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29/09/2015 | FRANCE | N°13/01711

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 3, 29 septembre 2015, 13/01711


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3



ARRÊT DU 29 Septembre 2015



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/01711



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 02 Octobre 2012 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 11/09187





APPELANT

Monsieur [R] [X]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

né le [Date naissance 1] 1973 à [Localité 1]

comparant en p

ersonne,

assisté de Me Fathi BENMAJED, avocat au barreau de PARIS, toque : D0668







INTIMEE

SARL MAZIERS ING

[Adresse 3]

[Adresse 3]

N° SIRET : 544 032 921

représentée par Me ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3

ARRÊT DU 29 Septembre 2015

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/01711

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 02 Octobre 2012 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 11/09187

APPELANT

Monsieur [R] [X]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

né le [Date naissance 1] 1973 à [Localité 1]

comparant en personne,

assisté de Me Fathi BENMAJED, avocat au barreau de PARIS, toque : D0668

INTIMEE

SARL MAZIERS ING

[Adresse 3]

[Adresse 3]

N° SIRET : 544 032 921

représentée par Me Jean-michel TROUVIN, avocat au barreau de PARIS, toque : A0354

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Juin 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Isabelle VENDRYES, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Daniel FONTANAUD, Président

Madame Isabelle VENDRYES, Conseillère

Madame Roselyne NEMOZ, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Claire CHESNEAU, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par Monsieur Daniel FONTANAUD, Président et par Madame Claire CHESNEAU, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Monsieur [X] a été engagé par la société MAZIERS ING, bureau d'études de moins de 10 salariés, dans le cadre de contrats de chantier à compter du 3 mai 2004, son dernier contrat en date du 1er février 2008 se poursuivant à durée indéterminée à l'arrivée de son terme. Son dernier salaire mensuel brut était de 3634, 19 euros.

À compter du 4 mars 2011 , son employeur lui a notamment adressé les lettres suivantes :

remise en main propre

le 4 mars 2011

'Monsieur,

la situation économique internationale ne cesse de se dégrader. Un fort ralentissement de nos activités est à déplorer depuis le printemps dernier.

De ce fait, nous vous informons que nous sommes amenés à envisager à votre égard une mesure de licenciement collectif pour motif économique.

Un entretien sur cette éventuelle mesure se fera le 11 mars 2011 sur le lieu de votre travail à la société OGER INTERNATIONAL, [Adresse 1]. Soyez donc disponible ce jour à 11h.

Nous vous précisons que vous avez la possibilité de vous faire assister lors de cet entretien par une personne de votre choix faisant partie de l'entreprise ou un conseiller inscrit sur la liste départementale dressée par le préfet.

Lors de cet entretien nous vous remettrons la documentation concernant les mesures d'évaluation des compétences et d'accompagnement en vue d'un reclassement (convention de reclassement personnalisé)'

Lettre recommandée AR

le 14 mars 2011

'Monsieur,

suite à des récents événements survenus chez notre client La société OGER INTERNATIONAL, nous ne sommes plus en mesure de vous licencier pour raison économique et donc de vous proposer la convention de reclassement personnalisé.

De ce fait, compte tenu de nos récents entretiens, si vous ne désirez plus travailler pour nous, vous devrez nous présenter une lettre de démission.

Nous vous rappelons que votre contrat stipule une clause de non-concurrence d'une durée de six mois après la date de fin de contrat. Nous nous réservons le droit de vous réclamer à vous et à OGER INTERNATIONAL, par toutes voies légales, les préjudices subis.

Nous signalons également au Pôle emploi le fait que Monsieur [Z] , chargé d'affaires chez OGER INTERNATIONAL, pour lequel vous travaillez (les gares: environ un an et demi de travail) vous ait proposé, devant témoin, de vous mettre au chômage et de revenir ensuite travailler chez notre client en tant qu'indépendant. Dans l'attente d'une justification de votre part, veuillez agréer, Monsieur, l'expression de nos sentiments distingués.'

lettre recommandée avec AR n°1A 054 948 9284 1

le 20 juin 2011

objet : licenciement pour faute grave.

Monsieur,

l'affaire sur laquelle vous avez travaillé est toujours en cours et vous essayez de traiter directement avec mon client OGER INTERNATIONAL. En effet, vous lui avez fait une proposition de travail en tant qu'indépendant alors que votre contrat comporte une clause de non-concurrence. Par ces procédés vous m'avez fait perdre mon client OGER INTERNATIONAL ce qui est une faute excessivement grave et j'en subis un préjudice certain.

Dans le même temps, vous essayez d'obtenir un licenciement économique pour bénéficier d'allocations. Une fois au courant de votre man'uvre, je me suis tourné vers mon client OGER INTERNATIONAL qui n'a pas contesté votre proposition de traiter en direct avec lui. J'ai d'ailleurs reçu un courrier de leur part, me précisant qu'en cas de licenciement d'un de mes salariés, il était tout à fait en droit d'engager quiconque. Plus précisément ce courrier dit, je cite: « il a été dit par Monsieur [Z] (votre chargé d'affaire) que si Monsieur [X] était au chômage, une éventuelle collaboration sous une forme ou sous une autre pourrait être envisageable. » Et cette lettre a été signée par Monsieur [E] [G] directeur des études d' OGER INTERNATIONAL. Par conséquent je me réserve le droit de vous réclamer des dommages-intérêts par tous moyens légaux. De plus, nous attendons toujours votre feuille d'heures du mois de juin 2011, merci de nous la communiquer le plus rapidement possible.

Lettre recommandée avec AR n°1A 055 536 9786 8

le5 août 2011

Monsieur,

nous vous avons convoqué ce 22 juillet 2011 pour vous remettre la convention de reclassement personnalisé.

Vos droits d'adhérer à une convention de reclassement personnalisé expirent le 12 août 2011.

À ce jour, vous ne nous avez pas répondu.

Par conséquent, si à cette date, vous n'avez pas fait connaître votre réponse sur la proposition de convention de reclassement personnalisé, ou si vous l'avez refusée, la présente cette constituera notification de votre licenciement.

Nous vous précisions que, sans application de critère d'ordre de licenciement, la mesure concernant la totalité des effectifs de l'entreprise, nous sommes donc contraints de vous notifier votre licenciement pour motif économique

-non-renouvellement de nos contrats par notre client unique,

- non paiement de nos factures arrivées à échéance par notre client OGER INTERNATIONAL.

Ce non-renouvellement et ce non-paiement ont pour conséquence l'arrêt d'activité de notre société et de ce fait, la suppression de votre poste sans possibilité de reclassement.

La date de première présentation de la présente marque le point de départ de votre préavis d'une durée de trois mois. Par ailleurs votre contrat de travail ne prendra fin qu'au terme du préavis (...).

Monsieur [X] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris le 28 juin 2011 concomitamment au fond et en référé afin de voir sanctionner la rupture abusive de son contrat de travail .

Par jugement rendu le 2 octobre 2012 par le conseil de prud'hommes de Paris, les demandes de Monsieur [X] ont été rejetées et le salarié a été condamné à verser à la société MAZIERS ING la somme de 3278,04 euros à titre de trop perçu de l'indemnité de licenciement.

Monsieur [X] a interjeté appel de ce jugement

Par conclusions visées au greffe le 22 juin 2015 au soutien de ses observations orales auxquelles il est expressément fait référence en ce qui concerne ses moyens, Monsieur [X] demande de voir dire que son licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse et la condamnation de la société MAZIERS ING à lui régler les sommes suivantes :

1090, 25 euros à titre de congés payés afférents à l'indemnité de préavis de 10'902, 57 euros,

21'805, 14 euros à titre de contrepartie financière de la clause de non-concurrence,

6000 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement,

130'830 euros à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive,

3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Par conclusions visées au greffe le 22 juin 2015 au soutien de ses observations orales auxquelles il est expressément fait référence en ce qui concerne ses moyens, la société MAZIERS ING demande la confirmation du jugement, le rejet des prétentions de Monsieur [X], la condamnation de Monsieur [X] à lui régler une somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

Il résulte des pièces produites que par courrier du 14 mars 2011 réitéré le 25 mars 2011 , la société MAZIERS ING a informé Monsieur [X] de ce qu'elle ne poursuivait pas la procédure de licenciement économique débutée à son encontre le 4 mars 2011, par la convocation à un entretien préalable;

La lettre du 20 juin 2011 adressée par lettre recommandée avec accusé de réception est explicite s'agissant du licenciement pour faute grave alors notifié, l'employeur reprochant au salarié d'avoir fait une proposition de travail au seul client de la société, la société OGER INTERNATIONAL, en tant qu'indépendant alors que son contrat comporte une clause de non-concurrence;

L'employeur y qualifie la perte du client s'en déduisant de 'faute excessivement grave'tout en reprochant dans le même temps au salarié d'obtenir un licenciement économique pour bénéficier d'allocations;

Cette rupture amène Monsieur [X] à saisir le conseil de prud'hommes le 28 juin 2011;

La cour observe que l'envoi du courrier du 20 juin 2011 par l'employeur n'a pas été précédé d'un entretien préalable au licenciement;

Au fond, l'employeur n'apporte par ailleurs aucune justification de ce que Monsieur [X] aurait fait une offre illicite de travail à la société OGER INTERNATIONAL ou aurait travaillé directement pour ce client étant observé à cet égard que celui ci lui a au contraire adressé le 24 juin 2011 la fiche de facturation correspondant pour ce mois à la prestation du salarié (pièce 21 de la société MAZIERS ING);

Il ne peut être non plus être reproché au salarié d'avoir adressé à son employeur des courriers d'acceptation de la convention de reclassement personnalisé compte tenu du licenciement économique initié début mars 2011 puis des lettres contradictoires reçues postérieurement;

Il se déduit de ces éléments que le licenciement du salarié intervenu le 20 juin 2011 est intervenu sans cause réelle et sérieuse, la procédure y afférente étant entachée par ailleurs d'irrégularités .

La société, comptant moins de 11 salariés, se verra condamner au paiement de la somme de 3635 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice tenant à l'absence d'entretien préalable et d'irrespect des droits de la défense;

Compte tenu des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée au salarié (3634, 19 euros), de son âge, de son ancienneté , de son retour à l'emploi depuis le 26 juin 2012 et des conséquences du licenciement à son égard, tels qu'ils résultent des pièces et des explications fournies, la société MAZIERS ING sera condamnée à lui verser la somme de 20'000 € à titre de dommages-intérêts;

Une somme de 1090, 25 euros est par ailleurs due à Monsieur [X] au titre des congés payés afférents sur préavis dans les termes d'ores et déjà fixés par le conseil de prud'hommes en référé;

Compte tenu de la nullité de la clause de non-concurrence insérée dans le contrat de travail du Monsieur [X] et du préjudice en découlant nécessairement, il sera alloué à Monsieur [X], lequel a été informé de la nullité de cette clause dès le 1er avril 2011 par le contrôleur du travail, une somme de 1500 euros à titre de dommages-intérêts

Compte tenu de l'ancienneté du salarié dans l'entreprise par le biais des contrats de travail à durée déterminée dont il a fait l'objet, le jugement du conseil de prud'hommes a lieu d'être infirmé en ce qu'il a condamné le salarié à rembourser à la société MAZIERS ING la somme de 3278, 04 euros à titre de trop perçu d'indemnité de licenciement;

Il est enfin rappelé que les créances salariales portent intérêts au taux légal à compter de la réception par la défenderesse de sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes et les créances indemnitaires à compter de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Infirme le jugement entrepris,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne la société MAZIERS ING à payer à Monsieur [X] les sommes suivantes

1090, 25 euros à titre de congés payés afférents à l'indemnité de préavis,

1500 euros au titre de la nullité de la clause de non-concurrence,

3635 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement,

20'000 euros à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive,

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute la société MAZIERS ING de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société MAZIERS ING à payer à Monsieur [X] la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne la société MAZIERS ING aux dépens

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 13/01711
Date de la décision : 29/09/2015

Références :

Cour d'appel de Paris K3, arrêt n°13/01711 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-09-29;13.01711 ?
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