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19/06/2015 | FRANCE | N°14/04371

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 11, 19 juin 2015, 14/04371


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11



ARRÊT DU 19 Juin 2015 après prorogation

(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/04371

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 06 Octobre 2010 par le Conseil de Prud'hommes de PARIS - RG n° 09/10154





APPELANTE

Mademoiselle [V] [C] [N]

[Adresse 1]

non comparante, représentée par Me Laure GENETY, avocat au barreau de PARIS, toque : E08

33







INTIMEE

Association INNOVANTE POUR LE DEVELOPPEMENT DE L'AIDE A DOMICILE (AIDA)

[Adresse 2]

représentée par Me Marie DUMESNIL-CAMUS, avocat au barreau de HA...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11

ARRÊT DU 19 Juin 2015 après prorogation

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/04371

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 06 Octobre 2010 par le Conseil de Prud'hommes de PARIS - RG n° 09/10154

APPELANTE

Mademoiselle [V] [C] [N]

[Adresse 1]

non comparante, représentée par Me Laure GENETY, avocat au barreau de PARIS, toque : E0833

INTIMEE

Association INNOVANTE POUR LE DEVELOPPEMENT DE L'AIDE A DOMICILE (AIDA)

[Adresse 2]

représentée par Me Marie DUMESNIL-CAMUS, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, toque : D 71

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 31 Mars 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Isabelle DOUILLET, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Luce CAVROIS, Présidente

Madame Evelyne GIL, Conseillère

Madame Isabelle DOUILLET, Conseillère

Qui en ont délibéré

Greffier : Melle Flora CAIA, lors des débats

ARRET :

- Contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle DOUILLET, Conseillère faisant fonction de Présidente et par Mademoiselle Flora CAIA, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu l'appel régulièrement interjeté par Mme [V] [C] [N] à l'encontre d'un jugement prononcé le 6 octobre 2010 par le conseil de prud'hommes de Paris ayant statué sur le litige qui l'oppose à l'association AIDA (Association InNovante pour le Développement de l'Aide à domicile) sur ses demandes relatives à l'exécution et à la rupture de son contrat de travail.

Vu le jugement déféré qui a débouté Mme [V] [C] [N] de toutes ses demandes et l'a condamnée aux dépens.

Vu les conclusions visées par le greffier aux termes desquelles :

Mme [V] [C] [N], appelante, poursuivant l'infirmation du jugement déféré, demande à la cour :

- de requalifier la relation de travail en contrat à durée indéterminée à temps plein,

- de condamner l'association AIDA à lui payer les sommes suivantes :

- 1 640,65 € à titre d'indemnité de requalification,

- 6 821,63 € à titre de rappel de salaires, outre les congés payés afférents de 10 %,

- 1 640,65 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents de 10 %,

- 292,04 € à titre d'indemnité de licenciement,

- 1 640,65 € à titre d'indemnité pour non respect de la procédure de licenciement,

- 13 000 € à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail,

- 5 000 € à titre de dommages et intérêts pour non respect de la réglementation afférente au contrat de travail à temps partiel,

- d'ordonner la remise sous astreinte des documents de fin de contrat et des bulletins de paie rectifiés, conformes à la décision,

- de condamner en outre l'association AIDA à lui payer la somme de 2 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

L'association AIDA, intimée, conclut à la confirmation du jugement et au débouté de Mme [C][N] de l'ensemble de ses demandes.

CELA ÉTANT EXPOSÉ

A partir du 19 octobre 2006 et suivant cinq contrats à durée déterminée dits 'd'usage' successifs, le dernier conclu pour la période allant du 1er mai au 30 septembre 2008, Mme [C] [N] a été employée par l'association AIDA en qualité d'aide familiale, du 19 octobre 2006 pour effectuer auprès de particuliers diverses prestations (entretien du logement, entretien du linge, repassage, repas, courses, promenade, accompagnement), les contrats prévoyant une durée minimale de travail hebdomadaire variant de 20 à 30 heures et une rémunération basée sur le SMIC.

Le dernier contrat a été rompu par anticipation le 30 juin 2008.

Le 1er juillet 2008, un contrat de travail à durée indéterminée a été signé entre Mme [C] [N] et Mme [M] aux termes duquel Mme [C] [N] a été engagée, à compter du même jour, en qualité d'assistante de vie II, suivant les dispositions de la convention collective nationale des salariés du particulier employeur, pour exercer ses fonctions au domicile de son employeur à raison de 40 heures hebdomadaires et moyennent un salaire brut horaire de 8,78 €.

Le 26 août 2008, Mme [M] a convoqué Mme [C] [N] pour le 5 septembre 2008 à un entretien préalable à un éventuel licenciement.

Cette mesure a été prononcée par lettre du septembre 2008, motivée par la nécessité pour pour Mme [M] de disposer désormais auprès d'elle des services d'une infirmière diplômée.

La salariée a été dispensée de l'exécution de son préavis qui lui a été payé.

Le 23 juillet 2009, elle a saisi le conseil de prud'hommes qui a rendu le jugement déféré.

SUR CE

En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux conclusions écrites déposées par les parties à l'audience du 31 mars 2015.

Sur la requalification des CDD

Sur la requalification en contrat de travail à durée indéterminée

Il est constant que l'association AIDA est une association intermédiaire agréée par la préfecture [Localité 1] ayant pour objet exclusif la réinsertion de personnes en grande difficulté et qui, dans ce cadre, développe des services à domicile auprès de la population parisienne.

Aux termes de l'article L. 5132-7 du code du travail, les associations intermédiaires sont des associations conventionnées par l'Etat ayant pour objet l'embauche des personnes sans emploi, rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières, en vue de faciliter leur insertion professionnelle en les mettant à titre onéreux à disposition de personnes physiques ou de personnes morales. L'association intermédiaire assure l'accueil des personnes ainsi que le suivi et l'accompagnement de ses salariés en vue de faciliter leur insertion sociale et de rechercher les conditions d'une insertion professionnelle durable.

En application de l'article L. 5132-11-1 du code du travail, les associations intermédiaires peuvent conclure avec des personnes sans emploi rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières des contrats à durée déterminée en application de l'article L. 1242-3 dont la durée ne peut être inférieure à quatre mois et qui peuvent être renouvelés dans la limite d'une durée totale de 24 mois.

Il résulte de l'article D. 1242-1 que les activités d'insertion par l'activité économique exercées par les associations intermédiaires prévues à l'article L. 5132-7 constituent l'un des secteurs dans lesquels des contrats à durée déterminée d'usage peuvent être conclus en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois.

C'est vainement que Mme [C] [N] soutient qu'il appartient à l'association AIDA de démontrer que l'emploi d'aide familiale qu'elle occupait auprès de personnes âgées présentait un caractère temporaire et ne correspondait pas à l'activité permanente de l'employeur. En effet, les contrats de travail conclus par les associations intermédiaires en vue de mettre un salarié à la disposition d'une personne physique ou morale ne sont pas soumis aux dispositions régissant les contrats à durée déterminée. En outre, le caractère par nature temporaire de l'emploi occupé par Mme [C] [N] résulte de l'objet même de l'association AIDA, association intermédiaire, qui vise à faciliter la réinsertion sociale des personnes employées en leur proposant des emplois leur permettant d'acquérir des compétences et une expérience et ainsi de trouver un emploi pérenne. En l'espèce, la signature par Mme [C] [N], en juillet 2008, d'un CDI avec l'une des clientes de l'association, Mme [M], auprès de laquelle elle avait précédemment été mise à disposition démontre que l'association AIDA a accompli sa mission d'assurer l'accompagnement de la salariée en vue de favoriser sa réinsertion professionnelle durable. Enfin, l'employeur fournit une liste établie par son responsable économique et financier indiquant qu'au cours de la relation contractuelle, entre octobre 2006 et juin 2008, la salariée a travaillé auprès de sept personnes : Mme [M] (octobre 2006 à juin 2008) M. [K] (décembre 2006), Mme [Y] (novembre à décembre 2006), Mme [S] (novembre 2006), M. [G] (décembre 2006 à mars 2007), Mme [L] (décembre 2006) et Mme [R] (décembre 2006 à mars 2007).

Il n'y a donc lieu à requalification des CDD en CDI.

Le jugement de première instance sera confirmé sur ce point et Mme [C] [N] déboutée de ses demandes contraires.

Sur la requalification en contrat de travail à temps plein

Mme [C] [N] soutient que ses CDD ne comportent aucune mention de la durée et de la répartition du travail ; qu'aucun planning ne lui a été remis à cet égard ; que l'employeur n'est pas en mesure de démontrer qu'elle n'était pas placée dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme elle devait travailler et qu'elle n'était pas obligée de se tenir constamment à sa disposition ; que l'employeur n'a pas respecté la réglementation relative aux heures complémentaires effectuées au-delà du dixième de la durée contractuelle.

L'article L. 5132-11-1 du code du travail prévoit que la durée hebdomadaire de travail du salarié ne peut être inférieure à 20 heures et qu'elle peut varier sur tout ou partie de la période couverte par le contrat sans dépasser la durée légale hebdomadaire.

L'article L. 3123-14 du code du travail relatif au contrat de travail à temps partiel prévoit que ce contrat de travail mentionne la durée hebdomadaire ou mensuelle de travail et, sauf pour les salariés des associations et entreprises d'aide à domicile et les salariés relevant d'un accord collectif de travail conclu en application de l'article L. 3122-2, la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois, et que dans les associations et entreprises d'aide à domicile, les horaires de travail sont communiqués par écrit chaque mois au salarié.

En l'espèce, les CDD conclus entre Mme [C] [N] et l'association AIDA fixent la durée minimale de travail à 20 ou 30 heures mensuelles (selon les contrats) et précisent que la répartition de cet horaire sera précisé par un planning remis en main propre à la salariée et actualisée chaque fois que nécessaire ; ils précisent en outre que le nombre d'heures autorisées par an est de 750 heures. Les CDD qui mentionnent ainsi la durée mensuelle de travail garantie à la salariée sans prévoir la répartition de l'horaire de travail satisfont aux exigences des dispositions précitées. Mme [C] [N], qui a travaillé pendant près de deux ans au profit de plusieurs personnes âgées concomitamment, ce qui supposait nécessairement une organisation de son temps, n'emporte nullement la conviction quand elle prétend qu'aucun planning ne lui était remis.

Mme [C] [N] ne peut réclamer des heures complémentaires pour les heures effectuées à partir de la 22ème heure (quand le contrat prévoit 20 heures de travail minimum) et à partir de la 33ème heure (quand le contrat prévoit 30 heures de travail minimum) dans la mesure où les heures ainsi mentionnées sont des planchers. Des heures majorées ne peuvent être réclamées qu'à partir de 169 heures - les associations intermédiaires n'étant pas soumises aux 35 heures - ou en cas de travail les dimanches ou jours fériés. Les bulletins de salaire montrent que Mme [C] [N] a régulièrement perçu des heures majorées, le nombre d'heures travaillées et le nombre d'heures donnant lieu à majoration étant précisés. Mme [C] [N] n'apporte pas d'élément montrant qu'elle a effectué des heures de travail qui ne lui auraient pas été payées.

Dans ces conditions, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes relatives à la requalification des CDD en contrats à temps complet, au paiement des rappels de salaire afférents, de majorations pour les heures complémentaires et de dommages et intérêts pour violation de la réglementation concernant lesdites heures complémentaires.

Sur la rupture du dernier CDD d'usage

Mme [C] [N] soutient que les parties étant liées par un contrat à durée indéterminée, l'employeur devait diligenter une procédure de licenciement pour pouvoir mettre fin au contrat de travail.

Mais comme il a été exposé ci-dessus les CDD ne peuvent être requalifiés en CDI. Il sera ajouté qu'en application de l'article L. 1243-1 le CDD peut être rompu avant l'échéance du terme.

En l'occurrence, Mme [C] [N] affirme mais sans nullement l'étayer qu'elle n'a pas librement conclu un CDI avec Mme [M] chez laquelle elle intervenait déjà pour le compte de l'association AIDA. Il doit être observé que, comme l'ont relevé les premiers juges, au moment de la fin de la relation contractuelle entre l'association AIDA et Mme [C] [N], cette dernière avait épuisé le quota d'heures qu'elle pouvait effectuer annuellement au titre des contrats d'usage, de sorte qu'elle n'aurait pas pu bénéficier d'un autre CDD, et que la signature d'un CDI à temps plein avec Mme [M] à effet du 1er juillet 2008 lui a permis, sans interruption d'activité, de trouver un emploi (en théorie) durable ce qui correspondait à la mission de l'association.

Les demandes de Mme [C] [N] relatives à la rupture du dernier CDD d'usage seront, en conséquence, rejetées et le jugement déféré sera confirmé sur ce point également.

Sur la remise des documents sociaux

Les demandes de Mme [C] [N] étant rejetées, il n'y a lieu à remise de documents de fin de contrat et des bulletins de paie rectifiés.

Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens

Succombant en son recours, Mme [C] [N] sera condamnée aux dépens d'appel et gardera à sa charge les frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés à l'occasion de la présente instance, les dispositions prises sur les dépens et les frais irrépétibles de première instance étant confirmées.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne Mme [V] [C] [N] aux dépens d'appel,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Le Greffier,P/la Présidente Empêchée,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 14/04371
Date de la décision : 19/06/2015

Références :

Cour d'appel de Paris L2, arrêt n°14/04371 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-06-19;14.04371 ?
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