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23/09/2015 | FRANCE | N°13/15348

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 3, 23 septembre 2015, 13/15348


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 3



ARRÊT DU 23 SEPTEMBRE 2015



(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 13/15348



Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Juin 2013 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 10/09733





APPELANTE



SAS VICTOIRES OPERA prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 1]
>[Localité 1]



Représentée par Me Jean-Claude CHEVILLER, avocat au barreau de PARIS, toque : D0945, avocat postulant

Assistée de Me Laurent VIOLLET de la SELARL LVA, avocat au barreau de PARIS,...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3

ARRÊT DU 23 SEPTEMBRE 2015

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/15348

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Juin 2013 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 10/09733

APPELANTE

SAS VICTOIRES OPERA prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentée par Me Jean-Claude CHEVILLER, avocat au barreau de PARIS, toque : D0945, avocat postulant

Assistée de Me Laurent VIOLLET de la SELARL LVA, avocat au barreau de PARIS, toque : G0129, avocat plaidant

INTIMÉE

Madame [P] [M] épouse [F]

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représentée par Me Laurence TAZE BERNARD de la SCP IFL Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : P0042, avocat postulant

Assistée de Me Emmanuelle CHAVANCE de l'AARPI OPERA AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0055, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 27 Mai 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Chantal BARTHOLIN, présidente

Madame Brigitte CHOKRON, conseillère

Madame Caroline PARANT, conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : lors des débats : Madame Orokia OUEDRAOGO

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- signé par Madame Chantal BARTHOLIN, présidente, et par Madame Orokia OUEDRAOGO, greffière.

********

Faits et procédure :

Suivant acte sous seing privé en date du 30 juillet 1999, Mme [P] [M] épouse [F] a consenti à la SAS Victoires Opéra un bail des locaux à usage d'hôtel meublé dépendant d'un immeuble situé [Adresse 1] dans le 2ème arrondissement de [Localité 3], pour une durée de neuf années à compter du 1er octobre 1999.

Selon acte de même date, les parties ont conclu un second bail commercial portant sur des locaux en rez-de-chaussée et au premier étage du même immeuble à destination de bar, restaurant, hôtel, étant précisé « qu'il s'agit d'une seule entité commerciale et que toutes les cessions, tous congés avec offre ou refus de renouvellement, toutes résiliations amiables ou judiciaires, ne pourront porter que sur l'ensemble des locaux faisant l'objet des deux baux afin de conserver leur caractère d'indivisibilité ».

Par actes d'huissier en date du 28 mars 2008, Mme [F] a fait délivrer à la société Victoires Opéra un congé avec offre de renouvellement des deux baux au 1er octobre 2008 moyennant un loyer porté à la somme de 170.000 euros pour les locaux principaux objet du premier bail, et à la somme de 70.000 euros pour les locaux objet du second bail.

Les parties n'ayant pu parvenir à un accord sur le prix des baux renouvelés, Mme [F] a fait assigner la société Victoires Opéra devant le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Paris en fixation des loyers par actes d'huissier du 22 juin 2010 enrôlés sous les n°10/9733 et 10/9735.

Par jugement avant dire droit du 6 avril 2011, le juge des loyers commerciaux a constaté le renouvellement des deux baux au 1er octobre 2008 par effet du congé du 28 mars 2008, dit que les locaux à usage d'hôtel sont monovalents et désigné Mme [X], ultérieurement remplacée par M. [C], en qualité d'expert afin d'estimer la valeur des baux renouvelés.

L'expert a déposé son rapport le 30 novembre 2012.

Par jugement en date du 28 juin 2013, le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Paris a :

- ordonné la jonction des dossiers n°10/9733 et 10/9735,

- fixé le loyer du bail renouvelé à la somme de 120.033 pour l'hôtel et 23.564,43 pour la boutique,

- condamné la société Victoires Opéra à payer à Mme [F] les intérêts au taux légal sur les loyers arriérés depuis le 1er octobre 2008 à compter du 22 juin 2010, date de l'assignation,

- dit n'y avoir lieu à capitalisation des intérêts,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- ordonné l'exécution provisoire.

La société Victoires Opéra a relevé appel de ce jugement le 24 juillet 2013. Par ses dernières conclusions en date du 17 mars 2015, elle demande à la Cour de :

- fixer le montant du loyer des baux renouvelés entre les parties au 1er octobre 2008 à la somme annuelle en principal de 65.846 euros,

- dire et juger que le délai pendant lequel la bailleresse ne peut bénéficier des travaux réalisés par sa locataire ne court qu'à compter de la date à laquelle les travaux ont été exécutés, soit le 20 décembre 2000,

A titre subsidiaire :

- dire et juger que la partie hôtel doit être valorisée dans sa configuration avant travaux et fixer en conséquence le montant du loyer de l'hôtel à la somme annuelle en principal de 72.000 euros à compter du 1er octobre 2008,

- dire et juger que le versement d'un droit d'entrée lors de la conclusion du bail ne constitue pas un motif de déplafonnement,

- dire et juger que le droit d'entrée versé ne peut être réintégré au montant du loyer,

- fixer en conséquence le loyer de la partie boutique suivant les règles du plafonnement à la somme annuelle en principal de 31.963 euros à compter du 1er octobre 2008,

En tout état de cause :

- dire et juger que les éventuels intérêts au taux légal ne produiront effet qu'à compter du 22juin 2010, date de l'assignation introductive d'instance,

- dire et juger n'y avoir lieu à capitalisation des intérêts,

- condamner Mme [F] au paiement d'une somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

- la condamner également aux entiers dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais et honoraires d'expertise judiciaire, dont le montant, pour ceux le concernant, pourra être recouvré dans les termes des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Par ses dernières conclusions datées du 30 avril 2015, Mme [F] demande quant à elle à la Cour de :

- d'infirmer le jugement entrepris,

- fixer le montant du loyer annuel dû pour le bail principal à compter du 1er octobre 2008 par la Société Victoires Opéra à la somme de 161.969 euros hors taxes et hors charges, toutes clauses, charges et conditions du bail venant à échéance demeurant inchangées,

- dire et juger que compte tenu de la clause du bail stipulant que les travaux effectués par le preneur ne feront pas accession à la propriété, le loyer des locaux boutique doit être apprécié dans leur configuration avant travaux, à savoir une boutique, une arrière-boutique en rez-de-chaussée, deux pièces et une cave,

- dire et juger que le règlement d'un droit d'entrée lors de la prise d'effet du bail constitue un motif de déplafonnement justifiant que le loyer soit fixé à la valeur locative,

- fixer le montant du loyer annuel dû pour la partie boutique à compter du 1er octobre 2008 par la société Victoires Opéra à la somme de 40.700 euros hors taxes et hors charges, toutes clauses, charges et conditions du bail venant à échéance demeurant inchangées,

A titre subsidiaire :

- dire et juger que pour calculer le plafonnement, le droit d'entrée doit être réintégré, de sorte que le loyer d'origine s'établit à 24.561,22 euros par an en principal,

- fixer le montant du loyer annuel dû à compter du 1er octobre 2008 par la société Victoires Opéra au plafond correspondant à la somme de 34.330 euros hors taxes et hors charges, toutes clauses, charges et conditions du bail venant à échéance demeurant inchangées,

- à titre infiniment subsidiaire, si les travaux devaient être pris en compte et les locaux être considérés comme monovalents, le loyer dû à compter du 1er octobre 2008 calculé selon la méthode hôtelière correspondrait donc à la somme de 31.797 euros hors taxes et hors charges, toutes clauses, charges et conditions du bail venant à échéance demeurant inchangées,

- subsidiairement, dire et juger que si un abattement pour travaux devait être appliqué, le délai de douze ans expirait le 31 mars 2012,

- en conséquence, dire et juger que le loyer après abattement ne s'appliquerait qu'entre le 1er octobre 2008 et le 31 mars 2012,

- débouter la société Victoires Opéra de l'ensemble de ses demandes principales et subsidiaires, fins et conclusions,

- à toutes fins, si la clause de non accession devait s'appliquer à tout l'immeuble, il conviendra de fixer le loyer à la somme de 199.058 euros par an en principal,

- dire que tout rappel de loyers dus à la suite du renouvellement portera intérêt au taux légal à compter rétroactivement du 22 juin 2010, date de l'assignation, puis de chacune des échéances contractuelles,

- ordonner la capitalisation des intérêts conformément à l'article 1154 du Code civil,

- condamner la société Victoires Opéra au paiement d'une somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner la société Victoires Opéra en tous les dépens de première instance y compris les frais d'expertise, et d'appel dont le recouvrement sera poursuivi conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

SUR CE

Il convient de se référer à la description des locaux telle qu'elle figure dans le jugement auquel il est expressément fait référence, étant souligné que le fonds est situé rue Montorgueil, artère piétonnière et d'excellente commercialité sur le premier tronçon qui va de la [Adresse 3], comportant 21 enseignes nationales s'adressant pour les commerces non alimentaires à une clientèle branchée parisienne ou étrangère et 20 hôtels cafés restaurants; l'emplacement est au surplus très bien desservi par les transports en commun ;

L'expert a souligné que la locataire a obtenu un changement de catégorie hôtelière en raison de l'acquisition du droit au bail de la boutique rez de chaussée qui a permis de créer une zone d'accueil pour la clientèle, un ascenseur vers le sous sol, des locaux techniques en sous sol et quatre chambres en étage;

La société Victoire Opéra appelante ne critique pas le jugement en ce qu'il a, utilisant la méthode hôtelière pour l'ensemble des locaux, procédé ensuite pour déterminer le loyer applicable à chacun de deux baux, à une ventilation du résultat en tenant compte du nombre de chambres affectées à chaque bail, soit 83, 59 % pour 20 chambres et 16, 41 % pour 4 chambres tout en soulignant que ce ratio ne reflète ni la réalité physique ni l'utilité technique et commerciale, que le loyer proposé pour la partie principale ne pourrait pas en effet être retenu si les locaux boutique n'avaient pas été intégrés au bail principal, que le ratio de contribution de la boutique au chiffre d'affaires global doit être repensé à la mesure de l'importance des travaux réalisés qui ont coûté plus de 2 millions d'euros et entraîné la fermeture de l'hôtel pendant deux ans ; elle souscrit à fixation de la recette théorique annuelle à la somme de 2 173 210 € dont à exclure la TVA et la taxe de séjour, et demande de ne pas y ajouter la recette petits déjeuners conformément à la jurisprudence de la cour, d'appliquer un taux de remise de 25 % en soulignant qu'elle traite avec des centrales de réservation, des tours opérateurs, qu'elle a négocié un certain nombre de contrats 'corporate' pour bénéficier d'une clientèle sécurisée, qu'elle subit ainsi les contraintes d'exploitation l'obligeant à baisser les prix des nuitées pour assurer le remplissage de l'hôtel, de confirmer le taux d'occupation de 75 % et de retenir un pourcentage de recettes de 11, 50 % eu égard à l'état des locaux, et notamment la forte déclivité des deux corps de bâtiment représentant 20 marches au 5ème étage, l'étroitesse des circulations latérales, le fait que l'ascenseur soit situé au fond du bâtiment sur cour obligeant la clientèle à subir le déclivité susvisée, la faible capacité de la salle de petits déjeuners .

Mme [F] souligne de son coté que la recette théorique pour le bail à destination hôtel s'établit à la somme hors taxe de 2 059 915 € ; elle demande de lui appliquer un taux de remise à la clientèle de 15%, faute pour la société locataire d'avoir produit des éléments comptables détaillés sur les remises effectivement pratiquées, de retenir un pourcentage de recettes de 14% aux motifs que tant les travaux de l'article 606 du code civil que l'impôt foncier sont à la charge de la bailleresse, de confirmer l'ajout des recettes petits déjeuners en tenant compte non d'un pourcentage du chiffre d'affaires mais du nombre de personnes prenant habituellement leur petit déjeuner au prix unitaire de 12 € et en appliquant au chiffre obtenu le même taux d'occupation et de recettes que pour le calcule de la recette théorique ; elle demande d'exclure la méthode hôtelière pour le calcul du loyer du bail-boutique, qui n'est pas exclusivement à destination d'hôtel alors que les travaux ne font pas au terme du bail accession au bailleur, et que le premier juge ne pouvait affirmer que les locaux ne peuvent être affectés à un autre usage sans travaux importants ou transformations coûteuses alors qu'il ne disposait d'aucune pièce lui permettant de le retenir leur caractère monovalent, que l'indivisibilité que les parties ont sous entendu ne vaut que pendant le cours du bail et peut prendre fin à son expiration; elle se prévaut pour ce bail renouvelé d'un loyer déplafonné en raison du versement du droit d'entrée et demande, si le droit d'entrée ne devait pas être considérée comme motif de déplafonnement, de l'ajouter au loyer d'origine à concurrence d'un neuvième .

Or si les parties ne contestent pas le caractère monovalent des locaux dépendant du bail principal et en conséquence, l'application de la méthode hôtelière à la détermination du loyer de ce bail renouvelé, elles s'opposent en revanche sur la méthode de détermination du loyer du bail en nature de boutique qui a été adjoint au premier bail.

Ce second bail comporte comme désignation une boutique en rez de chaussée avec arrière boutique, deux pièces en étage, une sur rue, l'autre sur cour, reliées par un escalier, et une cave; il précise que le preneur ne pourra exercer dans les lieux loués que les activités de bar, restaurant et hôtel et que 'les parties conviennent qu'il s'agit d'une même entité commerciale, toutes cessions, tous congés.. ne pouvant porter que sur l'ensemble des locaux faisant l'objet des deux baux afin de leur conserver leur caractère d'indivisibilité' ; plus loin il est encore indiqué que par dérogation à l'interdiction de modification de la distribution, le preneur pourra dans les six mois de la prise d'effet du bail, modifier la distribution actuelle sous réserve d'obtenir l'autorisation de ne pas porter atteinte au gos oeuvre, étant observé qu'il s'oblige expressément à dénoncer à l'échéance des six mois au bailleur les plans permettant d'appréhender la nouvelle distribution, laquelle deviendra contractuelle et ne pourra être modifiée, sauf le respect de la présente clause. Il est cependant précisé que les travaux ne feront pas accession au bailleur qui a loué une boutique, une arrière boutique en rez- de -chaussée, deux pièces en étage et une cave.

Le fait que les clauses dudit bail se contredisent au point de retenir que la modification de la distribution des locaux résultant des travaux deviendra la loi des parties pour ensuite retenir que celle-ci ne s'imposera pas au bailleur imposait une interprétation de manière à rendre à ces clauses contraires une cohérence ; les premiers juges ont justement retenu que l'intention des parties était de permettre au locataire de modifier avec l'accord du bailleur la distribution des locaux de telle manière que les locaux à destination de bar, hôtel ou restaurant soient désormais adjoints aux locaux du bail principal de façon à constituer un ensemble indivisible, la nouvelle distribution donnée aux locaux s'imposant aux parties, le bail ne contenant aucun retour à la situation antérieure même en fin de bail.

Ainsi les locaux du second bail en nature de boutique sont devenus le lobby de l'hôtel qui sans l'annexion de cette partie n'aurait pu recevoir le changement de nomenclature ; ils comportent également quatre chambres qui portent le nombre total de chambres à 24.

Les premiers juges ont en conséquence justement estimé que la méthode hôtelière devait s'appliquer pour l'ensemble de l'hôtel, dés lors que les locaux objet du second bail ont été modifiés pour permettre exclusivement l'accueil de la clientèle de l'hôtel, devenant ainsi partie d'un ensemble indivisible de locaux plus vaste ayant fait l'objet de travaux d'envergure et sans lesquels le changement de catégorie n'était pas possible.

Les deux parties s'accordent sur le calcul de la recette théorique tenant compte des prix affichés pour un hôtel quatre étoiles en 2008 et donc après travaux qui ont fait accession au bailleur pour le premier bail ;

Il n'y a pas lieu d'y ajouter la recette théorique tirée du service des petits déjeuners qui constitue une recette accessoire laquelle ne peut être considérée comme habituellement incluse dans le calcul de la recette hébergement ; aucun changement des usages dans la branche d'activité considérée n'est démontrée qui conduirait à prendre dans tous les cas les recettes accessoires constituées par les petits déjeuners dans la fixation du loyer selon la méthode hôtelière; au surplus, elle ne représente selon l'expert qu'un faible pourcentage du chiffre d'affaires ( environ 3% ), qui s'explique par la concurrence des nombreux cafés du secteur; la salle où est servi les petits déjeuners est en effet de faible contenance et située en sous sol, ce qui est sans rapport avec le standing de l'hôtel et ne la rend pas attractive, comparée à l'offre de cafés alentour de sorte que la preuve de la rentabilité de ce service n'est pas démontrée; cette recette accessoire ne sera pas ajoutée à la recette théorique 'hébergement' servant au calcul du loyer .

Le taux d'abattement revendiqué par le preneur est de 25% ; la pratique des remises pour permettre un taux de remplissage maximal grâce notamment aux centrales de réservations n'est pas contesté ; l'expert relève que l'hôtel se situe en dehors du secteur des hôtels quatre étoiles et plus de la capitale; le preneur ne produit aucun élément permettant de connaître le taux de remise pratiquée effectivement;

Il convient en conséquence de retenir le taux proposé par l'expert et retenu par le premier juge de 20 % qui correspond à un taux moyen de la catégorie de l'hôtel concerné ;

Le coefficient d'occupation de 75 % n'est pas contesté et sera confirmé.

Le pourcentage sur recette appliqué à la recette théorique hors taxe a été justement apprécié en tenant compte des contraintes de charges d'exploitation inhérentes à la configuration des locaux et à la catégorie de l'hôtel ; elle ne saurait ni être diminuée ni être augmentée en fonction des charges qui pèsent respectivement sur la locataire et la propriétaire au titre des travaux alors que l'ensemble des travaux de mise en conformité est à la charge de la locataire .

Les deux parties admettent conjointement que les travaux destinés à changer la catégorie hôtelière ont fait accession au bailleur lors du premier renouvellement suivant leur exécution, conformément aux dispositions du bail 'hôtel'; elles ne contestent pas davantage les références des prix affichés qui se rapportent à la situation de l'hôtel après travaux de sorte que les dispositions de l'article L 311-3 du code du tourisme en ce qu'elles prévoient que le bailleur ne pourra prétendre à aucune augmentation de loyer du fait de l'incorporation à l'immeuble des améliorations résultant de l'exécution des travaux mentionnés à l'article L 311-2 et qui concerne notamment dans le cas d'espèce, les travaux de chauffage, de climatisation, d'ascenseur, d'électricité, avant un délai de douze années compter de la date d'exécution des travaux, ne trouvent donc pas à s'appliquer .

La société locataire ne justifie d'ailleurs pas avoir, conformément aux dispositions de l'article L 311-2 précité, communiqué à la bailleresse le coût estimatif des travaux qu'elle a effectués et ne produit pas davantage devant la cour le coût final des travaux qui relèvent de la notification obligatoire prévue par l'article L 311- 2 du code du tourisme laquelle constitue une formalité substantielle dont le défaut prive le locataire d'invoquer les dispositions de l'article L 311-2 et suivants;

Il n'est cependant pas contesté que la locataire a procédé avec l'accord exprès de la bailleresse à des travaux de distribution, d'agencement et de décoration qui ont permis au même titre que les travaux soumis aux dispositions précitées d'accéder à une catégorie hôtelière supérieure et d'accroître le chiffre d'affaires, ce dont le bailleur tire immédiatement profit par l'accession des travaux en fin de bail .

Il convient en conséquence d'appliquer à la valeur locative obtenue un coefficient d'abattement de 30 % .

Aucun autre abattement tiré de l'existence de charges exorbitantes ne doit être admis à l'occasion de ce renouvellement alors que si le preneur a aux termes du bail la charge des travaux de mise aux normes, l'exécution des travaux pendant le cours du bail expiré lui vaut une remise sur le loyer renouvelé, étant souligné que la bailleresse a de son coté la charge des travaux prévus à l'article 606 du code civil.

En fonction de ce qui précède, et alors que le premier juge a justement retenu que dés lors que les locaux font l'objet de deux baux, le loyer renouvelé de chacun des deux baux devait être fixé séparément en appliquant un pourcentage tenant compte du nombre de chambres exploitées au titre de chacun des deux baux, il convient de fixer les loyers ainsi qu'il suit :

Valeur locative globale suivant la méthode hôtelière : 148 000 €

Loyer du premier bail ( partie hôtel ) :

148 000 € x 83, 59 % = 123 713, 20 € arrondie à 124 000 €

124 000 € x 30 % = 37 200 €

124 000 € - 37 200 € = 86 800 €

Loyer du second bail ( partie boutique ):

148 000 € x 16, 41% = 24 286, 80 € arrondie à 24 500 €.

Le jugement déféré sera réformé en ce qui concerne le montant des loyers des deux baux et confirmé pour le surplus, sauf en ce qui concerne la capitalisation des intérêts qui aura lieu en application de l'article 1154 du code civil .

Chaque partie conservera la charge des dépens qu'elle a exposés et il n'y a pas lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile .

PAR CES MOTIFS

Réformant le jugement déféré,

Fixe le loyer annuel du bail renouvelé entre Mme [F] et la société Victoires Opéra pour les locaux situés [Adresse 1], toutes autres clauses et conditions des baux expirés demeurant inchangées, de la façon suivante:

86 800 € pour le bail hôtel,

24 500 € pour le bail boutique ,

Dit que les intérêts au taux légal dus sur les arriérés de loyers et qui courent depuis la date de l'assignation, seront capitalisés par application de l'article 1154 du code civil.

Déboute les parties de leurs plus amples demandes,

Dit que chacune d'elles supportera les dépens qu'elle a exposés en appel .

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 13/15348
Date de la décision : 23/09/2015

Références :

Cour d'appel de Paris I3, arrêt n°13/15348 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-09-23;13.15348 ?
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