RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 9
ARRÊT DU 15 Avril 2015
(n° , 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/07002
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 21 mai 2014 par le conseil de prud'hommes de MEAUX - section industrie - RG n° 13/00191
APPELANTE
SAS MARTO ET FILS
[Adresse 1]
[Adresse 1]
né le [Date naissance 1] 1960 à [Localité 2] (PORTUGAL)
représentée par Me Sophie GACHET-BARETY, avocate au barreau de PARIS, D2113
INTIME
Monsieur [R] [U]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Siret n° 392 193 827 00012
représenté par Me Aurélie NADIRAS, avocate au barreau de PARIS, E1862
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 11 mars 2015, en audience publique, devant la cour composée de :
Madame Christine ROSTAND, présidente de la chambre
Monsieur Benoît HOLLEAUX, conseiller
Madame Aline BATOZ, vice présidente placée
qui en ont délibéré
Greffier : Madame Marion AUGER, lors des débats
ARRET :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Christine ROSTAND, présidente et par Madame Marion AUGER, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Meaux du 21 mai 2014 ayant':
' fixé la rémunération moyenne de M. [R] [U] à la somme de 2'356 € bruts mensuels
' donné acte à la SAS Marto et fils de ce qu'elle a remis à la barre un chèque bancaire d'un montant de 4'273,79 € en règlement d'un solde d'indemnité spéciale de licenciement et d'indemnité de préavis
' condamné la SAS Marto et fils à payer à M. [R] [U] les sommes de':
' 42'408 € à titre de dommages-intérêts pour «licenciement sans cause réelle et sérieuse»
' 1'000 € d'indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile
avec intérêts au taux légal partant de son prononcé
' ordonné la délivrance par la SAS Marto et fils à M. [R] [U] d'un bulletin de paie et d'une attestation Pôle Emploi conformes sans astreinte
' ordonné le remboursement par la SAS Marto et fils aux organismes concernés de l'équivalent d'un mois d'indemnité de chômage versée à M. [R] [U]
' ordonné l'exécution provisoire sur le fondement de l'article 515 du code de procédure civile
' condamné la SAS Marto et fils aux dépens';
Vu la déclaration d'appel de la Sas Marto et fils reçue au greffe de la cour le 20 juin 2014';
Vu les écritures régulièrement communiquées et oralement soutenues à l'audience du 11 mars 2015 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens de la SAS Marto et fils qui demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau, de débouter de l'ensemble de ses demandes M. [R] [U] qui sera condamné à lui restituer la somme de 42'208 € déjà perçue au titre de l'exécution provisoire ordonnée (article 515 du code de procédure civile), ainsi qu'à lui payer celle de 2'000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile';
Vu les écritures régulièrement communiquées et oralement soutenues à l'audience du 11 mars 2015 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens de M. [R] [U] qui demande à la cour de':
' confirmer sur le principe la décision déférée en ce qu'elle a jugé son licenciement «sans cause réelle et sérieuse»
' l'infirmer sur le quantum en lui allouant la somme indemnitaire à ce titre de 85'100 €
' faire droit à sa demande nouvelle en condamnant la SAS Marto et fils à lui régler la somme indemnitaire de 10'000 € pour préjudice moral
' dire que la SAS Marto et fils devra lui remettre une attestation Pôle Emploi et des bulletins de salaire rectifiés sous astreinte de 100 € par jour de retard et par document
' condamner la SAS Marto et fils à lui verser la somme complémentaire de 5'000 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS
La SAS Marto et fils, entreprise de travaux publics, a recruté M. [R] [U] dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps plein ayant pris effet le 8 juillet 2007, en qualité de chauffeur poids lourd au niveau 1-position 1-coefficient 100 de la convention collective nationale des ouvriers des travaux publics, moyennant un salaire de base ou fixe de 1'289,20 € bruts mensuels auquel s'ajoutent des primes de non accident, d'entretien et de présence.
M. [R] [U] a été victime d'un accident du travail survenu le 12 septembre 2011 - sa pièce 2 -, à la suite duquel il a été examiné par le médecin du travail les 23janvier (première visite de reprise) et 17 février 2012 (deuxième visite de reprise).
La deuxième et dernière visite l'a déclaré «inapte au poste, apte à un autre, ne peut pas conduire de véhicule ni porter de charges. Inapte définitif au poste» - sa pièce 4.
Dès le 20 février 2012, l'appelante a adressé à M. [R] [U] un courrier pour lui faire deux offres de reclassement sur des emplois à temps partiel (20 heures hebdomadaires) d'assistant au chef de transport et d'hôte d'accueil-standardiste.
Dans sa réponse du 27 février 2012, l'intimé indique à la SAS Marto et fils qu'il n'accepte pas un si faible volume d'heures ayant une incidence directe sur la rémunération servie.
Après avoir à nouveau interrogé le 29 février 2012 les services de la médecine du travail qui lui ont répondu le 7 mars sur les perspectives de reconversion de M. [R] [U], la SAS Marto et fils lui a remis par un courrier du 17 avril suivant une dernière proposition de reclassement sur des postes à plein temps d'hôte d'accueil standardiste et d'agent de liaison, propositions précises et circonstanciées.
M. [R] [U] a alors fait savoir à son employeur dans une correspondance du 22 avril 2012 qu'il était intéressé par la deuxième proposition concernant le poste d'agent de liaison sur [Localité 1], à la condition toutefois que «soit revu le salaire proposé (qui ne lui) convient pas».
L'appelante a conclu ces échanges en convoquant le 9 mai 2012 M. [R] [U] à un entretien préalable prévu le 23 mai, avant de lui notifier le 15 juin 2012 son licenciement pour inaptitude définitive à son emploi de chauffeur poids lourd et refus de la proposition de reclassement lui ayant été faite «en raison d'une baisse de salaire».
Dans le dernier état de la relation contractuelle de travail, l'intimé percevait une rémunération en moyenne de 2 356 € bruts mensuels correspondant à un emploi de chauffeur poids lourd-classification NI PI - coefficient 100.
La dernière proposition de reclassement sur un emploi à temps complet d'agent de liaison était accompagnée d'un salaire de base de 1'800,83 € bruts mensuels (qualification employé -niveau C) d'un montant inférieur à la rémunération moyenne de M. [R] [U] s'élevant alors à la somme de 2'356 € bruts mensuels, ce que ne conteste pas en définitive l'employeur dans ses écritures en cause d'appel - pages 6 et 7.
L'article L.1226-12, dernier alinéa, du code du travail dispose que': «L'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L.1226-10, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions».
Le refus par M. [R] [U] de la proposition de reclassement sur un emploi d'agent de liaison à [Localité 1] n'est pas abusif dès lors qu'elle emportait une modification de son contrat de travail résultant précisément d'une baisse de rémunération.
Faute par l'employeur de démontrer avoir repris ses recherches de reclassement, au besoin en ayant sollicité à nouveau le médecin du travail, suite à ce refus de M. [R] [U] exprimé le 22 avril 2012, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a condamné la Sas Marto et fils à lui payer la somme indemnitaire de 42'408 € équivalente à 18 mois de salaires, non pas pour «licenciement sans cause réelle et sérieuse», mais en application de l'article L.1226-15 du code du travail qui retient dans ce cas un régime de réparation spécifique d'au minimum 12 mois de salaires, avec intérêts au taux légal partant de son prononcé.
La cour l'infirmera en ses dispositions sur le remboursement par l'employeur aux organismes concernés d'un mois d'indemnité de chômage versée à M. [R] [U] sur le fondement de l'article L.1235-4 du code du travail inapplicable au cas d'espèce.
L'intimé sera débouté de sa demande indemnitaire nouvelle (10'000 €) pour préjudice moral non démontré.
La SAS Marto et fils sera condamnée en équité à régler à l'intimé la somme de 2'500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
CONFIRME le jugement entrepris sauf en ses dispositions relatives au remboursement par la SAS Marto et fils aux organismes intéressés d'un mois d'indemnité de chômage versée à M. [R] [U] ;
Statuant à nouveau de ce chef,
DIT n'y avoir lieu à ce remboursement';
Y ajoutant,
DÉBOUTE M. [R] [U] de sa demande indemnitaire pour préjudice moral;
CONDAMNE la SAS Marto et fils à payer à M. [R] [U] la somme de 2'500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile';
CONDAMNE la SAS Marto et fils aux dépens d'appel
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE