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12/03/2015 | FRANCE | N°13/14129

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 5, 12 mars 2015, 13/14129


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 5



ARRET DU 12 MARS 2015



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 13/14129



Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 Juin 2013 - Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2012032613





APPELANTE



SAS BOURGEY MONTREUIL FRANCILIENNE

ayant son siège social [Adresse 2]

[Localité 2]

prise en la p

ersonne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège



Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Assistée de Me Jacques MAZA...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 5

ARRET DU 12 MARS 2015

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/14129

Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 Juin 2013 - Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2012032613

APPELANTE

SAS BOURGEY MONTREUIL FRANCILIENNE

ayant son siège social [Adresse 2]

[Localité 2]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Assistée de Me Jacques MAZALTOV, avocat au barreau de PARIS, toque : E1021

INTIMEE

SARL TRANSPORTS COUTAREL

ayant son siège social [Adresse 1]

[Localité 1]

prise en la personne de son Gérant domicilié en cette qualité audit siège

Représentée par Me Luca DE MARIA de la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018

Assistée de Me Gilles CATELAND, avocat au barreau de LYON, toque : T 159

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Décembre 2014, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Colette PERRIN, Présidente de chambre, chargée du rapport, et Monsieur Patrick BIROLLEAU, Président.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Colette PERRIN, Présidente de chambre

Monsieur Patrick BIROLLEAU, Président

Monsieur Olivier DOUVRELEUR, Conseiller

Greffier, lors des débats : Monsieur Bruno REITZER

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Colette PERRIN, Présidente et par Monsieur Bruno REITZER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

****

Faits et procédure

Le 4 mars 2010, la société Transports Coutarel a été chargée, par la société Bourguey Montreuil Francilienne (ci-après société BM Francilienne), de transporter des appareils électroménagers appartenant à la société Electrolux.

Dans la nuit du 4 au 5 mars 2010, la société Transport Coutarel a été victime de vol.

La société BM Francilienne a réglé la somme de 31 072,95€ à la société Electrolux au titre des marchandises dérobées.

Elle a réglé diverses factures à la société Transports Coutarel en retenant le montant des marchandises dérobées, compensation contestée par la société Transports Coutarel comme ayant été opérée de façon arbitraire.

C'est dans ces conditions que la société Transports Coutarel a fait assigner la société BM Francilienne le 30 septembre 2011 en paiement de ses factures devant le tribunal de commerce de Paris.

Par jugement rendu le 6 juin 2013, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal de commerce de Paris a :

- condamné la société BM Francilienne à payer à la société Transports Coutarel la somme de 37 163,25 € TTC outre intérêts calculés à trois fois le taux légal à compter du 8 mars 2011.

- condamné la société BM Francilienne à payer à la société Transports Coutarel la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu l'appel interjeté par la société BM Francilienne le 11 juillet 2013 contre cette décision.

Vu les dernières conclusions signifiées par la société BM Francilienne le 20 octobre 2014, par lesquelles il est demandé à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris,

- dire et juger que la société Transports Coutarel a commis une faute inexcusable lors du transport du 4 mars 2010,

- dire et juger que la société Transports Coutarel est redevable à la société BM Francilienne de la somme de 31 072,95 Euros H.T.,

Subsidiairement, au cas où la faute inexcusable ne serait pas retenue,

- dire et juger que la société Transports Coutarel est redevable à la société BM Francilienne de la somme de 25 392 Euros.

En toute hypothèse,

- dire et juger que la compensation effectuée le 25 février 2011 a éteint les créances et dettes réciproques des parties,

- débouter la société Transports Coutarel de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, faute de droit et qualité à agir,

- condamner la société Transports Coutarel à verser à la société BM Francilienne la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'appelante expose que le jugement entrepris a fait droit à l'attitude déloyale de la société Transports Coutarel en appliquant la prescription annale à la réparation du vol alors que les parties étaient en compte courant, portant la prescription à cinq ans, et que la compensation légale intervient de plein droit même à l'insu des parties.

Elle fait valoir, qu'en application du contrat-type et de l'article L.133-1 du code de commerce, la société Transports Coutarel doit, en tant que garant, indemnisation des marchandises volées en cas de pertes partielles ou totales de la marchandise.

A cet effet, elle expose enfin que la société Transports Coutarel a commis des fautes inexcusables la privant des limitations de garantie et rendant applicable le délai de prescription de 5 ans.

Vu les dernières conclusions signifiées par la société Transports Coutarel le 20 octobre 2014, par lesquelles il est demandé à la cour de :

- dire et juger que la demande reconventionnelle formulée par la société BM Francilienne est prescrite.

En conséquence,

- dire et juger non fondé l'appel interjeté par la société BM Francilienne à l'encontre du jugement du tribunal de commerce de Paris le 6 juin 2013.

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 6 juin 2013 par le tribunal de commerce de Paris.

A titre subsidiaire,

- dire et juger que la société Transports Coutarel n'a commis aucune faute inexcusable.

- dire et juger par conséquent que l'indemnisation due par la société Transports Coutarel au titre du vol des marchandises doit être limitée à la somme de 3 750 Euros, conformément aux clauses limitatives de responsabilité du Contrat Type Général.

- dire et juger que la société BM Francilienne est redevable de la somme de 37 163,24 Euros TTC envers la société Transports Coutarel en raison de la déduction arbitraire opérée sur les factures de décembre 2010 et janvier 2011.

- ordonner la compensation à due concurrence de ces deux dettes.

- condamner en conséquence la société BM Francilienne à payer à la société Transports Coutarel la somme de 33 413,24 Euros TTC, outre les intérêts à 3 fois le taux légal à compter du 8 mars 2011.

- condamner dans tous les cas la société BM Francilienne à payer à la société Transports Coutarel la somme de 5 000 Euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'intimée affirme en premier lieu être bien fondée à demander, en application de l'article L 132-8 du code de commerce, la condamnation de la société BM Francilienne à lui payer la somme indûment retenue pour le vol des marchandises en ce que la société BM Francilienne ne conteste ni dans son principe, ni dans son quantum, cette demande.

Elle fait valoir que la demande reconventionnelle de la société BM Francilienne est infondée tant en vertu de la prescription annale prévue à l'article L 133-6 du code de commerce, qu'en vertu de l'absence de comportement dilatoire ou de compte courant.

Elle affirme enfin n'avoir commis aucune faute inexcusable car, compte tenu des impératifs de livraison et de l'obligation légale pour le chauffeur d'effectuer sa coupure de nuit, celui-ci n'a commis aucune faute en stationnant son ensemble routier en bordure d'une route nationale, elle demande donc l'application des limitations de sa responsabilité conformément aux clauses limitatives prévues dans le contrat type général.

La Cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur la faute commise par la société BM Francilienne :

Considérant que la société BM Francilienne soutient que la société Transports Coutarel a commis des fautes inexcusables en stationnant le véhicule sur une aire non sécurisée et déserte ainsi qu'en laissant le véhicule sans surveillance alors qu'il était démuni de protection de sorte qu'elle ne peut pas bénéficier des limitations de garantie ;

Considérant que l'article L133-8 du code de commerce dispose qu' « est inexcusable la faute délibérée qui implique la conscience de la probabilité du dommage et son acceptation téméraire sans raison valable » ;

Considérant que le rapport d'expertise amiable a conclu à l'absence de faute du chauffeur « compte tenu des impératifs de livraison et de l'obligation pour le chauffeur d'effectuer sa coupure de nuit » ; que l'expert observe que, si celui-ci a stationné son véhicule sur la route nationale, celle-ci était éclairée et qu'il n'est pas démontré qu'il aurait pu le stationner en un autre lieu plus fréquenté et plus sécurisé, les aires sécurisées se situant respectivement à 200kms au nord et à 300kms au sud ; qu'il ajoute que la route nationale 6 « est très fréquentée de jour comme de nuit » ; que le chauffeur devait effectivement effectuer sa coupure de nuit et ne pouvait en conséquence poursuivre sa route jusqu'à un lieu de stationnement pourvu de sécurité ;

Considérant que la société Transports Coutarel affirme que son véhicule était cadenassé et bénéficiait d'un système de protection par des rideaux anti effraction et que les voleurs ont détruit le cadenas et sont donc entrés par effraction dans le camion ; que la société BM Francilienne conteste la présence d'un cadenas et fait valoir que les rideaux anti effraction sont en réalité les portes de la remorque ;

Considérant que le chauffeur, entendu le 5 mars 2010 à 7h15 soit immédiatement après les faits a indiqué avoir constaté que les portes arrières de la remorque étaient entrouvertes et qu'il manquait des colis ; qu'il a aussi précisé avoir relevé la présence de DVD qui ne lui appartenaient pas sur le sol ; qu'en revanche il n'a fait état d'aucune effraction et n'a mentionné la présence d'aucun cadenas qui aurait été forcé ; que lors de l'expertise contradictoire organisée le 18 mars sur les lieux, il n'a pas été mentionné la présence d'un cadenas ; que s'il y avait eu un cadenas et quand bien même celui-ci aurait été jeté dans la nature par les malfaiteurs ce que soutient la société Transports Coutarel, le chauffeur aurait été en possession de la clé de celui-ci et en aurait fait mention ; qu'il résulte de ces éléments que le véhicule a été laissé en stationnement toute la nuit, portes seulement fermées sans qu'il ait été apposé un cadenas ; que cette mesure élémentaire constitue une précaution minimum et élémentaire de la part d'un transporteur d'autant qu'il savait qu'en raison des coupures réglementaires, son chauffeur aurait à stationner son véhicule en un lieu dépourvu de tout gardiennage durant toute une nuit ; qu'il importe peu que les parois de la remorque aient bénéficié de rideaux renforcés dès lors que l'accès par la porte était facilité en l'absence d'un cadenas ; que les circonstances de ce transport exigeaient de la part du transporteur de sécuriser au son véhicule ; qu'il avait donc parfaitement conscience de la probabilité du dommage et l'a accepté de façon téméraire sans raison valable ;

Considérant en conséquence que la société Transports Coutarel a commis une faute inexcusable et qu'elle ne peut se prévaloir des limitations de garantie ; qu'en conséquence s'applique le délai de prescription de 5 ans ; que la société Transports Coutarel est redevable à la société BM Francilienne de la somme de 31 072, 95€ ht ;

Sur la prescription :

Considérant que la société BM Francilienne ne conteste pas le prix des opérations de transport réalisées par la société Transports Coutarel, ni la retenue qu'elle a pratiquée sur le prix des transports de la somme de 37 163,25€ ; qu'elle fait valoir que la société Transports Coutarel est débitrice à son endroit au titre de l'indemnisation des marchandises dérobées à hauteur de 31 072,95€ de sorte qu'elle était fondée à opérer une compensation ;

Considérant que la société Transports Coutarel soutient que la demande de la société BM Francilienne se heurte au délai de prescription d'un an applicable aux opérations de transport et que la société BM Francilienne a procédé à une compensation arbitraire prohibée par le contrat type ;

Considérant que la société BM Francilienne affirme que le délai d'un an n'est pas applicable car les deux sociétés étaient en relation de compte courant auxquelles s'applique un délai de prescription de 5 ans ;

Considérant que l'article 11.7 du contrat type de sous traitance dispose que «En cas de perte ou d'avarie partielles ou totales de la marchandise dont il est tenu pour responsable, le sous traitant a droit au paiement du prix de la prestation qu'il a effectuée sous réserve qu'il règle intégralement l'indemnité correspondante» ;

Considérant que l'article 18.7 du contrat type général dispose que «En cas de perte ou d'avarie partielles ou totales de la marchandise, le transporteur a droit au paiement du prix du transport et sous réserve qu'il règle l'indemnité correspondante» ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le transporteur a droit au paiement de sa prestation de transport sous réserve qu'il ait réglé intégralement l'indemnité correspondantes ce qui n'exclut pas pour autant une compensation entre les créances de transport et le montant des dommages dès lors qu'il existe à ce titre une créance certaine, liquide et exigible ;

Considérant que le transporteur est responsable des marchandises qu'il transporte et que le montant de sa responsabilité est au moins égal au montant résultant de l'application des limitations de responsabilité prévues par le contrat type soit 750€ par colis ou 23€ par kilo ;

Considérant qu'il résulte des pièces produites que la marchandise se composait de 172 aspirateurs d'un poids total de 1376kilos et de 104 tables à induction d'un poids total de 1268 kilos ; que la société Transports Coutarel a signé le procès verbal de réception mentionnant 46 colis manquants (aspirateurs ) et 60 colis manquants (tables ), que dès lors au regard de la situation qui lui était la plus favorable, soit un calcul au poids, la société Transports Coutarel était redevable d'une créance certaine, liquide et exigible de 25 392€ ;

Considérant que la société BM Francilienne était fondée à procéder à une compensation à hauteur de cette somme ; que cette compensation a été opérée le 25 février 2011 soit à l'intérieur du délai d'un an suivant le transport de sorte que la société BM Francilienne n'était pas prescrite ;

Considérant que la société Transports Coutarel ne justifie pas d'une créance supérieure au montant de la somme de 31 072,95€ dont elle est redevable au titre du sinistre de sorte que la compensation effectuée le 25 février 2011 a éteint les créances et dettes réciproques ;

Sur l'article 700 du code de procédure civile

Considérant que la société BM Francilienne a dû engager des frais non compris dans les dépens qu'il serait inéquitable de laisser en totalité à sa charge, qu'il y a lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile dans la mesure qui sera précisée au dispositif.

PAR CES MOTIFS

Et, adoptant ceux non contraires des Premiers Juges,

LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

INFIRME le jugement déféré,

DIT que la société Transports Coutarel a commis une faute inexcusable

DIT la société Transports Coutarel redevable de la somme de 31 072,95€ à la société Bourgey Montreuil Francilienne.

DIT que la compensation effectuée le 25 février 2011 a éteint les créances et dettes réciproques des parties au titre des prestations de transport réalisées le 4 mars 2010.

CONDAMNE la société Transports Coutarel à payer à la société Bourgey Montreuil Francilienne la somme de 2 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNE la société Transports Coutarel aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le GreffierLa Présidente

B.REITZER C.PERRIN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 13/14129
Date de la décision : 12/03/2015

Références :

Cour d'appel de Paris I5, arrêt n°13/14129 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-03-12;13.14129 ?
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