Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 2
ARRÊT DU 17 JUIN 2015
(n° , 10 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/15825
Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Juin 2013 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 11/17540
APPELANTE
SCI CARMIGNAC VENDOME, RCS PARIS 399 292 408, ayant son siège social
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représentée par Me Bernard LAMORLETTE de la SELARL L.V.I AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0205
INTIMÉS
Syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 1] représenté par son syndic en exercice, la Société FONCIA FRANCO SUISSE, RCS PARIS 582 098 026, ayant son siège social
[Adresse 5]
[Adresse 5]
représenté par Me Jacqueline AUSSANT, avocat au barreau de PARIS, toque : E1638
SAS VAN CLEEF & ARPELS HOLDING FRANCE, RCS PARIS 421 069 246, ayant son siège social
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représentée par Me Bruno REGNIER de la SCP REGNIER - BEQUET - MOISAN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050
assistée de Me Nicolas BOYTCHEV de la SELARL RACINE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0301
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 08 Avril 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Dominique DOS REIS, Président de chambre
Madame Denise JAFFUEL, Conseiller
Madame Claudine ROYER, Conseiller, chargée du rapport
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame Emilie POMPON
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Dominique DOS REIS, Président et par Madame Emilie POMPON, Greffier présent lors du prononcé.
***
La SCI CARMIGNAC VENDÔME est propriétaire de lots situés au 3ème et 4ème étages de l'immeuble sis [Adresse 1], immeuble dépendant d'un ensemble immobilier composé de 5 bâtiments situés:
- le bâtiment A : [Adresse 1],
- le bâtiment B : [Adresse 4],
- le bâtiment C : [Adresse 1],
- le bâtiment D : [Adresse 3],
- le bâtiment E : [Adresse 2].
Ces lots sont loués à la Société CARMIGNAC GESTION. Les clients de cette société pénètrent dans l'immeuble par une porte donnant sur la [Localité 2].
La Société VAN CLEEF & ARPELS HOLDING FRANCE dispose d'un magasin en façade situé au rez-de-chaussée entre les deux porches des bâtiments des [Adresse 1]. Ce magasin arbore des enseignes en imposte sur chacune des 8 arcades composant la façade de l'immeuble.
A la suite d'une injonction de la Ville de [Localité 1] de 2009 de procéder au ravalement des façades donnant sur la [Localité 2], l'assemblée générale des copropriétaires du 16 décembre 2010 a donné mandat à M. [L] d'établir le permis de construire et l'appel d'offres pour le ravalement des façades des bâtiments des [Adresse 1].
Convoquée pour le 8 juillet 2011 pour statuer notamment sur le permis de construire du ravalement des façades [Localité 2], l'assemblée générale a été reportée à une assemblée générale postérieure du 9 septembre 2011, aux frais de la société VAN CLEEF & ARPELS HOLDING FRANCE, avec présentation de 2 ou 3 projets présentés par le cabinet [L].
A cette assemblée générale du 9 septembre 2011, une résolution n°4 a été adoptée décidant de valider le projet de ravalement des façades côté [Localité 2] comprenant la pose de portes cochères avec l'enseigne «VAN CLEEF & ARPELS » présentée par le Cabinet [L]. La résolution précisait qu'une assemblée spéciale serait tenue pour le vote des travaux concernant le permis de construire déposé, après purge des délais légaux.
La société CARMIGNAC VENDÔME a contesté cette résolution n° 4 en assignant le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] par acte d'huissier du 8 novembre 2011 aux fins d'obtenir l'annulation partielle de cette résolution, et subsidiairement l'annulation totale de cette résolution.
La Société VAN CLEEF & ARPELS HOLDING FRANCE est intervenue volontairement à la procédure.
Par jugement du 18 juin 2013, le Tribunal de grande instance de Paris (8ème chambre) a :
- déclaré irrecevable la demande d'annulation partielle,
- rejeté les autres demandes de la SCI CARMIGNAC VENDÔME,
- dit que la société VAN CLEEF & ARPELS HOLDING FRANCE avait un droit acquis au maintien des enseignes en imposte des 8 arcades de la façade de l'immeuble du [Adresse 1],
- condamné la SCI CARMIGNAC VENDÔME à payer à la société VAN CLEEF & ARPELS HOLDING FRANCE et au syndicat des copropriétaires la somme de 2.000 euros chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la SCI CARMIGNAC VENDÔME aux dépens.
La SCI CARMIGNAC VENDÔME a relevé appel de ce jugement par déclaration d'appel du 30 juillet 2013.
La SCI CARMIGNAC VENDÔME demande à la Cour, par dernières conclusions signifiées le 17 décembre 2014, de :
- déclarer son appel recevable et fondé et y faisant droit,
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré irrecevable sa demande principale et rejeté ses autres demandes,
- infirmer le jugement en ce qu'il a dit que la société VAN CLEEF ET ARPELS HOLDING avait un droit acquis au maintien des enseignes en imposte des huit arcades de la façade de l'immeuble du [Adresse 1],
- confirmer le rejet de la demande reconventionnelle du Syndicat des copropriétaires de la voir condamner à 150.000 euros à titre de dommages et intérêts,
- confirmer le rejet de la demande reconventionnelle de VAN CLEEF ET ARPELS de se voir reconnaître un droit au maintien de ses enseignes à caractère réel.
Et par l'effet dévolutif de l'appel,
A titre principal :
- la déclarer recevable et fondée à demander l'annulation partielle de la résolution n°4 du 9 septembre 2011 ayant validé le projet de ravalement des façades, côté [Localité 2], comprenant la pose de portes cochères avec l'enseigne « VAN CLEEF & ARPELS »,
- annuler en conséquence partiellement la résolution n°4 prise lors de l'assemblée générale de l'immeuble [Adresse 1], en date du 9 septembre 2011en tant qu'elle prévoit la pose de portes cochères avec l'enseigne VAN CLEEF & ARPELS,
A titre subsidiaire,
- la déclarer recevable et fondée à demander l'annulation totale de la résolution n°4,
- annuler en conséquence ladite résolution en sa totalité,
En tout état de cause,
- condamner le Syndicat des copropriétaires à lui payer la somme de 5000 € au titre de l'article 700 code de procédure civile,
- condamner le Syndicat des copropriétaires aux entiers dépens, dont distraction au profit de LVI avocats & associés.
Le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] demande à la Cour, par dernières conclusions signifiées le 15 décembre 2014, de :
- déclarer la SCI CARMIGNAC VENDÔME mal fondée en son appel du jugement déféré,
- déclarer la SCI CARMIGNAC VENDÔME irrecevable en son recours à l'encontre de la résolution n° 4 votée lors de l'assemblée du 9 septembre 2011, pour défaut d'intérêt à agir
- subsidiairement, débouter la SCI CARMIGNAC VENDÔME de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- en toute hypothèse, confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il n'a pas fait droit à sa demande de dommages et intérêts,
Faisant droit à l'appel incident de ce chef,
- dire et juger que l'opposition aux travaux de ravalement est à l'origine de la nécessité de la pose de filets de protection de la façade, à titre conservatoire,
- condamner la SCI CARMIGNAC VENDÔME à lui payer une somme de 150.000 Euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par l'ensemble des copropriétaires du fait de sa résistance abusive,
- condamner la SCI CARMIGNAC VENDÔME à lui payer une somme de 10.000 Euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la SCI CARMIGNAC VENDÔME aux dépens de la présente instance dont distraction au profit de son avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
La Société VAN CLEEF & ARPELS HOLDING FRANCE demande à la Cour, par dernières conclusions signifiées le 12 décembre 2014, de :
- débouter la SCI CARMIGNAC VENDÔME de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- déclarer la SCI CARMIGNAC VENDÔME irrecevable en sa demande d'annulation de la résolution n°4 de l'assemblée générale du 9 septembre 2011,
- confirmer le jugement rendu le 18 juin 2013 par le Tribunal de Grande Instance de Paris en ce qu'il a :
* déclaré irrecevable la demande d'annulation partielle,
* rejeté les demandes de la SCI CARMIGNAC VENDÔME,
* déclaré que les actions tendant à la suppression des enseignes affectant l'aspect extérieur de l'immeuble constituaient des actions personnelles soumises à la prescription décennale prévue par l'article 42 alinéa 1 de la loi du 10 juillet 1965 et que le Syndicat des Copropriétaires ne pourrait dès lors adopter valablement une résolution tendant à la suppression d'une enseigne posée depuis plus de dix ans,
* dit que la société VAN CLEEF & ARPELS HOLDING FRANCE bénéficiait d'un droit acquis au maintien de ses enseignes en imposte des huit arcades de la façade de l'immeuble du [Adresse 1],
- en revanche, infirmer le jugement en ce qu'il a considéré que le droit acquis par la société VAN CLEEF & ARPELS HOLDING FRANCE au maintien de ses enseignes en imposte des huit arcades de la façade de l'immeuble du [Adresse 1] n'avait pas de caractère réel et dire que ce droit est un droit réel,
- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la SCI CARMIGNAC VENDÔME à payer à la société VAN CLEEF & ARPELS HOLDING FRANCE la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
Y ajoutant,
- condamner la SCI CARMIGNAC VENDÔME à lui payer la somme de 5.000 Euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile, au titre des frais exposés en appel et non compris dans les dépens,
- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la SCI CARMIGNAC VENDÔME aux dépens de première instance, avec application des dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile,
- condamner la SCI CARMIGNAC VENDÔME aux dépens d'appel dont le recouvrement sera effectué conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.
Pour un plus ample exposé des faits de la cause, des procédures, des prétentions, moyens et arguments dont elle est saisie, la Cour fait référence expresse à la décision déférée et aux dernières conclusions d'appel des parties.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 17 décembre 2014.
CELA ÉTANT EXPOSÉ, LA COUR,
La résolution n° 4 contestée de l'assemblée générale du 9 septembre 2011 intitulée « vote sur le permis de construire du ravalement des façades de la [Localité 2] » était ainsi libellée :
« L'Assemblée Générale décide de valider le projet de ravalement des façades côté [Localité 2] comprenant la pose de portes cochères avec l'enseigne Van Cleef & Arpels présenté par le cabinet [L].
Il est rappelé qu'une Assemblée Spéciale se tiendra pour le vote des travaux, concernant le permis de construire, et une fois les délais légaux purgés »
Cette résolution, adoptée à la majorité de l'article 24 de loi du 10 juillet 1965, a recueilli :
POUR : 6.680 voix sur 12765 tantièmes,
CONTRE : 6085 voix sur 12765 tantièmes,
ABSTENTION : 0
Sur la recevabilité du recours en annulation de la résolution N°4 de l'assemblée générale du 9 septembre 2011
Le syndicat des copropriétaires et la société VAN CLEEF & ARPELS HOLDING FRANCE soutiennent que la société CARMIGNAC VENDÔME doit être déclarée irrecevable en sa demande d'annulation celle-ci n'ayant plus d'intérêt à agir puisque :
- le permis de construire dont le dépôt a été autorisé par une assemblée générale du 28 juin 2012 aujourd'hui définitive, a été déposé et accordé le 16 juillet 2013,
- les travaux de ravalement ont été votés, par l'assemblée générale des copropriétaires également définitive du 11 juillet 2013,
- lesdits travaux sont en cours d'exécution.
La société CARMIGNAC VENDÔME répond à juste titre que l'intérêt à agir s'apprécie au jour de la demande ; que l'arrêté de permis de construire ne précisait rien au sujet de pose de l'enseigne Van Cleef & Arpels ; qu'au jour de l'introduction de sa demande, elle disposait d'un intérêt à agir contre la résolution litigieuse, sans que les évènements postérieurs aient pu rendre cet intérêt à agir sans objet.
La fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir soulevée par les parties intimées sera donc écartée. La société appelante sera donc être déclarée recevable en son appel portant sur l'annulation partielle ou totale de la résolution n°4.
Sur la demande en annulation partielle de la résolution n°4 de l'assemblée générale du 9 septembre 2011
Cette demande avait été déclarée irrecevable en première instance au motif que cette résolution, même si elle avait trait à plusieurs points, constituait un ensemble indissociable et qu'à défaut de votes distincts sur chacun de ces éléments, elle ne pouvait faire l'objet d'une annulation partielle.
La SCI CARMIGNAC VENDÔME demande l'infirmation de cette irrecevabilité. Elle soutient qu'une annulation partielle est possible dès lors :
- que l'annulation demandée ne porte que sur un aspect mineur de la résolution ne remettant pas en cause l'économie générale du vote des copropriétaires,
- que cette partie est dissociable du reste de la résolution,
- que la demande d'annulation partielle n'emporte aucune conséquence néfaste sur la sécurité, la salubrité ou l'intégrité de l'immeuble.
En l'espèce, la société appelante prétend qu'en dépit de la présentation de la résolution litigieuse, celle-ci refermait deux décisions distinctes (le ravalement de la façade, et la pose et dépose de l'enseigne Van Cleef & Arpels) ; que sa demande d'annulation de la partie relative à l'enseigne portait sur un élément mineur non susceptible de remettre en cause l'économie générale du projet qui était le ravalement de la façade, que cette question était parfaitement dissociable du ravalement, et n'était pas de nature à remettre en cause l'intégrité de l'immeuble, cette demande ayant pour but de ne pas retarder les travaux de ravalement nécessaires.
Le syndicat des copropriétaires et la société VAN CLEEF & ARPELS HOLDING FRANCE demandent à la Cour de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré irrecevable l'annulation partielle de la résolution n°4. Les intimés soutiennent que la résolution avait un unique objet ; que la dissociation opérée par l'appelante est artificielle et fallacieuse ; qu'un recours contre une résolution d'assemblée générale ne peut avoir pour objet que son annulation et non sa modification ; qu'accueillir cette annulation partielle aboutirait à conférer à la Cour le pouvoir de substituer une résolution à une autre, pouvoir qu'elle n'a pas, ni le tribunal.
Contrairement à ce que soutient la société CARMIGNAC VENDÔME, l'objet de la résolution ne portait pas sur deux questions distinctes parfaitement dissociables (le ravalement d'une part et la dépose et re-pose d'enseignes d'autre part), mais sur le choix d'un projet de ravalement parmi plusieurs projets présentés, lesquels comportaient soit la pose de portes cochères avec enseignes « Van Cleef & Arpels », soit la pose desdites portes sans enseignes.
Il en résulte que le vote unique en l'espèce constituait un vote indissociable, même s'il avait trait à plusieurs points. Dans ces circonstances il n'est en effet pas possible d'annuler partiellement cette résolution qui s'était volontairement prononcée sur deux points distincts mais par un vote unique.
Il y a donc lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande d'annulation partielle de la résolution n°4 formée par la SCI CARMIGNAC VENDÔME ;
Sur la demande d'annulation en son entier de la résolution n°4 de l'assemblée générale du 9 septembre 2011
La société CARMIGNAC VENDÔME invoque à l'appui de sa demande d'annulation, la méconnaissance des règles de convocation édictées à l'article 9 du décret du 17 mars 1967, la violation des modalités de vote, un abus de majorité caractérisé et la violation des règles gouvernant la disposition des parties communes.
Sur la régularité de la convocation
L'article 9 du décret du 17 mars 1967 précise que « la convocation contient l'indication de (...) l'ordre du jour qui précise chacune des questions soumises à la délibération de l'assemblée ».
L'appelante fait valoir notamment que la convocation à l'assemblée générale était équivoque et faisait état d'un projet unique avec deux options mais que seul le projet n°2 a fait l'objet d'un vote ; que les plans joints au projet de résolution ne permettaient pas un vote éclairé sur les projets.
Le syndicat des copropriétaires et la société VAN CLEEF & ARPELS répondent que la convocation comportait un projet de résolution joint avec deux dessins correspondant aux deux projets de Monsieur [L] et que les copropriétaires avaient des informations suffisantes leur permettant de voter en connaissance de cause.
La SCI CARMIGNAC n'apporte sur ce point en cause d'appel aucun élément nouveau de nature à remettre en cause la décision des premiers juges, lesquels ont fait une juste appréciation des circonstances de la cause tant en droit qu'en fait par des motifs pertinents que la cour fait siens, étant observé que le projet de résolution mentionné dans la convocation ainsi que les croquis joints permettaient clairement aux copropriétaires de choisir entre les projets de ravalement qui leur étaient proposés, l'option de la pose ou non d'enseignes étant aisément compréhensible au vu des croquis joints.
Il y a donc lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a estimé la convocation régulière au regard des dispositions de l'article 9 du décret du 17 mars 1967.
Sur les modalités de vote
L'appelante soutient en substance que l'indication des majorités requises était erronée ; que les premiers juges ont estimé à tort que la majorité de l'article 24 était suffisante en dépit de l'absence d'autorisation d'assemblée générale ayant autorisé la pose d'enseignes ; que la résolution n°4 avait deux objets distincts relevant de deux régimes juridiques distincts et devant être soumis à des modalités de vote distinctes ; que la pose d'enseignes devait notamment être adoptée à la majorité de l'article 26 de la loi du 10 juillet 1965.
Le syndicat des copropriétaires soutient que la résolution 4 a été adoptée à la majorité de l'article 25 et n'avait pas pour objet le vote des travaux de ravalement qui devait intervenir ultérieurement ; qu'il ne s'agissait pas d'un vote bloqué ; qu'il n'y avait aucune atteinte à la destination de l'immeuble, ni à son harmonie ; que la pose d'enseigne relevait de la majorité de l'article 25 b de la loi du 10 juillet 1965 et ne pouvait s'analyser en une privatisation d'immeuble ; que le vote n'autorisait pas l'installation d'une enseigne qui était en place depuis des décennies, mais sa dépose pour les besoins du ravalement et sa repose.
La société VAN CLEEF & ARPELS estime qu'il n'y a pas eu violation des modalités de vote et que la majorité de l'article 24 était suffisante ; que la repose des enseignes n'était que la conséquence de leur dépose et était indispensable à la réalisation des travaux de ravalement ; que la question de la dépose de ses enseignes était prescrite, ces dernières étant apposées sur les portes cochères depuis 1953. Elle revendique un droit acquis à la présence de ces enseignes en façade et demande à la Cour de dire qu'il s'agit d'un droit réel au maintien de ces enseignes en imposte [Localité 2].
La convocation adressée aux copropriétaires précisait que la majorité nécessaire pour le vote de la résolution n°4 serait celle de l'article 24 [de la loi du 10 juillet 1965].
Le jugement déféré a estimé que les enseignes litigieuses étant installées depuis plus de 10 ans, la question de leur pose et dépose était prescrite en application de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965 ; que dans le cas d'espèce, cette dépose et repose n'étaient que la conséquence des travaux de ravalement ; que seuls les copropriétaires concernés par le ravalement devaient se prononcer et que la majorité de l'article 24 était suffisante.
Il n'est pourtant pas contestable que toute décision concernant des travaux de dépose et repose d'enseignes relevait de la majorité de l'article 25 de la loi du 10 juillet 1965 dès lors qu'elles affectaient la façade ou l'aspect extérieur d'un immeuble et étaient apposées sur les parties communes de l'immeuble. Cette décision ne relevait pas de la majorité de l'article 26 comme le prétend la SCI CARMIGNAC dans la mesure où lesdites enseignes ne constituaient aucune appropriation des parties communes, aucune atteinte à la jouissance des parties communes et aucune atteinte au règlement de copropriété, ainsi que le révèlent les photographies produites aux débats.
Il n'est pas davantage contesté que le ravalement ou toute décision y afférant nécessitait un vote à la majorité de l'article 25 dès lors que ces travaux relevaient de modalités et d'exécution d'obligations légales ou réglementaires ou concernaient des travaux à effectuer sur les parties communes en vue de prévenir les atteintes aux personnes et aux biens. Tel était bien le cas en l'espèce, puisque selon les parties, le ravalement avait été effectué à la suite de la mise en demeure de la Ville de [Localité 1] adressée aux copropriétaires par courrier du 22 janvier 2009.
Quoi qu'il en soit, et sans se préoccuper de l'opportunité de lier la question des enseignes au projet de permis de construire devant être déposé, qui relevait de l'appréciation souveraine de l'assemblée générale, il résulte du procès-verbal d'assemblée du 9 septembre 2011 que la résolution n°4 a été adoptée, de fait, à la majorité de l'article 25, le vote requis ayant recueilli 6.680 voix sur 12765 tantièmes, soit plus de la moitié des voix du syndicat plus une.
Compte tenu des résultats du vote, le moyen tiré de la violation des modalités de vote sera donc écarté mais par d'autres motifs, substitués à ceux des premiers juges.
Sur l'abus de majorité
La SCI CARMIGNAC VENDÔME prétend que par le biais du vote sur le ravalement, la pose des enseignes litigieuses a été le résultat de man'uvres destinées à obtenir un vote contraire à l'intérêt commun et de nature à favoriser uniquement le copropriétaire VAN CLEEF & ARPELS dont la stratégie était d'occuper un maximum d'espace au mépris des droits des autres copropriétaires ; que la pose de ces enseignes, qui n'avait aucune contrepartie, ne revêtait un intérêt commercial que pour cette société et était donc contraire à l'intérêt de la copropriété.
Le syndicat des copropriétaires et la société VAN CLEEF & ARPELS contestent ces allégations et demandent à la Cour de confirmer la décision de première instance en ce qu'elle a écarté cet abus de majorité.
Le jugement déféré a considéré que le syndicat ne pouvait demander la suppression des enseignes (en raison de la prescription), l'adoption du projet prévoyant leur repose ne pouvait constituer un abus de majorité.
L'abus de majorité peut revêtir divers aspects tels que le fait par exemple pour la majorité d'user de ses droits sans profit pour elle même, dans l'intention de nuire, ou à tout le moins, dans un but autre que l'intérêt commun de la copropriété, ou celui d'adopter des décisions non inspirées par la poursuite de l'intérêt collectif, par des préoccupations partisanes, ou ayant pour effet de rompre l'égalité entre les copropriétaires.
En l'espèce, la SCI CARMIGNAC ne démontre nullement ni ne caractérise, preuve qui lui incombe, les man'uvres qu'aurait déployées la société VAN CLEEF & ARPELS pour faire adopter la résolution litigieuse.
Au contraire, il résulte des pièces produites que les enseignes en cause étaient en place depuis de très nombreuses années, depuis l'ouverture de la boutique de joaillerie en 1954, l'apposition de ces enseignes ayant été autorisée en 1953 par l'architecte des Bâtiments de France. Ces éléments de même que les photos démontrant que ces enseignes étaient toujours présentes lors du tournage du film FANTOMAS en 1964 par le cinéaste [I] [M], sont des témoins suffisants établissant l'absence de man'uvres de la société VAN CLEEF & ARPELS.
Ce moyen tiré de l'abus de majorité sera donc également rejeté, et la décision déférée sera confirmée sur ce point.
Sur la violation des règles gouvernant la disposition des parties communes
Reprenant en partie les griefs précédemment examinés, la SCI CARMIGNAC soutient que par le vote de la résolution litigieuse, la copropriété a méconnu les règles gouvernant la disposition des parties communes ; que cette décision n'a été prise que par les copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 1], et portait atteinte à la destination de l'immeuble en entretenant une confusion sur l'appartenance de l'immeuble, ce qui n'est par le cas pour les autres boutiques des immeubles donnant sur la [Localité 2].
Contrairement à ce que soutient l'appelante, il ne saurait y avoir par l'apposition d'enseignes, installées de surcroît depuis de très nombreuses années, en tout cas depuis plus de 10 ans, d'atteinte à la destination de l'immeuble, dès lors que l'immeuble a une affectation mixte (habitation, bureaux et commerces de luxe) et qu'il n'est pas démontré par ailleurs une appropriation des parties communes par la société VAN CLEEF & ARPELS ou une atteinte aux droits des autres copropriétaires. Comme l'ont indiqué les premiers juges, la dépose et la repose des enseignes litigieuses n'a été décidée que pour les besoins du ravalement et la question de la dépose définitive de ces enseignes est aujourd'hui prescrite.
En revanche, contrairement à ce que soutient la société VAN CLEEF & ARPELS qui revendique un droit acquis au maintien de ces enseignes en imposte des 8 arcades de l'immeuble, et même un droit à caractère réel, il y a lieu de rappeler que la résolution litigieuse d'une part ne concernait que les 2 enseignes installées sur les portes cochères et non les autres, et d'autre part que la présence de ces enseignes ne pouvait présenter pour la société intimée un droit réel, l'ancienneté de leur présence n'étant pas de nature à leur conférer ce caractère. Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de la société VAN CLEEF & ARPELS tendant à la reconnaissance d'un droit réel.
Compte tenu de cet ensemble d'éléments, il y a lieu de rejeter en définitive la demande d'annulation de la résolution n°4 en son entier et de débouter la SCI CARMIGNAC VENDÔME de l'intégralité de ses demandes.
Sur la demande de dommages et intérêts formée par le syndicat des copropriétaires
Le syndicat des copropriétaires demande une somme de 150.000 euros à titre de dommages et intérêts en soutenant que l'appelante par son attitude a retardé les travaux de ravalement, ce qui a contraint la copropriété à mettre en place des mesures de protection provisoire (filets de protections) afin d'éviter toute éventuelle chute de pierres.
Pas plus en appel qu'en première instance le syndicat des copropriétaires ne démontre que la contestation de la SCI CARMIGNAC VENDÔME a retardé l'exécution des travaux de ravalement et était à l'origine de la nécessité de mettre en place des mesures de protection provisoires ainsi que l'ont relevé les premiers juges, qui rappellent que le syndicat a attendu près de 4 ans après refus d'un premier permis de construire pour demander à son architecte d'en déposer un nouveau. La Cour ajoutera en tout état de cause que la mise en place de mesures de protection provisoires trouve en réalité sa source dans le propre retard de la copropriété à procéder à ce ravalement, cette obligation ayant fait l'objet d'une mise en demeure en 2009 de la Ville de [Localité 1]; que la procédure en cause n'a nullement empêché la copropriété d'obtenir le permis de construire, de faire voter définitivement les travaux de ravalement et de les commencer.
Dans ces circonstances, il y a lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande de dommages et intérêts.
Sur les demandes accessoires et les dépens
Il serait inéquitable de laisser à la charge des intimés les frais irrépétibles exposés à l'occasion de cette procédure.
Il y a donc lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné la SCI CARMIGNAC VENDÔME à leur verser à chacun la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Il convient d'y ajouter une condamnation identique pour les frais irrépétibles exposés en cause d'appel.
Les dépens de première instance et d'appel seront supportés par la SCI CARMIGNAC VENDÔME qui succombe. Ces frais pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour statuant publiquement et contradictoirement,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne la SCI CARMIGNAC VENDÔME à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 1] la somme de 2000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SCI CARMIGNAC VENDÔME à payer à la société VAN CLEEF & ARPELS HOLDING FRANCE la somme de 2000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute les parties de leurs demandes plus amples et contraires,
Condamne la SCI CARMIGNAC VENDÔME aux entiers dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Le Greffier,Le Président,