RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 4
ARRÊT DU 24 Mars 2015
(n° , 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/06919
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 16 Avril 2012 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section encadrement RG n° 10/16931
APPELANT
Monsieur [O] [R]
[Adresse 2]
[Localité 2]
comparant en personne, assisté de Me Anne-claire MADDOLI RESTOUX, avocat au barreau de PARIS, toque : D1255
INTIMEES
SOCIÉTÉ GÉNÉRALE
[Adresse 1]
[Localité 1]
représentée par Me Jean-oudard DE PREVILLE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0502
UBIFRANCE (AGENCE FRANÇAISE POUR LE DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL DES ENTREPRISES )
[Adresse 3]
[Localité 3]
représentée par Me Mary-Daphné FISHELSON, avocat au barreau de PARIS, toque : P0487
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 10 Février 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente de chambre
Monsieur Jean-Louis CLEVA, Président de chambre
Madame Anne-Marie DEKINDER, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffier : Mademoiselle Sandrine CAYRE, lors des débats
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
- signé par Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente et par Mlle Sandrine CAYRE, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Cour est saisie de l'appel interjeté par Monsieur [O] [R] du jugement du Conseil des Prud'hommes de PARIS, section Encadrement - chambre 4, rendu le 16 avril 2012 qui s'est déclaré incompétent pour connaître du litige et a renvoyé les parties à mieux se pourvoir;
FAITS ET DEMANDES DES PARTIES
UBIFRANCE est un établissement industriel et commercial sous tutelle du Ministère du commerce extérieur (actuellement du Ministère des affaires étrangères) qui a été désigné gestionnaire de la procédure de volontariat international en entreprise (VIE) qui a succédé à l'ancien service national des coopérants en entreprise après la réforme du service national ; ce volontariat s'inscrit dans le cadre du service national universel ;
Monsieur [O] [R] né le [Date naissance 1] 1981 a signé une lettre d'engagement avec UBIFRANCE en vue d'une mission de Volontariat à l'international en entreprise (VIE) , le 9 février 2009 ; aux termes de cet engagement, il était indiqué que par décision du Ministre chargé du commerce extérieur, en date du 23 décembre 2008 sa candidature au volontariat civil a été retenue et qu'il lui était proposé d'être affecté pour le compte de la Société Générale à New-York à compter du 1er Mars 2009 pour une durée de 18 mois ; les conditions de cette affectations étaient précisées dans cet engagement ;
Le 19 avril 2010, la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE à New York a demandé à Monsieur [O] [R] de restituer son badge d'identification et de quitter les locaux de la Société Générale en raison selon mail du 4 juin 2010 de UBIFRANCE sous la plume de Monsieur [D] [E], directeur du VIE, à Monsieur [O] [R] « d'un comportement non professionnel » qu'il a eu faisant apparaître « un manque de respect mutuel alors qu'il s'agissait de qualités attendues de toute personne accueillie au sein de la Société Générale à New York ;
Aux termes de ce mail, il était indiqué à Monsieur [O] [R] que la société d'accueil ayant décidé de ne plus lui permettre d'accéder à son site, sa mission VIE faisait l'objet d'une interruption anticipée en raison du non respect des clauses de la convention prévue à l'article L 122-7 du Code du service national, à effet au 30 juin 2010 ; il lui était indiqué qu'après étude des éléments fournis par chacune des parties, le motif invoqué par la Société Générale, société d'accueil, ne pouvait pas être retenu par UBIFRANCE et qu'il aura droit à effectuer une seconde mission de volontariat international en entreprise d'une durée maximale de 8 mois ;
Monsieur [O] [R] a saisi le Conseil des Prud'hommes le 24 décembre 2010 ;
Monsieur [O] [R] demande à la Cour avec opposabilité à UBIFRANCE de constater l'existence d'un rapport de droit privé avec la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE constitutif d'un contrat de travail et conséquence d'infirmer le jugement en déclarant les juridictions judiciaires compétentes pour statuer et évoquant, de dire la rupture de son contrat de travail abusive et de condamner la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE à lui payer les sommes de :
27294 € à titre de préavis plus congés payés afférents et subsidiairement la somme de 5600 € au titre des rémunérations convenues du 30 juin 2010 au 31 Août 2010 avec intérêts de droit depuis cette date et 14196 € à titre d'indemnité pour inobservation de la procédure de licenciement
43670 € à titre de rappel de salaire plus congés payés afférents ou subsidiairement la somme de 43670 € à titre de dommages intérêts pour enrichissement sans cause du fait de la modification des fonctions convenues
1892.80 € à titre d'indemnité légale de licenciement
50000 € à titre de dommages intérêts en raison du caractère abusif de la rupture et notamment au titre de la perte de chance et de la violation de l'obligation de reclassement
5870 € en réparation des frais fixes indûment exposés à New York en juillet et Août 2010
42588 € pour travail dissimulé
3500 € au titre des frais irrépétibles exposés aux Etats Unis
4859 € au titre des frais irrépétibles exposés devant le Conseil des Prud'hommes
4800 € au titre des frais irrépétibles devant la Cour d'Appel
La SOCIÉTÉ GÉNÉRALE, avant tout débat au fond, demande à la Cour de se déclarer incompétente au profit du tribunal administratif de Paris au visa des articles L 1141-1 du Code du Travail et loi 122-1 du code du service national. Au fond, elle demande de rejeter les demandes de Monsieur [O] [R] comme injustifiées tant dans leur principe que dans leur montant, subsidiairement, de dire que l'appelant ne démontre pas la réalité et l'importance des préjudices qu'il invoque et d'en réduire le montant à de plus justes proportions et en tout état de cause elle sollicite la condamnation de Monsieur [O] [R] à lui payer la somme de 2800 € en application de l'article 700 du Code de procédure Civile.
UBIFRANCE demande la confirmation du jugement et de se déclarer incompétente au profit de la juridiction administrative et subsidiairement de débouter Monsieur [O] [R] de ses demandes au titre de la prétendue rupture de son contrat de travail et de l'ensemble de ses demandes et de le condamner à lui payer la somme de 3000 € en application de l'article 700 du Code de procédure Civile.
SUR CE
Il est expressément fait référence aux explications et conclusions des parties visées à l'audience et soutenues oralement à la barre .
Sur la compétence
C'est à bon droit que le Conseil des Prud'hommes s'est déclaré incompétent et a renvoyé les parties à mieux se pourvoir ;
En effet, en application de l'article L 1411-1 du Code du Travail le Conseil des Prud'hommes est compétent pour régler les différends surgissant à l'occasion d'un contrat de travail soumis au code du travail, entre l'employeur ou ses représentants et les salariés qu'il emploie ;
En l'espèce, aucun contrat de travail n'existe entre Monsieur [O] [R] et la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE, simple organisme d'accueil dans le cadre du VIE conclut par Monsieur [O] [R] avec UBIFRANCE ; les conditions générales du contrat signées par l'appelant le 9 Février 2009 rappellent à l'article I-1 que c'est UBIFRANCE qui passe un contrat avec l'organisme d'accueil du Volontaire aux fins de déterminer, « dans le respect des dispositions du Code du service National, les conditions d'accomplissement du volontariat » et à l'article I-2 que « le volontaire est placé sous l'autorité du Ministre délégué au commerce extérieur. Il a un statut de droit public défini par le code du service national. Pendant ses séjours à l'étranger, il est placé sous l'autorité déléguée du Chef de mission économique près l'Ambassade de France, compétent pour ce pays. Le chef de mission économique exerce cette autorité, en liaison avec la structure locale auprès de laquelle le volontaire est affecté » ;
Il s'ensuit qu'il ressort clairement des dispositions précitées que le lien de subordination nécessaire à l'existence d'un contrat de travail régi par le code du travail, n'existe pas dans le cas de Monsieur [O] [R] à l'égard de la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE ; le fait d'avoir à se soumettre au règlement intérieur de la structure auprès de laquelle est accompli le volontariat découle de l'article II-4 sans créer pour autant un lien de subordination à l'égard de l'organisme d'accueil ;
L'article II-7 stipule une obligation pour le volontaire de remettre deux rapports d'activité au cours de son séjour au chef de la mission économique compétente et à UBIFRANCE ;
L'ensemble de ces dispositions témoignent du lien de subordination exclusivement à l'égard de UBIFRANCE qui aux termes de l'article III-1, verse au volontaire ses indemnités mensuelles sur un compte bancaire à son nom ouvert en France et le volontaire n'est pas autorisé à percevoir d'autres indemnités que celles qui lui sont versées par UBIFRANCE ;
Ainsi, il ressort des articles précités des conditions générales de l'engagement de volontariat international souscrit par Monsieur [O] [R] ( n° 23365) au visa exclusif des articles L 122-1 et suivants du code du service national et du décret 2000-1159 du 30 novembre 2000 qu'il n'y a aucun lien contractuel entre le volontaire VIE et l'organisme d'accueil au rang des effectifs duquel il ne figure pas, les seuls liens contractuels existant étant entre l'entreprise et UBIFRANCE d'une part et le volontaire VIE et UBIFRANCE d'autre part ;
Monsieur [O] [R] qui avait un statut d'agent public intervenait auprès de la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE non dans le cadre d'un détachement auprès d'un organisme privé mais dans le cadre d'un contrat particulier répondant à des dispositions spécifiques ressortant du code du service militaire et par conséquent à des dispositions d'un contrat soumis au droit public excluant par nature l'existence d'un contrat de travail de droit privé avec l'organisme d'accueil et par conséquent avec la Société Générale ;
Il est vain pour l'appelant de soutenir que sa mission aurait été modifiée dans la mesure où aux termes de la lettre d'engagement dans le cadre du VIE il est stipulé à l'article II-4 des conditions générales qu'il ne doit en aucun cas, fût-ce à l'instigation de l'organisme d'accueil, exercer un pouvoir ou une responsabilité qui outrepasse le cadre de sa mission ou de ses obligations légales or l'article 1 « Objet de l'affectation » du «contrat» signé avec UBIFRANCE le 9 Février 2009 définit clairement l'étendue du champ d'intervention de Monsieur [O] [R] au sein de l'organisme d'accueil sans qu'il soit justifié par l'appelant d'une quelconque modification de sa mission par UBIFRANCE ou par elle acceptée ;
Il est ainsi établi que s'il y a bien eu une prestation de travail fournie pour la société d'accueil, elle l'a été seulement dans le cadre défini du contrat entre UBIFRANCE et Monsieur [O] [R] et il n'existait pas de lien de subordination entre l'appelant et la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE qui ne le rémunérait pas ;
En conséquence, il y a lieu de juger qu'il n'existe pas de contrat de travail entre la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE et Monsieur [O] [R] et que la juridiction prud'homale est incompétente pour connaître du litige de sorte que c'est à bon droit que les parties ont été renvoyées à mieux se pourvoir par le jugement déféré.
Il y a lieu de dire que chaque partie conservera à sa charge ses frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement
Dit que chaque partie conservera à sa charge ses frais irrépétibles
Laisse les entiers dépens à la charge de Monsieur [O] [R] .
LE GREFFIER LE PRESIDENT