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19/06/2015 | FRANCE | N°12/08358

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 11, 19 juin 2015, 12/08358


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11



ARRÊT DU 19 juin 2015 après prorogation

(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/08358

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 28 Juin 2012 par le Conseil de Prud'hommes de LONGJUMEAU - RG n° 11/00473





APPELANT

Monsieur [G] [Y]

[Adresse 2]

comparant en personne, assisté de Me Bénédicte GIARD-RENAULT TEZENAS DU MONTC, avocat au barrea

u de PARIS, toque : D1234







INTIMEE

SA PARROT venant aux droits de la SA DIB COM

[Adresse 1]

représentée par Me Philippe ROUSSELIN-JABOULAY, avocat au barreau de...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11

ARRÊT DU 19 juin 2015 après prorogation

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/08358

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 28 Juin 2012 par le Conseil de Prud'hommes de LONGJUMEAU - RG n° 11/00473

APPELANT

Monsieur [G] [Y]

[Adresse 2]

comparant en personne, assisté de Me Bénédicte GIARD-RENAULT TEZENAS DU MONTC, avocat au barreau de PARIS, toque : D1234

INTIMEE

SA PARROT venant aux droits de la SA DIB COM

[Adresse 1]

représentée par Me Philippe ROUSSELIN-JABOULAY, avocat au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Octobre 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Evelyne GIL, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Luce CAVROIS, Présidente

Madame Evelyne GIL, Conseillère

Madame Isabelle DOUILLET, Conseillère

Qui en ont délibéré

Greffier : Melle Flora CAIA, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Luce CAVROIS, Présidente et par Mademoiselle Flora CAIA, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu l'appel régulièrement formé par [G] [Y] contre un jugement du conseil de prud'hommes de LONGJUMEAU en date du 28 juin 2012 ayant statué sur le litige qui l'oppose à son ancien employeur, la société DIB COM SA aux droits de laquelle se trouve la société PARROT ;

Vu le jugement déféré ayant :

- fixé le salaire d'[G] [Y] à 15'625 €,

- dit la rupture de son contrat de travail pour motif économique fondée sur une cause réelle et sérieuse,

- condamné la SA DIB COM à lui payer les sommes de :

- 937,50 € au titre de la prime de vacances 2009, avec intérêts légaux à compter du jugement et capitalisation des intérêts dus pour une année entière,

- 52'800 € en deniers ou quittance, au titre des commissions dues pour les années 2007 à 2009,

- 5 280 € en deniers ou quittance, au titre des congés payés y afférents,

- 750 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- mis à la charge de la SA DIB COM les entiers dépens, y compris les frais afférents aux éventuels actes d'exécution du jugement ;

Vu les conclusions visées par le greffier et développées oralement à l'audience aux termes desquelles :

[G] [Y], appelant, poursuit :

- la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il lui a attribué les parts variables suivantes :

- 12'325 € et 1 232,50 € à titre de provision sur la part variable de 2007 et les congés payés y afférents,

- 19'800 € et 1 980 € à titre de provision sur la part variable de 2008 et les congés payés y afférents,

- 10'312,50 € et 1 031,25 € à titre de provision sur la part variable de 2009 et les six congés payés y afférents,

- son infirmation pour le surplus,

- la constatation de l'absence de cause réelle et sérieuse justifiant son licenciement économique,

- la fixation de la moyenne de ses salaires à 18'052,49 €,

- la condamnation de la société PARROT, venant aux droits de la société DIB COM, à lui payer les sommes de :

- 1 650 € à titre de prime de vacances pour 2007,

- 1 818,75 € à titre de prime de vacances pour 2008,

- 937,50 € à titre de prime de vacances pour 2009,

- 54'157,46 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 5 415,75 € au titre des congés payés afférents,

- 1 784,37 € à titre de reliquat sur l'indemnité de licenciement,

- 193'000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 4 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile en sus des dépens ;

La société PARROT venant aux droits de la société DIBCOM à la suite de la fusion absorption intervenue le 31 décembre 2011, intimée, conclut :

- à l'infirmation du jugement déféré sauf en ce qu'il a débouté le salarié de ses demandes indemnitaires,

- à la constatation de l'existence d'une cause réelle et sérieuse justifiant le licenciement d'[G] [Y],

- au débouté du salarié de l'ensemble de ses demandes, notamment à titre de rappel de salaire, à l'exception de la somme de 2 063 € brut correspondant à la part variable pour l'année 2009,

- à sa condamnation à lui payer la somme de 4 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile en sus des entiers dépens.

FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La société DIB COM, créée en 2000, était une jeune société française de haute technologie spécialisée dans la conception et la commercialisation de circuits intégrés permettant la réception de la télévision numérique sur des appareils mobiles ou portables.

Elle occupait 88 employés et appliquait la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, cabinets d'ingénieurs conseils et sociétés de conseils, dite SYNTEC

Par lettre du 7 juillet 2006, elle a fait une proposition d'embauche à [G] [Y], citoyen canadien résidant alors Canada, lui offrant d'occuper le poste de VP marketing relevant du statut de cadre dirigeant.

Suivant contrat de travail à durée déterminée signé le 2 janvier 2007, elle l'a engagé en qualité de vice-président marketing et business développement relevant de la catégorie cadre dirigeant, au coefficient 270, position 3.3, à compter du 29 janvier 2007, moyennant un salaire brut annuel forfaitaire de 180'000 € payable en 12 mensualités égales, une prime de résultat pouvant atteindre 11 % du salaire annuel brut en fonction du niveau de réalisation des objectifs définis et le remboursement de ses frais professionnels. En son dernier état, la rémunération de base brute mensuelle du salarié s'élevait à 15'625 € hors primes et commissions.

Le 27 avril 2009, la société DIB COM a soumis au comité d'entreprise un projet de licenciement économique comportant la suppression envisagée de 35 postes de travail dans l'entreprise ainsi qu'un projet de plan de sauvegarde de l'emploi.

Le 29 avril 2009, elle a notifié à la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle son projet de licenciement économique de 46 salariés, 38 en France et 8 à l'étranger.

Au cours de sa réunion extraordinaire du 13 mai 2009, le comité d'entreprise a approuvé à l'unanimité le procès-verbal de la réunion extraordinaire du 27 avril 2009.

Par lettre du 26 mai 2009, la société DIB COM a informé [G] [Y] que son emploi était inclus dans le cadre du plan de licenciement collectif pour motif économique, qu'il pouvait bénéficier d'une série de mesures d'accompagnement inscrites au plan de sauvegarde de l'emploi, qu'il n'existait qu'une possibilité de reclassement en France sur un poste d'accueil et d'assistanat polyvalent rémunéré entre 24'000 et 27'000 € par an, et elle lui a communiqué le dossier d'information et d'adhésion à la convention de reclassement personnalisé.

Le salarié ne s'est pas déclaré intéressé par l'offre de reclassement mais a adhéré à la convention de reclassement personnalisé le 24 juin 2009.

Le 1er juillet 2009, l'employeur lui a notifié son licenciement économique en raison de la situation déficitaire et de sérieuses difficultés économiques impliquant la suppression de son poste et a constaté que par l'effet de son adhésion à la convention de reclassement personnalisé, le contrat de travail se trouvait rompu d'un commun accord depuis le 30 juin 2009.

[G] [Y] a saisi le conseil de prud'hommes de LONGJUMEAU, le 21 septembre 2009, de la contestation de son licenciement et de ses demandes en paiement de rappels de primes, de commissions, de congés payés ainsi qu'en paiement des bons BSPCE et en paiement de dommages-intérêts pour rupture du contrat de travail sans cause réelle et sérieuse et préjudice moral.

Les parties ont développé à l'audience leurs moyens et présenté leurs demandes, tels que formulés dans leurs conclusions respectives.

SUR CE

- Sur l'exécution du contrat de travail

Sur la demande en paiement des primes de résultat au titre des années 2007 (12'325 €), 2008 (19'800 €) et 2009 (10'312,50 € )et des congés payés afférents

(1 232,50 € + 1 980 € + 1 031,25 €)

Le contrat de travail d'[G] [Y] stipule qu'il ' percevra un salaire brut annuel forfaitaire de 180'000 Euros (...) payable en douze (12) mensualités égales.

À ce salaire viendra s'ajouter une prime de résultat. Le montant de cette prime de résultat pourra atteindre en 11 % du salaire annuel brut en fonction du niveau de réalisation des objectifs définis. La détermination de ces objectifs pourra être annuelle ou semestrielle, et sera révisée chaque année ou chaque semestre en fonction de l'activité dans l'entreprise et de l'état du marché '.

Le salarié n'a reçu qu'une prime de résultat au cours de l'exécution de son contrat de travail, du 29 janvier 2007 au 30 juin 2009. Des objectifs dont plusieurs ne sont pas chiffrés ne lui ont été fixés pour l'année 2008 qu'à l'occasion de son entretien d'évaluation annuel qui s'est déroulé le 4 février 2008.

Au vu des résultats non chiffrés se dégageant de cette évaluation pour l'année 2007, la société DIB COM a estimé que 62,5 % des ' objectifs ' avaient été atteints correspondant à une prime de résultat de 12'375 €, le bonus maximal pour 100 % des objectifs atteints s'établissant à 180'000 € x 11 % = 19'800 €. Elle soutient cependant que le salarié a renoncé à son bonus au titre de l'année 2007 et que n'ayant réalisé que 37,5 % de ses objectifs en 2008 et 20 % en 2009, il ne pouvait prétendre qu'à une rémunération variable de 7'425 € qui lui a été versée en janvier 2009 et de 2 063 €pour l'année 2009.

Il n'est pas établi qu'[G] [Y] a expressément renoncé à sa prime de résultat pour l'année 2007.

Aux termes de ses conclusions, il accepte à ce titre 12'325 € pour l'année 2007. Il sera toutefois constaté que l'employeur reconnaît que la prime qui devait lui revenir se chiffrait à 12'375 €.

Il n'est pas démontré que le salarié n'a pas atteint en 2008 et 2009, les objectifs qui lui ont été fixés le 4 février 2008. Dans ces conditions, il sera fait droit à sa demande en paiement d'une rémunération variable maximale de 19'800 € pour 2008, dont à déduire 7'425 € versés avec le salaire de janvier 2009 (13'375 €), cette rémunération variable étant limitée pour 2009 à 9'900 €, compte tenu de la fin de son contrat de travail intervenue le 30 juin 2009 au soir.

Sur la demande en paiement des primes de vacances au titre des années

2007 (1 650 €), 2008 (1 818,75 €) et 2009 (937,50 €)

L'article 31 de la convention collective SYNTEC dispose que ' l'ensemble des salariés bénéficie d'une prime de vacances d'un montant au moins égal à 10 % de la masse globale des indemnités de congés payés prévues par la convention collective de l'ensemble des salariés' et que ' toutes primes ou gratifications versées en cours d'année à divers titres et quelle qu'en soit la nature peuvent être considérées comme primes de vacances à condition qu'elles soient au moins égales aux 10 % prévus à l'alinéa précédent et qu'une partie soit versée pendant la période située entre le 1er mai et le 31 octobre.'

Le conseil de prud'hommes a justement relevé d'une part, que si cette disposition ne précisait pas la façon dont la somme globale allouée aux primes de vacances devait être répartie entre les salariés, il résultait du texte que tous devaient bénéficier de cette prime dont une partie devait être versée entre le 1er mai et le 31 octobre, d'autre part, que l'attestation du directeur administratif et financier indiquant que la société s'était acquittée de son obligation, de 2006 à 2009, en ayant versé à titre de primes diverses, dont une partie durant la période de mai à octobre, une somme supérieure au dixième du total annuel des indemnités de congés payés, ne suffisait pas à prouver que la société DIB COM avait rempli ses obligations en matière de primes conventionnelles de vacances à l'égard d'[G] [Y].

L'examen des bulletins de paie de l'appelant montre qu'il n'a perçu qu'une prime exceptionnelle en février 2007 et une prime de résultat en janvier 2009, les primes de vacances lui sont donc dues, de 2007 à 2009, dans les termes de sa demande.

- Sur la rupture du contrat de travail et ses conséquences

[G] [Y] soutient que la rupture de son contrat de travail est dépourvue de cause réelle et sérieuse dès lors que l'employeur ne lui a pas notifié, au plus tard au moment de son adhésion à la convention de reclassement personnalisé (CRP), le motif économique de la rupture.

La société PARROT réplique qu'appartenant au comité de direction, l'appelant avait été informé du projet de licenciement économique avant tous les salariés, et avant même le comité d'entreprise.

Le dossier d'adhésion à la convention de reclassement personnalisé a été remis à [G] [Y] le 26 mai 2009 puis, à nouveau le 9 juin 2009.

Le salarié a adhéré à la convention le 24 juin 2009, provoquant la rupture effective de son contrat de travail le 30 juin 2009 au soir. La société DIB COM lui a adressé une lettre de licenciement pour motif économique, exposant les raisons de la rupture, le 1er juillet 2009, soit postérieurement à son acceptation de la CRP. Avant cette date, elle ne justifie pas lui avoir expédié ou remis une convocation à entretien préalable ou tout autre courrier développant les motifs économiques de la rupture envisagée.

Cependant, le salarié a reçu sans réserves le document de présentation de la convention de reclassement personnalisé, ainsi qu'il le reconnaît dans le récépissé qu'il a signé le 9 juin 2009. Ce document écrit d'information énonçant le motif économique de la rupture envisagée ayant été remis avant son acceptation de la CRP, il n'y a pas lieu de constater une absence de motif de la rupture la rendant de ce seul fait dépourvue de cause réelle et sérieuse.

Aux termes de sa lettre du 1er juillet 2009, l'employeur motive le licenciement économique notifié à [G] [Y] comme suit :

' DiBcom est une société déficitaire qui doit faire face à de sérieuses difficultés économiques dues à une chute importante du chiffre d'affaires sur plusieurs trimestres, à une situation déficitaire, une absence de visibilité sur 2009, une insuffisance de trésorerie pouvant conduire à un dépôt de bilan si des mesures de réduction importante des coûts ne sont pas prises, la perte d'un appel d'offres important et l'impossibilité à court terme de lever des fonds. ...................................................................................................................

Conformément à la loi, nous vous avons proposé par courrier en date du 28 mai 2009 une offre de reclassement ferme en France.

N'ayant pas reçu de réponse écrite de votre part dans les délais impartis, cela équivaut à un refus d'accepter cette offre de reclassement.

En l'absence de toute autre possibilité de reclassement, votre licenciement pour motif économique est donc inéluctable.'

[G] [Y] rappelle le licenciement économique collectif de forte ampleur auquel la société DIB COM avait déjà procédé fin 2007 pour supprimer 17 postes sur 52 et s'appuie sur les déclarations prononcées à cette occasion par le directeur général de la société, aux termes desquelles il s'agissait de garder les meilleurs et de licencier les plus mauvais, pour soutenir que l'utilisation d'une baisse d'activité temporaire de la société constituait pour elle le prétexte pour procéder à moindre coût à des licenciements d'opportunité.

Il fait justement valoir qu'une chute du chiffre d'affaires, même importante, et la ' perte ' d'un appel d'offres important ne sont pas des indicateurs suffisants pour caractériser à eux seuls dans une entreprise une situation de difficultés économiques au sens l'article L. 1233-3 du Code du travail. Il doit en effet être démontré que de tels éléments ont des incidences sur la situation économique de l'employeur et participent à la détérioration de ses résultats.

La société DIB COM ne faisait pas partie d'un groupe donnant lieu à l'établissement de comptes consolidés mais disposait d'établissements et de bureaux implantés à l'étranger, notamment en Asie.

L'organigramme de la société montre que les différentes succursales en Chine, au Japon, en Corée, à Taïwan et en Inde étaient rattachées à la direction des ventes mondiales.

La société DIB COM fait état d'une situation très fortement déficitaire en 2008 et au premier trimestre 2009, d'une absence de visibilité sur les commandes pour 2009, d'une insuffisance de trésorerie et de l'impossibilité de lever des fonds, situation qui exigeait la réduction des coûts et donc des effectifs pour éviter un dépôt de bilan à terme.

Les pièces du dossier tendent à montrer qu'une telle situation était liée aux difficultés rencontrées sur le marché par le système de télévision mobile personnelle développé par la société.

Les comptes de résultat affichent une perte de 5'680'491 € au 31 décembre 2008 qui s'est aggravée au 31 décembre 2009 en atteignant 9'888'179 €, en dépit de la réduction des salaires et traitements et des charges sociales, cette perte résultant manifestement du montant du chiffre d'affaires qui a chuté de 18'711 011 € à 9'033'908 €.

Les difficultés économiques de la société DIB COM exigeant au cours de l'année 2009 des mesures de réduction des coûts salariaux et la suppression du poste de vice-président marketing et business développement sont ainsi démontrées.

La société reconnaît dans ses écritures avoir présenté depuis l'année 2004, un résultat net déficitaire, dont une perte de 9,3 millions d'euros en 2007 qui l'avait contrainte à procéder alors à un licenciement collectif économique de 16 salariés en France. En l'absence de production des comptes annuels depuis l'année 2006 permettant de déterminer l'origine du déficit, le salarié ne saurait lui reprocher sa légèreté blâmable ayant consisté à lui consentir un contrat de travail à durée indéterminée, le 2 janvier 2007, alors qu'elle aurait été informée de sa situation financière obérée.

En exécution des dispositions de l'article L. 1233-4 du Code du travail, la société DIB COM a proposé à [G] [Y] son reclassement sur un poste d'accueil et d'assistanat polyvalent consistant notamment à accueillir les visiteurs, les informer, réserver les taxis, répondre au téléphone, transmettre les appels externes vers les différents services, prendre les messages téléphoniques, gérer les courriels arrivant sur la messagerie dibcom, gérer le courrier, assurer le secrétariat de la Direction, réserver les voyages, hôtels, restaurants, gérer les commandes de fournitures, suivre les services généraux de la société, cet emploi exigeant la pratique courante de la langue anglaise et étant rémunéré entre 24 et 27 K€ par an.

Ce poste de reclassement se trouvant, selon les déclarations de l'employeur, le seul alors vacant dans l'entreprise, a été proposé à l'ensemble des salariés dont le licenciement économique était envisagé.

Outre que la proposition ne comportait pas la fixation précise du montant de la rémunération, elle n'était pas adaptée à la situation de cadre dirigeant de l'appelant. Or, l'offre de reclassement doit être individualisée et procéder d'une recherche effectuée de bonne foi et avec un souci maximal d'exploration de toutes les possibilités, dans l'ensemble de l'entreprise, y compris au sein de ses établissements, bureaux ou succursales.

La société DIB COM ne justifie d'aucune diligence pour tenter de reclasser [G] [Y], d'aucune recherche d'emploi disponible dans ses différents établissements, avant de déclarer que son licenciement s'est avéré ' inéluctable '. L'inexécution de son obligation de reclassement a pour conséquence de rendre dépourvue de cause réelle et sérieuse la rupture du contrat de travail pour motif économique.

Sur le salaire moyen de référence

Le montant du salaire moyen est calculé sur la base du douzième de la rémunération des 12 derniers mois précédant le licenciement ou, selon la formule la plus avantageuse pour le salarié, le tiers des trois derniers mois, et comprend l'ensemble des éléments de rémunération, qu'elle soit fixe ou variable, et l'ensemble des primes et complément de salaire.

Au vu des bulletins de paie de juillet 2008 à juin 2009 inclus, le salaire moyen perçu par [G] [Y] au cours des 12 derniers mois ayant précédé la rupture de son contrat de travail se chiffre, après intégration des commissions dues pour la période considérée, à 18'052,49 €.

Sur les indemnités de rupture

La société DIB COM a réglé à [G] [Y], en juin 2009, une indemnité compensatrice de préavis de 16'243,75 €. Compte tenu du montant du salaire moyen de référence, elle reste lui devoir :

3 x (18'052,49 € ' 16'243,75 €) = 37'913,72 €, outre 3 791,37 € au titre des congés payés correspondants.

Au titre de l'indemnité de licenciement, elle reste lui devoir 1 784,37 €.

En considération de l'ancienneté du salarié, de son âge et des éléments de préjudice versés au dossier, la cour dispose des éléments suffisants pour fixer à 120'000 €, en application de l'article L. 1235-3 du Code du travail, la réparation du dommage que lui a causé son licenciement sans cause réelle et sérieuse.

- Sur l'application d'office de l'article L. 1235-4 du Code du travail en faveur du

PÔLE EMPLOI

[G] [Y] ayant plus de deux années d'ancienneté et la société DIB COM occupant habituellement au moins onze salariés, il convient d'ordonner le remboursement par l'employeur fautif des indemnités de chômage payées au salarié licencié du jour de son licenciement dans la limite de six mois en application de l'article L. 1235-4 du Code du travail.

- Sur la charge des dépens et les demandes d'indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile

La société PARROT, succombant partiellement à l'issue de l'appel, en supportera les dépens.

Au vu des circonstances de la cause, il serait inéquitable de laisser à la charge d'[G] [Y] les frais non taxables qu'il a exposés en cause d'appel. Il convient de lui allouer à ce titre une indemnité de 2 500 €, de rejeter la demande formée par la société PARROT sur le même fondement et de confirmer l'application qui a été faite par le conseil de prud'hommes des mêmes dispositions.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a condamné la SA DIB COM à payer à [G] [Y] la prime de vacances 2009 et une indemnité sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et en ce qu'il a mis les entiers dépens à la charge de l'employeur ;

L'infirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Constate l'absence de tentative de reclassement préalable au licenciement notifié à [G] [Y] le 1er juillet 2009 ;

En conséquence, dit que la rupture du contrat de travail pour motif économique est dépourvue de cause réelle et sérieuse ;

Constate que la moyenne des 12 derniers mois de salaire ayant précédé la rupture s'élève à 18'052,49 € ;

Constate que la société PARROT venant aux droits de la SA DIB COM reconnaît que l'activité du salarié en 2007 justifiait une prime de résultat de 12'375 € ;

Condamne la société PARROT venant aux droits de la société DIB COM à payer à [G] [Y] les sommes de :

- 1 650 € à titre de prime de vacances pour l'année 2007,

- 1 818,75 € à titre de prime de vacances pour l'année 2008,

- 12'325 € au titre de la prime de résultat pour l'année 2007,

- 1 232,50 € au titre des congés payés afférents,

- 13'375 € au titre de la prime de résultat pour l'année 2008,

- 1 337,50 € au titre des congés payés afférents,

- 9'900 € au titre de la prime de résultat pour l'année 2009,

- 990 € au titre des congés payés afférents,

- 37'913,72 € au titre du solde de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 3 791,37 € au titre des congés payés afférents,

- 1 784,37 € au titre du solde de l'indemnité de licenciement,

- 120'000 € à titre d'indemnité pour rupture du contrat de travail sans cause réelle et sérieuse,

- 2 500 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Rejette le surplus des demandes ;

Condamne la société PARROT venant aux droits de la société DIB COM à rembourser au PÔLE EMPLOI les indemnités de chômage payées au salarié licencié à compter du jour de son licenciement et dans la limite de six mois ;

La condamne aux dépens de l'appel.

Le Greffier,La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 12/08358
Date de la décision : 19/06/2015

Références :

Cour d'appel de Paris L2, arrêt n°12/08358 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-06-19;12.08358 ?
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