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09/04/2015 | FRANCE | N°14/04175

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 6, 09 avril 2015, 14/04175


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 6



ARRET DU 09 AVRIL 2015



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 14/04175



Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 Novembre 2013 -Tribunal de Grande Instance de MEAUX - RG n° 09/04185





APPELANTE



Madame [I] [S] épouse [U]

Née le [Date naissance 1]/1962 à [Localité 1]

[Adress

e 1]

[Adresse 1]



Représentée par Me Jean-claude CHEVILLER, avocat au barreau de PARIS, toque : D0945

Assistée de Me Catherine PEULVE, avocat au barreau de PARIS, toque : D1575





INTIMEE


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Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 6

ARRET DU 09 AVRIL 2015

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/04175

Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 Novembre 2013 -Tribunal de Grande Instance de MEAUX - RG n° 09/04185

APPELANTE

Madame [I] [S] épouse [U]

Née le [Date naissance 1]/1962 à [Localité 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Jean-claude CHEVILLER, avocat au barreau de PARIS, toque : D0945

Assistée de Me Catherine PEULVE, avocat au barreau de PARIS, toque : D1575

INTIMEE

SAS BSH ELECTROMENAGER

RCS de BOBIGNY b 341 911 790

Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Jean-Noël BOST, avocat au barreau de PARIS, toque : R114

Assistée de Me Sandrine MUNNIER, avocat au barreau de PARIS, toque : E0094

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 05 Mars 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Paule MORACCHINI, Présidente de chambre

Madame Caroline FÈVRE, Conseillère

Madame Muriel GONAND, Conseillère

qui en ont délibéré

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions de l'article 785 du code de Procédure Civile.

Greffier, lors des débats : Madame Josélita COQUIN

ARRET :

- Contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Paule MORACCHINI, président et par Madame Marie GIRAUD, greffier présent lors du prononcé.

Par jugement rendu le 26 novembre 2013, le tribunal de grande instance de Meaux a :

- condamné Madame [U], en sa qualité de caution de la société DESC, à payer à la société BSH ELECTROMENAGER la somme de 160.000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 17 mars 2009, date de présentation du courrier de mise en demeure,

- ordonné l'exécution provisoire,

- condamné Madame [U] à payer à la société BSH ELECTROMENAGER la somme de 800 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamné Madame [U] aux dépens comprenant notamment les frais d'expertise.

Par déclaration remise au greffe de la Cour le 25 février 2014, Madame [U] a interjeté appel de ce jugement.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 2 février 2015, Madame [U] demande à la Cour :

- d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- statuant à nouveau,

- à titre principal,

- de constater que l'authenticité de sa prétendue signature est douteuse,

- de débouter en conséquence la société BSH ELECTROMENAGER de l'ensemble de ses demandes,

- à titre subsidiaire,

- de constater que la mention manuscrite exigée par l'article L341-3 du Code de la consommation ne précède pas sa prétendue signature,

- de constater le positionnement économique dominant de la société BSH ELECTROMENAGER,

- de constater que la société BSH ELECTROMENAGER a obtenu l'engagement de caution en lui dissimulant intentionnellement les informations sur la situation de la société DESC,

- de dire que l'acte de cautionnement est nul et de prononcer son annulation,

- à titre plus subsidiaire,

- de constater que la société BSH ELECTROMENAGER a commis une faute qui engage sa responsabilité,

- de constater que l'engagement de caution est manifestement disproportionné par rapport à ses revenus,

- de dire que la société BSH ELECTROMENAGER est déchue du droit de se prévaloir de l'acte de cautionnement du 15 octobre 2008,

- de la décharger de cet engagement de caution,

- en tout état de cause,

- de débouter la société BSH ELECTROMENAGER de l'ensemble de ses demandes,

- de condamner la société BSH ELECTROMENAGER à payer la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens.

Dans ses dernières écritures signifiées le 13 février 2015, la société BSH ELECTROMENAGER demande à la Cour :

- de dire régulier l'engagement de caution souscrit le 15 octobre 2008 par Madame [U] et de la déclarer bien fondée à s'en prévaloir,

- de confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- de condamner Madame [U], en sa qualité de caution de la société DESC, à lui payer la somme de 160.000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 17 mars 2009, date de présentation du courrier de mise en demeure,

- de condamner Madame [U] à payer la somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et les entiers dépens, tant de première instance qui comprendront les frais d'hypothèque et d'expertise que d'appel,

- subsidiairement si la cour déclarait l'engagement de Madame [U] disproportionné à ses biens à la date de sa souscription,

- de lui enjoindre, au besoin sous astreinte, de produire ses déclarations de revenus 2009 à 2013 et les avis d'imposition correspondant.

SUR CE

Considérant que par acte du 15 octobre 2008, Monsieur et Madame [U] se sont portés chacun caution solidaire du remboursement de toutes les sommes découlant de l'achat de matériel électroménager par la société DESC, à l'égard de la société BSH ELECTROMENAGER, dans la limite de 160.000 euros ;

Considérant que par jugement du 6 janvier 2009, le tribunal de commerce de Nanterre a ouvert une procédure de redressement judiciaire de la société DESC ; que la société BSH ELECTROMENAGER a déclaré sa créance le 28 janvier 2009 à hauteur de la somme de 283.521,07 euros, ramenée à 263.621,07 euros par déclaration rectificative du 31 mars 2009 ;

Considérant que par jugement du 30 juin 2009, le tribunal de commerce de Nanterre a prononcé la liquidation judiciaire de la société DESC ;

Considérant que par actes d'huissier du 20 juillet 2009, la société BSH ELECTROMENAGER a assigné d'une part Monsieur [U] devant le tribunal de commerce de Meaux, d'autre part Madame [U] devant le tribunal de grande instance de Meaux en paiement de la somme de 160.000 euros ;

Considérant que par jugement avant dire droit du 3 novembre 2011, le tribunal de grande instance de Meaux a ordonné à la demande de Madame [U], la vérification de l'écriture de celle-ci sur l'acte litigieux ;

Considérant que l'expert Madame [Y] a déposé son rapport le 25 février 2013 et que c'est dans ces conditions que le jugement déféré a été rendu ;

Considérant que Madame [U] soutient à titre principal que la signature sur l'acte de caution n'est pas la sienne au motif que les pièces produites montrent que sa signature est différente ; qu'à titre subsidiaire elle prétend que l'acte est nul en application de l'article L341-2 du Code de la consommation qui impose de faire précéder la signature de la mention manuscrite, alors que dans l'acte de caution, la signature est apposée au dessus de la mention manuscrite et que le seul paraphe en bas de page ne peut être considéré comme une réitération de la signature ; qu'elle allègue aussi que la société BSH ELECTROMENAGER n'a pu obtenir son consentement que par violence et par dol au visa de l'article 1109 du Code civil ; qu'elle indique en premier lieu que la société DESC était en position de dépendance économique vis-à-vis de la société BSH ELECTROMENAGER, que cette dernière a tiré profit de la situation pour contraindre les époux [U] à s'engager, alors que la société DESC était déjà en état de cessation des paiements ; qu'elle affirme en second lieu que la société BSH ELECTROMENAGER s'est rendue coupable de réticence dolosive à son égard, qu'elle n'ignorait pas la situation obérée de la société DESC puisque c'est en raison de la fragilité de la trésorerie et des retards de paiement qu'elle a demandé la caution des époux [U] alors qu'elle-même, épouse du président de la société DESC, n'avait pas connaissance de la situation ; qu'à titre plus subsidiaire, elle estime que la société BSH ELECTROMENAGER a commis une faute en sollicitant son engagement alors que la société DESC était déjà en état de cessation des paiements et que son préjudice doit être fixé au montant de la condamnation à son encontre; qu'elle se prévaut également de la disproportion en application de l'article L341-4 du Code de la consommation, en soulignant que la fiche de renseignements ne contient aucune indication sur un patrimoine éventuel lui appartenant, qu'elle percevait en 2008 un revenu annuel de 19.393 euros et qu'elle était endettée à hauteur de 81.825 euros et 565.100 euros auprès de la LYONNAISE DE BANQUE et de 78.000 euros auprès du CIC ;

Considérant qu'en réponse, la société BSH ELECTROMENAGER fait valoir que la signature de Madame [U] n'est pas constante et que seul un expert peut apporter une appréciation sérieuse de sorte que le rapport d'expertise doit être entériné ; qu'elle considère que la mention manuscrite respecte les dispositions de l'article L341-2 du Code de la consommation, que la signature est apposée en haut du texte à l'intérieur d'un cadre et que le paraphe, qui constitue une signature abrégée, apposé en bas de page doit être considéré comme une réitération de la signature ; que sur la violence alléguée, elle réplique que le rapport de l'administrateur judiciaire révèle qu'il n'existait pas de dépendance économique de la société DESC à son égard et que Monsieur [U], souhaitant présenter un plan de redressement, était demandeur à la poursuite des relations commerciales ; qu'elle indique encore que Madame [U] ne prouve pas le dol allégué et qu'elle avait au contraire connaissance des difficultés de la société DESC ; que s'agissant de la faute reprochée à son encontre, elle souligne que Madame [U] invoque les mêmes motifs relatifs à la violence et au dol et qu'elle ne démontre pas l'existence d'une faute ; que sur la disproportion, elle mentionne que les garanties figurant sur la fiche de renseignements ne présentaient aucune anomalie apparente et étaient proportionnées à l'engagement pris, puisque les époux [U] disposaient de revenus annuels de 110.500 euros et deux biens communs évalués à 710.000 euros et 105.000 euros ; qu'elle précise par ailleurs que lors de l'engagement de caution, elle n'a eu connaissance que des engagements de caution de Monsieur [U] du 28 janvier 2008 à hauteur de 78.000 euros à l'égard du CIC et du 13 février 2008 pour 50.000 euros à l'égard de GE FACTO FRANCE et que les époux [U] ont délibérément dissimulé leur situation réelle ;

Considérant qu'il ressort du rapport d'expertise déposé le 25 février 2013 que Madame [Y] a conclu que Madame [U] est la rédactrice et la signataire de l'acte de cautionnement du 15 décembre 2008 ;

Considérant qu'en appel, Madame [U] ne maintient plus sa contestation que sur la signature apposée sur l'engagement de caution du 15 octobre 2008 ;

Considérant que dans son rapport, Madame [Y] a constaté que les signatures de Madame [U] sont très variables mais conservent des constantes dans la construction et qu'elle a indiqué que les particularités de la signature contestée se retrouvent dans les signatures de comparaison ;

Considérant qu'au vu de ce rapport et des éléments de comparaison étudiés par l'expert, il est établi que Madame [U] est bien la signataire de l'engagement de caution du 15 octobre 2008 ;

Considérant qu'aux termes de l'article L341-2 du Code de la consommation, 'toute personne physique qui s'engage par acte sous seing privé en qualité de caution envers un créancier professionnel doit, à peine de nullité de son engagement, faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante, et uniquement de celle-ci: 'en me portant caution de X..., dans la limite de la somme de ...couvrant le paiement du principal, des intérêts et le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de ..., je m'engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X n'y satisfait pas lui-même' ;

Considérant qu'en l'espèce, dans l'acte de caution du 15 octobre 2008, la mention manuscrite a été reproduite en page 3 de l'acte, dans une partie encadrée dans laquelle figure, au dessus de cette mention manuscrite, le nom de Madame [U] et la mention 'signature' suivie de la signature de Madame [U] ;

Considérant que l'article L341-2 du Code de la consommation impose de faire précéder la signature de la mention manuscrite et que l'acte susvisé ne respecte donc pas les dispositions de ce texte ;

Considérant que la société BSH ELECTROMENAGER soutient que le paraphe apposé au bas de la page constitue une signature abrégée, réitérant la première signature;

Considérant que le paraphe de Madame [U] figure en bas de chacune des trois pages de l'acte de cautionnement et que ce paraphe apposé au bas de la page 3 ne peut manifestement pas être considéré comme une véritable signature attestant de la validité de l'engagement ;

Considérant en conséquence que faute de respecter les dispositions de l'article L341-2 du Code de la consommation, l'engagement de caution de Madame [U] en date du 15 octobre 2008 est nul ;

Considérant dans ces conditions que la société BSH ELECTROMENAGER doit être déboutée de sa demande en paiement à l'encontre de Madame [U], en vertu de l'engagement susvisé ;

Considérant que le jugement doit dès lors être infirmé en toutes ses dispositions;

Considérant que la société BSH ELECTROMENAGER, qui succombe, supportera ses frais irrépétibles et les dépens de première instance comprenant les frais d'expertise et les dépens d'appel ;

Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de Madame [U] les frais non compris dans les dépens, exposés en premier ressort et en appel et qu'il convient de condamner la société BSH ELECTROMENAGER à lui payer la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions.

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déclare nul l'engagement de caution souscrit le 15 octobre 2008 par Madame [U].

Déboute la société BSH ELECTROMENAGER de ses demandes.

Condamne la société BSH ELECTROMENAGER à payer à Madame [U] la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Rejette toutes autres demandes des parties.

Condamne la société BSH ELECTROMENAGER aux dépens de première instance comprenant les frais d'expertise et aux dépens d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 14/04175
Date de la décision : 09/04/2015

Références :

Cour d'appel de Paris I6, arrêt n°14/04175 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-04-09;14.04175 ?
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