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13/03/2015 | FRANCE | N°12/01264

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 11, 13 mars 2015, 12/01264


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11



ARRÊT DU 13 mars 2015 après prorogation

(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/01264

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 10 Janvier 2012 par le Conseil de Prud'hommes de CRETEIL - RG n° 10/01138





APPELANTE

CENTRE COMMUNAL D'ACTION SOCIALE (CCAS) DE [Localité 1]

[Adresse 3]

[Adresse 2]

représentée par Me My-kim YA

NG PAYA, avocat au barreau de PARIS, toque : P0498 substitué par Me Carole SIMONIN, avocat au barreau de PARIS, toque : R077







INTIMEE

Madame [R] [L] épouse [H]

[Adresse 1]

...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11

ARRÊT DU 13 mars 2015 après prorogation

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/01264

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 10 Janvier 2012 par le Conseil de Prud'hommes de CRETEIL - RG n° 10/01138

APPELANTE

CENTRE COMMUNAL D'ACTION SOCIALE (CCAS) DE [Localité 1]

[Adresse 3]

[Adresse 2]

représentée par Me My-kim YANG PAYA, avocat au barreau de PARIS, toque : P0498 substitué par Me Carole SIMONIN, avocat au barreau de PARIS, toque : R077

INTIMEE

Madame [R] [L] épouse [H]

[Adresse 1]

comparante en personne, assistée de Me François PILLET, avocat au barreau de PARIS, toque : C1996

PARTIE INTERVENANTE :

POLE EMPLOI

[Adresse 4]

non comparant, ni représenté ayant pour avocat Me Catherine ROIG, barreau du Val de Marne, toque PC 309 (absent)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 18 Décembre 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Luce CAVROIS, Présidente de chambre

Madame Evelyne GIL, Conseillère

Madame Isabelle DOUILLET, Conseillère

Qui en ont délibéré

Greffier : Melle Flora CAIA, lors des débats

ARRET :

- Réputé Contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Luce CAVROIS, Présidente et par Mademoiselle Flora CAIA, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Par arrêt du 16 janvier 2014 auquel il est expressément renvoyé pour l'exposé des faits et de la procédure, la Cour a rouvert les débats et a invité les parties à approfondir leurs échanges sur la portée, dans le cadre du présent litige, de l'arrêté du président du Centre Communal d'Action Sociale de [Localité 1] du 15 avril 2010 à l'égard de Mme [R] [H].

A cet égard la cour a relevé que': «'Il est produit aux débats l'arrêté du président du CENTRE COMMUNAL D'ACTION SOCIALE DE [Localité 1] en date du 15 avril 2010 dont les parties font état sans toutefois d'expliquer de façon circonstanciée sur les effets qu'il peut ou non produire à l'égard de Mme [R] [H] dans le cadre du présent litige. Le sens général des explications de la salariée et la qualification de fait du prince qu'elle attribue à la manière de procéder de l'employeur tendent à soutenir que cette décision est dépourvue de toute valeur et de portée. Il s'agit toutefois d'un acte administratif ayant toutes les apparences de la régularité et qui, semble-t-il régulièrement notifié, n'a pas été contesté par Madame [R] [H]. Il apparait donc nécessaire d'inviter les parties à approfondir leurs échanges sur ce point.'»

L'affaire est revenue à l'audience du 18 décembre 2014 et à cette date les parties ont déposé et soutenu leurs conclusions visées par le greffier.

Le CCAS de [Localité 1] fait observer que la rémunération brute de 6.227 € mensuelle prévue au contrat de droit public que 18 décembre 2009 était manifestement excessive au regard des règles applicables, qu'elle avait été fixée sans tenir compte de la rémunération des agents titulaires exerçant des fonctions analogues au sein de la collectivité publique.

Le CCAS fait valoir que suite au contrôle de légalité exercé par le Préfet, il a été contraint de retirer le contrat du 18 décembre 2009. Il met en exergue le fait que le Préfet par courrier du 7 avril 2010 a indiqué': «'Je ne puis que vous inviter à retirer les contrats en cause dans un délai qui m'éviterait d'avoir à en saisir la justice administrative.'»

Le CCAS ajoute que le premier contrat étant entaché d'une erreur manifeste d'appréciation, il s'agissait d'un acte administratif illégal il ne pouvait servir de support à une proposition de modification de contrat'; qu'en conséquence le retrait du contrat du 18 décembre 2009 plaçait Mme [H] dans la situation dans laquelle elle se trouvait avant sa signature soit dans la situation régie par l'article L.1224-3 du Code du travail applicable au transfert des contrats de travail de l'AREV vers le CCAS. Le CCAS estime donc que ce retrait était inévitable et qu'il était bien fondé à proposer le nouveau contrat du 15 avril 2010 à Mme [H] avec une rémunération de 4.305, 94 €'; que celle-ci n'ayant pas donné de réponse dans le délai de trois semaine, ce silence s'analysait en refus de la proposition de contrat et en application de l'article L.1224-3 du Code du travail, ce refus constitue pour l'employeur une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Mme [H] rappelle que suite à la reprise en gestion publique de l'AREV par le CCAS, elle a accepté le premier contrat qui lui a été proposé en date du 19 décembre 2009, que ce contrat s'est appliqué et qu'ensuite elle a reçu le 15 avril 2010 une lettre du CCAS lui indiquant': «' je vous informe de la décision définitive de procéder au retrait de votre contrat actuel et vous soumets un nouveau contrat à durée indéterminée conforme à la réglementation en vigueur. La rémunération est fixée par équivalence à celle qui pourrait être versée à un agent non titulaire exerçant les fonctions et possédant une qualification équivalente aux vôtres. Vous disposez d'un délai maximum de trois semaines à compter de la date de réception de la présente pour m'indiquer par courrier si vous optez ou non pour ce CDI'; faute de réponse écrite de votre part , dans les délais ci-dessus indiqués, ce contrat sera considéré comme implicitement refusé. Dès lors vous vous verrez licenciée conformément aux dispositions de l'article L. 1224-3 du Code du travail'».

Mme [H] s'étonne de la réouverture des débats intervenue sur un point qui n'était pas dans les conclusions des parties'; elle estime que l'arrêté de retrait échappe à l'appréciation du Conseil et de la Cour.

Elle souligne qu'il n'y a pas eu de contrôle de légalité car le premier contrat n'a pas été soumis à la juridiction administrative et qu'il n'a donc pas pu être annulé'; que le délai de deux mois pour la saisine du tribunal administratif ayant expiré le CCAS a imaginé un arrêté de retrait rétroactif.

Mme [H] fait valoir qu'elle a nécessairement contesté le retrait du premier contrat et son licenciement en choisissant de saisir la juridiction civile compétente pour juger les relations du travail.

En substance Mme [H] fait valoir que s'agissant d'un deuxième contrat, l'article L.1224-3 du Code du travail ne saurait s'appliquer.

Elle souligne que le premier contrat est intervenu après une année de préparation de la reprise en gestion publique afin que le pouvoir d'achat de l'ensemble des salariés soit maintenu'; après un protocole d'accord fixant les modalités de l'intégration des personnels de l'AREV où il est précisé que le CCAS s'engage à maintenir au 1er janvier 2010 le pouvoir d'achat des salariés.

Elle ajoute qu'ayant compris que le CCAS n'avait pas l'intention d'appliquer le 1er contrat de travail signé le 19 décembre 2010, elle est tombée le 30 avril 2010 dans une très grave dépression qui a définitivement été jugée comme un accident du travail par l'Assurance Maladie qui n'a été consolidé avec séquelles que le 31 août 2014';

Elle souligne que son licenciement est intervenu le 20 mai 2010 alors qu'elle était en arrêt maladie reconnu comme accident du travail. Elle fait valoir qu'un tel licenciement intervenu durant l'arrêt maladie est entaché d'illégalité et ne procède pas d'une cause réelle et sérieuse.

SUR CE

Sur le licenciement'

En l'espèce, il convient de rappeler que le premier contrat du 18 décembre 2009 a été accepté par Mme [H] et qu'il s'est appliqué.

C'est vainement que le CCAS prétend que ce premier contrat aurait nécessairement été annulé rétroactivement par la juridiction administrative alors que cette juridiction n'a pas été saisie.

Faute d'une annulation par une juridiction administrative du contrat du 18 décembre 2009, le fait par la salariée de ne pas répondre à la proposition d'un deuxième contrat, lui imposant une diminution de sa rémunération mensuelle de 6.227 € à 4.305,94 €, ne saurait constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Au surplus, la cour relève qu'il n'est pas discuté que le licenciement de Mme [H] est intervenu alors qu'elle était en arrêt maladie du fait d'un accident du travail'et que l'employeur ne pouvait la licencier pendant cette période de suspension de son contrat.

En conséquence la décision du conseil de prud'hommes doit être confirmée en ce qu'elle a jugé le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et a constaté l'irrégularité de la procédure.

Sur les conséquences financières du licenciement

Sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse'

Du fait de son licenciement, Mme [H] a vu sa carrière brusquement arrêtée à 43 ans.

Il est, de plus, établi, tant par le certificat médical du 30 avril 2010 que par la décision de l'Assurance Maladie du 27 décembre 2010 que le traumatisme psychologique provoqué par son licenciement a entrainé une dépression qui a occasionné pour Mme [H] des lésions et troubles lesquels sont la conséquence de son licenciement.

Il n'est pas non plus discutable que cette dépression a perduré et que lors de sa réunion du 5/06/2014, la Commission des Droits et de l'Autonomie des Personnes Handicapées a reconnu à Mme [H] un taux d'incapacité compris entre 50 et 70 % et lui a accordé l'allocation adulte handicapé.

En conséquence il convient de lui allouer la somme de 150.000 euros à titre de réparation et d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la décision des premiers juges sur le quantum de cette indemnité est infirmée.

Sur l'indemnité pour non respect de la procédure'

Le CCAS n'ayant pas respecté la procédure de licenciement individuelle, c'est à juste titre que le conseil de prud'hommes l'a condamné à payer la somme de 6.227 € au titre de ce non respect, la décision sera confirmée de ce chef.

Sur l'indemnité de préavis

Mme [H] réclame 4 mois d'indemnité de préavis et les congés payés afférents au motif que cela est prévu par la convention collective de travail des établissements pour personnes inadaptées et handicapées. Cependant c'est à juste titre que le conseil de prud'hommes a relevé qu'elle ne faisait pas la preuve de ce que cette convention collective était applicable à son contrat, alors que cette convention collective n'est nullement visée par le contrat de travail du 18 décembre 2009 et que le CCAS gère du personnel de droit public. Dès lors elle est déboutée de sa demande et la décision des premiers juges est confirmée.

Sur l'indemnité de licenciement

Mme [H] a perçu la somme de 22.908,22 € mais fait valoir que la convention collective, article 10 annexe 6 relative aux salariés cadres prévoit un mois par année d'ancienneté'; son ancienneté était de 7 ans au jour du licenciement litigieux , elle estime avoir droit à une indemnité de 45.530,66 €, elle demande donc la différence soit la somme de 22.624,44 €. Mais ainsi qu'il vient d'être décidé une telle convention n'est pas applicable, en conséquence, Mme [H] doit être déboutée de cette demande.

Sur la demande de Pôle Emploi'

Par arrêt avant dire droit, la demande de Pôle emploi a été jugée recevable';

Il résulte des motifs précédents que le licenciement de Mme [H] est sans cause réelle et sérieuse, en conséquence il y a lieu, par application de l'article L.1235-4 du Code du travail de faire droit à la demande de Pôle Emploi en paiement de la somme de 2.813,59 € correspondant aux allocations chômages versées à Mme [H] du 8 au 30 novembre 2010'; au surplus en application du même article, il convient d'ordonner d'office le remboursement par le CCAS de [Localité 1] des indemnités de chômage versés à la salariée, à compter de son licenciement et ce, dans la limite de six mois d'indemnités.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Le CCAS succombant en son appel, il est condamné aux entier dépens et à verser à Mme [H] la somme de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés par elle en appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme le jugement du conseil de prud'hommes de Créteil du 10 janvier 2012 sauf sur le montant des dommages et intérêts alloués pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne le Centre Communal d'Action Sociale de [Localité 1] à verser à Mme [R] [H] les sommes de':

-150.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse'avec intérêts au taux légal à compter du jugement du 10 janvier 2012 ;

-5.000 € au titre de ses frais irrépétibles d'appel'avec intérêts au aux légal à compter du présent arrêt ;

Condamne le Centre Communal d'Action Sociale de [Localité 1] à verser à POLE EMPLOI la somme de'2.813,59 € correspondant aux allocations chômages versées à Mme [H] du 8 au 30 novembre 2010'; et à rembourser les éventuelles indemnités versées dans la limite de six mois.

Rejette toute autre demande.

Condamne le CCAS de [Localité 1] aux entiers dépens.

Le Greffier,La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 12/01264
Date de la décision : 13/03/2015

Références :

Cour d'appel de Paris L2, arrêt n°12/01264 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-03-13;12.01264 ?
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