préavis

- 3 327, 10 euros à titre d' indemnité conventionnelle de licenciement

- 16 614, 60 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 1 937, 75 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur la base d'un revenu de 19 937, 59 euros au jour du licenciement

- 3 000, 00 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral

- 1 500, 00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

REJETTE la demande de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire et brutal,

ORDONNE la délivrance par la société Hôtel Riquet à [U] [R] des bulletins de salaires conformes à la décision, d'un certificat de travail et du solde de tout compte,

CONDAMNE la société Hôtel Riquet aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 14/14006
Date de la décision : 05/11/2015

Références :

Cour d'appel de Paris K5, arrêt n°14/14006 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-11-05;14.14006 ?
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