Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 2
ARRÊT DU 11 FÉVRIER 2015
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/03460
Décision déférée à la Cour : Jugement du 21 Décembre 2012 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 10/05190
APPELANT
Syndicat des copropriétaires [Adresse 5] représentée par son syndic le cabinet [V] [P], SARL, sis
[Adresse 2]
[Localité 2]
représenté par Me Patricia HARDOUIN de la SELARL 2H Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056
assisté de Me Alexandre MEYRIEUX de l'Association AIRIEAU MEYRIEUX ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0130
INTIMÉE
SCI DEKO, prise en la personne de son gérant, ayant son siège social
[Adresse 3]
[Localité 1]
représentée et assistée de la SCP ZURFLUH - LEBATTEUX - SIZAIRE ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, toque : P0154
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 03 Décembre 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Dominique DOS REIS, Président de chambre
Madame Denise JAFFUEL, Conseiller, chargée du rapport
Madame Claudine ROYER, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame Emilie POMPON
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Dominique DOS REIS, Président et par Madame Emilie POMPON, Greffier présent lors du prononcé.
La SCI DEKO est propriétaire depuis juillet 2007, dans l'immeuble en copropriété [Adresse 5] du lot n° 201 de l'état descriptif de division correspondant au pavillon nord du bâtiment C, à usage commercial, situé [Adresse 1] et comprenant des locaux au sous-sol, au rez-de-chaussée et au 1er étage.
L'hôtel [B] DE SAGONNE, 'uvre de l'architecte [Z] [O] dit [O]-[B], comte de SAGONNE, constitue un édifice classé aux monuments historiques, par décret du 16 avril 1943. Il est situé dans le périmètre d'un site urbain protégé.
La copropriété comporte plusieurs bâtiments :
- Un bâtiment principal A, constitué de l'hôtel particulier de deux étages et d'un troisième étage mansardé, la façade arrière de cet hôtel étant visible depuis le [Adresse 4],
- Un bâtiment B en façade sur la [Adresse 6],
- Un corps de bâtiments, dit bâtiment C, composé de deux pavillons de chaque côté de la grille, dont celui de la SCI DEKO, donnant sur le boulevard Beaumarchais.
Il existe une cour pavée entre les bâtiments A et B ainsi qu'un jardin derrière l'hôtel particulier (bâtiment A) donnant sur le boulevard Beaumarchais, dont il est séparé par la grille se trouvant entre les pavillons du bâtiment C.
Le règlement de copropriété, établi le 20 octobre 1976, stipule que « les portes d'entrée des appartements, les fenêtres et persiennes, les garde-corps, balustrades, rampes et barres d'appui des balcons et fenêtres, même la peinture, et d'une façon générale tout ce qui contribue à l'harmonie de l'ensemble, ne pourront être modifiés, bien que constituant une partie privative, sans l'autorisation de l'assemblée générale' »
Lors de l'assemblée générale du 6 novembre 2007, les copropriétaires ont autorisé la SCI DEKO à réaliser, à ses frais, le ravalement des façades et les aménagements intérieurs (création d'une nouvelle trémie) suivant le descriptif des travaux et les plans de l'architecte des monuments historiques, M. [K], joints à la convocation. Cette assemblée est devenue définitive.
Les travaux extérieurs ont débuté en décembre 2007 et se sont achevés en avril 2008.
Lors de l'assemblée générale du 10 septembre 2009, les copropriétaires, estimant qu'à l'occasion de ces travaux il aurait été procédé à l'ouverture de fenêtres donnant sur le jardin sans autorisation de la copropriété, ont habilité le syndic à agir à l'encontre de la SCI DEKO pour obtenir la remise en état des façades et fenêtres telles qu'elles existaient avant la réalisation desdits travaux ainsi que la réparation des préjudices subis.
Par exploit du 30 mars 2010, le syndicat a fait assigner la SCI DEKO pour la voir condamner sous astreinte à remettre le bâtiment dans l'état ou il se trouvait avant la réalisation des travaux litigieux et à payer une indemnité de 50.000 euros en réparation du préjudice collectif subi en raison de la perte d'esthétisme et d'harmonie des lieux.
Par jugement contradictoire, assorti de l'exécution provisoire, rendu le 21 décembre 2012, dont le syndicat a appelé par déclaration du 21 février 2013, le Tribunal de grande instance de Paris 8ème chambre 3ème section :
Déboute le syndicat de l'ensemble de ses demandes,
Condamne le syndicat aux dépens de la présente instance,
Condamne le syndicat, par application des dispositions de l'article 700 du CPC, au paiement d'une indemnité de 5.000 euros au profit de la SCI DEKO.
La SCI DEKO intimée a constitué avocat.
Pour un plus ample exposé des faits de la cause, des procédures, des prétentions, moyens et arguments dont elle est saisie, la Cour fait référence expresse à la décision déférée et aux conclusions d'appel, dont les dernières ont été signifiées dans l'intérêt :
Du syndicat, le 2 décembre 2014,
De la SCI DEKO, le 17 novembre 2014.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 3 décembre 2014.
CELA ETANT EXPOSE, LA COUR,
Sur les prétentions en cause d'appel
Le syndicat demande, par infirmation, de juger que l'assemblée générale du 6 novembre 2007 a donné à la SCI DEKO une autorisation de travaux limitée au seul ravalement de la façade et à la création d'une trémie, de juger que les travaux de percement des murs, d'ouverture des fenêtres donnant sur le jardin et de pose de barreaux sur les fenêtres sont des travaux non autorisés par l'assemblée générale du 6 novembre 2007, et en conséquence, de condamner sous astreinte la SCI DEKO à remettre le bâtiment dans son état antérieur par le rebouchage des fenêtres, l'installation de nouveaux trompe-l''il à l'endroit desdites fenêtres et la dépose des barreaux ; il demande de condamner la SCI DEKO à lui payer la somme de 50.000 euros en réparation de son préjudice et celle de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC ;
La SCI DEKO demande de confirmer le jugement, et y ajoutant, de condamner le syndicat à lui payer la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du CPC et de la faire bénéficier de la dispense prévue par l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965 ;
Sur le jugement
Les moyens invoqués par le syndicat au soutien de son appel ne font que réitérer sous une forme nouvelle, mais sans justification complémentaire utile, ceux dont les premiers juges ont connu et auxquels ils ont répondu par des motifs pertinents et exacts que la Cour adopte sans qu'il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail d'une discussion se situant au niveau d'une simple argumentation ;
Il convient toutefois d'ajouter que lors de l'assemblée générale du 6 novembre 2007, ayant pour objet les travaux à entreprendre dans le pavillon de la SCI DEK0, a été adoptée par 6.574/10.000èmes la résolution n° 3 ainsi rédigée : « l'assemblée générale, après en avoir délibéré, autorise la SCI DEKO de réaliser, à ses frais, le ravalement des façades et les aménagement intérieurs (création d'une nouvelle trémie) suivant le descriptif et les plans de l'architecte des Monuments Historiques, B. [K], joints à la convocation » ; le dossier joint à la convocation, pour expliciter les travaux envisagés pour lesquels la SCI DEKO sollicitait l'autorisation, comportait le rapport de présentation de M. [K] de septembre 2007, des plans et croquis de l'état actuel et de l'état futur du pavillon et des photographies ;
Le syndicat ne peut pas valablement soutenir qu'au regard de l'intitulé du projet et sa présentation, le projet de la SCI DEKO de 2007 ne pouvait concerner que le ravalement du pavillon et non une quelconque modification des façades avec notamment ouvertures des fenêtres murées et que les copropriétaires auraient découvert avec stupeur, à l'issue des travaux, que les fenêtres de la façade ouest, jusque là condamnées, auraient été ouvertes et que des grilles auraient été posées sur certaines fenêtres de la façade sud, alors qu'il appert de l'examen du rapport de M. [K] joint à la convocation, après le constat que sur les façades sud et ouest les soupiraux et certaines baies sont murées totalement ou partiellement, que de fausses menuiseries ont été peintes sur les bouchements et que les fenêtres existantes fixes et vétustes nécessitent leur complète réfection, que le programme des travaux comporte, pour les travaux extérieurs, le nettoyage des façades, l'ouverture de baies sur les façades sud et ouest, la pose de menuiseries et de grilles de défense dans les trois baies à rez-de-chaussée de la façade sud, des dessins de la façade avant/après travaux étant annexés dont un représentant une fenêtre avec barres verticales et traverses horizontales formant la grille envisagée ; les copropriétaires ne pouvaient donc ignorer la teneur des travaux envisagés par la SCI DEKO ;
Le syndicat ne peut pas non plus valablement soutenir que la demande d'autorisation aurait été limitée au seul ravalement de la façade et à la création d'une trémie intérieure, sans porter sur l'ouverture de fenêtres murées et la pose de barreaux, alors que l'autorisation demandée portait sans ambiguïté sur un ensemble de travaux qualifiés de façon générique de « ravalement de façades et d'aménagements intérieurs » mais faisant l'objet d'une description précise et détaillée dans le rapport de M. [K] joint à la convocation, ladite demande d'autorisation faisant référence au descriptif et aux plans de l'architecte joints à la convocation ; ce moyen ne peut donc prospérer ;
Le syndicat soutient qu'il n'aurait autorisé, de manière expresse, que le seul ravalement des façades et les aménagements intérieurs (création d'une nouvelle trémie) suivant le descriptif et les plans de l'architecte, à l'exclusion de tous autres travaux, mais il appert en l'espèce de l'analyse de la résolution litigieuse adoptée par l'assemblée générale du 6 novembre 2007 qu'elle ne limite pas l'autorisation uniquement aux travaux de nettoyage des façades et à la création d'une trémie intérieure et indique que l'autorisation est accordée « suivant le descriptif et les plans de l'architecte des monuments historiques, B. [K], joints à la convocation » de telle sorte que le syndicat a autorisé, lors de l'assemblée générale du 6 novembre 2007, non pas exclusivement le nettoyage des façades et la création d'une trémie intérieure mais, sous la formule de « ravalement », l'ensemble des travaux de réfection portant sur les façades tels qu'ils figuraient clairement dans le descriptif de l'architecte des monuments historiques, étant observé qu'il n'est pas contesté que les travaux réalisés sont strictement conformes audit descriptif ;
Il en résulte que, contrairement à ce que soutient le syndicat, l'assemblée générale a autorisé expressément la réalisation des travaux sur les façades suivant le descriptif et les plans joints à la convocation, lesdits travaux portant sur le nettoyage et la réfection desdites façades suivant lesdits descriptif et plans portés à la connaissance des copropriétaires en même temps que la convocation, le terme générique « ravalement » étant explicité sous la rubrique « Programme des travaux » du rapport [K] par la description précise des travaux projetés de telle sorte que les copropriétaires, mêmes profanes, n'ont pu se méprendre ni sur la teneur des travaux envisagés ni sur la portée de l'autorisation de travaux accordée ;
Le syndicat fait valoir que lorsqu'il existerait une divergence entre la résolution autorisant les travaux et le descriptif des travaux annexé, le procès-verbal devrait prévaloir en tant que formalisation centrale du caractère exprès de la décision de l'assemblée générale, mais tel n'est pas le cas en l'espèce, la résolution autorisant le ravalement des façades et le rapport [K] joint à la convocation portant également sur le ravalement des façades, incluant sous ce terme générique le nettoyage des façades et leur réfection par l'ouverture des baies, la pose de menuiseries et de grilles de défense, de telle sorte qu'il n'y a pas de divergence entre la résolution votée et le descriptif des travaux annexé auquel fait explicitement référence l'autorisation accordée, le descriptif éclairant le sens à donner au terme « ravalement » sans contradiction ni divergence ;
Enfin, le syndicat ne peut pas utilement soutenir que sa demande de remise en état serait fondée sur la clause du règlement de copropriété interdisant la modification des fenêtres sans autorisation de l'assemblée alors qu'il appert de ce qui précède que l'assemblée générale du 6 novembre 2007, se référant expressément au descriptif et plans de l'architecte [K], a autorisé les travaux de réfection des façades par l'ouvertures de baies ainsi décrites : « façade sud : I soupirail en soubassement au droit de la baie axiale ;à rez-de-chaussée, la baie sud-est et surélévation des allèges des deux autres baies ; au premier étage, la baie centrale- Façade ouest : 2 soupiraux en soubassement ; les 2 baies du premier étage (la partie haute de la baie nord-ouest n'étant pas murée)' scellement des barres d'appui formant garde-corps dans les baies ré-ouvertes du 1er étage de la façade ouest » ; ce moyen ne peut donc prospérer et sera rejeté ;
Dans ces conditions, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que les travaux réalisés par la SCI DEKO n'excédaient pas les limites de l'autorisation donnée par l'assemblée générale et débouté le syndicat de ses demandes de remise en état ;
Pour ce qui concerne la demande de dommages et intérêts, c'est à bon droit que les premiers juges, par adoption de motifs, ont débouté le syndicat de sa prétention à ce titre ;
Il convient toutefois d'ajouter que le syndicat, qui soutient que les fenêtres du pavillon auraient été antérieurement murées et agrémentées d'un trompe l''il pour éviter une vue sur le jardin à usage privatif de l'hôtel particulier, ne démontre pas le préjudice collectif qu'il allègue de ce chef, n'ayant pas vocation à défendre le ou les bénéficiaires d'un droit de jouissance privatif sur le jardin, non présents à la procédure, et l'ensemble des copropriétaires qu'il représente ne bénéficiant pas dudit droit de jouissance ; sa demande de ce chef ne peut donc prospérer ;
En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté le syndicat de l'ensemble de ses demandes ;
Sur les autres demandes
Il sera dit que la SCI DEKO sera dispensée de toute participation à la dépense commune des frais de procédure, conformément aux dispositions de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965 ;
Le jugement sera confirmé pour ce qui concerne les frais irrépétibles de première instance ;
Il sera alloué à la SCI DEKO la somme de 3.500 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel ;
PAR CES MOTIFS, LA COUR,
Confirme le jugement ;
Y ajoutant :
Dit que la SCI DEKO est dispensée de toute participation à la dépense commune des frais de procédure, conformément aux dispositions de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965 ;
Condamne le syndicat des copropriétaires [Adresse 5] à payer à la SCI DEKO la somme de 3.500 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel ;
Rejette les demandes autres, plus amples ou contraires ;
Condamne le syndicat des copropriétaires précité aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Le Greffier, Le Président,