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26/02/2015 | FRANCE | N°12/08562

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 7, 26 février 2015, 12/08562


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7



ARRÊT DU 26 Février 2015

(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/08562



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 16 Mars 2010 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'EVRY Section Encadrement RG n° 09/00631





APPELANT

Monsieur [Q] [Z]

[Adresse 1]

[Localité 1]

représenté par Me Daniel RAVEZ, avocat au barreau de PARIS,

toque : B1024





INTIMEES

ASSOCIATION CULTURELLE DES MUSULMANS DE L'ILE DE FRANCE (ACMIF)

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Albert BELFIORE, avocat au barreau...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7

ARRÊT DU 26 Février 2015

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/08562

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 16 Mars 2010 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'EVRY Section Encadrement RG n° 09/00631

APPELANT

Monsieur [Q] [Z]

[Adresse 1]

[Localité 1]

représenté par Me Daniel RAVEZ, avocat au barreau de PARIS, toque : B1024

INTIMEES

ASSOCIATION CULTURELLE DES MUSULMANS DE L'ILE DE FRANCE (ACMIF)

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Albert BELFIORE, avocat au barreau de l'ESSONNE

FONDATION HASSAN II

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 4]

non comparante

Bureau Officiel de la LA LIGUE ISLAMIQUE MONDIALE

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 2]

non comparante

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 Janvier 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Rémy LE DONGE L'HENORET, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Patrice LABEY, Président

Monsieur Bruno BLANC, Conseiller

Monsieur Rémy LE DONGE L'HENORET, Conseiller

Greffier : Madame Laëtitia CAPARROS, lors des débats

ARRET :

- REPUTE CONTRADICTOIRE

- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Patrice LABEY, Président, et par Mme Naïma SERHIR, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Par lettre en date du 25 juin 1998 dont elle conteste l'authenticité, l'ASSOCIATION CULTURELLE DES MUSULMANS D'ILE DE FRANCE (ACMIF) représentée par son président fondateur, M. [G] [H] aurait confirmé à M. [Q] [Z] son engagement à compter du premier juin 1998, en qualité de Directeur du Centre culturel islamique D'EVRY-COURCOURONNES, pour mener à bien la réorganisation de ce centre, contre une rémunération mensuelle de 20.000 [Localité 6] (3 049 €) brut, outre la mise à sa disposition d'un logement de fonction situé au dessus du bureau, précisant qu'elle n'était en mesure, compte tenu de sa situation financière et dans l'attente de subventions promises de la FONDATION HASSAN II dont le siège est à RABAT (MAROC), de ne lui verser que des acomptes.

Les statuts de l'ACMIF reçus à la sous-préfecture de l'arrondissement d'[Localité 5] le 9 septembre 1998 indiquent que M. [Z] est nommé Directeur par le Conseil d'administration et a pour fonction de gérer ' les affaires courantes de l'association et du centre culturel islamique d'[Localité 5], il prend toutes les mesures qui peuvent favoriser la pratique du culte musulman, la promotion de la culture islamique et défense de l'entité de l'Islam, ainsi que les intérêts moraux et matériels de l'association (A.C.M.I.F) et du Centre culturel islamique d'[Localité 5].'

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 3 janvier 2000, l'ACMIF sous les signatures de son président et des membres du Conseil d'administration, a suspendu M. [Z] de ses fonctions pour :

'-Carence totale de tout ce qui touche le Centre Culturel Islamique.

-Pas la moindre organisation permettant un éclairage d'activité.

-Refus et rejet de toute proposition de collaboration émanant du C.A.

-Malveillance auprès des membres de l'Association.

-Absences non motivées d'assister aux réunions de bureau.'

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 12 avril 2001, l'ACMIF sous les signatures de son président et de son secrétaire général a informé M. [Z] que le Conseil d'Administration avait décidé de se séparer de lui, pour faute grave, en le radiant de l'Association, conformément à l'article 7 des Statuts et lui demandait de ' restituer tous les documents touchant l'Association "ACMIF' ou le Centre Culturel Islamique d'Évry-Courcouronnes, bilans comptables, carnets de chèques bancaires avec leurs souches et les justificatifs des dépenses que vous auriez effectuées pendant la période de votre fonction' et 'de prendre toute disposition à libérer l'appartement que vous occupez (gratuitement) actuellement au Centre Culturel Islamique pour le 30 juin 2001.'

Le 29 mai 2009, M. [Z] saisissait le Conseil de prud'hommes d'EVRY aux fins de faire juger que le licenciement intervenu le 12 avril 2001 était abusif et faire condamner l'ACMIF et la LIGUE ISLAMIQUE MONDIALE représentée par le BOLIM ainsi que la Fondation HASSAN II à lui payer:

- 36 588 € à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive ;

- 50 553,60 € à titre de rappel de salaire

- 5 055,36 € au titre des congés afférents ;

- 3 049 € à titre de dommages et intérêts pour non respect de la procédure de licenciement ;

- 9 147 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;

- 9 14,70 € au titre des congés afférents ;

-18 294 € à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé;

- 2 184,70 € à titre d'indemnité légale de licenciement ;

Outre l'exécution provisoire et l'octroi d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, M. [Z] demandait au Conseil de prud'hommes d'ordonner sous astreinte la remise d'un bulletin de paie, d'une attestation Pôle emploi et d'un certificat de travail.

La Cour est saisie d'un appel formé par M. [Z] contre le jugement du Conseil de prud'hommes d'EVRY en date du 16 mars 2010 qui l'a débouté de l'ensemble de ses demandes.

Vu les conclusions du 21 janvier 2015 au soutien des observations orales par lesquelles M. [Z] conclut à l'infirmation du jugement rendu le 16 mars 2010 par le Conseil des prud'hommes d'[Localité 5] sauf en ce qu'il a mis hors de cause LE BOLIM et demande à la cour de condamner l'ACMIF à lui payer avec intérêt au taux légal et application faite de l'article 1154 du Code Civil à compter du 29 mai 2009 :

- 1500 € à titre de dommages et intérêts défaut visite médicale d'embauche ;

- 3.049 € à titre de dommages et intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement ;

- 18.294 € à titre de dommages et intérêts licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- 2.223 € à titre d'indemnité légale de licenciement ;

- 1.500 € à titre de dommages et intérêts pour défaut d'information DIF ;

- 18.294 € à titre de dommages et intérêts pour dissimulation d'emploi salarié ;

- 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

M. [Z] sollicite outre une indemnité sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, la remise sous astreinte des bulletins de paye et de l'attestation POLE EMPLOI.

Vu les conclusions du 21 janvier 2015 au soutien de ses observations orales au terme desquelles l'ACMIF demande à la cour de rejeter des débats la pièce adverse numéro 21 constitutive d'un faux, de confirmer en sa totalité le jugement déféré et de constater l'absence de tout lien de subordination entre l'ACMIF et M. [Z], de le débouter de toutes ses demandes et de le condamner à lui verser 4.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Bien que régulièrement convoquées, la LIGUE ISLAMIQUE MONDIALE et la FONDATION HASSAN II n'ont pas comparu, il sera statué à leur égard par arrêt réputé contradictoire.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile , renvoie aux conclusions déposées et soutenues l'audience ;

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande de rejet de la pièce 21

La pièce 21 est constituée par lettre en date du 25 juin 1998 par laquelle l'ASSOCIATION CULTURELLE DES MUSULMANS D'ILE DE FRANCE (ACMIF) représentée par son président fondateur, M. [G] [H] aurait confirmé à M. [Q] [Z] son engagement à compter du premier juin 1998, en qualité de Directeur du Centre culturel islamique D'EVRY-COURCOURONNES, pour mener à bien la réorganisation de ce centre, contre une rémunération mensuelle de 20.000 [Localité 6] (3 049 €) brut, outre la mise à sa disposition d'un logement de fonction situé au dessus du bureau.

Sans susciter d'explication de la part de M. [Z], l'ACMIF fait valoir que l'appelant prétendait en première instance que la pièce litigieuse qui n'est pas produite en original ne lui avait jamais été remise et ajoute qu'il s'agit d'un faux qui a fait l'objet d'une plainte pour escroquerie classée sans suite.

En application des dispositions combinées des articles 15 et 132 du code de procédure civile et l'article 1334 du code civil, la production d'une copie ne peut suppléer l'original dont la communication peut toujours être exigée pour assurer le respect des droits de la défense. Faute pour M. [Z] de produire l'original de la lettre d'engagement invoquée, cette dernière doit être écartée des débats.

Sur la relation contractuelle

En application de l'article L.121-1 devenu L 1221-1 du code du travail, le contrat de travail est la convention par laquelle une personne s'engage, moyennant rémunération, à mettre son activité à la disposition d'une autre sous la subordination de laquelle elle se place, c'est à dire à se soumettre, dans l'accomplissement de son travail, aux ordres et directives du mandant, qui a le pouvoir d'en contrôler l'exécution et d'en sanctionner les manquements ou si la personne n'exerce pas son activité au sein d'un service organisé, à se soumettre à des conditions de travail qui sont unilatéralement déterminées par le mandant;

L'existence d'une relation de travail salarié ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu'elles ont données à leur convention, mais des conditions effectives dans lesquelles est exercée l'activité des travailleurs ;

Le lien de subordination est caractérisé lorsqu'une personne sous trouve placée sous l'autorité d'une autre, ayant le pouvoir de lui donner des ordres et directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné, toutefois L'existence d'un lien de subordination n'est pas incompatible avec une indépendance technique dans l'exécution de la prestation.

En présence d'un contrat de travail écrit ou apparent, il appartient à celui qui entend en contester l'existence de rapporter la preuve de son caractère fictif et en l'en l'absence d'écrit ou d'apparence de contrat, il appartient à celui qui invoque un contrat de travail d'en rapporter la preuve.

En l'espèce M. [Z] produit, outre les statuts de l'ACMIF le désignant en qualité de Directeur du Centre culturel islamique D'EVRY-COURCOURONNE, deux lettres recommandées avec accusé de réception des 3 janvier 2000 et 12 avril 2001 par lesquelles il est respectivement suspendu puis démis de ses fonctions par l'association représentée notamment par son Président.

Contrairement à ce qu'elle soutient, en exerçant au travers de ces deux courriers, un pouvoir disciplinaire à l'encontre de M. [Z], l'ACMIF démontre que l'intéressé était placé sous sa subordination, lui reprochant au surplus de ne pas rendre compte de son activité et de son bilan financier et lui rappelant qu'il devait la consulter pour tout ce qui concerne l'association et ne pas s'arroger un quelconque pouvoir de décision sans avoir l'aval du Conseil d'Administration.

Ces circonstances sont suffisantes à caractériser la relation contractuelle contestée, le fait que les salaires de l'intéressé aient été en tout ou partie réglés par l'intermédiaire d'une fondation étrangère, comme l'absence d'édition de bulletin de salaire par l'association étant à cet égard indifférent, étant relevé au surplus que la mise à disposition d'un logement à titre gratuit par l'association à raison de l'exercice de ses fonctions, constituait en toute hypothèse un avantage en nature.

La décision entreprise sera infirmée de ce chef.

Sur la rupture

Il résulte des articles 'L.1234-1 et L.1234-9 du code du travail que, lorsque le licenciement est motivé par une faute grave, le salarié n'a droit ni à un préavis ni à une indemnité de licenciement.

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle fait obstacle le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée du préavis.

L'employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve.

En application des dispositions de l'article L1332-4 du Code du travail, aucun fait fautif ne peut, à lui seul, donner lieu à l'engagement de poursuites disciplinaires au delà de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance ; lorsqu'un fait fautif a eu lieu plus de deux mois avant le déclenchement des poursuites disciplinaires, il appartient à l'employeur de rapporter lui-même la preuve qu'il n'en a eu connaissance que dans les deux mois ayant précédé l'engagement de la procédure disciplinaire, mais l'existence de faits commis dans cette période permet l'examen de faits plus anciens relevant du même comportement, reproduits dans la période.

Par ailleurs, une sanction déjà prononcée fait obstacle au prononcé d'une seconde sanction pour les mêmes faits ; la première peut être rappelée lors d'un licenciement ultérieur, pour conforter les griefs fondant celui-ci, mais ce rappel n'est possible que si elle n'est pas antérieure de plus de trois ans.

Il résulte notamment de ces principes que seuls les faits dénoncés dans la lettre de licenciement doivent être pris en compte à condition qu'ils ne soient pas antérieurs de plus de deux mois à l'engagement de la procédure, exclusion faite de faits relevant éventuellement du même comportement s'ils n'ont pas été invoqués, exclusion faite plus encore de faits relevant d'un autre comportement, spécialement s'ils sont antérieurs de plus de deux mois.

La lettre de licenciement qui circonscrit les limites du litige et qui lie le juge est ainsi rédigée:

"Le 3 janvier 2000, nous vous avions adressé par lettre recommandée la suspension de votre fonction de Directeur Administratif du Centre Culturel Islamique d'Évry-Courcouronnes.

Après quinze mois de patience, nous n'avons pu observer en vous le moindre signe d'explication ou le désir de réintégrer une équipe qui vous avait donné toute leur confiance. Eh bien, non, vous persistez à vous comporter, dans l'indifférence la plus totale, sur un terrain conquis, et, comme vous savez d'ailleurs bien le dire : «je suis indécrottable!»

Vous comprendrez que nous ne pouvons plus poursuivre davantage cette situation désagréable qui provoque au sein de la communauté un certain malaise, surtout, dans un lieu de spiritualité, où doit régner l'harmonie fraternelle.

C'est pourquoi, le Conseil d'Administration a décidé de se séparer de vous, pour faute grave, en vous radiant de l'Association, conformément à l'article 7 de nos Statuts.

Il vous est donc demandé de restituer tous les documents touchant l'Association "ACMIF' ou le Centre Culturel Islamique d'Évry-Courcouronnes, bilans comptables, carnets de chèques bancaires avec leurs souches et les justificatifs des dépenses que vous auriez effectuées pendant la période de votre fonction.

Aussi, nous vous demandons de prendre toute disposition à libérer l'appartement que vous occupez (gratuitement) actuellement au Centre Culturel Islamique pour le 30 juin 2001."

La cour ne peut que constater que la lettre de licenciement adressée à M. [Z] le 12 avril 2001 qui se réfère à la suspension de ses fonctions notifiée par lettre recommandée du 3 janvier 2000 qui constituait déjà en soi une sanction, se borne à reprocher à l'intéressé de se comporter en terrain conquis sans plus caractériser le grief ainsi formulé, et par conséquent, déclarer abusif le licenciement de M. [Z], de sorte qu'il y a lieu d'infirmer la décision déférée de ce chef.

Compte tenu de la faible ancienneté du salarié ainsi que des conséquences matérielles et morales du licenciement à son égard, en particulier de la perte de revenus et de l'avantage en nature constitué par l'appartement mis à sa disposition, ainsi que cela résulte des pièces produites et des débats, il lui sera alloué, en application de l'article L.122-14-5 ancien du Code du travail applicable, une somme de 18.294 € à titre de dommages-intérêts ;

Le licenciement de M. [Z] étant abusif, le salarié peut prétendre aux indemnités de licenciement, compensatrice de préavis et de congés afférents tel qu'il est dit au dispositif, pour les sommes non autrement contestées.

Le licenciement de M. [Z] étant intervenu en violation des dispositions de l'article L. 122-14-4 ancien du Code du travail applicable, le privant en particulier d'entretien préalable, l'ACMIF sera condamnée à lui verser une indemnité de 3.049 € à ce titre.

La lettre de licenciement ne portant aucune information sur le Droit individuel à la Formation de M. [Z], ce dernier est fondé à être indemnisé du préjudice qui en résulte, à concurrence de 500 € compte tenu de son ancienneté.

L'employeur qui ne justifie pas avoir fait bénéficier son salarié d'une visite préalable d'embauche, en violation des dispositions de l'article R 241-38 du Code du travail applicable et de son obligation générale de sécurité de résultat, sera condamné à lui verser une indemnité de 1.000 € en réparation du préjudice qui en est résulté.

Sur la dissimulation d'emploi salarié

L'article ancien L 324-9 alinéa1 du code du travail applicable (L.8221-1 nouveau) prohibe le travail totalement ou partiellement dissimulé défini par les alinéas 1 à 3 de l'article L. 324-10 (L.8221-3 nouveau) du même code relatif à la dissimulation d'activité ou exercé dans les conditions des alinéas 4 et 5 de l'article L. 324-10 (L.8221-5 nouveau) du même code relatif à la dissimulation d'emploi salarié ;

L'article L. 324-10 du code du travail applicable (L 8221-5, 2° nouveau) dispose notamment qu'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour un employeur de mentionner sur les bulletins de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli ; que toutefois, la dissimulation d'emploi salarié prévue par ces textes n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a agi de manière intentionnelle ;

Aux termes de l'alinéa 1 de l'article L 324-11-1 ( L.8223-1 nouveau) du code du travail, le salarié auquel l'employeur a recours dans les conditions des alinéas 1 à 3 de l'article L. 324-10 (L.8221-3 nouveau) ou en commettant les faits prévus aux alinéas 4 et 5 de l'article L. 324-10 ( L.8221-5 nouveau) du même code relatifs au travail dissimulé a droit, en cas de rupture de la relation de travail, à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire ;

L'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé de l'article L.324-11-1 du Code du travail applicable est due quelle que soit la qualification de la rupture; cette indemnité qui sanctionne la violation de dispositions légales se cumule avec les indemnités de nature différente résultant du licenciement, et notamment avec l'indemnité de licenciement.

En l'espèce, l'emploi de M [Z] pendant plus de deux ans sans le déclarer aux organismes sociaux, sans le soumettre à la visite médicale préalable à l'embauche et en ne lui remettant ni bulletin de salaire, ni document de fin de contrat lors de son licenciement, établit de la part de l'ACMIF le caractère intentionnel de la dissimulation de son emploi, étant relevé de surcroît que la suspension qui lui a été infligée le 3 janvier 2000 est intervenue à la suite de l'initiative de M. [Z] tendant à déclarer à l'URSSAF une salariée du centre culturel.

Il y a lieu en conséquence de faire droit à la demande de M. [Z] formulée à ce titre tel qu'il est dit au dispositif.

Sur la capitalisation des intérêts

En application de l'article 1154 du code civil, la capitalisation des intérêts est de droit dès lors qu'elle est régulièrement demandée ; elle ne peut être ordonnée qu'à compter de la demande qui en est faite et ne peut rétroagir avant cette demande ; elle peut être demandée pour les intérêts antérieurs dès lors qu'une année entière s'est déjà écoulée depuis la demande, à venir dès lors qu'une année entière se sera écoulée ; il doit être fait droit à cette demande ;

Sur la remise des documents sociaux

La demande de remise de documents sociaux conformes est fondée ; il y sera fait droit dans les termes du dispositif ci-dessous sans qu'il y ait lieu à astreinte ;

Sur l'article 700 du Code de procédure civile

L'équité et la situation économique respective des parties justifient qu'il soit fait application de l'article 700 du code de procédure civile dans la mesure énoncée au dispositif ;

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant en dernier ressort et par arrêt réputé contradictoire mis à la disposition des parties au greffe,

DÉCLARE recevable l'appel formé par M. [Q] [Z],

INFIRME le jugement entrepris sauf en ce qu'il a mis hors de cause la LIGUE ISLAMIQUE MONDIALE,

et statuant à nouveau,

ECARTE des débats, la pièce 21 constituée par la lettre d'engagement du 25 juin 1998 .

DÉCLARE abusif le licenciement de M. [Q] [Z],

CONDAMNE l'ASSOCIATION CULTURELLE DES MUSULMANS DE L'ILE DE FRANCE (ACMIF) à payer à M. [Q] [Z] :

- 1.000 € à titre de dommages et intérêts défaut visite médicale d'embauche ;

- 3.049 € à titre de dommages et intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement ;

- 18.294 € à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive ;

- 2.223 € à titre d'indemnité légale de licenciement ;

- 500 € à titre de dommages et intérêts pour défaut d'information DIF ;

- 18.294 € à titre de dommages et intérêts pour dissimulation d'emploi salarié ;

RAPPELLE que les sommes de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la date de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation, les autres sommes portant intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, application faite de l'article 1154 du Code civil.

CONDAMNE l'ACMIF à remettre à M. [Q] [Z] un certificat de travail, une attestation destinée au Pôle Emploi et un bulletin de salaire conformes au présent arrêt dans un délai de deux mois à compter de sa signification.

CONDAMNE l'ACMIF à payer à M. [Q] [Z] 2.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

DÉBOUTE l'ACMIF de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

DÉBOUTE les parties de leurs autres demandes,

CONDAMNE l'ACMIF aux entiers dépens de première instance et d'appel,

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT.

Naïma SERHIR P. LABEY


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 12/08562
Date de la décision : 26/02/2015

Références :

Cour d'appel de Paris K7, arrêt n°12/08562 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-02-26;12.08562 ?
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