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08/04/2015 | FRANCE | N°12/01133

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 9, 08 avril 2015, 12/01133


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9



ARRÊT DU 08 Avril 2015



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/01133



Décision déférée à la cour : sur renvoi après cassation du 18 mai 2005 suite à l'arrêt de la Cour d'Appel de Paris du 23 novembre 2011 concernant un jugement rendu le 25 février 2002 par le Conseil de Prud'hommes de PARIS - RG n° 01/02615







APPELANTE

SA F

RANCE MELASSES

[Adresse 2]

[Localité 2]

Siret n° 591 920 251 00103

représentée par Me Rose-marie TOURDE, avocat au barreau de PARIS, E0836







INTIME

Monsieur [S] [P]

[Adress...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9

ARRÊT DU 08 Avril 2015

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/01133

Décision déférée à la cour : sur renvoi après cassation du 18 mai 2005 suite à l'arrêt de la Cour d'Appel de Paris du 23 novembre 2011 concernant un jugement rendu le 25 février 2002 par le Conseil de Prud'hommes de PARIS - RG n° 01/02615

APPELANTE

SA FRANCE MELASSES

[Adresse 2]

[Localité 2]

Siret n° 591 920 251 00103

représentée par Me Rose-marie TOURDE, avocat au barreau de PARIS, E0836

INTIME

Monsieur [S] [P]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 1]

né le [Date naissance 1] 1957 à [Localité 3]

représenté par Me Virginie BOUCHET, avocat au barreau de PARIS, L0047

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 18 février 2015, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Christine ROSTAND, présidente de la chambre

Monsieur Benoît HOLLEAUX, conseiller

Madame Aline BATOZ, vice présidente placée

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Marion AUGER, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Christine ROSTAND, présidente et par Madame Marion AUGER, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 25 février 2002 en formation de départage ayant condamné la SA France mélasses à payer à M. [S] [P] la somme de 168'319,50 € à titre de rappel d'heures supplémentaires (1er janvier 1996 au 31 mars 2001) avec intérêts au taux légal partant du 1er mars 2001 ainsi que celle de 1'500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, ordonné à celle-ci la délivrance d'un bulletin de paie récapitulant le nombre de jours de repos compensateurs afférents, et l'ayant condamnée aux dépens';

Sur l'appel interjeté à l'initiative de la SA France Mélasses, vu l'arrêt de la cour de Paris du 18 mai 2005 ayant infirmé le jugement entrepris et, statuant à nouveau, dit que M. [S] [P] a le statut de cadre, ordonné la délivrance à ce dernier des bulletins de salaire conformes, condamné la SA France Mélasses à lui payer la somme indemnitaire de 5'000 € tout en le déboutant de ses autres demandes, et dit que chacune des parties supportera ses propres dépens';

Sur pourvoi formé par M. [S] [P], vu l'arrêt de la Cour de cassation du 23 novembre 2011 ayant censuré l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris seulement en ce qu'il l'a débouté de sa demande en paiement d'un rappel d'heures supplémentaires avec les repos compensateurs afférents, et renvoyé la cause et les parties devant la même cour autrement composée';

Vu la déclaration de saisine de la cour d'appel de Paris en tant que cour de renvoi à l'initiative de la SA France Mélasses, déclaration reçue au greffe le 27 janvier 2012 dans le respect du délai de quatre mois prévu à l'article 1034 du code de procédure civile';

Vu les écritures régulièrement communiquées et oralement soutenues à l'audience du 18 février 2015 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens de la SA France Mélasses qui demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau, de débouter de l'ensemble de ses demandes M. [S] [P] qui sera condamné à lui payer la somme de 2'000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile';

Vu les écritures régulièrement communiquées et oralement soutenues à l'audience du 18 février 2015 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens de M. [S] [P] qui demande à la cour':

' de condamner la SA France Mélasses à lui verser les sommes de :

' 181'785,41 € (+ 18'178,54 €) de rappel d'heures supplémentaires (1996/2001)

' 71'057,37 € de rappel d'indemnité au titre des repos compensateurs (demande nouvelle)

' 2'500 € à titre de dommages-intérêts pour violation de la durée maximale de travail (demande nouvelle)

' 2'500 € d'indemnité pour défaut d'information sur les repos compensateurs (demande nouvelle)

avec intérêts au taux légal «à compter de la saisine»

' d'ordonner à la SA France Mélasses de lui délivrer les bulletins de paie, une attestation Pôle Emploi ainsi qu'un certificat de travail conformes au présent arrêt, sous astreinte journalière de 50 € par document

' de la condamner à lui régler la somme de 3'000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

MOTIFS

M. [S] [P] a été recruté pour une durée indéterminée par la SA Debayser appartenant au groupe France Mélasses aux termes d'une lettre d'embauche ayant pris effet le 27 décembre 1976 en tant que garçon de course-chauffeur, son contrat de travail ayant été repris le 1er juillet 1982 par la Sa Société Européenne des Mélasses (SEM) pour y occuper les fonctions d'employé commercial correspondant de fait à la qualification d'agent technico-commercial.

Dès l'année 1982, M. [S] [P] s'est vu progressivement confier des responsabilités dans la surveillance des opérations de chargement et de déchargements des mélasses sur différents sites portuaires en France et à l'étranger.

Dans une note du 15 février 1996, la SEM s'adresse ainsi à l'intimé que': «Lors des chargements ou déchargements des navires, nous vous rappelons que votre présence ne doit pas se limiter au début et à la fin du chargement, mais doit être suffisante pour pallier toute difficulté pouvant survenir pendant les opérations» - pièce 8 du salarié.

En janvier 1992, il a accédé aux fonctions de cargo superintendant responsable du contrôle du poids et de la qualité des mélasses chargées et déchargées dans différents ports.

Sa mission comprenait plus précisément la vérification de la propreté des cuves des navires, le suivi des circuits de déchargement et de chargement ainsi que les opérations de calcul par double pesée.

Dans une correspondance du 1er juin 2001, trois mois après sa saisine du conseil de prud'hommes de Paris, M. [S] [P] n'a pas manqué de rappeler à son employeur que ses nombreux déplacements professionnels en France et à l'étranger, en l'obligeant à être présent sur les sites concernés suffisamment de temps avant l'arrivée des cargos pour les opérations de déchargement-chargement ou inversement et ainsi de rester sur place tout le temps nécessaire, lui font accomplir un nombre important d'heures supplémentaires dont il sollicite le complet règlement - sa pièce 10.

L'appelante a notifié à M. [S] [P] son licenciement pour faute grave par une lettre du 21 novembre 2005.

A titre liminaire, il y a lieu de relever que la qualification de cadre reconnue à M. [S] [P] ressort de l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 18 mai 2005 définitif sur ce point dès lors que la cassation intervenue, par un arrêt du 23 novembre 2011, porte exclusivement sur la question d'un rappel d'heures supplémentaires, étant en outre observé que le contrat de travail de ce dernier ne comporte aucune clause stipulant une rémunération forfaitaire sous la forme d'une convention individuelle de forfait dans les conditions prévues à l'article L.3121-39 du code du travail.

L'article L.3121-1 du code du travail dispose que': «La durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles'».

M. [S] [P] a été de fait contraint de se tenir prêt à répondre à un éventuel appel de son employeur de manière à pouvoir intervenir en cas de nécessité durant les opérations de chargement et de déchargement des navires, cela sans obligatoirement être présent à tout moment sur ses différents lieux de travail.

En pratique cette présence requise sur des périodes déterminées visait à préparer les conditions de réception des navires dans les ports en vue du chargement ou du déchargement des mélasses, présence nécessaire lors de leur arrivée et jusqu'au début des opérations de pompage après le jaugeage des soutes et l'échantillonnage des tanks, de même qu'à leur départ afin de pouvoir intervenir sur tout type d'événement susceptible de se produire.

Contrairement à ce que soutient la Sa France Mélasses, ces périodes d'activité correspondaient en ce qui concerne l'intimé à des permanences qu'il était tenu d'assurer sur les sites portuaires ou à leur proximité immédiate afin de répondre à toute demande d'intervention sur les navires, ce qui ne peut en conséquence que s'analyser en un temps de travail effectif devant être rémunéré comme tel au sens du texte précité.

M. [S] [P] verse aux débats une synthèse générale des heures de travail effectuées pour le compte de son employeur sur la période en cause (1996/2001) représentant un total de 7'424 heures supplémentaires qui correspondent à des interventions sur différents navires précisément listés, semaine après semaine, avec, pour chacun, indication du port d'arrivée ou de départ - pièces 2/1 et 2/2.

Ses différents bulletins de paie sont tous établis sur une base invariable de 169 heures mensuelles sans prise en compte du temps de travail réellement accompli - pièces 3/1 à 3/6 -, alors qu'il produit des attestations de collègues de travail confirmant qu'il était joignable de manière quasi permanente sur les sites de chargement et de déchargement - pièces 19 à 27.

En réponse à cette demande suffisamment étayée comme reposant sur des éléments circonstanciés et précis, la SA France Mélasses se contente d'affirmer, au visa de l'article .L.3171-4 du code du travail, que l'intimé ne fournit pas des données suffisamment complètes sur les horaires prétendument réalisés et qu'elle est en mesure de démontrer quels étaient les horaires exacts de son salarié en faisant état de plannings de congés ou de feuilles individuelles de congés totalement non pertinents sur ce point - ses pièces 1 à 6 et 16.

Il convient en conséquence, pour l'ensemble de ces raisons, infirmant le jugement entrepris sur le quantum, de condamner la SA France Mélasses à régler à l'intimé la somme de 181'785,41 € à titre de rappel d'heures supplémentaires représentant un total de 7'424 heures sur la période 1996/2001, ainsi que celle de 18'178,54 € d'incidence congés payés, avec intérêts au taux légal partant du 15 mars 2001, date de réception par l'employeur de la convocation en bureau de conciliation.

La SA France Mélasses sera condamnée à payer à l'intimé la somme de 71'057,37 € à titre de rappel sur les repos compensateurs afférents qui correspondent à 509 jours restant au 30 avril 2005 (1078 jours de repos compensateurs acquis ' 569 jours d'ores et déjà réglés) et auxquels s'ajoutent 37 autres jours entre mai et novembre 2005, ce qui représente un total de 546 jours, avec intérêts au taux légal à compter du 15 mars 2001.

Il en est résulté pour l'intimé un préjudice spécifique résultant de la violation par la SA France Mélasses, d'une part, des durées maximales hebdomadaires de travail et, d'autre part, des règles d'information sur les repos compensateurs.

L'appelante sera ainsi condamnée à verser à M. [S] [P], pour chacune de ces mêmes violations, la somme de 1'000 € à titre de dommages-intérêts, avec intérêts au taux légal partant du présent arrêt.

Il sera ordonné la remise par la Sa France Mélasses à M. [S] [P] des bulletins de paie, d'une attestation Pôle Emploi ainsi que d'un certificat de travail conformes au présent arrêt sans le prononcé d'une astreinte.

L'appelante sera condamnée en équité à payer à M. [S] [P] la somme de 3'000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

CONFIRME la décision entreprise en ce qu'elle a alloué à M. [S] [P] sur le principe un rappel d'heures supplémentaires, l'infirme sur le quantum et statuant à nouveau, condamne la SA France Mélasses à régler à M. [S] [P] la somme à ce titre de 181'785,41 € et celle de 18'178,54 € de congés payés afférents, avec intérêts au taux légal partant du 15 mars 2001';

Y ajoutant,

CONDAMNE la SA France Mélasses à payer à M. [S] [P] les sommes de':

' 71'057,37 € de rappel au titre des jours de repos compensateurs avec intérêts au taux légal à compter du 15 mars 2001

' 1'000 € d'indemnité pour violation des durées maximales hebdomadaires de travail

' 1'000 € de dommages-intérêts pour défaut d'information sur les repos compensateurs

avec intérêts au taux légal partant du présent arrêt'

ORDONNE la remise par la SA France Mélasses à M. [S] [P] des bulletins de paie, d'une attestation Pôle Emploi ainsi que d'un certificat de travail conformes au présent arrêt;

CONDAMNE la SA France Mélasses à verser à M. [S] [P] la somme de 3'000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile';

CONDAMNE la SA France Mélasses aux dépens d'appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 12/01133
Date de la décision : 08/04/2015

Références :

Cour d'appel de Paris K9, arrêt n°12/01133 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-04-08;12.01133 ?
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