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26/03/2015 | FRANCE | N°12/10941

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 7, 26 mars 2015, 12/10941


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7



ARRÊT DU 26 Mars 2015

(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/10941



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 14 Juin 2012 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS Section Commerce RG n° 11/09980





APPELANTE

Madame [G] [K]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

comparante en personne

assistée de Me Martine LAUTRED

OU, avocat au barreau de PARIS, toque : C2565 substituée par Me David DESGRANGES, avocat au barreau de PARIS







INTIMEE

SAS POMME DE PAIN

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée pa...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7

ARRÊT DU 26 Mars 2015

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/10941

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 14 Juin 2012 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS Section Commerce RG n° 11/09980

APPELANTE

Madame [G] [K]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

comparante en personne

assistée de Me Martine LAUTREDOU, avocat au barreau de PARIS, toque : C2565 substituée par Me David DESGRANGES, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

SAS POMME DE PAIN

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Franck BLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : K0168 substitué par Me Clément SALINES, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 Février 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Patrice LABEY, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Patrice LABEY, Président

Monsieur Bruno BLANC, Conseiller

Monsieur Rémy LE DONGE L'HENORET, Conseiller

Greffier : Madame Laëtitia CAPARROS, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Patrice LABEY, Président, et par Mme Naïma SERHIR, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Madame [F] [K] a été engagé par la SAS POMME de PAIN, par contrat à durée indéterminée à temps partiel de 130 heures mensuelles à compter du 6 octobre 2007, en qualité d'employé polyvalent de restauration.

Selon avenant, le temps partiel est devenu un temps complet à compter du 1er mai 2008.

Mme [K] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris le 15 juillet 2011 de demandes de résiliation judiciaire de son contrat aux torts de l'employeur, annulation d'un avertissement du 8 juin 2011, paiement d'un rappel de salaire, d'indemnité pour le temps d'habillage et de déshabillage, d'indemnité de rupture du contrat et de dommages et intérêts pour préjudice moral.

Par lettre recommandée du 9 décembre 2011avec accusé de réception du 15 décembre, Mme [K] a été convoquée à un entretien préalable fixé au 20 décembre 2011, puis s'est vue notifier son licenciement pour faute grave le 23 décembre 2011.

Dans le dernier état de la procédure, Mme [K] a présenté devant le conseil de prud'hommes les chefs de demande suivants :

-Prononcer la résiliation judiciaire aux torts exclusifs de l'employeur et requalifier le licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Condamner la société Pomme de Pain à lui payer :

- Salaire : arriéré du 10 juillet 2011 ..................................... 40,91 €

- Congés payés afférents ...................................................... 4,09 €

- Prime conventionnelle non réglée....................................... 360 €

- Indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse... 8 903,01 €

- Indemnité compensatrice de préavis ..................................1 483,83 €

- Congés payés afférents : ..................................................148,38 €

- Indemnité de licenciement conventionnelle : ......................630,65 €

- Droit individuel à la formation : ........................................796 €

- Dommages et intérêts pour harcèlement moral : ................4 451,49 €

- Remise de l'attestation d'employeur destinée au Pôle Emploi, d'un certificat de travail

de bulletins de paie des mois d'avril 2008 à janvier 2011 régularisés

- Remise sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter du 8ème jour de la notification de la décision.

Annuler la sanction disciplinaire du 8 juin 2011 et condamner la société Pomme de Pain à lui verser une indemnité au titre du préjudice subi de 1 483,83 €.

Condamner la société Pomme de Pain à lui payer la somme de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Le tout avec exécution provisoire.

La Cour est saisie d'un appel régulier de Mme [K] du jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 14 juin 2012 qui l'a déboutée de toutes ses demandes.

Vu les écritures développées par Mme [K] à l'audience du 6 février 2015, au soutien de ses prétentions par lesquelles, elle demande à la cour de :

REFORMER le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

CONSTATER que l'employeur a méconnu ses obligations en madère de paiement de l'entier salaire ;

CONSTATER que l'employeur s'est rendu coupable de harcèlement moral à son encontre ;

En conséquence,

PRONONCER la résiliation judiciaire aux torts exclusifs de l'employeur et requalifier le licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

En conséquence,

CONDAMNER l'employeur au paiement des sommes suivantes :

- 40,91 € au titre d'arriérés de salaire pour le 10 juillet 2011 outre 4,09 € au titre de congés payés afférents,

- 360 € au titre de prime conventionnelle non réglée,

- 8 903,01 € au titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et

sérieuse,

-1 483,83 € au titre d'indemnité compensatrice de préavis,

-148,38 € au titre des congés payés afférents,

- 630,65 € au titre d'indemnité de licenciement conventionnelle,

-796 € au titre du droit individuel à la formation,

- 4 451,49 € au titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral ;

pour mémoire : indemnité compensatrice de congés payés ;

CONDAMNER l'employeur à la remise de l'attestation destinée au Pôle Emploi conforme à la décision à intervenir, de l'attestation ASSEDIC ainsi que le certificat de travail et des bulletins de paye régularisés pour la période comprise entre le mois d'avril 2008 et le mois janvier 2011, régularisés en fonction de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter du 8ème jour de la notification de la décision à rendre ;

PRONONCER l'annulation de la sanction disciplinaire du 8 juin 2011, et condamner l'employeur à indemniser la salariée pour le préjudice subi de ce chef, à hauteur de 1 483,83 euros ;

CONDAMNER la société Pomme de Pain à lui payer la somme de 2.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu les écritures développées par la SAS Pomme de Pain à l'audience du 6 février 2015, au soutien de ses prétentions par lesquelles, elle demande à la cour de :

- CONSTATER que l'avertissement prononcé à l'égard de Mme [K] le 8 juin 2011 est parfaitement fondé,

- CONSTATER l'absence de manquements graves de la part de la Société susceptibles de justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme [K],

- CONSTATER que Mme [K] n'a fait l'objet d'aucun agissement de harcèlement moral,

En conséquence,

- JUGER que la demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de la Société formulée par Mme [K] est injustifiée,

- JUGER que le licenciement pour faute grave de Mme [K] est parfaitement fondé,

- CONFIRMER dans toutes ses dispositions le jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes de Paris le14 juin 2012,

- DEBOUTER Mme [K] de l'intégralité de ses demandes,

- CONDAMNER Mme [K] à verser la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- CONDAMNER Mme [K] aux entiers dépens.

Pour un exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour renvoie à leurs écritures visées par le greffe le 6 février 2015, auxquelles elles se sont référées et qu'elles ont soutenues oralement à l'audience.

MOTIFS DE L'ARRET

Sur l'avertissement

Considérant que Mme [K] s'est vue notifier le 8 juin 2011 l'avertissement suivant :

'Vous avez été informée, en application des dispositions de l'article L. 1332-2 du Code du Travail, d'une sanction envisagée à votre égard et des causes qui la motivent lors de notre entretien du jeudi 12 mai 2011.

Les faits qui vous sont reprochés sont les suivants :

A plusieurs reprises, Monsieur [P] [L], directeur, vous a fait part verbalement d'un nombre anormal de corrections faites lorsque vous êtes postée en ligne de caisse. Pendant l'entretien, Monsieur [P] [L], directeur, vous a montré les documents émanant des caisses, mentionnant les nombres des corrections, pendant vos périodes de prise de poste en caisse. Vos nombres de corrections étaient important pour les mois de mars et avril 2011

Par ailleurs, vous faite preuve d'un manque de respect envers certains de vos collègues de travail. Vous refusez de leurs adresser la parole, et ne dite bonjour uniquement à ceux que vous estimez. Cette attitude entraîne une mauvaise ambiance au sein de l'équipe. Votre comportement n'évolue pas malgré plusieurs rappels à l'ordre de vos responsables hiérarchiques.

Votre comportement est en totale inadéquation avec ce que nous sommes en droit d'attendre de nos collaborateurs.

Nous attirons votre attention sur le fait que vous êtes liée à l'entreprise par un contrat de travail impliquant certaines obligations, notamment en terme de respect des règles de politesse, d'une attitude correcte et irréprochable dans vos rapports à l'intérieur de l'établissement, tant avec les autres salariés qu'avec les clients ou les tiers.

Un tel comportement n'est pas acceptable, et les explications que vous nous avez fournies pendant l'entretien ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation des faits.

Ces fautes nous obligent à vous infliger un avertissement.

Si de tels faits devaient se reproduire, nous nous verrions dans l'obligation d'envisager de prendre toutes sanctions qui pourraient s'imposer pour assurer la bonne marche de l'entreprise';

Que Mme [K] a protesté le 12 juillet 2011 dans les termes suivants :

'Je conteste fermement l'avertissement qui m'a été donnée par M. [P] [L], le 8 juin 2011.

Depuis plus de trois ans que je suis employée dans la société, je n'ai jamais eu un reproche sur un problème de caisse.

Au mois d'avril 2011, le bruit a couru qu'un salarié serait pris sur le vif pour vol en raison de corrections sur sa caisse.

J'ignorais alors que c'était moi qui étais visée.

En fin de service, alors que je devais compter ma caisse, M. [P] [L] m'a prise à part dans le bureau, au motif que j'aurais eu de nombreuses corrections manuelles sur ma caisse.

Je lui indiqué que je n'avais ni badge ni code manuel pour faire des corrections manuelles sur ma caisse et je lui ai proposé de regarder les bandes vidéo pour s'en assurer.

Furieux, M. [P] [L] a catégoriquement refusé de les regarder et a persisté dans ses accusations laissant entendre que je volais, et demandant aux autres membres du personnel que je sois surveillée.

Deux jours après, il a reconnu qu'il y avait eu un problème informatique et que d'autres caisses avaient été touchées, mais il n'a pas rectifié la situation sur les bruits lancés sur moi.

Compte-tenu des avertissements donnés aux autres salariés sur moi-même, un certain nombre de personnes ont refusé de m'adresser la parole et se sont mises à me regarder avec la plus grande méfiance.

Je n'ai pendant un temps plus entendu parler de ce problème. Jusqu'à ce que M. [P] [L] me convoque pour me reprocher ces mêmes corrections et mon comportement vis-à-vis d'autres salariés et me convoque pour un avertissement le 12 mai 2011.

Là cela a recommencé.

J'ai été contrainte en raison de la réputation injustifiée (et que je considère calomnieuse) qui m'avait été faite auprès des autres membres du personnel et de l'atmosphère créée autour de moi, de partir dans une autre boutique de la société.

Or, alors que j'avais jusqu'à présent des horaires de 7:30 à 15:00 et ne travaillait pas le week-end, je suis maintenant envoyée de boutique en boutique et obligée de travailler à des horaires différents selon les semaines.

Par exemple, la semaine dernière j'ai eu mon emploi du temps le samedi avec repos le vendredi et le samedi et j'ai du travailler:

-le lundi de 11:30 à 21:30,

-le mardi deux 9:30 à 16:00,

-le mercredi de 9:30 à 15:30,

-le jeudi de 16:00 à 21:30,

-le dimanche de 10:00 à 19:30.

Cette semaine, j'ai mon emploi du temps dimanche, je suis en repos lundi et mardi et je dois travailler :

- le mercredi de 14:30 à 22:00,

- le week-end de 15:00 à.22:00.

J'estime que ces faits me causent un préjudice grave et je vous informe que j'ai saisi le Conseil de Prud'hommes.

Je regrette vraiment d'en arriver là, mais je ne peux accepter la réputation qui m'a été faite et la pression qui est mise sur moi pour me pousser à la dépression.' ;

Que pour l'annulation de l'avertissement, Mme [K] fait valoir que :

- la relation de travail s'est bien déroulée jusqu'à l'arrivée d'un nouveau directeur en octobre 2010, M [L].

- Celui-ci n'a pas cessé de mettre en garde les autres salariés à son encontre, et à l'accuser d'être à l'origine de trop de corrections sur ses bandes ce caisse, pour dissimuler des vols, ce qui était impossible car elle ne disposait pas des codes permettant de faire des corrections.

- elle a demandé en vain à M [L] de visionner les vidéos.

- d'autres caisses ont connu les mêmes dysfonctionnement.

- l'employeur lui a toutefois notifié un avertissement pour la mettre sous pression et obtenir son départ ;

Que pour le bien fondé de l'avertissement, la SAS Pomme de Pain soutient que du 1er mars au 30 avril 2001, la salariée a procédé à 1949 corrections en caisse et a fait montre d'un comportement attesté 'désagréable et irrespectueux' envers ses collègues ;

Qu'il n'est pas reproché un quelconque vol à la salariée, ni d'avoir procédé à des corrections manuelles de ses bande de caisse un jour d'avril 2011, mais un nombre élevé d'erreurs de caisse qui ont généré des corrections sur la période du 1er mars au 30 avril 2011 ; que ce fait est établi par le tableau de l'employeur qui révèle un taux de correction de 13,56 % du chiffre d'affaires pour Mme [K], très supérieur aux autres collaborateurs, sauf [Z] à 12,60 % du C.A. ; qu'il est régulièrement attesté par des collègues de travail du comportement irrespectueux de Mme [K] à leur égard, caractérisé par un mutisme de plusieurs mois et le fait de ne pas dire bonjour ou au revoir, contribuant ainsi à mettre une mauvaise ambiance dans l'équipe, étant souligné par [E] [X], collègue de travail l'été 2011, confirmé en cela par la nouvelle supérieure de l'intéressée, que Mme [K] ne supportait pas la moindre réflexion et se réfugiait souvent dans un long mutisme ;

Que l'avertissement est donc fondé ;

Sur la prime conventionnelle

Considérant que l'avenant n° 43 du 25 janvier 2011 de la convention collective nationale de l'alimentation et de la restauration rapide instaure une prime annuelle à la double condition de justifier d'un an d'ancienneté dans l'entreprise et d'être inscrit dans les effectifs, la dite prime de 120 € pour un salarié ayant d'un à trois ans d'ancienneté étant payable, dans le mois qui suit le 1er exercice clos au-delà du 1er janvier 2011 ;

Que la société Pomme de Pain clôturant son exercice le 31 décembre, selon l'extrait du registre du commerce et des sociétés, la prime était payable à compter du 1er janvier 2012, date à laquelle Mme [K] n'était plus dans les effectifs de la société ;

Que Mme [K] doit donc être déboutée de cette demande ;

Sur la prime d'habillage et de déshabillage

Considérant qu'en application de l'article 29.6 de la convention collective nationale de l'alimentation et de la restauration rapide, l'employeur doit au salarié une contrepartie au temps d'habillage et de déshabillage du port d'une tenue de travail, sous forme de l'octroi de 2 jours de congés supplémentaires par an ou de contribution à un régime complémentaire de santé ;

Que, selon les pièces produites, cette contrepartie était assurée dans la société Pomme de Pain par l'octroi de 2 jours de congés payés supplémentaires, réduit le 6 avril 2005 à un jour en raison de la journée de solidarité créée par la loi du 30 juin 2004, de sorte que les salariés bénéficiaient de 25 jours de congés légaux + 1 journée en contrepartie du temps d'habillage et de déshabillage;

Qu'il résulte de la pièce 26 de l'employeur que Mme [K] a bénéficié de 26 jours de congés payés, ce que confirme les bulletins de paie, de sorte que sa demande n'est pas fondée ;

Sur le rappel de salaire de juillet 2011

Considérant qu'il résulte du planning de Mme [K] qu'elle a travaillé 140 heures en juillet, payés 144,67 h, selon le bulletin de paie, plus 7 h au titre du 14 juillet férié et travaillé ;

Que la salariée, qui ne produit aucun décompte exploitable faisant apparaître qu'elle aurait travaillé 2h30 en plus en juillet 2011, a donc été remplie de ses droits et doit être débouté de sa demande à ce titre ;

Sur la résiliation du contrat

Considérant que la résiliation judiciaire du contrat de travail peut être demandée par le salarié en cas de manquement de l'employeur à ses obligations contractuelles d'une gravité telle qu'il rend impossible la poursuite de leurs relations ; que la résiliation prononcée dans ces conditions produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Que lorsque la résiliation judiciaire du contrat de travail demandée par le salarié a été prononcée aux torts de l'employeur, le licenciement postérieur notifié par ce dernier est sans effet ;

Que lorsqu'un salarié demande la résiliation de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, tout en continuant à travailler à son service, et que ce dernier le licencie ultérieurement pour d'autres faits survenus au cours de la poursuite du contrat, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation du contrat de travail était justifiée ; que c'est seulement dans le cas contraire qu'il doit se prononcer sur le licenciement notifié par l'employeur ;

Que pour la résiliation de son contrat, Mme [K] invoque le défaut de paiement de la prime conventionnelle d'ancienneté de 120€ par an, soit 360 € entre le 6 octobre 2008 et le 6 octobre 2011, le défaut de paiement des 2h30 travaillées en plus en juillet 2011, l'absence de congés payés en contrepartie du temps d'habillage et de déshabillage prévus par l'article 26 de la convention collective nationale de restauration rapide, l'avertissement injustifié, la modification de ses horaires, parfois jusqu'à 21h30 et parfois le week-end de 7h30 à 15 heures, le fait que tout était rentré dans l'ordre, M [L] étant muté en août 2011, mais que la situation a changé lorsque sa nouvelle directrice a appris la saisine du conseil de prud'hommes, qu'elle subissait alors des réflexions et l'agression de cette dernière et a été victime d'un harcèlement moral, conduisant à un arrêt de travail du 19 septembre au 5 octobre 2011, puis du 13 au 24 octobre 2011, prolongé jusqu'au 2 novembre 2011 ;

Que pour la confirmation du jugement et le rejet de la demande de résiliation, la société Pomme de Pain soutient pour l'essentiel que :

- la prime d'ancienneté instituée par un avenant n° 43 à la convention collective nationale de la restauration rapide du 25 janvier 2011, n'était payable qu'au mois de janvier 2012 et est conditionnée à la présence de la salariée dans l'entreprise à cette date, ce qui n'était pas le cas de Mme [K].

- Mme [K] a été remplie de ses droits pour le mois de juillet 2011, étant précisé qu'elle n'a pas travaillé 9h30 par jour et a perçu 7 heures supplémentaires pour le 14 juillet jour férié.

- elle octroie à ses salariés 2 jours de congés payés supplémentaires par an, en contrepartie du temps d'habillage te de déshabillage, étant précisé qu'une journée a été abandonnée dès 2005 au titre de la journée de solidarité, de sorte que Mme [K] a bénéficié chaque année de 26 jours de congés payés.

- Mme [K] n'établit pas la matérialité de faits précis et concordants permettant de présumer l'existence d'un harcèlement moral à son encontre ;

Que Mme [K] ne peut reprocher à l'employeur un changement de ses heures de travail, dans la mesure où son contrat prévoit un horaire sur la plage journalière 9h30 - 21h30, qu'aucun document ne justifie de l'usage d'un horaire fixe et que le planning des collaborateurs du point de vente est établi par roulement selon différentes tranches horaires ;

Que la salariée n'est pas fondée à se plaindre d'une modification de ses horaires, de l'absence de contrepartie au temps d'habillage et de déshabillage, pas plus qu'elle n'est fondée dans sa demande de rappel de salaire et de prime d'ancienneté;

Que Mme [K] n'établit pas la matérialité de faits précis et concordants qui, pris dans leur ensemble permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral, au sens de l'article L 1152-2 du Code du Travail ; qu'au surplus, il n'est produit aucun certificat du médecin qui l'a arrêté mi septembre 2011, puis du 13 octobre au 24 octobre, avec prolongation jusqu'au 2 novembre 2011, permettant d'imputer ces arrêts à une dégradation de ses conditions de travail altérant son état de santé ;

Que le fait attesté que M [L], ancien supérieur de Mme [K], lui ait reproché le 29 avril 2011 d'effectuer des corrections manuelles sur sa caisse, alors qu'il s'agissait d'un problème informatique, et a demandé à la 1ère vendeuse de se mettre derrière elle pour vérifier ce qu'elle faisait parce qu'il l'a soupçonnait de vol, constitue un fait isolé et non un agissement répété de M [L] qui, en tout état de cause a été muté en août 2011 selon la salariée, qui n'établit pas un comportement similaire de sa nouvelle directrice ;

Que la demande de résiliation judiciaire présentée le 15 juillet 2011 et maintenue en appel n'est donc pas fondée et il convient d'examiner le licenciement de Mme [K] ;

Sur le licenciement

Considérant que la lettre de licenciement de Mme [K] pour faute grave, qui fixe les limites du litige, est rédigée en ces termes :

« Vous étiez en arrêt de travail jusqu'au 2 novembre 2011, selon la dernière prolongation d'arrêt que nous avions reçue, et depuis le 3 novembre 2011, nous sommes sans nouvelle de votre part.

Nous vous avions adressé en date du 21 novembre 2011 un courrier recommandé (distribué le 24/11 selon 1 'accusé réception) via lequel nous vous demandions de justifier vos absences dans les plus brefs délais, rappelant les dispositions de notre règlement intérieur en matière de justification d'absence.

Sans réponse de votre part, nous vous avons informé que nous envisagions de procéder à votre licenciement par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 9 décembre 2011 (1ère présentation par la poste de ce courrier le 10/12/2011), dans lequel, nous vous, avons invité à vous présenter à un entretien préalable le mardi 20 décembre 2011 à 15 heures 00, au siège de Pomme de Pain, pour un entretien avec Mr [W] [U], DRH, pour que vous puissiez fournir des explications quant à vos absences.

Vous n'avez pas souhaité vous présenter à cet entretien, nous n'avons donc pas pu modifier notre appréciation des faits.

En effet, nous vous rappelons que vous exercez un métier de service, que vous travaillez au sein d'une équipe et que, par conséquent, vos absences injustifiées portent préjudice au bon fonctionnement de l'unité dont vous dépendez.

D'autre part, nous attirons également votre attention sur le fait que vous êtes lié à l'entreprise par un contrat de travail impliquant certaines obligations notamment en terme d'assiduité et de respect de planning.

En conséquence, nous nous voyons dans l'obligation de mettre fin au contrat de travail vous liant à notre entreprise. Les conséquences immédiates de votre comportement rendent impossible la poursuite de votre activité au service de l'entreprise même pendant un préavis, qui ne vous sera pas en conséquence rémunéré.

Nous vous notifions parla présente votre licenciement immédiat pour faute grave, sans préavis, ni indemnité de rupture. Vous cesserez de faire partie du personnel de notre entreprise le 23 décembre 2011. » ;

Considérant qu'il résulte des articles L.1234-1 et L.1234-9 du code du travail que, lorsque le licenciement est motivé par une faute grave, le salarié n'a droit ni à un préavis ni à une indemnité de licenciement ; que la faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée du préavis ; que l'employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve ;

Considérant que pour un licenciement sans cause réelle et sérieuse, Mme [K] expose qu'elle ne pouvait reprendre son poste en raison du harcèlement moral et du comportement de l'employeur ;

Que pour la confirmation du jugement et un licenciement pour faute grave, la société Pomme de Pain soutient que :

- Mme [K] n'a pas donné suite à un courrier de M [U], DRH, du 4 août 2011 désireux de s'entretenir avec elle des difficultés évoquées dans sa lettre du 12 juillet et de la saisine du conseil de prud'hommes.

- La salariée ne s'est pas présentée à son poste du 6 au 12 octobre 2011.

- Le 21 octobre 2011, le DRH a avisé la salariée d'une prise de rendez-vous auprès du médecin du travail qui n'émettait pas d'avis le 3 novembre et précisait à revoir lors de la reprise.

- Par la suite, Mme [K] n'a adressé aucune prolongation d'arrêt de travail et n'a pas repris son poste, malgré deux mises en demeure ;

Qu'après un premier courrier recommandé de l'employeur du 17 novembre 2011, qu'elle n'a pas retiré, Mme [K] a été mise en demeure par lettre recommandée du 21 novembre 2001 avec accusé de réception du 24 novembre, de justifier de son absence ; qu'à ce jour, Mme [K] ne justifie toujours pas d'un arrêt maladie ou d'un motif d'absence pour la période postérieure au 3 novembre 2011 et n'a pas repris son poste, empêchant ainsi de fait la poursuite du contrat de travail ;

Que ce manquement constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail d'une importance telle qu'il rend impossible le maintien de Mme [K] dans l'entreprise même pendant la durée du préavis et fonde son licenciement pour faute grave, exclusif de dommages et intérêts, d'indemnités de préavis et de licenciement, le jugement étant confirmé ;

Sur le droit individuel à la formation

Considérant que Mme [K] précise n'avoir jamais pu bénéficier de son droit individuel à la formation ;

Que toutefois, alors que la lettre de licenciement a informé Mme [K] de l'acquisition de 78 heures au titre de son droit individuel à la formation et l'a invité à utiliser ce droit dans un délai de deux mois, équivalent à celui du préavis, la salariée n'en a rien fait et a attendu la procédure d'appel pour présenter cette demande nouvelle ; que la SAS Pomme de Pain ne peut donc être tenue au paiement de la contrepartie du droit individuel à la formation non utilisé en raison de la carence du titulaire du droit ;

Sur les frais et dépens

Considérant que Mme [K] qui succombe en son appel n'est pas fondée à obtenir l'application de l'article 700 du code de procédure civile, mais versera sur ce même fondement à la société Pomme de Pain la somme de 1.000 € et supportera les dépens de première instance et d'appel;

PAR CES MOTIFS

La cour,

Dit fondé le licenciement de Madame [F] [K] pour faute grave ;

Confirme le jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 14 juin 2012 en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Condamne Madame [F] [K] a payer à la SAS Pomme de Pain la somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute les parties de leurs autres demandes ;

Condamne Madame [F] [K] aux dépens.

Le GreffierLe Président

N. SERHIR P. LABEY


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 12/10941
Date de la décision : 26/03/2015

Références :

Cour d'appel de Paris K7, arrêt n°12/10941 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-03-26;12.10941 ?
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