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05/11/2015 | FRANCE | N°11/12155

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6- chambre 12, 05 novembre 2015, 11/12155


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6- Chambre 12

ARRÊT DU 05 Novembre 2015
(no, pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/ 12155

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 17 Août 2011 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de PARIS-RG no 09/ 02726

APPELANTE
SYNDICAT DES TRANSPORTS D'ILE DE FRANCE
39 Bis, 41, Rue de Châteaudun
75009 PARIS
représentée par Mme X... en vertu d'un pouvoir spécial

INTIMEE
FONDATION DIACONESSES DE RE

UILLY venant aux droits de l'ASSOCIATION OEUVRES ET INSTITUTION DES DIACONESSES DE REUILLY.
14 rue porte de Buc
78000 VERSAILL...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6- Chambre 12

ARRÊT DU 05 Novembre 2015
(no, pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/ 12155

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 17 Août 2011 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de PARIS-RG no 09/ 02726

APPELANTE
SYNDICAT DES TRANSPORTS D'ILE DE FRANCE
39 Bis, 41, Rue de Châteaudun
75009 PARIS
représentée par Mme X... en vertu d'un pouvoir spécial

INTIMEE
FONDATION DIACONESSES DE REUILLY venant aux droits de l'ASSOCIATION OEUVRES ET INSTITUTION DES DIACONESSES DE REUILLY.
14 rue porte de Buc
78000 VERSAILLES
représentée par Me Isabelle SANTESTEBAN, avocat au barreau de PARIS, toque : G0874 substitué par Me Caroline CARRÉ-PAUPART, avocat au barreau de PARIS, toque : E1388

Monsieur le Ministre chargé de la sécurité sociale
14, avenue Duquesne
75350 PARIS CEDEX 07
avisé-non comparant

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 25 Juin 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Bernadette VAN RUYMBEKE, Présidente de chambre
Monsieur Luc LEBLANC, Conseiller
Madame Marie-Ange SENTUCQ, Conseillère
qui en ont délibéré

Greffier : Mme Laila NOUBEL, lors des débats

ARRÊT :
- contradictoire
-prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
- signé par Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Président et par Madame Céline BRUN, Greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

L'association des oeuvres et institutions des Diaconesses de Reuilly devenue la Fondation Diaconesses de Reuilly, a saisi le tribunal des affaires de la sécurité sociale d'un recours à l'encontre du refus que lui a opposé le Syndicat des Transports d'Ile de France, ci après désigné le STIF, par décision du 10 avril 2009, de l'exonérer du paiement des cotisations des employeurs dues au titre du versement de transport pour ses établissements suivants : Institut de formation en soins infirmiers, studios de la Tourelle, Direction générale, maison de Santé Notre Dame du Lac et maison de Santé Claire Demeure.

La Fondation Diaconesses de Reuilly n'ayant maintenu sa contestation que pour les établissements Notre Dame du Lac et Claire Demeure, oeuvrant dans la prise en charge de sois palliatifs, la juridiction, par jugement en date du 17 aout 2011, a fait droit à son recours aux motifs qu'elle avait rapporté la preuve que son activité prépondérante était de caractère social au sens des dispositions de l'article L. 2531-2 du code général des collectivités territoriales et qu'elle pouvait, en conséquence, bénéficier de l'exonération du versement de transport prévue par ce texte.

Le STIF fait soutenir oralement par sa représentante des écritures aux termes desquelles il demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris, de confirmer sa décision du 10 avril 2009 et condamner la Fondation Diaconesses de Reuilly à une indemnité de 3. 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Estimant tout d'abord irrecevable le moyen de l'association tiré de l'impossibilité d'abroger une décision unilatérale d'exonération antérieure, il conteste, sans remettre en cause la reconnaissance d'utilité publique ni le but non lucratif de l'association, le caractère social de l'activité exercée qui en l'espèce n'est caractérisé ni par son activité ni sa vocation sociale auprès des pouvoirs publics ni enfin par son financement ; que selon lui, les établissements Claire Demeure et Notre Dame du lac relèvent des mêmes modalités de financement et des mêmes obligations que des établissements hospitaliers public ou privés

La Fondation Diaconesses de Reuilly conclut à la confirmation du jugement et à la condamnation du STIF à lui payer 3. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Maintenant son moyen de nullité, elle estime démontrer une utilité sociale au regard de la gratuité de ses prestations, du public accueilli, de l'existence de mission de formations, de son financement enfin de son organisation interne qui fait appel à des bénévoles.

Vu les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile et les conclusions des parties régulièrement communiquées, oralement soutenues et visées par le greffe à l'audience du 25 juin 2015, conclusions auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé de leurs demandes, moyens et arguments

MOTIFS DE LA DÉCISION :

- sur le moyen tiré de l'impossibilité d'abroger la décision unilatérale d'exonération antérieure

Considérant que la Fondation Diaconesses de Reuilly soutient que depuis sa création, l'association, bien qu'embauchant le nombre de salariés conditionnant l'assujettissement au versement de transport, a toujours été exonérée de celui-ci en raison de la reconnaissance de son caractère social ; que la décision initiale d'exonération étant créatrice de droits et constituant un acte administratif unilatéral individuel, le STIF ne pouvait unilatéralement l'annuler sauf demande du bénéficiaire, ou dans le délai de 4 mois de la décision, ce qui n'a pas été fait ;

Mais considérant que ce moyen qui tend aux mêmes fins que celui présenté en première instance à savoir l'annulation de la décision de refus d'exonération est recevable ;

Qu'il n'est toutefois pas fondé ;

Qu'en effet, une association ne peut être exonérée du versement de transport que par une décision expresse du syndicat des transports d'Ile-de-France (STIF) seul compétent, en tant que tant qu'autorité organisatrice des services de transports publics réguliers de personnes, pour vérifier si une personne morale remplit ou non les conditions d'exonération ; qu'en l'espèce, la Fondation Diaconesses de Reuilly ne démontre pas avoir bénéficier d'une décision explicite d'exonération établie par le STIF " en raison de la reconnaissance de son caractère social " ; que le seul fait qu'elle ne se soit pas acquittée du versement de transport, auprès de l'Urssaf ne vaut pas décision explicite en sa faveur, peu important qu'elle n'ait pas été redressée de ce chef ;

- sur les conditions d'exonération

Considérant qu'aux termes de l'alinéa premier de l'article L 2531-2 du code général des collectivités territoriales dans sa rédaction applicable : " dans la région d'Ile de France, les personnes physiques ou morales, publiques ou privées, à l'exception des fondations et associations reconnues d'utilité publique, à but non lucratif, dont l'activité est de caractère social, sont assujetties à un versement de transport lorsqu'elles emploient plus de neuf salariés ".

Considérant en l'espèce, que la Fondation Diaconesses de Reuilly étant reconnue d'utilité publique et ayant un but non lucratif, seul est en litige le caractère social de son activité contesté par le STIF ;

Que c'est à la Fondation Diaconesses de Reuilly, qui réclame le bénéfice de l'exonération, de démontrer le caractère social de l'activité exercée par les maisons de santé Claire Demeure et Notre Dame du Lac gérées, par l'association ¿ uvres et Institutions des Diaconesses de Reuilly ;

Considérant que le caractère social d'une activité n'est pas déterminée en considération du seul objet de l'association ou de la fondation, mais au regard des missions, attributions et activités de celles-ci.

Et considérant que contrairement à ce qui a été jugé par le tribunal des affaires de la sécurité sociale, les pièces et éléments rapportés par la Fondation Diaconesses de Reuilly sont insuffisants à une telle démonstration ;

Considérant tout d'abord, que la maison Claire Demeure est un établissement hospitalier privé d'intérêt collectif de 72 lits, dédiés pour partie aux soins palliatifs (16 lits), pour partie à l'unité de soins de longue durée accueillant des personnes âgées très dépendantes (48 lits) et des patients en état végétatif chronique (8 lits) ;

Que la maison médicale Notre Dame du Lac, quant à elle, gère une unité de soins palliatifs et une unité pour patients neurologiques lourds (48 lits), une équipe de soins palliatifs intervenant au domicile des patients ainsi que dans des établissements hospitaliers ou des maisons de retraite ; que cet établissement accueille également un centre de formation ;

Que ces deux établissements sont donc des établissements de santé présentant une offre de soins dans plusieurs spécialités : gériatrie, soins palliatifs, état végétatif chronique ;

Que s'agissant plus précisément de soins palliatifs, leur organisation, en application notamment de la loi du 22 avril 2005 sur le droit des malades en fin de vie, prévoit, que ce soit pour les lits identifiés de soins palliatifs (LISP), des équipes mobiles de soins palliatifs (EMSP) ou enfin des unités de soins palliatifs (USP), un dispositif de prise en charge dans différentes structures de soins ou au sein d'établissements de santé public ou privés destinés à soulager la douleur et apporter un réconfort moral à la personne en fin de vie ainsi qu'à ses proches ; que l'activité de la Fondation Diaconesses de Reuilly s'inscrit dans le cadre d'une mission de service public sanitaire auquel elle contribue ;

Qu'il est indifférent, à cet égard que la Fondation Diaconesses de Reuilly appartienne à la Fondation d'Entraide Protestante étroitement liée à la religion protestante et qu'elle assure une présence religieuse importante dès lors qu'elle est soumise aux mêmes obligations que tout établissement sanitaire, les hôpitaux publics disposant également d'une équipe d'aumôniers chargé d'assister les patients qui le sollicitent ;

Qu'il est encore indifférent qu'elle prenne en charge les patients en grande précarité, l'accès aux soins étant ouvert, au sein de tout établissement de santé privé d'intérêt collectif public ou privé, à toute personne, y compris aux plus démunis ;

Qu'il en résulte que ces deux maisons de santé prennent en charge les soins palliatifs au même titre que les établissements publics ou privés à but non lucratif ;

Considérant ensuite, s'agissant de l'intervention au sein de la Fondation Diaconesses de Reuilly, de bénévoles, que cette intervention n'est qu'accessoire, équivalent à l'activité de 14 salariés pour un nombre de 182 postes salariés ;

Que contrairement à ce que soutient la Fondation Diaconesses de Reuilly, si par leur présence les bénévoles, contribuent à l'amélioration des conditions de fin de vie dans un esprit de partenariat avec les équipes soignantes, le bénévolat ne relève pas de la prise en charge palliative et ne constitue pas un complément de l'activité des salariés ; qu'en effet, aux termes des dispositions de l'article L. 1110-11 du code de la santé publique qui définissent le rôle des " bénévoles formés à l'accompagnement de la fin de vie ", ces bénévoles contribuent par leur présence, leur écoute à l'amélioration des conditions de fin de vie des personnes malades mais ne participent pas à l'organisation des soins qui relève de la compétence exclusive des salariés de ces deux établissements, qu'ils ne font pas partie de l'équipe soignante, n'ont pas accès au dossier médical et ne prennent aucunement part aux décisions d'ordre médical ; que leur intervention ne se distingue pas de celle des bénévoles d'accompagnement présents au sein des établissements publics assurant des missions de soins palliatifs ;

Que par ailleurs la dimension religieuse invoquée par la Fondation Diaconesses de Reuilly qui se retranche derrière l'intervention de religieuses et d'aumôniers n'est pas davantage pertinente puisqu'elle concerne exclusivement la pratique religieuse des malades et donc leur vie privée ;

Que c'est donc en vain que la Fondation Diaconesses de Reuilly soutient que la prise en charge psychique et spirituelle des patients des deux établissements relève d'une activité sociale spécifique représentant l'essentiel de leur activité alors que les soins palliatifs, s'ils comportent une importante dimension psychologique, n'en sont pas moins des soins actifs impliquant un suivi par l'équipe médicale et un traitement thérapeutique de la douleur ;

Considérant enfin, que les deux établissements sont financés sur les fonds de la sécurité sociale, de l'Etat et des collectivités territoriales ; qu'il s'agit donc d'un financement essentiellement public destiné à assurer la prise en charge des dépenses afférentes aux frais d'hospitalisation et de soins, justifié par les missions de service public qu'ils assurent au même titre que les établissements de santé publics ou privés ; que compte tenu des missions spécifiques liées à l'accompagnement de la fin de vie, ces établissements de santé bénéficient en outre de moyens financiers par l'assurance maladie pour compenser les frais engendrés par la prise en charge des soins palliatifs ;

Que les établissements Claire Demeure et Notre Dame du Lac relèvent donc des mêmes modalités de financement et sont soumis aux mêmes obligations, aussi bien pour leur activité de soins palliatifs que des soins de longue durée, que les établissements hospitaliers du même type public ou privé à but non lucratif ;

Qu'en dernier lieu, s'agissant du centre formation de la maison de santé Notre Dame du Lac la Fondation Diaconesses de Reuilly ne démontre pas davantage qu'il relèverait d'un caractère social, ne produisant aucun justificatif sur le contenu des formations et leur coût ;

Considérant en conséquence que faute pour La Fondation Diaconesses de Reuilly de prouver le caractère social de son activité au sens de l'article L 2531-2 du code général des collectivités territoriales, elle ne peut bénéficier de l'exonération du versement de transport et le jugement entrepris doit être infirmé ;

Considérant que l'équité commande de laisser enfin à chaque partie la charge de ses frais non répétibles ;

PAR CES MOTIFS
LA COUR,

Infirme en toutes ses dispositions le jugement,

Statuant à nouveau,

Déboute la Fondation Diaconesses de Reuilly venant aux droits de l'association des oeuvres et institutions des Diaconesses de Reuilly de sa demande d'exonération du paiement du versement de transport au titre des maisons de santé Claire Demeure et Notre Dame du Lac,

Confirme en conséquence la décision du 10 avril2009 établie par le Syndicat des Transports d'Ile de France refusant cette exonération,

Laisse à chaque partie la charge de ses frais non répétibles.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6- chambre 12
Numéro d'arrêt : 11/12155
Date de la décision : 05/11/2015
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2015-11-05;11.12155 ?
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