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22/10/2015 | FRANCE | N°12/04827

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 12, 22 octobre 2015, 12/04827


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12



ARRÊT DU 22 Octobre 2015



(n° , pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/04827



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 20 Février 2012 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de MELUN RG n° 11-00379MN





APPELANT

Monsieur [Q] [M]

[Adresse 1]

[Localité 3]

comparant en personne




>INTIMÉE

CARSAT SUD EST

[Adresse 3]

[Localité 1]

représentée par M. [W] en vertu d'un pouvoir spécial





Monsieur le Ministre chargé de la sécurité sociale

[Adresse 2]

[Localité 2]

avisé - non comparant





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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12

ARRÊT DU 22 Octobre 2015

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/04827

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 20 Février 2012 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de MELUN RG n° 11-00379MN

APPELANT

Monsieur [Q] [M]

[Adresse 1]

[Localité 3]

comparant en personne

INTIMÉE

CARSAT SUD EST

[Adresse 3]

[Localité 1]

représentée par M. [W] en vertu d'un pouvoir spécial

Monsieur le Ministre chargé de la sécurité sociale

[Adresse 2]

[Localité 2]

avisé - non comparant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 juin 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, Madame Marie-Ange SENTUCQ, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Président

Monsieur Luc LEBLANC, Conseiller

Madame Marie-Ange SENTUCQ, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier : Mme NOUBEL Laïla, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Président et par Madame Lynda BENBELKACEM, Greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par Monsieur [Q] [M], à l'encontre du jugement prononcé le 20 février 2012 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de MELUN, dans le litige l'opposant à la Caisse de Retraite et Santé au Travail du SUD-EST, dite CARSAT SUD EST.

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Monsieur [G] [M] est décédé le [Date décès 1] 2008.

Il a laissé pour lui succéder, aux termes de la déclaration de succession établie le 21 janvier 2009, trois enfants :

[N] né le [Date naissance 1] 1956

[P] né [Date naissance 3] 1959

[Q] né le [Date naissance 2] 1960

Monsieur [G] [M] était titulaire depuis le 1er octobre 1993 d'un avantage vieillesse servi par la CARSAT assorti à sa demande, depuis le 1er octobre 2001, de l'allocation supplémentaire visée par l'article L 815-2 ancien du code de la sécurité sociale.

Il a souscrit deux assurances vie :

le 19 janvier 2004 au profit de Madame [B] [M], sa fille par une prime de 12 000 euros non soumise aux droits de mutation à titre gratuit

le 17 janvier 2008 au profit de ses héritiers par une prime de 153 995,93 euros supportant les droits de mutation sous déduction d'un abattement global disponible de 18 500 euros soit sur un montant de 135 492,93 euros.

La CARSAT a avisé l'étude notariale de maîtres [E] [O] et [Q] [C] que la partie taxable des assurances vie ( 135 492,93 euros) serait prise en compte pour le calcul de l'actif successoral net, en application de l'article L 132-13 du code des assurances.

Au vu de l'actif successoral et après réintégration des primes d'assurance vie supportant les droits de mutation par décès, l'actif net ressortait à hauteur de 140 187,68 euros.

La CARSAT a notifié à Monsieur [Q] [M] le 29 septembre 2009 le remboursement de la somme de 9 491,73 euros correspondant à l'allocation supplémentaire versée du 1er novembre 2001 au 30 septembre 2008 au motif des dispositions de l'article L 132-13 du code des assurances.

Monsieur [Q] [M] a contesté cette décision devant le tribunal des affaires de sécurité sociale et le jugement entrepris l'a déclaré recevable mais mal fondé en son recours et l'a condamné à régler à la CRAM du SUD-EST la somme de 9 491,72 euros au tire de sa quote part héréditaire de recouvrement des arrérages servis au titre de l'allocation supplémentaire sur succession.

Monsieur [Q] [M] a développé à l'audience les observations contenues dans le mémoire déposé au greffe le 25 août 2014.

Il sollicite l'infirmation du jugement et demande principalement à la Cour de reconnaître qu'en faisant application des dispositions de l'article L 132-13 du code des assurances la CRAM du SUD-EST a modifié unilatéralement et arbitrairement les règles de dévolution successorales, qu'elle a abusé de son pouvoir d'ester en justice et s'est rendue coupable de création d'un faux document.

Dans l'hypothèse d'une réintégration confirmée des primes d'assurance vie dans l'actif successoral, il sollicite la ré-ouverture de la succession pour redonner aux héritiers leur droit de renonciation.

Monsieur [M] réitère sa demande de dédommagement en soulignant l'impact de la présente procédure sur sa santé compte tenu d'un traitement à vie pour l'hypertension.

La CARSAT a développé par l'intermédiaire de son représentant le mémoire visé par le greffe social le 8 décembre 2014, tendant à la confirmation du jugement au vu des dispositions de l'article L 815-12 ancien du code de la sécurité sociale.

Elle sollicite la condamnation de Monsieur [Q] [M] au remboursement des arrérages de l'allocation supplémentaire à hauteur de 9 491,73 euros majorée des intérêts légaux depuis le 29 septembre 2009 date de la première mise en demeure ainsi qu'aux frais d'exécution du jugement.

Elle sollicite en outre la condamnation de Monsieur [M] au paiement d'une somme de 1 000 euros en application de l'article 1382 du code civil pour propos dilatoires relevant du dénigrement de la caisse.

La caisse fait valoir que le prestataire était sous la tutelle de son fils [P] au moment de la souscription du contrat et ne pouvait avoir envisagé utilement le versement de la prime d'assurance vie.

Elle souligne que sur la demande d'allocation supplémentaire déposée par Monsieur [M] en 2001, outre sa pension au régime général et sa retraite complémentaire de la CNRO, son patrimoine n'était constitué que de titres et actions pour 120 643 francs et non euros, sans biens immobiliers.

Selon la caisse la prime unique apparaît donc disproportionnée par rapport à ses facultés d'épargne et le mobile de l'opération apparaît clairement comme la volonté du souscripteur de se dépouiller de manière irrévocable.

SUR QUOI,

LA COUR :

Considérant les dispositions de l'article L 132-13 du code des assurances selon lesquelles les primes versées par le souscripteur d'un contrat d'assurance vie sont rapportables à la succession si elles présentent un caractère manifestement exagéré eu égard aux facultés du souscripteur ;

Que ce texte constitue une dérogation aux dispositions de l'article L 132-12 du code des assurances qui excluent de la succession de l'assuré le capital ou la rente stipulé payables lors du décès de l'assuré et qu'il est donc d'interprétation stricte ;

Considérant que le caractère exagéré des primes versées s'évince d'une part de l'âge, de situation patrimoniale et familiale du souscripteur et d'autre part de l'utilité de la souscription, ces deux critères devant être réunis et appréciés au moment du versement des primes ;

Considérant qu'en l'espèce, les motifs du jugement entrepris retiennent exclusivement le caractère exagéré du versement de la prime unique de 153 995,93 euros ( soit 135 492,93 euros après abattement ) au motif d'une part de la disproportion entre le montant de la prime et les ressources déclarées par le souscripteur dont les avoirs bancaires au jour du décès ne dépassait pas 6106,23 euros et d'autre part de ce que l'intéressé remplissait depuis 2001 les conditions légales pour bénéficier de l'allocation supplémentaire ;

Considérant néanmoins que pour apprécier le caractère exagéré des primes d'assurance, la situation patrimoniale du souscripteur doit être appréciée au jour du versement de la prime;

Qu'il en est de même pour apprécier l'utilité de ce versement ;

Considérant qu'en l'espèce il n'est pas justifié des ressources dont disposait Monsieur [G] [M] au moment de la souscription du contrat ayant donné lieu au versement de la prime unique le 17 janvier 2008 ;

Que les premiers juges ont méconnu la portée de l'article

L 132-13 du code des assurances en se fondant sur les ressources du souscripteur au moment de son décès ;

Considérant par ailleurs que l'utilité de la souscription s'évince en l'espèce de l'âge de Monsieur [G] [M], 75 ans lors de la souscription, de l'opportunité de cette disposition prise en faveur de ses héritiers réservataires et de la nécessaire autorisation qui en a été donnée par le juge des tutelles ou le conseil de famille puisque la CARSAT, sans être contredite par l'appelant, affirme que lors du versement de la prime, Monsieur [G] [M] était sous tutelle et que son fils [P] était son tuteur ;

Considérant qu'au vu de l'ensemble de ces éléments la preuve du caractère exagéré du versement de la prime objet du litige n'est pas rapportée, que celle-ci ne saurait s'évincer du seul droit à l'allocation vieillesse antérieurement au versement de la prime d'où il suit que Monsieur [Q] [M] doit être déclaré fondé en son appel et le jugement infirmé en ce qu'il a reconnu le droit de la CARSAT à poursuivre le recouvrement des arrérages de l'allocation supplémentaire versée à Monsieur [G] [M] à l'encontre de son fils [Q] [M] ;

Considérant qu'il n'est justifié par l'appelant d'aucun préjudice autre que celui réparé par la présente instance et que Monsieur [Q] [M] sera débouté de sa demande de dommages et intérêts ;

PAR CES MOTIFS

DÉCLARE Monsieur [Q] [M] recevable et bien fondé en son appel ;

Infirme le jugement ;

DIT n'y avoir lieu à poursuivre à l'encontre de Monsieur [Q] [M] le recouvrement des arrérages de l'allocation supplémentaire versée à Monsieur [G] [M] ;

DÉBOUTE la CARSAT SUD-EST de ses demandes reconventionnelles ;

DÉBOUTE Monsieur [Q] [M] de sa demande de dommages et intérêts ;

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 12
Numéro d'arrêt : 12/04827
Date de la décision : 22/10/2015

Références :

Cour d'appel de Paris L3, arrêt n°12/04827 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-10-22;12.04827 ?
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