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07/09/2015 | FRANCE | N°13/20760

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 3, 07 septembre 2015, 13/20760


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 3



ARRÊT DU 07 SEPTEMBRE 2015



(n°15/ , 17 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 13/20760



Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 Août 2013 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 12/00090





APPELANTES



SA COVEA RISKS venant aux droits et obligations de la Compagnie MMA, prise en la personne de ses r

eprésentants légaux

[Adresse 2]



Association LES GLENANS, prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 9]



Représentées par Me Dominique CRESSEAUX de l'Associ...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 3

ARRÊT DU 07 SEPTEMBRE 2015

(n°15/ , 17 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/20760

Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 Août 2013 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 12/00090

APPELANTES

SA COVEA RISKS venant aux droits et obligations de la Compagnie MMA, prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 2]

Association LES GLENANS, prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 9]

Représentées par Me Dominique CRESSEAUX de l'Association LECLERE & ASSOCIÉS, avocat au barreau de PARIS, toque : R075

Assistés de Me Stéphane GAILLARD, avocat plaidant pour l'Association LECLERE & ASSOCIÉS, avocat au barreau de PARIS, toque : R075

INTIMES

Monsieur [J] [G]

[Adresse 1]

Madame [T] [X]

Bassin à [Adresse 8]

Madame [V] [L] épouse [G]

[Adresse 4]

Monsieur [C] [G]

[Adresse 4]

Représentés par Me Estelle RIGAL-ALEXANDRE, avocat au barreau de PARIS, toque : J026

Assistés de Me Agnès CHEILAN, avocat au barreau de MARSEILLE

Organisme CPAM DES BOUCHES DU RHÔNE, pris en la personne de ses représentants légaux,

[Adresse 6]

Représentée par Me Maher NEMER de la SELARL BOSSU & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : R295

Assistée de Me Mylène BARRERE, avocat plaidant pour la SELARL BOSSU & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : R295

Compagnie d'assurances MUTUELLE ASSURANCE DES INSTITUTEURS DE FRANCE - MAIF, pris en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 3]

[Adresse 5]

Représentée par Me Averèle KOUDOYOR, avocat au barreau de PARIS, toque : D1635

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 08 Juin 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Catherine COSSON, Conseillère faisant fonction de Présidente

Madame Marie-Brigitte FREMONT, Conseillère, entendue en son rapport

Madame Sophie GRALL, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Nadia DAHMANI

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Catherine COSSON, conseillère faisant fonction de présidente et par Mme Nadia DAHMANI, greffier présent lors du prononcé.

****

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [J] [G] et Mademoiselle [T] [X], tous deux adhérents de l'Association les Glénans, ont réservé le 16 février 2005 un stage de voile devant se dérouler du 30 juillet au 12 août 2005 dans le secteur de BONIFACIO en CORSE.

Le 7 août 2005, un empannage sauvage s'est produit sur le bateau '[A]' où se trouvaient Monsieur [G] et Mademoiselle [X]. Monsieur [J] [G], touché par l'écoute de la grand voile au niveau cervical droit, a été victime d`un grave traumatisme crânien avec coma initial.

Par jugement du 30 juillet 2009, le tribunal de grande instance de Paris a :

- dit que l'association Les Glénans est responsable des conséquences dommageables de l'accident dont a été victime Monsieur [J] [G],

- Avant dire droit sur l'évaluation du préjudice corporel personnel de Monsieur [J] [G], désigné le Docteur [F] en qualité d'expert,

- condamné in solidum l'association Les Glénans et son assureur la société COVEA RISKS a payer à Monsieur [J] [G] la somme de 20 000 euros à titre de provision à valoir sur la réparation de son préjudice,

- condamné in solidum l'association Les Glénans et son assureur la société COVEA RISKS à payer à Mademoiselle [T] [X] la somme de 2030,55 euros au titre de son préjudice financier et celle de 1500 euros au titre de son préjudice moral,

- condamné in solidum l'association Les Glénans et son assureur la société COVEA RISKS à payer à Monsieur [C] et Madame [V] [G] la somme de 208 459 euros au titre de leur préjudice financier,

- condamné in solidum l'association Les Glénans et son assureur la société COVEA RISKS à payer aux requérants la somme de 500 euros chacun, soit au total 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Les défendeurs ont interjeté appel de ce jugement et par un arrêt aujourd'hui définitif du 12 décembre 2011, la cour d'appel de Paris a confirmé la décision de première instance et donc la responsabilité du [Établissement 1] et renvoyé les parties devant le tribunal de grande instance de Paris concernant la liquidation des préjudices.

Le Docteur [F] a déposé son rapport le 30 avril 2010.

Il conclut à :

- des séquelles neuropsychologiques avec lenteur idéatoire, troubles de la mémoire, une désinhibition responsable d'une certaine familiarité, des modifications du caractère avec irritabilité, impulsivité, labilité émotionnelle,

- sur le plan psychique, une certaine anxiété ainsi qu'une agoraphobie,

- sur le plan neurologique, une amyotrophie de la jambe droite, une asymétrie de la commissure labiale, ainsi qu'une épilepsie post traumatique,

- un déficit fonctionnel temporaire total du 7 août 2005 au 19 octobre 2005,

- un déficit fonctionnel temporaire partiel de 66% jusqu'au 31 janvier 2007,

- un déficit fonctionnel temporaire partiel de 40% jusqu'au 7 août 2008,

- une consolidation fixée au 7 août 2008,

- une incapacité permanente partielle séquellaire de 20 %,

- des souffrances endurées de 4,5/7,

- un préjudice esthétique de 1/7,

- un préjudice d'agrément consistant en une gêne dans certaines activités de loisirs et une impossibilité de conduire jusqu'à la récupération de son permis de conduire,

- un préjudice sexuel du fait d'une gêne jusqu'à la consolidation,

- une incidence professionnelle : Monsieur [G] est apte à exercer son métier habituel mais à un niveau moindre en terme de rentabilité, efficacité, rapidité,

- des besoins en aides humaines, avant consolidation à hauteur de trois heures par jour pendant cinq mois outre une aide pour les trajets.

L'association LES GLENANS a sollicité, par requête présentée à Monsieur le Président du Tribunal de Commerce d'Ajaccio, l'application de la Convention de Londres de 1976 et des articles L5121-3 et suivants du code des transports qui permettent au propriétaire d`un navire de limiter sa responsabilité lorsque les dommages se sont produits à bord du navire, en constituant un fonds d'indemnisation, destiné à la réparation des sinistres matériels et/ou corporels causés par celui-ci.

Par ordonnance rendue en date du 14 août 2012, Monsieur le Président du Tribunal de Commerce d'AJACCIO a fait droit à cette demande, puis par ordonnance du 4 février 2013, il a dit que le plafond d'indemnisation applicable s'établissait à 1 000 000 de DTS.

Par jugement du 1er août 2013, le tribunal de grande instance de Paris a:

Reçu l'intervention volontaire de la MUTUELLE ASSURANCE DES INSTITUTEURS DE FRANCE;

Dit que la Convention de LONDRES du 19 novembre 1915 est applicable au litige;

Dit que le plafond d'indemnisation concernant le sinistre du 7 août 2005 s'établit à la somme de 1 million de DTS;

Condamné in solidum l'association [Établissement 1] et la société COVEA RISKS à payer à Monsieur [J] [G] la somme de 39 134,22 € au titre de son préjudice patrimonial;

Condamné in solidum l'association [Établissement 1] et la société COVEA RISKS à payer à Monsieur [J] [G] la somme de 83 566 € au titre de son préjudice extra-patrirnonial;

Condamné in solidum l'association [Établissement 1] et la société COVEA RISKS à payer à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES DU RHONE la somme de 74 510,61 € au titre des dépenses de santé et des indemnités journalières et la somme de 164 332,11 € au titre au titre de la rente invalidité et des arrérages échus;

Déclaré irrecevable la demande de Madame [T] [X];

Condamné in solidum l'association [Établissement 1] et la société COVEA RISKS a payer à Madame [V] [G] et Monsieur [C] [G] la somme de 3 000€ chacun au titre de leur préjudice moral;

Condamné in solidum l'association [Établissement 1] et la société COVEA RISKS à payer à la MUTUELLEASSURANCE DES INSTITUTEURS DE FRANCE la somme de 10 671,39 € au titre de son recours subrogatoire ;

Dit que dans l'hypothèse où, à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par le jugement a intervenir, l'exécution forcée devra être réalisée par l'intermédiaire d'un huissier, le montant des sommes retenues par celui-ci en application du tarif des huissiers devra être supporté par le débiteur en sus de l'indemnité allouée au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

Condamné in solidum l'association [Établissement 1] et la société COVEA RISKS à payer sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à Madame [V] [G] et Monsieur [C] [G] la somme de 800€ chacun, à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES DU RHONE et a la MUTUELLE ASSURANCE DES INSTITUTEURS DE FRANCE la somme de 1000 € chacune et à Monsieur [J] [G] la somme de 2 500€;

Condamné in solidum l'association [Établissement 1] et la société COVEA RISKS aux dépens, autorisation étant donnée aux avocats qui en ont fait la demande de recouvrer les dépens conformément à l'article 699 du Code de Procédure Civile;

Ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.

La SA COVEA RISKS et l'association Les Glénans ont relevé appel du jugement.

Dans leurs dernières conclusions signifiées le 1er avril 2014, ils demandent à la cour de :

'A titre préliminaire,

- CONFIRMER le Jugement en ce qu'il a déclaré applicable la Convention de LONDRES,

- CONFIRMER également le Jugement en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à cumuler les plafonds d'indemnisation prévus par cette convention, seules des créances corporelles étant invoquées en l'espèce,

- LE REFORMER pour le surplus et statuant à nouveau :

- CONSTATANT que l'application rétroactive du Décret n° 2007-1379 emporterait une privation de propriété au sens des dispositions de l'article 1er du 1er protocole additionnel à la CESDHLF,

- DIRE ET JUGER que la jurisprudence de la Cour de cassation du 28 mai 1991 est contraire à l'article 1er du 1er protocole additionnel à la CESDHLF,

- DIRE ET JUGER par conséquent que, conformément au droit commun de la responsabilité civile, seule la loi en vigueur à la date du fait générateur, soit le 7 août 2005, est applicable,

- DIRE ET JUGER dès lors que la responsabilité de l'association Les Glénans est limitée à 166.500 DTS,

A titre principal, sur les préjudices:

Sur les préjudices de Monsieur [J] [G] :

Préjudices patrimoniaux

- Dépenses de santé actuelles :

- REFORMER le jugement entrepris :

- CONSTATANT que Monsieur [G] ne fournit aucun justificatif relatif aux prétendues séances de psychothérapie et que les honoraires liés au bilan neuropsychologique réalisé en avril 2010 ont été exposés par la MAIF,

- LE DEBOUTER intégralement de ses demandes,

- Pertes de gains professionnels actuels :

- REFORMER le Jugement entrepris et, statuant à nouveau,

- DIRE ET JUGER que Monsieur [G] a subi un préjudice de :

* 4.963,67 euros au titre des pertes de salaire,

* 624,79 euros au titre des pertes de retraite complémentaire et de retraite par capitalisation,

- FIXER dès lors à 5.588,46 euros les pertes de gains professionnels actuels,

- Aide humaine :

- REFORMER le jugement et, statuant à nouveau :

- CONSTATANT que le Docteur [F] Expert, a retenu, sur les seuls déclarations de Monsieur [G], la nécessité d'une aide humaine qui a été apportée par Mademoiselle [T] [X], alors la compagne de Monsieur [G], à hauteur de 3 heures par jour du 20 octobre 2005 au 20 mars 2006,

- ACCORDER à ce titre une somme de 3.600 euros sur la base d'un taux horaire de 8 euros de l'heure, s'agissant d'une aide familiale, à défaut une somme de 4.197,60 euros sur la base d'un taux horaire de 8,48 euros augmenté de 10% au titre des congés payés conformément aux dispositions de la Convention Collective du Particulier Employeur,

- [Localité 1] divers :

- CONFIRMER le jugement en ce qu'il a accordé une somme de 809,97 euros au titre des frais de transport et des frais liés aux examens devant la Commission préfectorale des Permis de Conduire, selon justificatifs fournis,

- DEBOUTER Monsieur [G] de sa demande au titre des honoraires du Docteur [O], pris en charge par la MAIF,

- Dépenses de santé futures :

- CONFIRMER le Jugement qui a accordé à Monsieur [G] un capital de 1.292,26 euros au titre du traitement anti-comitial,

- Perte de Gains Professionnels Futurs :

- REFORMER le Jugement entrepris et, statuant à nouveau,

- CONSTATER que Monsieur [G] a conformément aux conclusions du Professeur [F], Expert judiciaire, conservé la capacité d'exercer le même emploi qu'avant l'accident, à temps plein, repris, depuis la fin de l'année 2008, un travail à temps plein, et démissionné, en octobre 2008, de son poste au sein de la Société SOLVAY et rejoint la Société CETAQUA en Espagne,

- CONSTATANT en outre et en tout état de cause que la différence entre les revenus anciennement perçus en FRANCE par Monsieur [G] et ceux actuellement perçus en ESPAGNE, qui se chiffre à 5.229 euros par an, résulte du fait que les salaires versés en ESPAGNE sont nets d'impôts sur les revenus, ce pays pratiquant la retenue fiscale à la source, ce qui n'est pas le cas en FRANCE,

- DIRE ET JUGER en conséquence que :

* le changement d'emploi de Monsieur [G] résulte d'un choix purement personnel, sans aucun lien avec l'accident du 7 août 2005,

* en tout état de cause, qu'il n'en résulte aucune perte de revenus pour lui,

- DEBOUTER dès lors Monsieur [G] de sa demande, mal fondée, à ce titre,

- SUBSIDIAIREMENT, limiter l'indemnisation du demandeur à la somme offerte dans le cadre des présentes sous forme d'une rente temporaire, limitée à 65 ans,

- Incidence professionnelle :

- REFORMER le Jugement entrepris et fixer l'incidence professionnelle subie par Monsieur [G] à 15.000 euros et, subsidiairement, 30.000 € si la Cour devait retenir l'existence de PGPF,

Préjudices extrapatrimoniaux

- Déficit Fonctionnel Temporaire : CONFIRMATION : 9.566 euros,

- Pretium Doloris : CONFIRMATION : 15.000 euros,

- Déficit Fonctionnel Permanent : REFORMATION : 40.000 euros,

- Préjudice Esthétique : CONFIRMATION : 1.500 euros,

- Préjudice d'Agrément : REFORMATION : 5.000 euros,

Sur les demandes formées par Mademoiselle [X]

- CONFIRMER le Jugement en ce qu'il a rejeté ses demandes comme se heurtant à l'autorité de chose jugée attachée au Jugement du 30 juillet 2009,

Sur les demandes formées par Monsieur et Madame [C] [G], père et mère de [J] [G]

- REFORMER le Jugement entrepris et fixer à 1.500 euros chacun le préjudice moral de Monsieur et Madame [C] [G],

Sur les demandes formées par la CPAM

- CONFIRMER le Jugement en ce qu'il a fait droit à la demande à hauteur de 74.510,61 euros, au titre des indemnités journalières servies et des frais d'hospitalisation pris en charge,

- LE REFORMER pour le surplus et :

- CONSTATANT que, conformément aux conclusions expertales, Monsieur [G] reste apte à exercer le même emploi que précédemment, à temps plein,

- DIRE ET JUGER que le versement d'une rente d'invalidité n'est pas une conséquence de l'accident du 7 août 2005,

- DEBOUTER dès lors la CPAM de sa demande à ce titre,

Sur les demandes formées par la MAIF

- CONFIRMER le Jugement en ce qu'il a accordé à la MAIF, conformément aux justificatifs produits, une somme de 10.671,39 euros et, ajoutant à la décision de première instance, précisera que cette somme sera déduite de celles revenant à Monsieur [G] au titre des préjudices qu'elle a contribué à indemniser,

En tout état de cause,

- STATUER ce que de droit sur les dépens,

- REJETER les demandes présentées au titre de l'article 700 du CPC.'

Par dernières conclusions signifiées le 20 mars 2014 Monsieur [J] [G] Mademoiselle [T] [X], Madame [V] [L] épouse [G], et Monsieur [C] [G] demandent à la cour de :

'Réformer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré applicable la Convention de LONDRES,

Dire que la Convention de LONDRES du 19 novembre 1976 n'est pas applicable en l'espèce.

Débouter en conséquence les appelants de leur demande de limitation de leur responsabilité.

A titre subsidiaire et en tout état de cause,

Vu l'article 4 de la convention de Londres et l'article L5121-3 du code des transports,

Dire et juger que le dommage subi par les concluants résulte du comportement téméraire du moniteur du centre nautique les GLENANS qui avait nécessairement conscience qu'un tel dommage en résulterait probablement.

Dire et juger que la limitation du montant de sa responsabilité par l'Association les GLENANS et son assureur COVEA RISKS n'est pas opposable à Monsieur [J] [G], Mademoiselle [T] [X], Madame [V] [G] et Monsieur [C] [G] concernant l'indemnisation de leurs préjudices résultant de l'accident survenu le 7 août 2005 sur le voilier « [A] ».

En conséquence, dire n'y avoir lieu à la constitution d'un fonds d'indemnisation.

A titre encore plus subsidiaire,

Confirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit qu'en application des dispositions en vigueur au jour du prononcé de la décision, le plafond d'indemnisation s'établit à la somme de 1 million de DTS,

A titre très infiniment subsidiaire,

Dire que le plafond d'indemnisation s'établit à 250 000 DTS outre intérêts ayant courus depuis la date de l'accident,

Vu le rapport d'expertise judiciaire du Docteur [F] du 30 avril 2010,

Fixer le préjudice de Monsieur [J] [G] et son droit à indemnisation comme suit:

1) les préjudices patrimoniaux

a) Les préjudices patrimoniaux temporaires (avant consolidation)

- dépenses de santé actuelles : 810 euros

- perte de gains professionnels actuels : 13069 euros

- frais divers :

' frais de transport : 809,97 euros

' aides humaines : 6885 euros

b) Les préjudices patrimoniaux permanents

- dépenses de santé futures : 1292,26 euros

- perte de gains professionnels futurs : 171 545,17 euros

- incidence professionnelle : 80 000 euros

2) les préjudices extra-patrimoniaux

a) Les préjudices extra-patrimoniaux temporaires (avant consolidation)

- le déficit fonctionnel temporaire : 11 291, 50 euros

- souffrances endurées : 18 000 euros

b) Les préjudices extra-patrimoniaux permanents

- le déficit fonctionnel permanent : 48 000 euros

- le préjudice esthétique permanent : 1800 euros

- le préjudice d'agrément : 20 000 euros

Condamner le [Adresse 7] et son assureur COVEA RISKS à payer à Mademoiselle [X] la somme de 19 347,78 euros en réparation de sa perte de revenus et des droits à retraite.

Condamner les appelants à payer à Madame [V] [G] et à Monsieur [C] [G] la somme de 5000 ! chacun en réparation de leur préjudice moral.

Dire et juger que ces sommes porteront intérêt au taux légal à compter du jour de la décision à intervenir.

Débouter les appelants de leurs demandes, fins et conclusions.

Déclarer l'arrêt opposable à la CPAM des Bouches-du-Rhône.

Condamner le [Adresse 7] et son assureur COVEA RISKS à payer la somme de 1.000€ chacun à Mademoiselle [X], Monsieur [C] [G] ET Madame [V] [G] et la somme de 4 000€ à [J] [G] en application des dispositions de l'article 700 du CPC, ainsi qu'aux entiers dépens.'

Les offres et demandes faites au titre de l'indemnisation de Monsieur [J] [G] sont reprises dans le tableau suivant :

OFFRES

DEMANDES

Préjudices patrimoniaux

¿ temporaires:

-dépenses de santé actuelles:

* demeurées à la charge de la victime:

Rejet

810€

-frais divers restés à la charge de la victime :

809,97€

809,97€

- tierce personne:

3.600€ Subsidiairement 4197,60€

6.885€

-perte de gains professionnels actuels:

5.588,46€

13.069€

¿ permanents:

-dépenses de santé futures:

* à la charge de la victime:

1.292,26€

1.292,26€

-perte de gains professionnels futurs:

Rejet

171.545,17€

-incidence professionnelle:

15.000€ Subsidiairement PGPF+IP:30.000€

80.000€

Préjudices extra-patrimoniaux:

¿ temporaires:

-déficit fonctionnel temporaire :

9.566€

11.291,50€

-souffrances:

15.000€

18.000€

¿ permanents:

-déficit fonctionnel permanent :

40.000€

48.000€

- préjudice d'agrément:

5.000€

20.000€

-préjudice esthétique:

1.500€

1.800€

Art.700 du CPC:

Rejet

4.000€

Par dernières conclusions du 1er septembre 2014, la CPAM des Bouches du Rhône a demandé à la cour de :

CONFIRMER le jugement en toutes ses dispositions à l'égard de la CPAM, sauf à tenir compte de l'actualisation de la créance de la caisse,

CONDAMNER solidairement l'Association Les Glénans et son assureur COVEA RISKS à verser à la CPAM DES BOUCHES DU RHONE la somme de 119.987,10 €, au titre des dépenses déjà exposées par la caisse, toutes réserves étant faites pour les prestations non connues à ce jour et pour celles qui pourraient être versées ultérieurement,

CONDAMNER en outre solidairement l'Association Les Glénans et son assureur COVEA RISKS à verser à la CPAM DES BOUCHES DU RHONE les arrérages à échoir de la rente accident du travail, au fur et à mesure de leur engagement, pour un capital représentatif s'élevant à la somme de 119.421,36 €, avec intérêt de droit à compter de leur engagement ou du jugement de première instance si le tiers opte pour un versement en capital,

CONDAMNER tous succombants solidairement à payer à la CPAM des Bouches du Rhône la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du CPC outre à prendre en charge les dépens d'appel dont recouvrement au profit de la SELARL BOSSU ET ASSOCIES conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC.

Par dernières conclusions du 13 mars 2014, la MAIF, qui est l'assureur de Monsieur [J] [G] et intervient subrogé dans les droits de ce dernier en application du contrat RAQVAM Sérénité, demande à la cour de :

Confirmer dans son intégralité le jugement rendu le 01/08/2013 par le Tribunal de Grande Instance de Paris,

En conséquence,

Condamner in solidum l'Association Les Glénans et COVEA RISKS à lui payer la somme de 10 671,39 € au titre de son recours subrogatoire,

Y ajoutant,

Condamner in solidum l'Association Les Glénans et COVEA RISKS à lui verser la somme de 4000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

Condamner in solidum l'Association Les Glénans et COVEA RISKS aux entiers dépens de l'instance qui seront recouvrés par Maître KOUDOYOR Averèle suivant les dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

CELA ÉTANT EXPOSÉ, LA COUR :

Sur l'application de la convention de Londres

La limitation de responsabilité en matière de créances maritimes prévue par l'article 2 de la Convention de Londres du 19 novembre 1976, n'est opposable, selon les consorts [G]-[X], aux termes des articles 7 et 3, qu'aux passagers ou aux tiers, et non aux membres de l'équipage.

Invoquant l'absence d'un contrat de transport, ils soutiennent qu'en faisant un stage de voile Monsieur [J] [G] et Mademoiselle [T] [X] faisaient partie de l'équipage du voilier puisqu'ils effectuaient des manoeuvres à bord du navire ; qu'ils avaient donc la qualité d'équipiers et en cette qualité, ne peuvent se voir opposer la limitation de responsabilité prévue par la convention de Londres.

Le [Établissement 1] et la société COVEA RISKS répliquent que Monsieur [G] et Mademoiselle [X] n'avaient pas la qualité d' 'assistants' au sens de l'article 1er -3° de la convention ni celle de 'membres de l'équipage' puisqu'ils n'avaient pas celle de marin, profession réglementée par les dispositions de l'article L.5521-1 du code des Transports. Ils concluent à l'application du principe de limitation de responsabilité du propriétaire du navire posé par l'article 2 de la Convention de Londres.

L'article 3 de la Convention de Londres dispose que ses règles ne s'appliquent pas « aux créances des préposés du propriétaire du navire ou de l'assistant dont les fonctions se rattachent au service du navire ou aux opérations d'assistance ou de sauvetage ainsi qu'aux créances de leurs héritiers, ayants cause ou autres personnes fondées à former de telles créances si, selon la loi régissant le contrat d'engagement conclu entre le propriétaire du navire ou l'assistant et les préposés, le propriétaire du navire ou l'assistant n'est pas en droit de limiter sa responsabilité relativement à ces créances ou si, selon cette loi, il ne peut le faire qu'à concurrence d'un montant supérieur à celui prévu à l'article 6 ».

L'article 1er -3° de la Convention définit les assistants comme :

« toute personne fournissant des services en relation directe avec les opérations d'assistance ou de sauvetage. Ces opérations comprennent également celles que vise l'article 2, paragraphe 1, alinéa d, e et f. »

Monsieur [J] [G] et Mademoiselle [T] [X] ayant souscrit un contrat de stage de voile avec le Centre Nautique des Glénans, n'avaient pas, en naviguant sur le bateau '[A]', la qualité d'assistant ni celle de préposé du propriétaire telle que définie par l'article susvisé.

Par ailleurs l'article L5121-4 du code des Transports dispose :

' La limitation de responsabilité n'est pas opposable :

1° Aux créances d'indemnité d'assistance, de sauvetage, ou de contribution en avarie commune ;

2° Aux créances du capitaine et des autres membres de l'équipage nées de l'embarquement ;

3° Aux créances de toute autre personne employée à bord en vertu d'un contrat de travail ;

4° Aux créances de l'Etat ou de toute autre personne morale de droit public qui aurait, au lieu et place du propriétaire, renfloué, enlevé, détruit ou rendu inoffensif un navire coulé, naufragé, échoué ou abandonné, y compris tout ce qui se trouve ou s'est trouvé à bord.'

Pour avoir la qualité de membre de l'équipage, les articles L5521-1 et suivants du même code énumèrent sous le Titre 2 dénommé ' L'EQUIPAGE' les conditions nécessaires d'accès et d'exercice de la profession de marin (conditions d'aptitude médicale et de formation professionnelle), que ne présentaient pas Monsieur [J] [G] et Mademoiselle [T] [X] alors qu'ils se trouvaient sur le voilier, même si Monsieur [G] était à la barre, exécutant les ordres du moniteur au moment de l'empannage.

En conséquence, la limitation de responsabilité est applicable en vertu des dispositions de l'article 3 de la Convention de Londres et de l'article L5121-4 du code des Transports.

Le jugement est confirmé sur ce point.

Sur la faute inexcusable du propriétaire du navire

Les consorts [G]-[X] se prévalent des dispositions de l'article 4 de la Convention de Londres, reprises par l'article L5121-3 du Code des transports, aux termes desquelles « Une personne responsable n'est pas en droit de limiter sa responsabilité s'il est prouvé que le dommage résulte de son fait ou de son omission personnels, commis avec l'intention de provoquer un tel dommage ou commis témérairement et avec conscience qu'un tel dommage en résulterait probablement », pour soutenir que le moniteur du [Établissement 1] a commis une faute inexcusable en laissant la barre à un stagiaire épuisé et insuffisamment expérimenté et en prenant la décision de naviguer sous grand voile par vent arrière.

Le [Établissement 1] conteste cette argumentation, rappelant qu'aucune faute intentionnelle ne saurait être retenue à son encontre, et qu'il ne peut être recherché que sur le fondement de sa responsabilité de plein droit du fait de son préposé.

Si une faute d'imprudence peut être reproché au moniteur Monsieur [W] qui a pris le risque de quitter le mouillage en hissant la grand-voile, sous un vent fort, et en confiant la barre à un stagiaire inexpérimenté, aucune faute personnelle et intentionnelle ou inexcusable requise par les textes susvisés n'est caractérisée à l'encontre du propriétaire du navire.

En conséquence, les causes d'exclusion du principe de limitation de responsabilité ne s'appliquant pas en l'espèce, l'Association [Établissement 1], propriétaire du navire « [A] » comme son assureur, COVEA RISKS, sont en conséquence bien fondés à voir limiter leur responsabilité au regard des dispositions de l'article 2 et 4 de la Convention de Londres.

Le jugement est aussi confirmé sur ce point.

Sur le plafond de limitation applicable

La Convention de LONDRES a fait l'objet d'un avenant conclu le 2 mai 1996, qui rehausse les plafonds de limitation de la responsabilité des propriétaires de navires d'une jauge inférieure à 500 tonneaux, de 166.500 DTS prévus par le texte de la Convention dans sa rédaction initiale du 19 novembre 1976, à 1.000.000 DTS.

Rappelant que la loi applicable en matière de responsabilité civile extracontractuelle est, à l'exclusion de toute autre, celle en vigueur au jour du fait générateur soit, en l'espèce, l'accident survenu à bord du « [A] » le 7 août 2005, et que l'avenant du 2 mai 1996 a été introduit en droit interne par un décret n° 2007-1379 du 22 septembre 2007, le Centre Nautique Les Glénans et son assureur, COVEA RISKS soutiennent que le plafond de limitation applicable est celui prévu par la Convention dans sa rédaction en vigueur en France le 7 août 2005, soit 166.500 DTS.

Ils ajoutent que si l'augmentation rétroactive de la responsabilité du propriétaire de navire doit s'appliquer, elle s'analyse en une privation de propriété au sens de l'article 1er du protocole n° 1 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de L'Homme et des Libertés Fondamentales. Ils font valoir que la Cour Européenne a déjà statué en ce sens en constatant que l'application d'une loi de 2002 réduisant de manière rétroactive l'étendue de la créance d'indemnisation détenue par les parents d'enfants handicapés nés avant l'entrée en vigueur de ce texte, avait entraîné une ingérence dans l'exercice des droits de créance en réparation. Ils demandent donc à la cour de constater l'incompatibilité de l'application rétroactive du décret n° 2007-1379 du 22 septembre 2007 introduisant en droit interne l'avenant du 2 mai 1996 à la Convention de Londres avec la Convention Européenne des Droits de L'Homme et de retenir une limitation de responsabilité à hauteur de 166.500 DTS.

Les consorts [G]-[X] répliquent que le fonds de limitation est régi non par la loi en vigueur à la date où les dommages ont été causés, ni par celle en vigueur à la date du dépôt de la requête en constitution du fonds, mais par la loi en vigueur à la date où le juge rend son ordonnance ouvrant la procédure de constitution du fonds, soit 1.000.000 DTS.

Le fonds de limitation de responsabilité, dont la procédure de constitution est ouverte par une ordonnance du Président du Tribunal de Commerce, est régi par la loi en vigueur, non pas à la date où les dommages ont été causés par l'événement de mer à la suite duquel il a été constitué, ou du dépôt de la requête formée par le propriétaire du navire, mais à la date où l'ordonnance a été rendue. En l'espèce, l'ordonnance ouvrant la procédure de constitution du fonds a été rendue le 14 août 2012 par le Président du Tribunal de Commerce d'Ajaccio, après l'entrée en vigueur du décret n°2007-1379 du 22 septembre 2007 introduisant en droit interne l'avenant du 2 mai 1996 à la Convention de Londres.

De surcroît, l'application de la loi en vigueur n'est pas contraire à l'article 1er du protocole n° 1 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de L'Homme et des Libertés Fondamentales, puisqu'elle ne conduit pas à priver d'une créance en réparation l'Association [Établissement 1], laquelle est au contraire débitrice d'une telle créance à l'égard des victimes du dommage en mer.

C'est donc le plafond de limitation à 1.000.000 DTS qui est applicable en l'espèce et le jugement est confirmé sur ce point.

Sur le préjudice corporel:

Au vu des éléments médicaux et de l'ensemble des pièces versées aux débats, le préjudice corporel de Monsieur [J] [G] qui était âgé de 28 ans (né le [Date naissance 1] 1976) lors de l'accident et occupait l'emploi d'ingénieur chercheur, sera indemnisé comme suit, étant précisé que lorsqu'une capitalisation sera nécessaire, le barème publié par la Gazette du Palais en 2004 au taux d'intérêts de 3,20% sera utilisé, conformément à la demande de la victime.

Préjudices patrimoniaux:

¿ temporaires, avant consolidation:

- dépenses de santé actuelles:

Elles ont été prises en charge par la CPAM pour un montant de 41.374,70€ selon relevé des débours pour la période du 6/08/2005 au 30/11/2006 .

La victime justifie par l'attestation de Madame [D] [R] psychologue qu'elle a bénéficié de 27 séances de psychothérapie à 30€ la séance. Ce préjudice a été exactement indemnisé par la somme de 810€ au titre des frais restés à sa charge.

- frais divers:

Cette disposition du jugement, acceptée par les parties, sera confirmée à hauteur de 809,97€.

- tierce personne temporaire:

Le besoin en aide humaine a été évalué par l'expert à 3 heures par jour à compter de son retour du centre de rééducation le 19 octobre 2005, pendant une durée de 5 mois.

Ce préjudice sera donc réparé comme suit, au taux horaire retenu de 13€ :

151 jours x 3h x 13€ = 5.889€

-perte de gains professionnels actuelle :

Au jour du dommage, Monsieur [J] [G] bénéficiait d'un contrat de travail à temps plein en qualité d'ingénieur chargé de recherches au sein de la société SOLVAY. A compter du 1er octobre 2007 il a repris son poste à temps partiel de 60% et a perçu de la CPAM une pension d'invalidité 1ère catégorie annuelle de 6.895,29€.

Il verse aux débats une évaluation des pertes financières effectuée par le responsable des ressources humaines de la société SOLVAY, qui a basé son estimation sur un revenu à temps plein et pris en compte le versement de la pension d'invalidité par la CPAM des Bouches du Rhône.

Le [Établissement 1] et la société COVEA RISKS s'opposent à la demande en remboursement de la rente d'invalidité en soutenant que Monsieur [J] [G] est apte à exercer son activité professionnelle à temps plein et qu'en conséquence la rente d'invalidité n'est pas justifiée par les conséquences de l'accident du 7 août 2005.

La CPAM des Bouches du Rhône verse aux débats une attestation d'imputabilité de la créance de la CPAM des Bouches du Rhône datée du 26/04/2012.

En vertu des dispositions des articles L.341-3 et L.341-4 du code de la sécurité sociale, la pension d'invalidité 1ère catégorie est versée aux personnes capable d'exercer une activité professionnelle rémunérée. La pension versée par la CPAM à Monsieur [G] n'est donc pas incompatible avec l'activité professionnelle qu'il exerce. Les arrérages et la pension d'invalidité versés par l'organisme social en lien de causalité avec l'accident, seront donc déduits des pertes de gains actuels et futurs.

Ainsi la perte de revenus actuels de la victime doit se calculer comme suit :

* du 9 août 2005 au 30 septembre 2007, Monsieur [J] [G] a perçu des indemnités journalières d'un montant total de 33.135,91€ et n'a subi aucune perte de revenus;

* du 1er octobre 2007 au 7 août 2008 date de consolidation, selon l'évaluation produite, la victime a subi une perte de salaire annuelle de 14.442€ (sans comptabiliser la pension d'invalidité perçue comme le fait l'employeur), une perte annuelle de droits à la retraite complémentaire de 168€ et une perte annuelle d'épargne retraite de 553€, étant précisé que s'agissant d'une perte de gains actuelle, ni la perte de droits à la retraite ni la perte d'épargne retraite ne seront capitalisées comme le demande la victime:

15.163€ x 10,22/12 mois = 12.913,82€ dont il y a lieu de déduire la somme de 5.773,02€ (6.895,29€ x 10,22/12) au titre de la pension d'invalidité versée par la CPAM des Bouches du Rhône, de sorte qu'il revient à la victime l'indemnité complémentaire de 7.140,80€.

¿ permanents, après consolidation:

- dépenses de santé futures:

Les parties s'accordent pour voir fixer les dépenses restées à la charge de Monsieur [J] [G], au titre du traitement anti-comitial que nécessite son état, à la somme viagère de 1.292,26€, après capitalisation de la somme annuelle de 55,79€.

Cette disposition du jugement sera donc confirmée.

-perte de gains professionnels futurs:

Monsieur [J] [G] expose qu'il a été contraint de démissionner de son emploi chez Solvay car ses relations avec les autres membres de son équipe, et particulièrement avec son chef d'équipe, étaient devenues très difficiles après son accident. Il a retrouvé un emploi en Espagne comme ingénieur dans la société Cetaqua, chargée du traitement des eaux.

Il soutient avoir subi une perte de revenus annuelle de 7.406€, qu'il capitalise de façon viagère selon le barème de capitalisation de la Gazette du Palais 2004, pour solliciter la somme de 171.545,17€.

Le [Établissement 1] et la société COVEA RISKS s'opposent à cette demande en faisant valoir que ce changement d'emploi résulte d'un choix personnel de Monsieur [J] [G], que la rémunération qu'il perçoit en Espagne est nette d'impôts sur le revenu et qu'il ne justifie donc pas d'une perte de revenus. Subsidiairement, si des pertes de revenus étaient avérées, ils demandent que l'indemnisation soit calculée jusqu'à l'âge de 65 ans, et soit versée sous forme de rente trimestrielle ou annuelle.

Les attestations de collègues de travail de Monsieur [J] [G] versées aux débats démontrent que lorsqu'il est revenu travailler à temps partiel après son accident, il présentait des troubles de comportement et de l'humeur ayant engendré de fortes tensions dans son milieu professionnel, compatibles avec les séquelles neuropsychologiques suivantes décrites par l'expert: une désinhibition responsable d'une certaine familiarité, des modifications du caractère avec irritabilité, une impulsivité. Sa démission de la société Solvay est donc en lien avec l'accident.

Le poste à temps plein qu'il occupe depuis novembre 2008 au sein de la société barcelonaise Cetaqua, lui a rapporté en 2009 des revenus annuels bruts de 37.402,52€, soit la somme nette de 30.903€, après déduction des sommes correspondant aux cotisations sociales et à l'impôt sur le revenu, le système d'imposition fiscal espagnol en vigueur étant le prélèvement à la source.

L'évaluation faite par le responsable des ressources humaines de la société Solvay fixe le montant des ressources qu'il aurait dû percevoir en 2008 s'il avait travaillé à taux plein à la somme de 38.309€ nets, outre une participation bloquée sur 5 ans de 1.961€, et à la somme de 36.132€ après simulation de la déduction de l'impôt sur le revenu et des cotisations CSG/CRDS.

Ainsi est avérée une perte de revenus annuelle de 36.132 - 30.903 = 5.229€.

Considérant qu'il subira cette perte de façon viagère pour tenir compte de la perte de gains à la retraite, il convient de capitaliser cette somme selon l'euro de rente pour un homme de 34 ans au jour de la consolidation :

5.229 x 23,163 = 121.119,32€

De cette somme il y a lieu de déduire le reliquat de la pension d'invalidité versée par la CPAM qui s'élève à 39.703,47 € (45.476,49 € - 5.773,02€) en ce qui concerne les arrérages échus au 1er août 2014 et 119.421,36 € en ce qui concerne le capital représentatif des arrérages à échoir au 1er août 2014, soit un total de 159.124,83€, de sorte qu'il ne revient aucune indemnité complémentaire à la victime, que la CPAM recevra la somme de 121.119,32€ et qu'il reste à imputer 38.005,51€.

- incidence professionnelle :

L'expert [F] a décrit les séquelles neuropsychologiques conservées par la victime, et notamment une lenteur idéatoire, des troubles de la mémoire, qui, même si elles ne l'ont pas empêché de reprendre son activité professionnelle, ont des conséquences en terme de rentabilité, d'efficacité et de rapidité. Monsieur [J] [G] ressent aussi une plus grande fatigabilité : son poste a d'ailleurs été aménagé par son employeur pour qu'il puisse travailler à domicile un jour par semaine.

Sa créativité a aussi été affectée, car après avoir été à l'origine de deux brevets avant l'accident, sa capacité d'innovation a diminué, voire même disparu.

Il est indéniable que la minoration de ses performances, pour un chercheur, est de nature à ralentir son évolution de carrière, et que l'accident l'a empêché de poursuivre la carrière à laquelle il pouvait prétendre et de percevoir les émoluments en découlant.

Ce préjudice a été exactement indemnisé par l'allocation de la somme de 80.000€ dont il y a lieu de déduire le solde de la pension d'invalidité pour 38.005,51€ qui reviennent à la CPAM des Bouches du Rhône et la victime recevra la somme de 41.994,49€.

Préjudices extra-patrimoniaux:

¿ temporaires, avant consolidation:

- déficit fonctionnel temporaire:

L'incapacité fonctionnelle totale ou partielle subie par la victime durant la maladie traumatique pour la période antérieure à la date de consolidation ainsi que sa perte de qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante, la privation de ses activités privées et son préjudice sexuel soufferts durant cette même période seront indemnisés par la somme de 10.895€.

-souffrances:

Elles ont été exactement indemnisées par la somme de 15.000€.

-préjudice esthétique temporaire:

Il convient de confirmer la somme allouée par les premiers juges qui répare ce poste de préjudice à hauteur de 1.500€.

¿ permanents, après consolidation:

-déficit fonctionnel permanent :

Les séquelles décrites par l'expert et conservées par Monsieur [J] [G] après la consolidation de son état, entraînent non seulement des atteintes aux fonctions physiologiques mais également des douleurs ainsi qu'une perte de qualité de vie et des troubles dans les conditions d'existence, personnelles, familiales et sociales, qui justifient, pour une victime âgée de 32 ans lors de la consolidation de son état, la somme de 48.000€.

Cette disposition du jugement sera confirmée.

-préjudice d'agrément:

Les activités musicales auxquelles la victime prétend qu'elle s'adonnait ne sont pas démontrées.

Par contre est produite l'attestation de Monsieur [Y] [M], dont il ressort que Monsieur [J] [G] pratiquait la randonnée pédestre en montagne et qu'il a dû abandonner cette activité en autonomie. Monsieur [G] rencontre aujourd'hui une limitation et une gêne dans l'exercice de cette activité sportive liées à un manque d'équilibre lorsqu'il se trouve en terrain difficile ou instable.

Il lui sera attribué de ce chef, une indemnité de 8.000€.

-préjudice esthétique permanent:

Ce préjudice a été exactement réparé par l'allocation de la somme de 1.500€.

Le préjudice corporel de Monsieur [J] [G] s'élève à la somme totale de 136.031,52 €.

Sur la demande de la CPAM

Il sera alloué à la CPAM des Bouches du Rhône la somme de 119.987,10€ au titre des dépenses déjà exposées (41.374,70 +33.135,91+5.773,02 + 39.703,47), ainsi que les arrérages à échoir de la rente accident du travail, au fur et à mesure de leur engagement, pour un capital représentatif s'élevant à la somme de 119.421,36€, augmenté des intérêts au taux légal à compter du jour de la demande en application de l'article 1153 du Code civil.

Sur les demandes de Mademoiselle [T] [X]

Mademoiselle [T] [X] sollicite l'allocation de la somme de 9.831,53€ au titre d'un préjudice économique qu'elle déclare avoir subi du 16/09/2005 au 31/08/2006, après avoir réduit son activité d'enseignante pour apporter à son compagnon Monsieur [G] l'aide humaine dont il avait besoin.

Le [Établissement 1] et la société COVEA RISKS s'opposent à cette demande au motif que les préjudices de Mademoiselle [T] [X] ont déjà été indemnisés par jugement du Tribunal de Grande Instance de Paris du 10 juillet 2009 et Mademoiselle [X] réplique à cet argumentation en soutenant qu'elle a sollicité réformation de ce jugement par conclusions du 4/04/2011 devant la Cour d'Appel de céans.

Par jugement du 10 juillet 2009, confirmé en toutes ses dispositions par arrêt de la présente cour du 12 décembre 2011, le Tribunal de Grande Instance de Paris a statué sur le préjudice de Mademoiselle [T] [X] en indemnisant ses frais de transport et son préjudice moral et en la déboutant de sa demande au titre de la perte de revenus. Cette décision revêt aujourd'hui l'autorité de la chose jugée et sa réformation ne peut plus être sollicitée.

Cette demande est donc irrecevable.

Sur les demandes de Monsieur [C] [G] et Madame [V] [L] épouse [G]

Le préjudice moral subi par les parents de Monsieur [J] [G] doit être indemnisé par la somme de 1.500€ chacun.

Sur les demandes de la MAIF

Il est justifié par les quittances subrogatoires produites que la MAIF a versé à son assuré la somme totale de 10.671,39€ en vertu d'un contrat d'assurance Raqvam Sérénité, en remboursement d'honoraires de médecin expert amiable, d'assistance à expertise, de bilan neuropsychologique, de frais d'expertise judiciaire, d'avocat et d'huissier de justice pour la somme de 4.271,39€, ainsi qu'en indemnisation du préjudice corporel à hauteur de 6.400€.

La disposition du jugement allouant à la MAIF la somme de 10.671,39€ sera confirmée, étant précisé que les sommes allouées au titre des frais d'avocat (1589,23€) viendront en déduction des sommes allouées en première instance au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, les frais d'huissier (767,16€) sont inclus dans les dépens de première instance, et la somme de 6.400€ viendra en déduction des sommes allouées à Monsieur [J] [G] au titre de son indemnisation du préjudice corporel de sorte qu'il revient à cette victime la somme de 129.631,52 € .

Sur l'article 700 du CPC

Il serait inéquitable de laisser à la charge de la victime l'intégralité des frais et honoraires exposés par elle et non compris dans les dépens. La somme allouée en première instance sera confirmée, et après déduction de la créance de la MAIF, il lui revient la somme de 1.732,84€. Il lui sera alloué en cause d'appel la somme de 4000€.

Les sommes allouées en première instance à Monsieur [C] [G] et Madame [V] [L] épouse [G], à la CPAM des Bouches du Rhône et à la MAIF seront confirmées.

Monsieur [C] [G] et Madame [V] [L] épouse [G] seront déboutés du chef de cette demande en cause d'appel.

Mademoiselle [T] [X] ayant été déclarée irrecevable en sa demande principale, il ne sera pas fait droit à sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il sera alloué à la CPAM des Bouches du Rhône et à la MAIF la somme de 1.500€ chacune pour les frais engagés en cause d'appel.

Les dépens de première instance en ce compris les frais d'huissier réglés par la MAIF à hauteur de 767,16 € et d'appel seront mis à la charge du [Établissement 1] et de la société COVEA RISKS.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement à l'exception de ses dispositions relatives à l'application de la convention de Londres, au plafond de limitation applicable, aux demandes de Mademoiselle [T] [X], aux frais de l'article 700 du code de procédure civile alloués à Monsieur [C] [G] et Madame [V] [L] épouse [G], à la CPAM des Bouches du Rhône et à la MAIF, et aux dépens;

Statuant à nouveau, dans cette limite, et y ajoutant :

Condamne in solidum le [Établissement 1] et la société COVEA RISKS à verser à :

- Monsieur [J] [G] :

* la somme de 129.631,52 €, déduction faite de l'avance sur recours effectuée par la MAIF, en réparation de son préjudice corporel, en deniers ou quittances, provisions et somme versée en vertu de l'exécution provisoire non déduites, ladite somme augmentée des intérêts au taux légal à compter du jugement à concurrence des sommes allouées par celui-ci et à compter du présent arrêt pour le surplus ;

* la somme de 1.732,84€ au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile en première instance;

* la somme complémentaire de 4.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en appel;

- Monsieur [C] [G] et Madame [V] [L] épouse [G] la somme de 1.500€ chacun au titre de leur préjudice moral;

- la CPAM des Bouches du Rhône :

* la somme 119.987,10€ en remboursement des prestations versées à la victime avec intérêts au taux légal à compter du jour de la demande;

* les arrérages à échoir, au fur et à mesure de leur échéance, de la rente dont le capital constitutif est de 119.421,36€, avec intérêts au taux légal à compter de chaque échéance,

* la somme complémentaire de 1.500€ en application de l'article 700 du code de procédure civile;

- la MUTUELLE ASSURANCE DES INSTITUTEURS DE FRANCE :

* la somme de 10.671,39€, au titre de son recours subrogatoire;

* la somme complémentaire de 1.500€ en application de l'article 700 du code de procédure civile;

Dit n'y avoir lieu à faire application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel au profit de Mademoiselle [T] [X];

Déboute Monsieur [C] [G] et Madame [V] [L] épouse [G] de leur demande au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile;

Condamne in solidum le [Établissement 1] et la société COVEA RISKS aux dépens de première instance, en ce compris les frais d'huissier réglés par la MAIF à hauteur de de 767,16€, et aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 13/20760
Date de la décision : 07/09/2015

Références :

Cour d'appel de Paris C3, arrêt n°13/20760 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-09-07;13.20760 ?
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