RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 12
ARRÊT DU 05 Novembre 2015
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/10154
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 29 Juillet 2011 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de MELUN - RG n° 10-00581MN
APPELANTE
Madame [C] [R]
née le [Date naissance 1] 1953
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée par Me Arnaud OLIVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : A0476 substitué par Me Hélène BERTHOUX, avocat au barreau de PARIS, toque : A476
INTIMEES
Société CYMB
RCS Evry n° B 432 527 894
[Adresse 3]
[Adresse 3]
représentée par Me Agathe MOREAU, avocat au barreau de PARIS, toque : K0030
CPAM [Localité 1]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
représenté par Mme [I] en vertu d'un pouvoir général
Monsieur le Ministre chargé de la sécurité sociale
[Adresse 1]
[Adresse 1]
avisé - non comparant
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 03 septembre 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Président
Madame Marie-Ange SENTUCQ, Conseiller
Mme Marie-Odile FABRE DEVILLIERS, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffier : Madame Fatima BA, lors des débats
ARRET :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
- signé par Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Président et par Madame Céline BRUN, Greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS-PROCÉDURE-MOYENS DES PARTIES
Par arrêt en date du 18 décembre 2014 , la présente Cour, infirmant le jugement du tribunal des affaires de la sécurité sociale de Melun, a notamment:
- dit que l'accident dont a été victime Mme [C] [R] est du à la faute inexcusable de la société CYMB - fixé au maximum la majoration de la rente allouée à la victime,
- avant dire droit sur les divers chefs de préjudices complémentaires, ordonné une expertise médicale confiée au docteur [X] [P] aux fins d'évaluer les différents postes de préjudice personnel de Mme [R] et donner son avis sur l'existence et l'étendue des dommages suivants : perte ou diminution de ses possibilités de promotion professionnelle, déficit fonctionnel temporaire ,assistance tierce personne temporaire , frais de logement ou de véhicule, préjudice sexuel.
- déclaré irrecevable la demande de la société CYMB en inopposabilité de la rechute du 1er juillet 2008
- rejeté sa demande d'inopposabilité du taux de rente tels que fixés par le tribunal du contentieux de l'incapacité ,
L'expert a déposé son rapport .
Madame [R], par l'intermédiaire de son avocat qui a déposé des écritures développées à la barre, conclut tout d'abord au rejet de la demande de sursis à statuer et sollicite que son indemnisation soit fixée comme suit:
- besoins assistance tierce personne avant et après la consolidation: 208.840,32 euros
- déficit fonctionnel temporaire : 11.795 euros
- pretium doloris : 40.000 euros
- préjudice d'agrément : 30.000 euros
- préjudice esthétique : 12.000 euros
- frais divers : 600 euros
- au titre de l'article 700 du code de procédure civile : 3.000 euros.
La société CYMB , par l'intermédiaire de son conseil qui a déposé des écritures développées à la barre, conclut à titre principal , à un sursis à statuer dans l'attente de la décision de la cour de cassation saisi de son pourvoi .
A titre subsidiaire , elle demande que les indemnisations accordées à Mme [R] ne soient pas supérieures aux sommes suivantes:
- souffrances endurées : 13.000 euros à 16.000 euros
- préjudice esthétique : 3.500 euros
- préjudice d'agrément: 3.000 euros
- le déficit fonctionnel temporaire : 11.270,12 euros
- assistance tierce personne temporaire avant consolidation: 39.174 euros
Elle demande en outre qu'il lui soit donné acte qu'elle a versé à la caisse primaire d'assurance maladie une somme de 30.933 euros au titre de la majoration de la rente sur un taux de 16%et d'une somme de 1.00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile à Mme [R] en exécution du précédent arrêt.
La caisse primaire d'assurance maladie, par l'intermédiaire de son représentant qui a présenté des observations orales, s'oppose au sursis à statuer et demande que les sommes allouées soient ramenées à de plus justes proportions; en ce qui concerne le préjudice d'agrément et l'assistance tierce personne après consolidation, elle conclut au rejet de ces demandes et rappelle son droit à récupération des sommes dont elle fera l'avance et des frais d'expertise qu'elle a déjà versés.
Vu les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile et les conclusions des parties régulièrement communiquées, oralement soutenues et visées par le greffe à l'audience du 3 septembre 2015, conclusions auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé de leurs demandes, moyens et arguments.
SUR CE LA COUR
- sur le sursis à statuer
Considérant que la société CYMB sera débouté de sa demande, le pourvoi n'étant pas suspensif et ce pourvoi ne concernant que les rapports caisse - employeur, sans incidence sur l'évaluation et la liquidation des préjudices de Mme [R], victime d'un accident du travail en 2007 soit il y a 8 ans ;
- sur les préjudices de Mme [R]
*sur les souffrances endurées
Considérant que Docteur [P] a évalué les souffrances endurées par Mme [R] à 4,5 sur une échelle de 7 compte tenu de l'arrachement de la peau de l'index et du pouce subi par Mme [R] au moment de l'accident, des hospitalisations endurées, des séances de rééducation, de l'amputation du pouce droit et de l'index et des répercussions psychologiques ;
Considérant que ce poste de préjudice sera évalué à 15.000 euros .
* sur le préjudice esthétique
Considérant que l'expert a évalué le préjudice esthétique de Mme [R] à 3/7,c'est à dire modéré en relevant l'aspect disgracieux de la main que Mme [R] cache des regards avec sa main gauche;
Que ce préjudice doit être fixé à la somme de 6.000 euros ;
* sur le préjudice d'agrément
Considérant qu'au titre de ce préjudice , la victime doit justifier d'une activité spécifique sportive ou de loisir antérieure à la maladie ;
Qu'en l'espèce , force est de constater que Mme [R] ne rapporte pas la preuve d'une telle activité, le fait de ne pouvoir continuer des activités de jardinage ou s'occuper de ses petits enfants en bas age ne relevant pas du préjudice d'agrément; que la caisse conclut à bon droit au rejet de cette demande;
*sur le déficit fonctionnel temporaire
Considérant que les indemnités journalières servies à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle n'assurent pas la réparation du déficit fonctionnel temporaire qui inclut, pour la période antérieure à la date de consolidation, l'incapacité fonctionnelle totale ou partielle ainsi que le temps d'hospitalisation et les pertes de qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante durant la maladie traumatique;
Considérant en l'espèce, que du fait de son accident, Mme [R] justifie, selon l'expert , d'un déficit fonctionnel temporaire partiel à 50% en dehors des hospitalisations et jusqu'à la consolidation du 29 novembre 2009 ; que sur la base d'une somme mensuelle satisfactoire proposée par l'employeur , le montant de 11.270,12euros sera allouée à Mme [R];
*sur l'assistance tierce personne temporaire
Considérant que le docteur [P] a relevé l'existence d'une assistance tierce personne temporaire durant la période de déficit fonctionnel temporaire partiel à 50 % à raison de 3 heures par jour ;
Que sur la base de 15 euros l'heure, ce préjudice sera fixé à la somme de 44.415 euros ;
Considérant que le besoin d'assistance par une tierce personne après consolidation est indemnisé dans les conditions prévues à l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale, de sorte que ce préjudice est couvert par le livre IV du code de la sécurité sociale, et ne peut donner lieu à indemnisation sur le fondement de l'article L. 452-3 du même code ; que Mme [R] sera déboutée de ce chef de préjudice ;
*sur les frais divers
Considérant que les frais d'assistance de médecin lors des opérations d'expertise, sont la conséquence directe de l'accident du travail, ne figurant pas parmi les chefs de préjudice expressément couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale, ils ouvrent droit à indemnisation complémentaire en raison de la faute inexcusable de l'employeur;
Que la somme de 600 euros sera allouée de ce chef à Mme [R] ;
- sur l'action de la caisse
Considérant que la caisse fera l'avance des sommes ainsi fixées et pourra les récupérer dans le cadre de son action récursoire sur l'employeur tenu par ailleurs au remboursement à l'organisme social des frais d'expertise que celui ci a avancés;
Considérant que le donné acte, qui ne formule qu'une constatation, n'est pas susceptible de conférer un droit à la partie qui l'a requis et obtenu de sorte que la cour n'a pas à donner acte à l'employeur de ce qu'il s'est acquitté du règlement de la majoration de la rente et a payé les frais non répétibles de la précédente instance ;
Considérant que la société CYMB devra régler à Mme [R] une indemnité de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Déboute la société CYMB de sa demande aux fins de sursis à statuer ,
Fixe le préjudice de Mme [R] comme suit :
- souffrances endurées : 15.000 euros
- préjudice esthétique : 6.000 euros
- le déficit fonctionnel temporaire : 11.270,12 euros
- assistance tierce personne temporaire avant consolidation: 44.415 euros
- assistance à expertise : 600 euros
Déboute Mme [R] de tout autre chef de préjudice,
Dit que la caisse primaire d'assurance maladie qui fera l'avance des sommes, pourra les récupérer auprès de la société CYMB, ce remboursement par l'employeur incluant les frais l'expertise avancés par la caisse,
Déboute les parties de toutes autres demandes ,
Condamne la société CYMB à verser à Mme [R] 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT