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30/09/2015 | FRANCE | N°13/06476

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6- chambre 1, 30 septembre 2015, 13/06476


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6- Chambre 1

ARRÊT DU 30 Septembre 2015
(no, 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/ 06476

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 12 Février 2013 par le Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de PARIS section-RG no 11/ 17247

APPELANTE

Madame X... Y...
...
95410 GROSLAY
née le 19 Mai 1975 à ALGÉRIE

comparante en personne, assistée de Me Thibaut CAYLA, avocat au barreau de PARIS, toque : C2417 s

ubstitué par Me Olivia BERTHET PAWLOTSKY, avocat au barreau de PARIS, toque : C2417

INTIMÉE

SAS SPAT
34 RUE DE L'EGLISE
...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6- Chambre 1

ARRÊT DU 30 Septembre 2015
(no, 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/ 06476

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 12 Février 2013 par le Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de PARIS section-RG no 11/ 17247

APPELANTE

Madame X... Y...
...
95410 GROSLAY
née le 19 Mai 1975 à ALGÉRIE

comparante en personne, assistée de Me Thibaut CAYLA, avocat au barreau de PARIS, toque : C2417 substitué par Me Olivia BERTHET PAWLOTSKY, avocat au barreau de PARIS, toque : C2417

INTIMÉE

SAS SPAT
34 RUE DE L'EGLISE
75015 PARIS

représentée par Me Véronique CLAVEL, avocat au barreau de PARIS, toque : C1008, M. Z... (Gérant) en vertu d'un pouvoir général

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 01 Juillet 2015, en audience publique, devant la Cour composée de   :
Madame Irène CARBONNIER, Président de chambre
Madame Véronique SLOVE, Conseillère
Madame Isabelle DELAQUYS, Conseillère
qui en ont délibéré

Greffier : Madame Chantal HUTEAU, lors des débats

ARRET :

- contradictoire,
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
- signé par Madame Irène CARBONNIER, Présidente et par Mme Céline BRUN, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu le jugement rendu le 12 février 2013 par le conseil de prud'hommes de Paris qui, saisi par Mme X... Y..., a dit que cette dernière avait le statut de cadre et l'a déboutée ainsi que la société Spat des autres demandes ;

Vu les conclusions soutenues oralement par lesquelles Mme Y... demande à la Cour de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il lui a reconnu le statut de cadre, infirmer ledit jugement en ce qu'il l'a débouté de ses demandes et statuant à nouveau, condamner la société Spat à lui payer les sommes suivantes :

-7 573, 80 euros à titre d'indemnités compensatrices de préavis et 757, 38 euros à titre de congés payés afférents,
-10 619, 28 euros à titre d'un rappel de salaire et 1 061, 93 euros titre des congés payés afférents,
-1 540, 31 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires et 154, 03 euros au titre des congés payés afférents,
-9 4067, 25 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,
-30 295, 20 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
-3. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions de la société Spat développées à l'audience tendant à confirmer la décision entreprise sauf en ce qui concerne la qualification de cadre accordée par le conseil de prud'hommes, dire que la rupture s'analyse en une démission, débouter Mme Y... de toutes ses demandes, ordonner à Mme Y... de produire son contrat de travail avec Eurosites et ses feuilles de paie correspondantes, condamner Mme Y... à lui verser les sommes suivantes 5. 000 euros de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du code civil pour remise tardive des clés de la société et communication de pièces internes de la société, 10. 000 euros d'indemnité pour brusque rupture sur le fondement de l'article L. 1237-1 du code du travail, 4. 150, 80 euros à titre de préavis et 4. 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Vu la production du contrat de travail signé par Mme Y... avec la société Eurosites et les bulletins de salaire correspondants demandés par arrêt du 3 juin 2015 ;

Considérant que Mme Y... a été engagée selon un contrat de travail à durée indéterminée du 1er septembre 1998, par la société SPAT en qualité de secrétaire, à temps plein ; qu'elle est devenue le 9 janvier 2006, " chef de projet junior ", son salaire étant porté à la somme de 2 300 euros brut par mois, avec effet rétroactif au 1er novembre 2005 ; que le 1er janvier 2008, le contrat de travail de Mme Y... est passé au 4/ 5ème avec maintien du montant de son salaire ;

Que par lettre recommandée avec accusé de réception du 30 novembre 2011, Mme Y... a pris acte de la rupture de son contrat de travail pour les motifs suivants :
" Suivant le Code Civil qui régit les contrats de travail tant écrits que oraux.
Suivant le Code du Travail en ses articles qui déterminent les modalités dudit contrat oral que nous avons conclu d'un commun accord.
Suivant les dispositions suivantes :
*je serai nommée cadre responsable dans la société (Chef de projet)
*je serai augmentée suivant ce statut : confer Convention Collective
* je dépendrai d'une caisse de retraite (dont je n'ai ni le nom ni l'adresse
* j'aurai toute latitude pour exercer mes fonctions et missions (confer nos échanges de mails)
*j'aurai le même salaire que mes autres collègues qui effectuent le même travail
*j'aurai un téléphone professionnel
Aucune de ces clauses contractuelles n'ont été remplies par l'entreprise, ni le statut, ni le salaire, la convention collective, l'égalité de traitement entre femmes et hommes définie par les différents codes (liste non exhaustive).
Pour toutes ces raisons, dont nous avons déjà débattu ensemble, je considère que vous n'avez pas rempli vos obligations contractuelles (orales).
Je prends acte et conclus que de votre fait vous rompez le contrat qui nous lie.
A la date de réception de ce courrier, soit le 2 décembre 2011, je considérerai que je suis licenciée... " ;

Que par lettre du 9 décembre 2011, Mme Y... a ajouté qu'elle était lésée dans ses droits reprochant à l'employeur le refus d'une formation en anglais commercial, l'octroi d'un seul jour de repos à la suite d'un déplacement de trois jours à Londres, le défaut de paiement ou de récupération d'heures supplémentaires, l'utilisation de son téléphone portable pour joindre ses clients, un refus d'augmentation de salire accordée à d'autres salariés, des agressions verbales et des pressions ;

Sur le statut de cadre :

Considérant que contrairement à ce qu'elle soutient, la société Spat qui organise des salons et des congrès est soumise à la Convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils du 15 décembre 1987 (Syntec), l'article 1 de ladite convention, modifié par avenant no 28 janvier 2003 et étendu par arrêté du 30 juillet 2003, prévoyant qu'elle est applicable aux sociétés dont l'activité principale est l'organisation ou l'accueil de manifestations économiques type foire, salons, congrès et réunions d'entreprise, où les relations de service liées à ses activités ;

Considérant qu'il résulte des pièces produites et notamment de courriels internes et de clients, qu'à compter du 1er janvier 2006, Mme Y... a exercé les fonctions de chef de projet ; qu'à ce titre, elle a assuré la commercialisation, le suivi des dossiers clients, la création des supports de communication, la mise en place et le suivi des partenaires presse, la gestion des fournisseurs, du site internet, outre les tâches administratives associées en disposant d'une grande marge d'initiatives et de responsabilités pour l'accomplissement de ses fonctions exercées, qu'elle exerçait sous la seule responsabilité du Président de SPAT ; qu'ainsi elle relevait bien dans la classification des cadres de la convention collective Syntec de la position 2-2 définie comme suit : " 2. 2 (coefficient 130) : initiatives et responsabilités en exécution d'instructions d'un chef de service ou d'un directeur. Pas de fonction de commandement à l'exception du personnel administratif immédiatement rattaché à sa fonction " ;

Considérant, en conséquence, que le décompte établi par Mme Y... à partir des salaires minimaux prévus par la convention collective pour les années 2007 à 2010 fait apparaître qu'un rappel de salaire de 10 619, 28 euros est dû à la salariée ; que l'employeur sera condamné à payer cette somme outre celle de 1. 061, 93 euros au titre des congés payés afférents ;

Sur les heures supplémentaires :

Considérant qu'à l'appui de sa demande, Mme Y... produit des tableaux " excel " qu'elle a établis pour la procédure et qui ne sont pas contresignés par l'employeur, des agendas électroniques qu'elle a remplis sans aucun contrôle ; que, cependant, il résulte de l'échange de courriels versés aux débats par les deux parties, que Mme Y... a récupéré par des jours de congé les heures supplémentaires qu'elle avait effectuées ;   qu'elle sera déboutée de la demande formée à ce titre ;

Sur la rupture :

Considérant qu'aucune des pièces produites par Mme Y... ne permettent de présumer de l'existence d'un quelconque harcèlement à son égard ; que les courriels de M. Z... sont rédigés sur un ton courtois, ne contiennent aucun terme dénigrant ou humiliant et témoignent au contraire de relations professionnelles normales entre un supérieur hiérarchique et un salarié ; qu'aucune attestation ne rapporte que M. Z... hurlait dans les couloirs ;

Que de la même manière, il n'est pas justifié que Mme Y... a eu un traitement différent de celui de ses collègues ; que la grille des salaires versés aux différents chefs de projet révèle que Mme Y... avait le salaire le plus élevé ;

Considérant qu'il est constant que Mme Y... n'a pas bénéficié du statut de cadre et du salaire correspondant ; que par un courriel du 17 février 2006, le président de la société SPAT a refusé implicitement d'accorder à Mme Y... le statut de cadre en raison du coût salarial d'un tel statut et de l'application qui devrait en être faite à tous les autres salariés, " ce qui n'est pas souhaitable " ; que, cependant, alors même que dans ce mail M. Z... précisait qu'il était disposé à en reparler dès que Mme Y... le souhaiterait, cette dernière n'a plus demandé à bénéficier de ce statut pendant cinq ans, acceptant la poursuite de son contrat de travail avec le statut d'agent de maîtrise ;

Que Mme A..., directrice opérationnelle de la société SPAT, atteste que du 18 au 28 novembre 2011, Mme Y... a été reçue à plusieurs reprises par elle même et M. Z... ; qu'au cours de ces entretiens Mme Y... les a informés d'abord de son intention de démissionner et de son souhait d'être libérée par anticipation, son futur nouvel employeur demandant qu'elle soit présente rapidement, puis d'être licenciée ou de signer un accord transactionnel si le nouvel employeur ne la gardait pas à l'issue de sa période d'essai ; que l'employeur lui a demandé d'exécuter sa période d'essai ;

Que Mme Y... a envoyé sa lettre de prise d'acte de la rupture deux jours seulement avant qu'elle ne commence à travailler pour son nouvel employeur comme le démontre son contrat de travail signé avec la société Eurosites ; qu'il en résulte que la cause déterminante de la prise d'acte de la rupture n'a pas été le refus du statut de cadre mais le souhait de Mme Y... de quitter l'entreprise pour un nouvel emploi sans attendre l'expiration du délai de préavis, ce qui démontre sa volonté non équivoque de démissionner ; que le non-respect du préavis manifeste lui aussi sans équivoque sa volonté de démissionner ; qu'ainsi la prise d'acte de la rupture s'analyse en une démission de Mme Y... qui ne peut se voir allouer les indemnités relatives à un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Sur la demande reconventionnelle :

Considérant que l'obligation de respecter le préavis s'impose aux parties ; qu'il s'en déduit que lorsqu'il n'en a pas été dispensé, le salarié qui n'a pas exécuté son préavis doit à l'employeur une indemnité compensatrice en application de l'article L. 1234-5 du code du travail ; qu'en l'espèce, par lettre du 1er décembre 2011, la société SPAT a mis Mme Y... en demeure d'exécuter son préavis ; que Mme Y... n'ayant pas exécuté ledit préavis sera condamnée à payer à la société SPAT la somme de 4. 150, 80 euros ;

Considérant que la société SPAT ne démontre ni un abus manifeste, ni une intention de nuire dans la démission de Mme Y... ; qu'elle sera déboutée de sa demande de dommages-intérêts pour brusque rupture ; que la société ne justifie pas du préjudice résultant de la remise des clefs et de la production devant les juridictions judiciaire de pièces internes à la société ; qu'elle sera déboutée de la demande formée à ce titre ;

Considérant que l'équité commande de condamner la société SPAT, tenue aux dépens, à payer à Mme Y... la somme de 1. 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ; que la société SPAT doit être déboutée de cette même demande.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a reconnu le statut de cadre de Mme X... Y...

L'INFIRME pour le surplus,

CONDAMNE la société SPAT à payer à Mme X... Y... la somme de 10 619, 28 euros à titre de rappel de salaire et de 1. 061, 93 euros au titre des congés payés afférents ;

DEBOUTE Mme X... Y... de ses autres demandes,

CONDAMNE Mme X... Y... à payer à la société SPAT la somme de 4. 150, 80 euros au titre du préavis non exécuté,

DEBOUTE les parties de leurs autres demandes,

CONDAMNE la société SPAT aux dépens et à payer à Mme X... Y... la somme de 1. 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la société SPAT aux dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6- chambre 1
Numéro d'arrêt : 13/06476
Date de la décision : 30/09/2015
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2015-09-30;13.06476 ?
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