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11/03/2015 | FRANCE | N°12/11465

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 9, 11 mars 2015, 12/11465


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9



ARRÊT DU 11 Mars 2015



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/11465



Décision déférée à la cour : jugement rendu le 08 octobre 2012 par le conseil de prud'hommes de CRETEIL- section activités diverses - RG n° 11/00242





APPELANTE

Madame [B] [W]

[Adresse 2],

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Me Myriam BOUAFF

ASSA, avocate au barreau de PARIS, C2185 substituée par Me Agathe GENTILHOMME, avocate au barreau de PARIS,







INTIMEE

SAS HOPITAL PRIVE [1]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9

ARRÊT DU 11 Mars 2015

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/11465

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 08 octobre 2012 par le conseil de prud'hommes de CRETEIL- section activités diverses - RG n° 11/00242

APPELANTE

Madame [B] [W]

[Adresse 2],

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Me Myriam BOUAFFASSA, avocate au barreau de PARIS, C2185 substituée par Me Agathe GENTILHOMME, avocate au barreau de PARIS,

INTIMEE

SAS HOPITAL PRIVE [1]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Valérie BEBON, avocate au barreau de PARIS, P0002

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 Janvier 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Aline BATOZ, Vice présidente placée, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Christine ROSTAND, présidente

Monsieur Benoît HOLLEAUX, conseiller

Madame Aline BATOZ, vice présidente placée faisant fonction de conseillère par ordonnance du Premier Président en date du 02 septembre 2014

Greffier : Mme Marion AUGER, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Christine ROSTAND, présidente et par Madame Marion AUGER, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Mme [B] [W] a été engagée le 4 avril 2006 par la SAS Hôpital privé [1] (ci-après dénommé Hôpital [1]) en qualité d'auxiliaire puéricultrice vacataire puis par contrat à durée indéterminée à compter du 1er juillet 2007.

Mme [W] a été en arrêt maladie du 7 au 10 septembre 2007, puis du 10 novembre 2007 au 15 février 2008, puis du 19 au 29 mars 2008 suite à un accident du travail, puis du 1er octobre 2008 au 30 mars 2009. Le médecin du travail a rendu le 23 mars 2009 un avis d'inaptitude temporaire puis, le 7 avril 2009, un avis d'inaptitude définitive à tous postes dans l'entreprise.

A compter du 17 avril 2009, Mme [W] a été en arrêt de travail pour maladie professionnelle.

Par courrier du 27 avril 2009, l'hôpital [1] a demandé à Mme [W] si, dans le cadre de la procédure de reclassement, elle accepterait une mobilité géographique, ce à quoi elle a répondu par la négative le 30 avril 2009.

Suite aux indications formulées par le médecin du travail le 11 mai 2009, l'hôpital [1] a proposé un poste à Mme [W] le 17 juin 2009 au sein d'un autre hôpital du groupe, qu'elle a refusé par courrier du 18 juin 2009.

Mme [W] a été licenciée par courrier du 16 juillet 2009 pour inaptitude.

Contestant le bien fondé de son licenciement, Mme [W] a saisi le 15 novembre 2010 le conseil de prud'hommes de Créteil qui, par jugement du 8 octobre 2012, l'a déboutée de toutes ses demandes.

Mme [W] a régulièrement relevé appel de cette décision et, à l'audience du 15 octobre 2014, reprenant oralement ses conclusions visées par le greffier, demande à la cour d'infirmer le jugement déféré, et de condamner l'hôpital [1] à lui verser les sommes suivantes:

- 50.000 € à titre d'indemnité sur le fondement de l'article L.1226-15 du code du travail, subsidiairement, à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 15.000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral

- 3.764,50 € à titre d'indemnité compensatrice sur le fondement de l'article L.1226-14 du code du travail

- 367,45 € au titre des congés payés incidents

- 1.467,71 € à titre de complément d'indemnité spéciale de licenciement sur le fondement de l'article L.1226-14 du code du travail, subsidiairement, 166,04 € à titre de complément d'indemnité de licenciement

- 4.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [W] sollicite en outre la remise d'une attestation Pôle Emploi et la remise d'un bulletin de salaire rectificatif conformes, sous astreinte de 50 € par jour de retard et par document, ainsi que la capitalisation des intérêts.

L'hôpital [1] a repris oralement à l'audience ses conclusions visées par le greffier et demande à la cour de confirmer le jugement déféré, de débouter Mme [W] de toutes ses demandes, de fixer la moyenne des salaires des trois derniers mois à la somme de 1.748,23 €, et de condamner Mme [W] à lui verser la somme de 4.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour plus ample exposé de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier, développées lors de l'audience des débats.

MOTIFS

Sur le licenciement

Les règles protectrices applicables aux victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, édictées aux articles L.1226-7 et suivant du code du travail, s'appliquent dès lors que l'inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée ou invoquée, a, au moins partiellement, pour origine cet accident ou cette maladie et que l'employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement.

L'article L.1226-7 alinéa 2 du code du travail prévoit que le contrat de travail du salarié victime d'un accident du travail, autre qu'un accident du trajet, ou d'une maladie professionnelle, est suspendu pendant la durée de l'arrêt de travail provoqué par l'accident ou la maladie.

Aux termes de l'article L.1226-9 du code du travail, au cours de la période de suspension, l'employeur ne peut rompre le contrat de travail à durée indéterminée que s'il justifie soit d'une faute grave de l'intéressé, soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident.

L'article L.1226-13 du même code prévoit que toute résiliation du contrat de travail prononcée en méconnaissance des dispositions précédentes est nulle..

Mme [W] soutient que son licenciement est nul puisque, compte tenu de la reconnaissance du caractère professionnel de sa maladie par la CPAM, son employeur aurait du appliquer la procédure spécifique aux inaptitudes liées à une maladie professionnelle.

L'hôpital [1] fait valoir que la maladie professionnelle déclarée postérieurement aux avis d'inaptitude rendus par le médecin du travail n'a pas entraîné une nouvelle période de suspension du contrat de travail, de sorte qu'il n'avait pas à mener la procédure spécifique aux inaptitudes liées à une maladie professionnelle. Il précise que Mme [W] a été en arrêt maladie "de droit commun" à compter du 1er octobre 2008 et jusqu'au 30 mars 2009, et que c'est au regard de cette même maladie que le médecin du travail a conclu à l'inaptitude de la salariée à son poste à la suite des visites médicales des 23 mars et 7 avril 2009.

L'hôpital [1] ajoute que le panaris dont Mme [W] a tenté de faire reconnaître le caractère professionnel a été constaté pour la première fois le 17 avril 2009, soit postérieurement à la constatation de l'inaptitude physique constatée par le médecin du travail, et alors que la salariée n'était plus dans l'entreprise depuis 6 mois et demi, de sorte qu'il n'a pu être contracté sur son lieu de travail. Il soutient qu'en tout état de cause, Mme [W] ne rapporte pas la preuve du caractère professionnel de sa maladie.

Il ressort des pièces versées aux débats que Mme [W] a adressé à son employeur des avis d'arrêt de travail pour la période du 1er octobre 2008 au 31 mars 2009, pour maladie, et qu'elle a passé une visite médicale de reprise le 23 mars 2009, au terme de laquelle le médecin du travail a conclu à une inaptitude temporaire au poste occupé, suivie d'une seconde visite intervenue le 7 avril 2009, ayant donné lieu à un avis d'inaptitude définitive à tous postes dans l'entreprise.

Il est également établi que Mme [W] a communiqué un certificat médical initial d'accident du travail ou maladie professionnelle le 17 avril 2009, soit antérieurement à la date d'envoi de la lettre de licenciement.

Il convient toutefois de rappeler que la délivrance d'un nouvel arrêt de travail au bénéfice d'un salarié déclaré inapte par le médecin du travail ne peut avoir pour conséquence juridique d'ouvrir une nouvelle période de suspension du contrat de travail et de tenir en échec le régime juridique applicable à l'inaptitude.

En conséquence, dès lors que Mme [W] a été déclarée inapte définitivement à tout poste au cours des deux examens de reprise, suite à la maladie non professionnelle à l'origine de ses arrêts de travail pour la période du 1er octobre 2008 au 31 mars 2009, elle est mal fondée à solliciter l'application des dispositions spécifiques applicables en cas de maladie professionnelle, alors que son inaptitude ne relevait pas de ce régime.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté Mme [W] de ses demandes au titre de la nullité du licenciement, de l'indemnité spéciale de licenciement fondée sur l'article L.1226-15 du code du travail, de l'indemnité compensatrice et du complément d'indemnité de licenciement fondées sur l'article L.1226-14 du code du travail.

Aux termes de l'article L.1226-2 du code du travail, lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités.

Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise.

L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutation, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail.

L'avis d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise délivré par le médecin du travail ne dispense pas l'employeur de rechercher une possibilité de reclassement au sein de l'entreprise et le cas échéant du groupe auquel celle-ci appartient, au besoin par la mise en 'uvre de mesures telles que mutation, transformation de poste de travail ou aménagement du temps de travail.

C'est à l'employeur de démontrer qu'il s'est acquitté de son obligation de reclassement, laquelle est de moyens, et de rapporter la preuve de l'impossibilité de reclassement qu'il allègue.

L'hôpital [1] justifie avoir adressé à Mme [W] un courrier le 27 avril 2009 lui demandant si elle était mobile géographiquement, afin d'effectuer des recherches de reclassement au sein du groupe, auquel elle a répondu le 30 avril 2009, indiquant n'être ni mobile, ni intéressée par un reclassement au sein du groupe.

L'employeur a également sollicité le médecin du travail par courrier du 27 avril 2009 afin qu'il précise de façon plus détaillée les postes que Mme [W] pourrait effectivement occuper compte tenu de son état de santé et de ses compétences professionnelles, l'invitant en outre à se déplacer au sein de la clinique pour qu'il étudie les possibilités de reclassement.

Il est établi que celui-ci a répondu le 11 mai 2009, précisant que Mme [W] peut occuper un poste d'auxiliaire-puéricultrice, bien défini et dans les limites de ses compétences professionnelles, dans un autre établissement du groupe, à condition que les limites de sa fiche de poste soient bien respectées.

L'hôpital [1] verse aux débats le courrier qu'il a adressé le 4 mai 2009 au département emploi du GIE Générale de Santé demandant s'il existe au sein des établissements du groupe un poste susceptible de correspondre aux aptitudes professionnelles de Mme [W]. Le directeur du département a répondu le 20 mai 2009 qu'aucun poste correspondant aux conditions d'exercice d'une activité et aux compétences de Mme [W] n'était disponible au sein de Générale de Santé.

L'hôpital [1] indique avoir également adressé aux établissements Générale de Santé de la région des courriers pour leur demander s'il existait un poste disponible correspondant aux préconisations du médecin du travail, et avoir obtenu deux réponses négatives de l'hôpital [2] ainsi que de l'hôpital [3], et une réponse positive de l'hôpital [4]. Si l'employeur ne justifie ni de l'envoi de ces courriers, ni des réponses qu'il dit avoir reçues, il communique la lettre recommandée qu'il a fait parvenir à Mme [W] le 17 juin 2009 dans laquelle il lui propose, après avoir effectué des recherches de reclassement, un poste au sein de l'hôpital [4], situé à [Localité 3], en qualité d'auxiliaire de puériculture au service de maternité. Cette proposition précise qu'environ 1.900 accouchements sont réalisés chaque année dans cette maternité (classée niveau 1), qu'il s'agit d'un emploi à temps complet, de jour, avec un horaire de travail réparti en 12 heures, et que le poste est réparti entre le bloc obstétrical et les suites de couches.

Mme [W] a répondu par courrier du 18 juin 2009 qu'elle n'était pas intéressée par ce reclassement, alors même qu'elle ne prétend ni ne démontre que le poste proposé entraînait une modification de son contrat de travail, et que ce poste était conforme aux préconisations du médecin du travail.

En outre, Mme [W] ne saurait se prévaloir de l'absence de consultation effective des délégués du personnel sur la proposition de reclassement, l'article L.1226-10 prévoyant de recueillir l'avis des délégués du personnel sur ce point constituant une disposition spécifique au régime des inaptitudes consécutives à une maladie professionnelle, dont elle ne relevait pas.

Il en résulte que l'hôpital [1] a respecté son obligation de reclassement, et que le licenciement de Mme [W], qui repose, aux termes de la lettre du 16 juillet 2009, sur son inaptitude et sur l'impossibilité de la reclasser suite au refus qu'elle a opposé à la proposition de poste qui lui a été faite, aucun autre poste n'étant disponible, est fondé.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté Mme [W] de ses demandes subsidiaires de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et de complément d'indemnité de licenciement.

Sur le préjudice moral

Mme [W] fonde sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral d'une part sur le refus de son employeur de prendre en compte le caractère professionnel de sa maladie, d'autre part sur l'absence de tentative sérieuse de reclassement.

Compte tenu des développements qui précèdent, dont il ressort que l'hôpital [1] n'avait pas à tenir compte dans le cadre de la procédure de licenciement de la maladie professionnelle déclarée après l'émission des deux avis d'inaptitude délivrés par le médecin du travail, et qu'il a respecté ses obligations en matière de reclassement, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [W] de sa demande sur ce point.

Sur la remise de documents sociaux

Compte tenu des développements qui précèdent, il n'y a pas lieu de faire droit à cette demande.

Le jugement sera donc également confirmé sur ce point.

Mme [W] sera condamnée à verser à l'hôpital [1] la somme de 1.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

CONDAMNE Mme [W] à verser à la société Hôpital Privé [1] la somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Mme [W] aux dépens.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 12/11465
Date de la décision : 11/03/2015

Références :

Cour d'appel de Paris K9, arrêt n°12/11465 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-03-11;12.11465 ?
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