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03/09/2015 | FRANCE | N°14/08612

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 6, 03 septembre 2015, 14/08612


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 6



ARRET DU 03 SEPTEMBRE 2015



(n° ,12 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 14/08612



Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Avril 2014 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 11/09801





APPELANT



Monsieur [S] [E]

Né le [Date naissance 1]/1969 à[Localité 1] (Algérie)

[Adresse 5]

[L

ocalité 3]



Représenté par Maître Véronique DE LA TAILLE de la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0148

Ayant pour avocat plaidant Maître Caroline GUNSETT, ...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 6

ARRET DU 03 SEPTEMBRE 2015

(n° ,12 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/08612

Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Avril 2014 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 11/09801

APPELANT

Monsieur [S] [E]

Né le [Date naissance 1]/1969 à[Localité 1] (Algérie)

[Adresse 5]

[Localité 3]

Représenté par Maître Véronique DE LA TAILLE de la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0148

Ayant pour avocat plaidant Maître Caroline GUNSETT, avocat au barreau de NICE

INTIMEES

SA CHAURAY CONTROLE

Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 5]/

Représentée par Maître Jean-Pierre SOMMELET, avocat au barreau de PARIS, toque : C0494

Ayant pour avocat plaidant Maître Nathalie LACHAISE-KONDRACKI, avocat au barreau de PARIS, toque : E0864

S.A. CREDIT FONCIER DE FRANCE

RCS PARIS 542 029 848,

Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Maître Thierry SERRA de l'AARPI SERRA ABOUZEID ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : E0280

Ayant pour avocat plaidant Maître Caroline SCHUMACHER, avocat au barreau de PARIS, toque : J030

SAS WHITE

RCS 410 672 646

Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Maître François TEYTAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : J125

Ayant pour avocat plaidant Maître Véronique SAHAGUIAN de l'Association SMILEVITCH & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : R122

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 Mai 2015, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Caroline FEVRE, Conseillère, et Muriel GONAND, Conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Paule MORACCHINI, Présidente de Chambre

Madame Caroline FEVRE, Conseillère

Madame Muriel GONAND, Conseillère

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions de l'article 785 du Code de Procédure Civile.

Greffier, lors des débats : Madame Marie GIRAUD

ARRÊT :

- Contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Paule MORACCHINI, Présidente et par Madame Corinne de SAINTE MAREVILLE, greffier présent lors du prononcé.

Par jugement rendu le 10 avril 2014, le tribunal de grande instance de Paris a :

- déclaré irrecevables les demandes de Monsieur [S] [E] à l'encontre du CREDIT FONCIER DE FRANCE,

- rejeté la fin de non recevoir tirée de la prescription soulevée par la société CHAURAY CONTROLE,

- rejeté la fin de non recevoir tirée de l'autorité de chose jugée soulevée par la société WHITE SAS et par la société CHAURAY CONTROLE,

- rejeté la fin de non recevoir tirée du défaut de concentration des moyens soulevée par la société CHAURAY CONTROLE,

- rejeté la demande en paiement de dommages et intérêts de Monsieur [S] [E],

- rejeté la demande de compensation de créance de Monsieur [S] [E],

- rejeté la demande en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive de la société WHITE SAS et de la société CHAURAY CONTROLE,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- rejeté les demandes formées par les parties au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamné Monsieur [S] [E] aux dépens.

Par déclaration remise au greffe de la Cour le 17 avril 2014, Monsieur [S] [E] a interjeté appel de ce jugement.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 4 mai 2015, Monsieur [S] [E] demande à la Cour :

- de le déclarer recevable et bien fondé en son appel,

- de confirmer parte in qua le jugement en ce qu'il a débouté l'argumentation de la société CHAURAY CONTROLE et de la société WHITE SAS relatives à l'autorité de chose juge des décisions et à la prescription de son action,

- de réformer parte in qua le jugement concernant la mise en responsabilité des différents intervenants et ses demandes indemnitaires,

- de dire que ses demandes sont recevables,

- de rejeter les fins de non recevoir tirées de la chose jugée et de la prescription,

- de rejeter la fin de non recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir soulevée par le CREDIT FONCIER DE FRANCE,

- de débouter les sociétés CREDIT FONCIER DE FRANCE, WHITE SAS et CHAURAY CONTROLE de l'ensemble de leurs demandes,

- vu les dispositions de l'article 1147 du Code civil,

- de dire que la BANQUE LA HENIN aux droits de laquelle se trouve le CREDIT FONCIER DE FRANCE, a commis une faute contractuelle en lui faisant souscrire des engagements de caution manifestement disproportionnés,

- de dire qu'il est recevable et fondé à solliciter la condamnation de la société WHITE SAS solidairement avec le CREDIT FONCIER DE FRANCE au paiement de dommages et intérêts équivalents aux créances contractuelles qui lui sont réclamées en tant que caution,

- de condamner solidairement la société WHITE SAS et le CREDIT FONCIER DE FRANCE à lui payer la somme de 6.781.029,95 euros, à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice résultant de l'engagement de caution litigieux du 15 janvier 1990, somme à parfaire du montant des intérêts complémentaires réclamés depuis le 8 avril 2009,

- de condamner solidairement la société WHITE SAS et le CREDIT FONCIER DE FRANCE à lui payer la somme de 2.908.479,83 euros, au titre du préjudice résultant de l'engagement de caution litigieux du 16 décembre 1991, somme à parfaire du montant des intérêts complémentaires réclamés depuis le 8 avril 2009,

- de dire qu'il est recevable et fondé à voir ordonner la compensation entre sa créance indemnitaire à l'égard du CREDIT FONCIER DE FRANCE et de la société WHITE SAS et la créance contractuelle revendiquée sur le fondement des deux actes de caution litigieux,

- de dire qu'il est recevable et fondé à opposer à la société CHAURAY CONTROLE l'exception de compensation de sa dette au titre des engagements de caution des 15 janvier 1990 et 16 décembre 1991 avec sa créance indemnitaire à l'encontre de la société WHITE SAS et du CREDIT FONCIER DE FRANCE,

- de rejeter la demande de la société WHITE SAS en condamnation au paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- de rejeter l'ensemble des moyens soulevés par la société CHAURAY CONTROLE, la société WHITE SAS et le CREDIT FONCIER DE FRANCE,

- de condamner solidairement la société WHITE SAS et le CREDIT FONCIER DE FRANCE à payer la somme de 7.500 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens.

Dans ses dernières écritures signifiées le 29 août 2014, le CREDIT FONCIER DE FRANCE demande à la Cour :

- vu la fin de non recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir,

- de déclarer Monsieur [S] [E] irrecevable et en toute hypothèse mal fondé en ses demandes, fins et conclusions,

- de confirmer le jugement en ce qu'il a constaté le défaut d'intérêt à agir de Monsieur [S] [E] à son encontre,

- statuant à nouveau, de condamner Monsieur [S] [E] à payer la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et les entiers

dépens.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 13 mai 2015, la société WHITE SAS demande à la Cour :

- de la déclarer recevable et bien fondée en ses demandes,

- d'infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la fin de non recevoir tirée de l'autorité de chose jugée,

- statuant à nouveau,

- vu les dispositions de l'article 480 du Code de procédure civile,

- vu le jugement du Tribunal de Grande Instance de Toulouse du 11 janvier 2007 et l'arrêt de la cour d'appel de Toulouse du 3 septembre 2007,

- vu l'autorité de chose jugée,

- de déclarer Monsieur [S] [E] irrecevable en ses demandes,

- de confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande en paiement de dommages et intérêts de Monsieur [S] [E],

- d'infirmer le jugement ce qu'il a rejeté sa demande en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- de condamner Monsieur [S] [E] à lui payer la somme de 30.000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- de condamner Monsieur [S] [E] à payer la somme de 10.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et les entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 5 mai 2015, la société CHAURAY CONTROLE demande à la Cour :

- de déclarer Monsieur [S] [E] mal fondé en son appel,

- vu le jugement du Tribunal de Grande Instance de Toulouse du 11 janvier 2007, confirmé par l'arrêt de la cour d'appel de Toulouse du 3 septembre 2007, et l'arrêt de la cour de cassation du 9 avril 2009,

- vu l'autorité de chose jugée attachée à ces décisions,

- de déclarer irrecevable la demande de Monsieur [S] [E] à son encontre,

- vu l'article L110-4 du code de commerce,

- vu la fin de non recevoir tirée de la prescription,

- de déclarer prescrites toutes les demandes de Monsieur [S] [E] en qualité de caution de la SCI RESIDENCE HERMES au titre des actes notariés des 12 et 15 janvier 1990 et des 13 et 16 décembre 1991, reçus par Maître [H], notaire à [Localité 6],

- vu l'article 122 du Code de procédure civile,

- de déclare irrecevable en vertu du principe de concentration des moyens Monsieur [S] [E] en sa demande nouvelle sur la base de l'article 1147 du Code civil au titre de ses engagements de caution ayant fait l'objet antérieurement à de multiples décisions à compter du jugement du 11 janvier 2007 l'autorisant à poursuivre Monsieur [S] [E] sur le fondement des actes notariés,

- vu l'article 1291 du Code civil,

- de déclarer irrecevable la demande de Monsieur [S] [E] à faire valoir une compensation à son encontre au titre d'une dette éventuelle à l'encontre d'un tiers, le CREDIT FONCIER DE FRANCE,

- vu l'article 1295 du Code civil,

- vu la cession du 31 janvier 2002 à son profit,

- d'infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la fin de non recevoir tirée de la prescription, de l'autorité de chose jugée, du défaut de concentration des moyens et de l'absence de compensation,

- statuant à nouveau,

- de déclarer Monsieur [S] [E] irrecevable et mal fondé en toutes ses demandes, la créance invoquée étant postérieure à la cession du 31 janvier 2002, dont la validité a été confirmée par jugement du Tribunal de Grande Instance de Toulouse du 11 janvier 2007, confirmé par arrêt de la cour d'appel de Toulouse du 3 septembre 2007, et définitif suite à l'arrêt de rejet de la cour de cassation du 9 avril 2009,

- de déclarer mal fondé la demande de Monsieur [S] [E] à faire valoir une quelconque compensation à son encontre, titulaire de titres exécutoires constitués par les actes notariés des 12 et 15 janvier 1990 et des 13 et 16 décembre 1991, reçus par Maître [H], notaire à [Localité 6], la validité des poursuites ayant été ordonnée par jugement du Tribunal de Grande Instance de Toulouse du 11 janvier 2007, confirmé par arrêt de la cour d'appel de Toulouse du 3 septembre 2007, définitif suite à l'arrêt de rejet de la cour de cassation du 9 avril 2009,

- de condamner Monsieur [S] [E] à lui payer la somme de 30.000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- de condamner Monsieur [S] [E] à payer la somme de 10.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et les entiers dépens.

SUR CE

Considérant que par acte notarié des 12 et 15 janvier 1990, la BANQUE LA HENIN a consenti à la SCI RESIDENCE HERMES :

- un crédit en compte courant Promogaz de 2.970.000 francs pour une durée de 18 mois, au TEG de 6,776 %,

- deux crédits d'un montant global de 11.030.000 francs constitués d'un crédit de démarrage de 4.030.000 francs et d'un crédit d'accompagnement jusqu'à concurrence de 7.000.000 francs sous forme d'autorisation de découvert pour une durée de deux ans, au TEG de 14,22 % ;

Considérant que ces crédits avaient pour objet de financer une opération immobilière portant sur la construction par la SCI RESIDENCE HERMES d'un ensemble immobilier sur un terrain situé à [Localité 6], acquis le même jour par la SCI RESIDENCE HERMES auprès de la SCI LES SAUGES moyennant le prix de 4.500.000 francs ;

Considérant qu'il a été convenu entre les parties à la vente du terrain que le prix de cession de 4.500.000 francs était converti en obligation pour la SCI RESIDENCE HERMES de livrer à la SCI LES SAUGES la totalité des locaux commerciaux et d'habitation situés en rez de chaussée de l'immeuble à construire ainsi que les 20 parkings et garages situés en sous-sol ;

Considérant que dans l'acte notarié des 12 et 15 janvier 1990, Monsieur [S] [E] s'est porté caution solidaire, avec les autres associés de la SCI RESIDENCE HERMES à l'exception de [R] [E], des engagements de la SCI RESIDENCE HERMES auprès de la BANQUE LA HENIN ;

Considérant que par acte notarié des 13 et 16 décembre 1991, la BANQUE LA HENIN s'est portée caution de la SCI RESIDENCE HERMES auprès des services fiscaux afin de lui permettre d'obtenir le remboursement de TVA à hauteur de 861.895 francs, a prorogé le crédit Promogaz au 12 janvier 1992 et a accordé à la SCI RESIDENCE HERMES un crédit complémentaire de 5.500.000 francs jusqu'au 13 décembre 1992 au TEG de 15,05 % ; que dans cet acte, Monsieur [S] [E] et les autres associés de la SCI RESIDENCE HERMES se sont portés cautions solidaires en garantie du remboursement de toutes sommes dues en principal, intérêts et accessoires dont la SCI RESIDENCE HERMES ou ses associés seraient débiteurs envers la banque au titre de cet acte ;

Considérant que par acte du 16 septembre 1996, la BANQUE LA HENIN a procédé au profit de la société WHITE SAS à un apport partiel d'actifs portant sur son activité de crédits immobiliers consentis à des professionnels, incluant les prêts consentis à la SCI RESIDENCE HERMES ;

Considérant qu'en décembre 1999, la société WHITE SAS a été absorbée par la société WHRED ONE qui a ensuite changé de dénomination sociale pour prendre celle de la société absorbée WHITE SAS ;

Considérant que le 31 janvier 2002, la société WHITE SAS a cédé ses créances sur la SCI RESIDENCE HERMES à la société CHAURAY CONTROLE ;

Considérant que le 2 mars 2004, la société CHAURAY CONTROLE a fait délivrer à Monsieur [S] [E] un commandement aux fins de saisie immobilière portant sur l'appartement dont il était propriétaire [Adresse 4] pour obtenir le paiement de la somme de 152.449,02 euros en exécution de l'acte notarié du 15 janvier 1990 ;

Considérant que par jugement du 7 octobre 2004, le juge des criées a suspendu les poursuites de saisie immobilière dans l'attente d'une décision de l'autorité compétente sur la recevabilité d'une demande de Monsieur [S] [E] tendant à bénéficier du dispositif de désendettement des rapatriés d'Algérie réinstallés dans une profession non salariée ;

Considérant que par jugement du 11 janvier 2007, la chambre des criées du Tribunal de Grande Instance de Toulouse a autorisé la société CHAURAY CONTROLE à reprendre les poursuites ; que par arrêt du 3 septembre 2007 la cour d'appel de Toulouse a confirmé cette décision ; que le pourvoi formé par Monsieur [S] [E] a été déclaré non admis par décision de la cour de cassation du 9 avril 2009 ;

Considérant que par jugement du 8 avril 2009, le Tribunal de Grande Instance de Toulouse a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la SCI RESIDENCE HERMES, puis le 29 juin 2009 a prononcé la liquidation judiciaire de la SCI RESIDENCE HERMES ;

Considérant que le 11 mai 2009, la société CHAURAY CONTROLE a déclaré ses créances au passif de la SCI RESIDENCE HERMES pour un montant total de 9.689.489,78 euros ; que le recours formé par Monsieur [S] [E] contre la déclaration de créance a été rejeté par le juge commissaire le 7 novembre 2011;

Considérant que le 8 mars 2012, le juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de Toulouse a prononcé l'adjudication du bien immobilier situé à [Localité 2] au prix principal de 400.000 euros au profit de [Q] [J], épouse de Monsieur [S] [E] et colicitante ;

Considérant que c'est dans ces conditions que par actes d'huissier des 24 juin 2011 et 23 février 2012, Monsieur [S] [E] a assigné le CREDIT FONCIER DE FRANCE, la société CHAURAY CONTROLE et la société WHITE SAS devant le Tribunal de Grande Instance de Paris qui a rendu la décision déférée ;

Considérant que Monsieur [S] [E] soutient que ses engagements de caution étaient disproportionnés à ses ressources, qu'il n'est pas une caution avertie, que le fait d'être associé de la SCI RESIDENCE HERMES à hauteur de 5 % n'est pas suffisant, qu'il n'avait aucune connaissance en matière de gestion, qu'il n'avait pas de fonction de direction dans la SCI RESIDENCE HERMES et qu'il n'a pas participé à la demande de prêts ;

Qu'en réplique aux moyens opposés par les intimés, il prétend, sur l'autorité de chose jugée, que les décisions rendues ne concernent que la société CHAURAY CONTROLE, lui-même et la saisie immobilière, qu'en outre sa demande n'a pas pour objet de remettre en cause l'existence et la validité du cautionnement mais qu'elle vise à voir engager la responsabilité des établissements bancaires et financiers dans ce dossier ; que sur la prescription, il indique que sa demande est fondée sur l'article 1147 du Code civil et que la faute contractuelle de la banque relève de la prescription de 30 ans applicable aux actes conclus en 1991 ; qu'il estime qu'il a intérêt à agir à l'encontre du CREDIT FONCIER DE FRANCE puisque la reconnaissance de la responsabilité du CREDIT FONCIER DE FRANCE est un des éléments permettant la prise en charge par la société WHITE SAS des conséquences financières résultant de son préjudice ;

Considérant que le CREDIT FONCIER DE FRANCE demande la confirmation du jugement sur le défaut d'intérêt à agir à son encontre ; qu'il rappelle que les créances sur la SCI RESIDENCE HERMES, qui étaient à l'origine la propriété de la BANQUE LA HENIN, ont été apportées à la société de crédit à l'habitation le 13/09/1996 avant les fusions du CREDIT FONCIER DE FRANCE et de la société ENTENIAL, puis d'ENTENIAL et de la BANQUE LA HENIN en 2000 et en 2005 ; qu'il ajoute que le traité d'apport partiel d'actifs entre la BANQUE LA HENIN et la société de crédit à l'habitation exclut expressément toute solidarité, que la BANQUE LA HENIN ne peut plus être tenue d'aucun passif et que cette disposition est opposable à Monsieur [S] [E] ;

Considérant que la société WHITE SAS se prévaut de l'autorité de chose jugée de l'arrêt de la cour d'appel ; que sur le fond, elle affirme que Monsieur [S] [E], associé fondateur, disposait des informations pour apprécier la portée de ses engagements ;

Considérant que la société CHAURAY CONTROLE invoque la prescription de l'article L110-4 du code de commerce, applicable même pour l'action en responsabilité contractuelle ; qu'il fait valoir que le dommage au manquement de devoir de mise en garde se manifeste à la date de signatures des actes de caution et que l'action de Monsieur [S] [E] est prescrite depuis le 15 janvier 2000 et le 11 décembre 2001;

- sur la recevabilité de la demande à l'encontre du CREDIT FONCIER DE FRANCE:

Considérant qu'il ressort des pièces versées aux débats que selon projet de contrat d'apport partiel d'actifs signé le 13 septembre 1996, déposé au greffe du tribunal de commerce de Paris le 18 septembre 1996, la BANQUE LA HENIN (BLH) a apporté à la SOCIETE DE CREDIT A L'HABITATION (SCH) devenue par la suite WHITE SAS, sa branche d'activité de financement des professionnels de l'immobilier, incluant les prêts consentis à la SCI RESIDENCE HERMES ;

Considérant que l'avis de publication du projet est paru le 19 septembre 1996 dans le journal 'les annonces de la Seine', qu'un avis a été inséré dans le bulletin des Annonces Légales Obligatoires du 20 septembre 1996 et qu'il n'est pas contesté que cet apport partiel d'actif, soumis au régime des scissions, est devenu définitif le 14 novembre 1996 ;

Considérant que les créances de la BANQUE LA HENIN sur la SCI RESIDENCE HERMES au titre des deux actes notariés de janvier 1990 et décembre 1991 ont été apportés par ce contrat à la SOCIETE DE CREDIT A L'HABITATION, avec les garanties qui y étaient attachées ;

Considérant qu'aux termes de l'article 5.1.2 du projet d'apport, il est prévu que la SOCIETE DE CREDIT A L'HABITATION (SCH) a reçu tous pouvoirs, dès la réalisation définitive de l'apport, 'notamment pour intenter ou défendre toutes actions judiciaires en cours ou nouvelles, aux lieu et place de BLH et relatives à la branche du fonds de commerce apportée, pour donner tous acquiescements à toutes décisions, pour recevoir ou payer toutes sommes dues à la suite de jugements ou transactions' ; que l'article 5 de l'exposé précise que l'apport est soumis au régime des scissions et que 'les parties conviennent expressément que SCH sera seule tenue au passif apporté, sans solidarité avec BLH' ;

Considérant que la société COMPTOIR DES ENTREPRENEURS est venue aux droits de la BANQUE LA HENIN (BLH) par l'effet d'une fusion du 31 mai 2000 et que le CREDIT FONCIER DE FRANCE vient aux droits de la société ENTENIAL (anciennement dénommée COMPTOIR DES ENTREPRENEURS) par l'effet d'une fusion du 1er juin 2005;

Considérant qu'à la suite de l'apport partiel d'actifs devenu définitif le 14 novembre 1996, la SOCIETE DE CREDIT A L'HABITATION (SCH) devenue par la suite WHITE SAS, vient seule aux droits de la BANQUE LA HENIN et que les créances sur la SCI RESIDENCE HERMES apportées en 1996, avant les fusions susvisées intervenues en 2000 et en 2005, n'ont pas été intégrées dans le patrimoine du CREDIT FONCIER DE FRANCE puisque ce dernier est venu aux droits de la BANQUE LA HENIN postérieurement à l'apport partiel d'actifs ;

Considérant que la responsabilité contractuelle de la banque apporteuse, créancière d'origine, et les conséquences qui y sont attachées ont été transmises à la société bénéficiaire par l'effet de la transmission universelle de patrimoine ;

Considérant dans ces conditions que Monsieur [S] [E] ne justifie donc pas d'un intérêt à agir à l'encontre du CREDIT FONCIER DE FRANCE et qu'il doit être déclaré irrecevable en ses demandes à son encontre ; que le jugement sera confirmé de ce chef ;

- sur la fin de non recevoir tirée de l'autorité de chose jugée :

Considérant que la société WHITE SAS et la société CHAURAY CONTROLE invoquent l'autorité de chose jugée résultant de l'arrêt de la cour d'appel de Toulouse du 3 septembre 2007 et font valoir que Monsieur [S] [E] n'a pas contesté le principe de son engagement de caution, ni son montant ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1351 du Code civil, 'l'autorité de chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité' ;

Considérant que la société WHITE SAS qui n'est pas partie aux décisions rendues le 11 janvier 2007 par le tribunal de grande instance de Toulouse et le 3 septembre 2007 par la cour d'appel de Toulouse, ne peut se prévaloir de l'autorité de chose jugée attachée à ces décisions ;

Considérant que la société CHAURAY CONTROLE est partie à ces décisions qui font suite à sa demande de reprise des poursuites fondées sur le commandement de saisie immobilière délivré à Monsieur [S] [E] le 2 mars 2004 ;

Considérant qu'il ressort du jugement du 11 janvier 2007 que le tribunal a indiqué que la créance de la société CHAURAY CONTROLE n'était pas contestée par le débiteur ni dans son principe, ni dans son quantum et était exigible en vertu d'un titre exécutoire et qu'il a autorisé la reprise par la société CHAURAY CONTROLE des poursuites de saisie immobilière à l'encontre de Monsieur [S] [E], en sa qualité de caution ; que l'arrêt du 3 septembre 2007 a confirmé ce jugement sans que des demandes nouvelles ne soient formulées en appel ;

Considérant qu'en l'espèce la demande de Monsieur [S] [E] n'a pas pour objet de remettre en cause la validité de son engagement de caution mais de rechercher la responsabilité contractuelle de l'établissement prêteur à son égard ;

Considérant en conséquence que la présente demande ne se heurte pas à l'autorité de chose jugée attachée à l'arrêt de la cour d'appel de Toulouse du 3 septembre 2007 et que la fin de non recevoir invoquée par la société WHITE SAS et la société CHAURAY CONTROLE pour ce motif doit être rejetée ;

- sur la prescription soulevée par la société CHAURAY CONTROLE :

Considérant que la société CHAURAY CONTROLE se prévaut de la prescription de l'action de Monsieur [S] [E] sur le fondement de l'article L110-4 du code de commerce et prétend que cette action est prescrite à compter du 15 janvier 2000 et du 11 décembre 2001;

Considérant que Monsieur [S] [E] fait valoir que l'action en responsabilité contractuelle relève des dispositions de l'article 1147 du Code civil et qu'elle est soumise à la prescription de droit commun, qui était de trente ans avant la loi du 17 juin 2008 ;

Considérant qu'aux termes de l'article L110-4 du Code de commerce, dans sa rédaction applicable au litige, 'les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non commerçants se prescrivent par dix ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions plus courtes' ;

Considérant que, quelle que soit la qualification de l'action intentée par Monsieur [S] [E] à l'encontre de la société CHAURAY CONTROLE, cette dernière a la qualité de commerçante et que ce sont donc les dispositions de l'article L110-4 qui doivent s'appliquer en l'espèce ;

Considérant que le manquement au devoir de mise en garde de la banque à l'égard de la caution se manifeste à la date de signatures des actes de caution, soit en l'espèce le 15 janvier 1990 et le 16 décembre 1991;

Considérant que la prescription décennale était ainsi acquise à la date des 15 janvier 2000 et du 16 décembre 2001 et que l'action introduite le 24 juin 2011 par Monsieur [S] [E] à l'encontre de la société CHAURAY CONTROLE est prescrite;

Considérant que le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a rejeté la fin de non recevoir tirée de la prescription soulevée par la société CHAURAY CONTROLE ;

Considérant que la fin de non recevoir tirée du défaut de concentration des moyens soulevée par la société CHAURAY CONTROLE est dès lors dénuée d'intérêt et qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce point ;

- sur la demande de dommages et intérêts à l'encontre de la société WHITE SAS :

Considérant que Monsieur [S] [E] fait grief au tribunal d'avoir considéré qu'il était une caution avertie et de ne pas avoir retenu la disproportion manifeste entre ses engagements de caution et ses revenus ;

Considérant que la société WHITE SAS ne conteste pas qu'elle vient aux droits et obligations de la BANQUE LA HENIN, qui a octroyé les deux prêts octroyés à la SCI RESIDENCE HERMES et qu'il ressort de l'acte de cession de créances au profit de la société CHAURAY CONTROLE que cette cession n'a pas eu pour effet de transférer à l'acquéreur les obligations du vendeur envers les débiteurs cédés découlant de la responsabilité du vendeur à l'occasion de la conclusion des contrats de prêts ;

Considérant qu'il ressort de l'acte notarié des 12 et 15 janvier 1990 que la SCI RESIDENCE HERMES était dirigée par Monsieur [G] [E] et que ses associés fondateurs étaient Monsieur et Madame [G] [E], Messieurs [C], [X], [S] [E] et [R] [E] ;

Considérant qu'il s'agissait d'une SCI familiale composée des époux [E], de leurs trois enfants et du frère de Monsieur [G] [E] et que la SCI RESIDENCE HERMES avait pour objet la construction d'un ou plusieurs immeubles en vue de la vente, et notamment la construction et la vente d'un ensemble immobilier situé à [Adresse 6] ;

Considérant que les crédits ont été octroyés en janvier 1990 pour financer l'opération immobilière portant sur la construction par la SCI RESIDENCE HERMES d'un ensemble immobilier sur un terrain situé à [Localité 6], acquis le même jour par la SCI RESIDENCE HERMES auprès de la SCI LES SAUGES moyennant le prix de 4.500.000francs ; qu'il n'est pas contesté par Monsieur [S] [E] que cette SCI LES SAUGES était également une société familiale constituée entre les consorts [E] ;

Considérant que Monsieur [S] [E], né en 1959, exerçant l'activité de chirurgien dentiste depuis 1985, était en sa qualité d'associé fondateur de la SCI RESIDENCE HERMES, en cours de formation à la date du 15 janvier 1990, et compte tenu en outre de la taille de la société et de sa composition familiale, le gérant étant son propre père, informé de l'opération immobilière et qu'il disposait de tous les renseignements utiles pour apprécier l'opportunité de ce projet ;

Considérant dans ces conditions que Monsieur [S] [E] avait connaissance de la portée de son engagement et qu'il doit être considéré comme une caution avertie ;

Considérant que s'agissant du second engagement de caution consenti dans l'acte notarié des 13 et 16 décembre 1991, Monsieur [S] [E] prétend plus particulièrement que la banque a manqué à son devoir d'information concernant l'ouverture d'une procédure collective personnelle de [G] [E] par jugement du 1er juin 1990 ;

Considérant cependant que Monsieur [S] [E] n'établit pas que la banque était informée de ce jugement et que lui-même n'en avait pas connaissance malgré sa proximité manifeste avec son père, puisqu'il était domicilié à la même adresse que [G] [E], ainsi qu'il ressort de l'acte notarié des 13 et 16 décembre 1991;

Considérant dans ces conditions que Monsieur [S] [E] ne démontre pas qu'à la date de ses engagements de cautions, la BANQUE LA HENIN aurait eu sur ses revenus, son patrimoine ou les facultés de remboursement de la SCI RESIDENCE HERMES raisonnablement prévisibles en l'état du succès escompté de l'opération, des informations que lui-même aurait ignorées ;

Considérant que la BANQUE LA HENIN n'avait donc pas d'obligation de mise en garde à l'égard de Monsieur [S] [E], caution avertie, et que ce dernier doit être débouté de sa demande de dommages et intérêts à l'encontre de la société WHITE SAS, venant aux droits de la BANQUE LA HENIN ; que le jugement sera confirmé de ce chef ;

- sur la demande de dommages et intérêts de la société WHITE SAS et de la société CHAURAY CONTROLE :

Considérant que la société WHITE SAS et la société CHAURAY CONTROLE n'établissement pas que le droit de Monsieur [S] [E] d'agir en justice puis d'interjeter appel a, en l'espèce, dégénéré en abus et qu'elles doivent être déboutées de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Considérant que le jugement sera confirmé en ses dispositions concernant l'article 700 du Code de procédure civile ;

Considérant que Monsieur [S] [E], qui succombe, supportera ses frais irrépétibles et les dépens d'appel ;

Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la charge des intimés les frais non compris dans les dépens, exposés en appel et qu'il convient de condamner Monsieur [S] [E] à leur payer à chacun la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a rejeté la fin de non recevoir tirée de la prescription de la société CHAURAY CONTROLE et la demande de compensation de créance de Monsieur [S] [E].

Confirme le jugement en toutes ses autres dispositions.

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Déclare irrecevables comme prescrites les demandes de Monsieur [S] [E] à l'encontre de la société CHAURAY CONTROLE.

Condamne Monsieur [S] [E] à payer au CREDIT FONCIER DE FRANCE, à la société WHITE SAS et à la société CHAURAY CONTROLE la somme de 1.000 euros à chacun en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Déboute les parties de toutes autres demandes.

Condamne Monsieur [S] [E] aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 14/08612
Date de la décision : 03/09/2015

Références :

Cour d'appel de Paris I6, arrêt n°14/08612 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-09-03;14.08612 ?
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