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25/06/2015 | FRANCE | N°12/11665

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 12, 25 juin 2015, 12/11665


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12



ARRÊT DU 25 Juin 2015



(n° 1050 , 4 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/11665



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 18 Octobre 2012 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de PARIS RG n° 10/02909



APPELANTE

Madame [I] [Q] épouse [P]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

comparante en personne, assistée de Me Thierry TONNELLIER

, avocat au barreau de PARIS, toque : D1020



INTIMEE

CAISSE DE MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE ILE DE FRANCE

[Adresse 1]

Service Contentieux

[Adresse 1]

représentée par Me Christo...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12

ARRÊT DU 25 Juin 2015

(n° 1050 , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/11665

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 18 Octobre 2012 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de PARIS RG n° 10/02909

APPELANTE

Madame [I] [Q] épouse [P]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

comparante en personne, assistée de Me Thierry TONNELLIER, avocat au barreau de PARIS, toque : D1020

INTIMEE

CAISSE DE MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE ILE DE FRANCE

[Adresse 1]

Service Contentieux

[Adresse 1]

représentée par Me Christophe RAMOGNINO, avocat au barreau de PARIS, toque : P0380 substitué par Me Marc-Antoine GODEFROY, avocat au barreau de PARIS, toque : P0380

MINISTERE DE L'AGRICULTURE, DE L'ALIMENTATION ET DE LA PECHE

Service des Affaires Juridiques

[Adresse 2]

[Adresse 2]

avisé - non comparant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 avril 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Présidente, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Président

Monsieur Luc LEBLANC, Conseiller

Madame Marie-Ange SENTUCQ, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier : Mme NOUBEL Laïla, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Président et par Madame Laïla NOUBEL, greffier stagiaire, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS-PROCÉDURE-MOYENS DES PARTIES :

Mme [I] [Q] épouse [P], née en 1951, a formé une demande de rachat de cotisations sur le fondement de l'article R 351-11 du code de la sécurité sociale, pour des périodes d'activité de salarié agricole accomplies pendant les mois de juillet, août et septembre des années 1965, 1966 et 1967; à l'appui de sa demande, elle a produit une attestation sur l'honneur en date du 2 octobre 2006 affirmant avoir travaillé pendant les vacances scolaires, du 1er juillet au 30 septembre de ces trois années, sur l'exploitation agricole des époux [R] à [Localité 2] ; que cette attestation était contre signée par deux témoins, Mme [T] [B] et Mme [J].

Le rachat, accepté le 18 octobre 2006 par la caisse, a porté sur 12 trimestres de cotisations pour un coût global de 1.405,84 euros.

Le 1er novembre 2008 , Mme [P] a fait valoir ses droits à la retraite.

Dans le cadre d'une mission d'examen par les caisses de sécurité sociale sur les dossiers de régularisations de cotisations arriérés et rachats , la caisse de la mutualité sociale agricole a procédé au contrôle a posteriori du rachat opéré par Mme [P].

Aux motifs qu'il n'y avait pas de témoins oculaires et que les exploitants avaient réfuté le travail allégué, la caisse , par décision du 14 décembre 2009, a procédé à l'annulation du rachat en cause et des douze trimestres de cotisations attribués pour les années rachetées, en raison du caractère frauduleux du rachat.

Après avoir en vain contesté cette décision devant la commission de recours amiable qui a rejeté sa demande par décision du 12 mai 2010, Mme [P] a saisi le tribunal des affaires de la sécurité sociale de Paris.

Par jugement en date du 18 octobre 2012 , elle a été déboutée de son recours aux motifs que l'admission au rachat avait été surprise par des déclarations qui se sont avérées erronées, et condamnée à rembourser à la caisse la somme de 550,37 euros au titre d'un trop perçu de pensions versée avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 22 décembre 2009.

Mme [P] , par l'intermédiaire de son conseil qui a déposé des écritures développées à la barre, conclut à l'infirmation du jugement et demande à la cour sur le fondement des articles D724-9 du code rural et eu égard à la violation du caractère contradictoire du contrôle et R351-10 et R351-11 du code de la sécurité sociale de :

- constater l'absence de fraude et de fausse déclaration de sa part,

- constater que la décision de la caisse de la mutualité sociale agricole du 14 décembre 2009 ainsi que la décision de la commission de recours amiable du 12 mai 2010 ont été prises passé le délai de recours contentieux admis en pareil cas ;

- constater la confusion opérée par le jugement attaqué entre fausse déclaration et déclaration erronée et en tirer les conséquences de droit quant au délai imparti à l'organisme de gestion de sécurité sociale pour prononcer l'annulation d'un rachat d'arriérés de cotisations -

- confirmer la réalité du travail agricole effectué par madame [P], sur les périodes d'été de 1965,1966 et 1967 pour lesquelles elle a opéré le rachat de l'arriéré des cotisations ;

- dire que ce travail s'est déroulé dans le cadre d'une situation de salariat ayant fait l'objet d'une rémunération et sous la vigilance des exploitants agricoles ;

- en conséquence , déclarer nulles les décisions,

- dire que le principe de l'intangibilité de la pension liquidée s'oppose à la remise en cause du rachat, opéré par Mme [P] auprès de la caisse, au mois d'octobre 2006, des cotisations arriérées pour les années 1965,1966 et 1967, et de l'attribution de sa pension de retraite ;

- débouter la caisse de sa demande reconventionnelle ;

- condamner cette dernière à une indemnité de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La caisse de la mutualité sociale agricole , par l'intermédiaire de son conseil qui a déposé des écritures développées à la barre, conclut à la confirmation du jugement aux motifs principaux que les enquêtes diligentées par les enquêteurs assermentés sont valables, que le principe du contradictoire a été respecté, puisque les dispositions applicables ne sont pas celles issues des articles L724-11 et suivants et D724-7 et 9 du code rural et de la pêche maritime mais celles fondées sur les articles L114-10 et R114-18 du code de la sécurité sociale; sur le fond que la fraude est avérée ; elle y ajoute une demande de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile et les conclusions des parties régulièrement communiquées, oralement soutenues et visées par le greffe à l'audience du 17 avril 2015, conclusions auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé de leurs demandes, moyens et arguments.

SUR CE, LA COUR

sur la régularité de la procédure de contrôle,

Considérant que l'article L. 724-7 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction en vigueur , a confié aux caisses de mutualité sociale agricole le contrôle de l'application des dispositions relatives aux différentes branches des régimes de protection sociale des non-salariés et salariés agricoles dont la branche de l'assurance vieillesse (article L. 722-8 ) ;

Que le contrôle mis en oeuvre par la caisse est soumis aux dispositions des articles D724-7 et D724-9, dans leur rédaction antérieure au 1er janvier 2014, qui stipulent que ce contrôle est précédé de l'envoi par la caisse d'un avis adressé par lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressé à l'employeur, au chef d'exploitation et également au titulaire d'allocation de vieillesse agricole ou de pension de retraite, et qu'à l'issue du contrôle la caisse doit adresser , au moyen d'une lettre recommandée avec avis de réception à la personne contrôlée, un document rappelant l'objet du contrôle et mentionnant les documents consultés, la période vérifiée et la date de la fin du contrôle et, s'il y a lieu, les observations faites au cours du contrôle, assorties de l'indication de la nature et du mode de calcul des redressements d'assiette et de taux envisagés, ou du montant des prestations à reverser, tels que connus à cette date;

Que la personne contrôlée dispose alors d'un délai de trente jours pour faire part de sa réponse à ces observations à la caisse , le recouvrement des prestations indues, des cotisations, des pénalités et des majorations de retard ne pouvant intervenir qu'au terme du délai prévu à l'alinéa précédent;

Considérant que la communication des observations des agents de contrôle à la personne contrôlée constitue une formalité substantielle, destinée à assurer le caractère contradictoire du contrôle et la sauvegarde des droits de la défense de sorte que sa violation entraîne la nullité du contrôle et de la procédure subséquente;

Considérant qu'il n'est pas discuté, qu'en l'espèce, Mme [P] n'a pas reçu de lettre d'observations de la caisse suite à la procédure de contrôle dont elle a fait l'objet et qu'elle n'a pu ainsi faire valoir ses observations ou ses contestations avant que la caisse ne prenne, le 14 décembre 2009, une décision qui a eu pour effet de lui retirer le bénéfice de droits qui a lui avaient été accordés trois ans auparavant ;

Considérant que contrairement à ce que soutient la caisse, ces textes ne sont pas seulement applicables aux employeurs mais aussi aux titulaires d'allocations de vieillesse agricole , ce qui est bien le cas de Mme [P]; qu'en outre, les dispositions relatives aux contrôles résultant du chapitre IV du titre II du livre VII du code rural et de la pêche maritime, dans lequel est inséré l'article D. 724-9, s'appliquent à la fois aux personnes salariées des professions agricoles et aux personnes non salariées de ces mêmes professions ;

Qu'il s'en déduit que tout contrôle effectué à l'initiative de la caisse de mutualité sociale agricole à l'égard d'un titulaire d'allocation de vieillesse agricole doit respecter ce formalisme en amont et à l'issue du contrôle ;

Que contrairement à ce que la caisse soutient encore , ces textes s'appliquent aussi bien en cas de fraude présumée qu'en cas de simple erreur commise par le titulaire d'allocation de vieillesse agricole et doivent par conséquent prévaloir, en raison de leur caractère spécifique aux professions agricoles salariées ou non salariées, sur les dispositions plus générales, issues du code de la sécurité sociale applicables dont elle se prévaut ;

Qu'à cet égard , aucune pièce produite émanant de la procédure de contrôle ne démontrent que les opérations menées par les agents assermentés l'ont été sur le fondement des articles L114-9 et suivants du code de la sécurité sociale ;

Qu'au contraire, les délégations de compétence produites aux débats par l'organisme social et délivrées le 22 juillet 2009 par le directeur général de la caisse de mutualité sociale agricole [Localité 1] aux directeurs généraux des caisses de mutualité sociale agricole de Haute Normandie et d'Armorique afin d'enquêter auprès des personnes ayant pu témoigner en faveur de Mme [P], visent expressément l'article L. 724-7 du code rural et de la pêche maritime ; que ce texte concerne l'application des dispositions relatives aux différentes branches des régimes de protection sociale des non-salariés et salariés agricoles, et non les dispositions du code de la sécurité sociale relatives à la lutte contre la fraude qu'elle revendique aujourd'hui ;

Considérant en conséquence que Mme [P] est bien fondée à soutenir la nullité du contrôle entrepris sans respect des formalités substantielles imposées par l'article D. 724-9 du code rural et de la pêche maritime ;

Que la nullité du contrôle entraînant la nullité de la décision d'annulation de rachat de cotisations prise par la caisse , il convient d'ordonner à celle-ci de rétablir Mme [P] dans ses droits en validant ses 12 trimestres de cotisations pour les années 1965, 1966 et 1967;

Que le jugement sera donc infirmé en toutes ses dispositions ,

Considérant qu'il n'est pas inéquitable de laisser à chaque partie la charge de ses propres frais non répétibles ;

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

- Annule la procédure de contrôle de rachat de cotisations arriérées ainsi que la décision prise par la caisse de mutualité sociale agricole [Localité 1] le 14 décembre 2009 annulant le rachat des cotisations effectué par Mme [P],

- Infirme la décision de la commission de recours amiable du 12 mai 2010 ;

- Ordonne à la caisse de mutualité sociale agricole [Localité 1] de rétablir Mme [P] dans ses droits en validant ses 12 trimestres de cotisations pour les années 1965,1966, 1967

- Déboute les parties de toutes autres demandes,

- Laisse à chacune d'elle la charge de ses frais non répétibles.

Le Greffier, Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 12
Numéro d'arrêt : 12/11665
Date de la décision : 25/06/2015

Références :

Cour d'appel de Paris L3, arrêt n°12/11665 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-06-25;12.11665 ?
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