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15/10/2015 | FRANCE | N°12/09644

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 5, 15 octobre 2015, 12/09644


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5



ARRÊT DU 15 Octobre 2015

(n° 413 , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/09644



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 17 Septembre 2012 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - Section industrie - RG n° 10/15096



APPELANT

Monsieur [M] [T]

[Adresse 2]

[Localité 1]

né le [Date naissance 1] 1968 à [Localité 4] (PORTUGAL

)

comparant en personne, assisté de Me Daniel-yves LACROIX, avocat au barreau de PARIS, toque : D1749



INTIMEES

Me [G] [I] - Mandataire liquidateur de SAS RESEAU ELE...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5

ARRÊT DU 15 Octobre 2015

(n° 413 , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/09644

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 17 Septembre 2012 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - Section industrie - RG n° 10/15096

APPELANT

Monsieur [M] [T]

[Adresse 2]

[Localité 1]

né le [Date naissance 1] 1968 à [Localité 4] (PORTUGAL)

comparant en personne, assisté de Me Daniel-yves LACROIX, avocat au barreau de PARIS, toque : D1749

INTIMEES

Me [G] [I] - Mandataire liquidateur de SAS RESEAU ELEC ILE DE FRANCE

[Adresse 3]

[Localité 3]

représenté par Me Jean PRINGAULT, avocat au barreau de PARIS, toque : C2539 substitué par Me Laure VAYSSADE, avocat au barreau de PARIS, toque : C2539

PARTIE INTERVENANTE

AGS CGEA IDF OUEST

[Adresse 1]

[Localité 2]

représenté par Me Grégoire LAFARGE de la SELARL LAFARGE ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : T10 substituée par Me Marina DUCOTTET CHAREYRON, avocat au barreau de PARIS, toque : T10

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 3 septembre 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées ,devant Madame Marie-Bernard BRETON, Présidente, chargée d'instruire l'affaire .

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Bernard BRETON, Présidente

Madame Anne-Marie GRIVEL, Conseillère

Madame Marie-Liesse GUINAMANT, Vice-Présidente placée

qui en ont délibéré

Greffier : M. Franck TASSET, lors des débats

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- signé par Madame Marie-Bernard BRETON, Présidente et par M. Franck TASSET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

[M] [T] a été engagé par la société Lesbaudy-Paquin selon contrat de travail à durée indéterminée du 9 février 1987 ; son contrat de travail a été transféré à la société Reso Elec Ile de France le 10 juin 2010 en application des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail par suite de l'intégration de la société Lesbaudy-Paquin au sein de celle-ci,

Le 16 novembre 2010 [M] [T] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris d'une action tendant au prononcé de la résiliation du contrat de travail, en invoquant divers manquements de la part de son employeur, et au paiement de diverses sommes,

Par jugement du 5 janvier 2011 la société Reso Elec Ile de France a été placée en liquidation judiciaire par le tribunal de commerce de Créteil ; maître [G] a été désigné en qualité de mandataire liquidateur,

Par jugement du 27 novembre 2012 le conseil de prud'hommes de Paris a débouté [M] [T] de l'ensemble de ses demandes

[M] [T] a formé appel contre ce jugement,

Vu les conclusions du 3 septembre 2015, auxquelles le présent renvoie expressément pour l'exposé des prétentions et des moyens, régulièrement reprises à l'audience sans ajouts ni retraits par [M] [T], qui demande à la cour d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions et, statuant de nouveau, de prononcer la résiliation du contrat de travail et de fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de son employeur aux sommes suivantes :

594, 21 euros avec congés payés y afférents au titre de l'indemnité compensatrice de préavis

1 366, 08 euros au titre des congés payés liés au préavis

8 110, 37 euros au titre de l »indemnité de licenciement

104 732, 80 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

II demande encore à la cour de dire que l'AGS devra garantir les sommes qui lui sont dues, et réclame 1 500, 00 euros au titre des frais irrépétibles,

II expose que l'opération de transfert a été effectuée sans que soient respectées les obligations d'information et de consultation qu'impose l'article L. 2323-19 du code du travail à l'employeur titulaire du contrat et au nouvel employeur ; il prétend que l'employeur a modifié unilatéralement le temps de travail, que les primes d'astreinte, d'ancienneté et de fin d'année lui ont été supprimées par décision unilatérale et sans dénonciation régulière et que ces manquements justifient que soit prononcée la résiliation du contrat de travail à ses torts, en considération du fait que lui sont dues les sommes de 2 450, 52 euros pour le 13ème mois, 2 195, 72 euros pour la prime d'ancienneté, 3 000, 00 euros pour la prime de fin d'année et 1 713, 33 euros pour la prime d'astreinte,

Vu les conclusions du 3 septembre 2015, auxquelles le présent renvoie expressément pour l'exposé des prétentions et des moyens, régulièrement reprises à l'audience sans ajouts ni retraits, par maître [G], es qualité, qui demande à la cour, de confirmer le jugement du 27 novembre 2012, de débouter le salarié de ses demandes et de le condamner aux entiers dépens,

Il expose que la société Reso Elec Ile de France n'a commis aucun manquement, dans la procédure d'information et de consultation lors de la modification de l'organisation économique et juridique de l'entreprise et prétend qu'un éventuel manquement de cette nature n'affecterait pas la validité de l'opération ; il fait valoir également que les modifications apportées au contrat de travail, qui l'ont été dans un souci d'harmoniser le statut de l'ensemble des salariés regroupés sous un horaire collectif, sont favorables au salarié et ne justifient pas la résiliation du contrat de travail

Vu les conclusions du 3 septembre 2015 auxquelles le présent renvoie expressément pour l'exposé des prétentions et des moyens, régulièrement reprises à l'audience sans ajouts ni retraits, par l' AGS qui demande à la cour débouter le demandeur de sa demande de résiliation du contrat de travail et de juger que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse , de le condamner à lui rembourser les sommes dont elle a fait l'avance ; à titre subsidiaire de le débouter de ses demandes indemnitaires ; elle demande que soient rappelées les limites de sa garantie,

SUR QUOI

LA COUR

sur la demande de résiliation du contrat de travail :

dans l'exécution du contrat de travail les manquements d'une des parties à ses obligations ouvrent droit à l'autre partie de demander judiciairement la résiliation du contrat par application des dispositions de l'article 1184 du code civil,

En relevant que la demande de résiliation a été présentée au conseil de prud'hommes antérieurement au licenciement pour motif économique notifié au salarié le 17 janvier 2011 par suite du prononcé de la liquidation judiciaire, la cour examinera d'abord la demande de résiliation du contrat de travail avant d'examiner éventuellement les demandes fondées sur le licenciement pour motif économique,

Divers manquements sont invoqués au soutien de la demande de résiliation qui seront examinés successivement :

1) s'agissant de la procédure de modification de l'organisation économique et juridique de l'entreprise :

l'article L. 2323-19 du code du travail énonce que le comité d'entreprise est informé et consulté sur les modifications de l'organisation économique et juridique de l'entreprise ; en l'espèce il apparaît que par suite du regroupement des entités juridiques, société Lesbaudy-Paquin et RFE, appartenant au groupe Reso, au sein d'une entité juridique unique, la société Reso Elec Ile de France, les règles relatives à l'obligation de consultation des institutions représentatives du personnel, qui s'imposent au nouvel employeur par application de l'article L. 1224-2 du code du travail, n'ont pas été respectées ; en effet, l'information délivrée à la délégation unique du personnel telle qu'elle ressort du procès verbal de réunion du 14 avril 2010, qui se borne à la mention que la société Lesbaudy-Paquin est absorbée par le groupe et que des démarches juridiques pour le nouveau statut sont en cours, ne suffit pas à y satisfaire,

Le salarié ne démontre cependant pas qu'il existe un lien de causalité direct entre ce manquement de l'employeur et les modifications de son contrat de travail qu'il invoque au soutien de sa demande de résiliation,

2) s'agissant de la modification du contrat de travail :

le salarié fait état de la modification de la durée hebdomadaire du travail et la société Reso Elec Ile de France reconnaît avoir porté à 38 heures la durée hebdomadaire contractuellement fixée à 37 heures et à 39 heures la durée contractuellement fixée à 38 heures en indiquant qu'elle souhaitait harmoniser la durée du travail pour tous les salariés regroupés,

Or, la durée du travail, telle qu'elle est stipulée au contrat de travail, constitue un élément du contrat de travail qui ne peut être modifié sans l'accord du salarié, peu important que le montant global de la rémunération soit maintenu,

En l'espèce il apparaît que la modification du temps de travail intervenue dans la relation de travail litigieuse ne repose pas sur un motif économique tel qu'il est prévu par l'article 1222-6 du code du travail et qu'elle n'a pas été effectuée en application d'un accord de réduction du temps de travail tel que le prévoient les dispositions de l'article L. 1222-7 du même code, de sorte que cette modification unilatérale du contrat de travail constitue un manquement à l'exécution de bonne foi exigée par l'article L. 1222-1 de ce code,

Le salarié reproche également à son employeur de lui avoir supprimé le bénéfice des primes d'ancienneté, d'astreinte, de 13ème mois, et de fin d'année,

L'usage et l'engagement unilatéral constituent des sources de droit du travail qui s'ajoutent aux conventions et accords collectifs et au contrat de travail individuel ; tant l'usage, qui se caractérise par sa fixité, sa généralité et sa constance, que l'engagement unilatéral, présentent un caractère obligatoire pour l'employeur qui doit maintenir l'avantage octroyé tant qu'il n'a pas été régulièrement dénoncé, ce qui suppose une information des institutions représentatives du personnel et une information individuelle de chaque salarié concerné,

La prime d'ancienneté, calculée mensuellement sur la base d'un pourcentage du salaire minimum conventionnel, en fonction de l'ancienneté du salarié, résulte d'un accord entre l'employeur et les délégués du personnel en date du 21 avril 2005 ; elle constitue un usage opposable au nouvel employeur,

La prime de fin d'année versés sur le salaire du mois de décembre chaque année, représentent un engagement unilatéral de l'employeur qui s'impose au nouvel employeur,

la prime d'astreinte relève d'un engagement unilatéral de l'employeur qui s'impose au nouvel employeur,

Qu'il s'agisse d'usage ou d'engagement unilatéral de l'employeur, les modifications ainsi apportées par la société Reso Elec Ile de France affectent le mode de rémunération du salarié et ne peuvent être compensées par une augmentation globale du salaire ; par ailleurs, l'employeur ne justifie pas avoir régulièrement dénoncé ces avantages par le seul envoi d'une proposition d'avenant adressée au salarié sans information préalable collective ou individuelle,

D'où il se déduit que la société Reso Elec Ile de France a, en modifiant unilatéralement le temps de travail et en supprimant certains avantages dont bénéficiait le salarié sans les avoir préalablement dénoncés, commis des manquements qui justifient que soit prononcée la résiliation du contrat de travail à ses torts, avec effet au 17 janvier 2011, date de la rupture effective du contrat de travail,

sur les conséquences de la rupture du contrat de travail

la résiliation ainsi prononcée produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et ouvre droit pour le salarié à la perception des indemnités qui doivent être calculées sur la base d'un revenu mensuel moyen de 4 553, 60 euros,

Au vu du solde de tout compte sur lequel figurent les sommes perçues par [M] [T] restent dus un complément d'indemnité compensatrice de préavis de 594, 21 euros avec les congés payés y afférents soit 1 366, 08 euros ainsi qu'un complément d'indemnité de licenciement de 8 110, 37 euros,

L'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, doit être évaluée conformément aux dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail ; compte tenu d'une ancienneté dans l'entreprise de plus de 23 années et des justificatifs de préjudice produits par le salarié l'indemnité sera fixée au montant de 40 982, 40 euros qui est de nature à réparer intégralement le préjudice subi,

Pour des raisons relevant de l'équité il sera alloué à l'intimé la somme de 500, 00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

PAR CES MOTIFS

statuant publiquement, par arrêt contradictoire et par mise à disposition au greffe :

INFIRME le jugement en toutes ses dispositions,

statuant de nouveau sur les points en litige :

PRONONCE la résiliation du contrat de travail au 17 janvier 2011,

FIXE la créance de [M] [T] aux sommes suivantes :

594, 21 euros au titre du complément de l'indemnité compensatrice de préavis

1 366, 08 euros au titre des congés payés liés au préavis

8 110, 37 euros au titre de l'indemnité de licenciement

40 982, 40 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

CONDAMNE maître [G], es qualité, à payer à [M] [T] la somme de 500,00 euros au titre de ses frais de procédure,

CONDAMNE Maître [G], es qualité, aux dépens d'appel,

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 12/09644
Date de la décision : 15/10/2015

Références :

Cour d'appel de Paris K5, arrêt n°12/09644 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-10-15;12.09644 ?
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